La Liberté, ou Mlle Raucour/02
INTERVENTION
des Tribades dans la cauſe des Bougres
& des Bardaches, contre les
fouteuſes &c.
Nous, Actrices, Danſeuſes, figurantes, eſpaliers de l’Opéra, des Français, des Italiens &c. &c. &c. ayant renoncé à foutre dans les formes ordinaires pour nous mettre à l’abri des ſuites qui en réſultent, & ayant fait ſerment de plus uſer de pines & couilles, pour n’avoir pas le déſagrément de voir nos ventres groſſir, & nos tailles devenir lourdes & maſſives, ce qui nous foutoit malheur ; étions convenues de nous foutre & gamahucher mutuellement, afin de cueillir les roſes du plaiſirs, ſans être expoſées à la piqure de ſes épines. Sans craintes & ſans remords parce que nous ne nuiſions à perſonne. Nous nous livrions ſans méfiance à nos amuſemens innocens, lorſque nous avons manqué être les victimes de notre ſécurité. Mais une divinité bienfaiſante veilloit ſur nous : il nous est parvenu que les putains formoient ſourdement le projet de nous faire exercer de nouveau le catinisme public que nous avons abjuré avec ſerment. A peine inſtruites, nous nous ſommes aſſemblées & après avoir mûrement diſcuté un projet auſſi important, après nous être foutues & refoutues, branlées & gamahuchées juſqu’à épuiſement, conſidérant que nous donnerions des preuves d’une lâcheté dont nous ſommes incapables, ſi nous ne prenions pas tous les moyens poſſibles de réſiſter aux fouteuſes nos adverſaires ; conſidérant en outre, que renoncer à nous clytoriſer, ce ſeroit renoncer à ce qui nous fait chérir l’exiſtence, nous avons arrêté d’intervenir en faveur des Bougres & des Bardaches dans leur affaire contre les Putains & compagnie, pendante au comité de fouterie ; offrant aux enfans de Sodôme de faire la moitié des dépenſes des pourſuites, à telle ſomme qu’elles puiſſent ſe monter ; & de payer en cas de ſuccombantes, notre portion de tous les frais qui ſeront faits à cette époque, dont le rôle ſera mis ſous nos yeux avec les ſignatures & paraphes de droit ; à condition néanmoins, que lesdites Putains & compagnie ſeront pourſuivies à toute outrance par devant tous les tribunaux chargés de connoître des affaires foutatives & enculatoires, juſqu’à entier déſiſtement de leur part, ou juſqu’à jugement définitif ; voulant que la préſente, & tout ce qui la précéde, ſoit légalement ſignifié à notre partie adverſe par le miniſtère de notre huiſſier ordinaire, pour qu’elles n’en prétendent cauſe d’ignorance, & avons ſigné le tout avec notre plus précieuſe ſubſtance, avec notre foutre.
Fait à Paris, le lendemain de l’Egratignure de Charles Lameth.[1]
V… P… C… aînée,
C… cadette.
à l’original.
- ↑ Fait référence au duel au cours duquel C. Lameth fut blessé, cf. G. Dairnvaell, Histoire des Jacobins, p. 227. (Note de Wikisource)