La Sélection naturelle/09

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Traduction par Lucien de Candolle.
C. Reinwald & Cie, libraires-éditeurs (p. 215-240).

VI

PHILOSOPHIE DES NIDS D’OISEAUX.


La construction des nids est-elle un effet de l’instinct ou de la raison ?


On dit en général que les oiseaux construisent leurs nids par instinct, tandis que l’homme fait usage de sa raison dans la construction de sa demeure ; et l’on en donne pour preuve le fait que les oiseaux bâtissent toujours sur le même plan, sans y jamais rien changer ; tandis que l’homme modifie et perfectionne ses maisons ; or, dit-on, le progrès caractérise la raison, tandis que l’instinct est stationnaire.

Cette doctrine est généralement, on peut presque dire universellement adoptée. Des personnes dont les opinions diffèrent d’ailleurs sur tout autre sujet, acceptent comme bonne cette explication des faits ; philosophes et poètes, métaphysiciens et théologiens, naturalistes et gens du monde, tous sont d’accord pour la considérer comme probable, l’adoptent même comme une sorte d’axiome, et en font la base de leurs spéculations sur l’instinct et la raison. Une opinion si générale devrait, semble-t-il, reposer sur des faits incontestables, et en être déduite logiquement. Je suis pourtant arrivé à la conclusion que cette manière de voir est non-seulement très-douteuse, mais absolument erronée ; non-seulement elle s’écarte beaucoup de la vérité, mais elle lui est complètement opposée presque en tous points. Bref, je crois que les oiseaux ne font pas leurs nids par instinct et que l’homme ne construit pas sa demeure par raison, que les oiseaux changent et améliorent sous l’influence des mêmes causes qui font progresser l’homme, et que l’espèce humaine ne modifie ni ne perfectionne lorsqu’elle est soumise à des conditions semblables à celles qui sont presque universelles parmi les oiseaux.


L’homme construit-il par raison ou par imitation ?


Examinons d’abord la théorie d’après laquelle la raison détermine seule l’architecture domestique de la race humaine.

On dit que l’homme, animal raisonnable, change et améliore sans cesse sa demeure. Je nie cela entièrement. En général, l’homme ne modifie ni ne perfectionne, pas plus que les oiseaux. Quelle amélioration peut-on voir dans les maisons de la plupart des tribus sauvages ? chacune est aussi invariable que le nid d’une espèce d’oiseau. Les tentes des Arabes sont les mêmes aujourd’hui qu’elles étaient il y a 2 ou 3000 ans, et les villages de boue de l’Égypte ne peuvent guère avoir été améliorés depuis l’époque des Pharaons. Quel progrès peut-on supposer dans les huttes en feuilles de palmier ou dans les cabanes qu’habitent les tribus de l’Amérique du Sud et de l’archipel Malais, depuis que ces régions sont peuplées ? Quant à l’abri grossier que le Patagon se fait avec du feuillage ou que l’habitant de l’Afrique méridionale se creuse dans la terre, nous ne pouvons même les concevoir inférieurs à ce qu’ils sont aujourd’hui. Plus près de nous, la cabane en gazon de l’Irlandais, et la hutte de pierres de la haute Écosse, ne peuvent guère avoir beaucoup progressé depuis 2000 ans.

Or personne ne voit un effet de l’instinct dans cet état stationnaire de l’architecture domestique chez ces peuples sauvages, mais on l’explique plutôt par l’imitation transmise de génération en génération, et par l’absence de toute circonstance qui les aient poussés à améliorer. Personne n’imagine que, si un enfant arabe était transporté en Patagonie ou en Écosse, une fois adulte, il étonnerait ses nouveaux parents en construisant une tente de peaux. D’autre part, il est clair que les conditions physiques, combinées avec le degré de civilisation atteint, rendent pour ainsi dire nécessaires certains types de construction. Le gazon, les pierres, la neige, les feuilles de palmier, le bambou, les branches, sont pris comme matériaux des maisons des différents pays, parce qu’ils sont plus faciles à se procurer qu’aucune autre chose. Le paysan égyptien n’a aucune de ces substances, pas même du bois. Que peut-il donc employer d’autre que la boue ?

Dans les forêts des tropiques, le bambou et les larges feuilles de palmier sont les matériaux naturels pour les maisons ; la forme et le mode de construction seront déterminés en partie par la nature du pays, selon que celui-ci est chaud ou frais, marécageux ou sec, rocailleux ou plat, selon que la contrée est fréquentée par des bêtes sauvages ou exposée aux attaques des hommes. Toutes ces circonstances font adopter un mode particulier de construction qui, confirmé par l’habitude, devient héréditaire et sera conservé longtemps, même lorsque de nouvelles conditions ou une migration dans une région différente lui auront fait perdre son utilité.

Dans toute l’étendue du continent américain, et en règle générale, les maisons des indigènes reposent sur le terrain même ; on les rend sûres et solides au moyen de murs épais et bas, surmontés d’un toit. Par contre, dans presque toutes les îles malaises, les maisons sont élevées sur des pieux, parfois à une grande hauteur, le plancher en bambou étant à claire voie : toute la bâtisse est excessivement mince et légère. Or, quelle peut être la raison de cette différence remarquable entre ces pays, dont bien des parties nous offrent d’ailleurs une ressemblance frappante dans leur constitution physique, leurs productions naturelles et le degré de civilisation de leurs habitants ? Nous en trouvons l’explication, ce me semble, dans l’origine probable et les migrations de leurs populations respectives. On croit que les indigènes de l’Amérique tropicale sont venus du Nord, d’un pays où les hivers sont rudes et où des maisons bâties au-dessus du sol avec des planchers ouverts, seraient inhabitables. Ils se sont dirigés vers le Sud en suivant les chaînes de montagnes et les plateaux, et, sous un climat nouveau, ils ont conservé le mode de construction de leurs ancêtres, modifié seulement par les matériaux qu’ils trouvaient. M. Bates, qui a fait des observations exactes sur les Indiens de la vallée des Amazones, est arrivé à la conclusion qu’ils sont récemment immigrés d’un climat plus froid : « On ne peut, » dit-il, « vivre longtemps parmi les Indiens de l’Amazone supérieure sans être frappé de leur antipathie constitutionnelle pour la chaleur… Leur peau est chaude au toucher et ils transpirent peu… Ils sont agités et mécontents par un temps chaud et sec, mais gais par les jours frais, lorsque la pluie coule en abondance sur leurs dos nus. » Après beaucoup d’autres détails, il conclut : « Comme tout cela diffère du nègre, le véritable enfant des climats tropicaux ! Je me sentais toujours plus porté à admettre que l’Indien Peau-Rouge vit dans ces contrées chaudes comme émigré ou étranger, que sa constitution n’était point originairement faite pour ce climat, auquel elle ne s’est qu’imparfaitement adaptée. »

D’autre part, les races malaises sont certainement de très-anciens habitants des contrées les plus chaudes ; elles ont particulièrement pour habitude de placer leur premier établissement à l’embouchure des rivières, dans des anses, ou bien dans les baies ou détroits peu ouverts. Peuples éminemment maritimes, le canot est pour eux une nécessité de la vie, et ils ne voyagent jamais par terre s’ils peuvent le faire par eau. Conformément à ces goûts, le Malais a construit sa maison sur des pilotis à la manière des habitations lacustres de la vieille Europe ; et ce mode de construction est tellement entré dans ses mœurs que même les tribus qui ont pénétré dans l’intérieur, et se sont établies dans des plaines arides et sur des montagnes rocheuses, continuent à bâtir exactement de la même manière et trouvent de la sécurité à élever leurs demeures au-dessus du sol.


Pourquoi chaque oiseau construit une espèce particulière de nid.


Tels sont les caractères généraux des habitations de l’homme sauvage. Les nids des oiseaux nous en offrent de tout à fait analogues.

Chaque espèce emploie les matériaux qui sont le plus à sa portée, et choisit les situations les plus conformes à ses habitudes. Le troglodyte, par exemple, vivant dans les haies et les bosquets bas, fait en général son nid avec de la mousse, qu’il trouve toujours là où il vit, et qui lui fournit probablement beaucoup d’insectes pour sa nourriture ; mais parfois il varie, employant du foin ou des plumes, lorsqu’il peut se les procurer. Le freux creuse dans les prairies et les champs labourés pour prendre les vers, et, en faisant cela, trouve continuellement des racines et des fibres végétales. Il s’en sert pour revêtir son nid, quoi de plus naturel ! Pour le même usage, le corbeau, qui se nourrit de chair morte, telle que lapins et agneaux, et fréquente les pâturages et les garennes, choisit la laine et la fourrure. L’alouette se tient dans les champs cultivés et fait sur le sol un nid de tiges sèches qu’elle double d’herbes fines, matériaux le plus à sa portée et le mieux adaptés à ses besoins. Le martin-pêcheur construit son nid avec les arêtes des poissons qu’il a mangés. L’hirondelle emploie de l’argile et de la boue prises sur les bords des étangs et des rivières, à la surface desquels elle trouve les insectes dont elle se nourrit. Bref, les matériaux dont les oiseaux font leurs nids, aussi bien que ceux que l’homme sauvage prend pour sa maison, sont donc ceux qui sont le plus à portée ; dans aucun cas, le choix n’est dû à un instinct spécial.

Mais, dira-t-on, ce sont surtout la forme et la structure des nids, plus encore que leurs matériaux, qui nous frappent par leur variété, et sont si merveilleusement adaptées aux besoins, aux habitudes de chaque espèce ; comment s’en rendre compte autrement que par l’instinct ?

Je réponds que nous en trouvons l’explication en grande partie dans les habitudes générales de l’espèce, dans la nature des outils qui lui sont donnés, et les matériaux qu’elle emploie, enfin dans le discernement des moyens les plus propres au but, discernement très-élémentaire, sans doute, mais qui rentre parfaitement dans la capacité intellectuelle de l’oiseau. La délicatesse et la perfection du nid seront proportionnées à la grandeur de l’oiseau, à sa conformation et à ses habitudes. Celui du troglodyte ou du colibri n’est peut-être relativement ni plus parfait ni plus beau que celui du merle, de la pie, de la corneille. Le troglodyte, avec son bec mince, ses longues jambes et sa grande agilité, peut très-facilement former un nid bien tressé des matériaux les plus fins, et il le place dans les arbustes et les haies qu’il fréquente et où il trouve sa nourriture. La mésange, qui hante les arbres fruitiers et les murs, cherchant des insectes dans les fentes et les crevasses, est naturellement conduite à s’établir dans des trous qui la tiennent à l’abri et en sûreté ; sa grande agilité et la perfection de ses outils (bec et pattes), lui permettent de former rapidement un admirable réceptacle pour ses œufs et ses petits. Le pigeon, ayant un corps lourd avec des pattes et un bec faibles, mauvais instruments pour faire une construction délicate, bâtit un nid grossier et plat, formé de bâtons, mis en travers de branches assez fortes pour porter le poids de l’oiseau et de ses petits. Les engoulevents ont les instruments les plus imparfaits de tous : des pattes qui ne peuvent les porter que sur une surface plane, car ils ne peuvent percher, et un bec excessivement large, court et faible, presque caché par des plumes et des soies. Ces oiseaux ne sauraient construire un nid de fibres ou de branches, de poils ou de mousse ; aussi s’en passent-ils généralement, et pondent-ils leurs œufs sur le sol nu, sur une branche plate ou sur le tronc d’un arbre coupé. Le perroquet, avec son gros bec recourbé, son cou et ses pattes trop courtes, son corps pesant, est tout à fait incapable de bâtir un nid comme presque tous les oiseaux. Il ne peut grimper sur une branche, ni se retourner sur place lorsqu’il perche, sans employer son bec aussi bien que ses pattes. Comment alors pourrait-il tresser, ou entremêler les matériaux d’un nid ? Il pond ses œufs dans le trou d’un arbre, au sommet de troncs pourris, ou dans une fourmilière abandonnée, dont la substance est facile à creuser.

Beaucoup de Sterna et de Tringa déposent leurs œufs sur le sable au bord de la mer ; le duc d’Argyll sans doute a raison lorsqu’il attribue cette habitude, non à leur incapacité de former un nid, mais au fait que, dans de pareilles situations, un nid serait apparent et ferait découvrir les œufs. Cependant le choix de la place est évidemment déterminé par les habitudes de ces oiseaux, qui, dans la recherche quotidienne de leur nourriture, parcourent continuellement de grands bancs de sable, à la marée basse. Les mouettes varient beaucoup dans leur manière de nicher, mais celle-ci est toujours en harmonie avec leur conformation et leurs habitudes ; le nid est placé tantôt sur un roc nu, ou sur le bord d’une falaise, tantôt dans un marais ou parmi les algues du rivage ; il est fait d’algues, de touffes d’herbes ou de roseaux, ou encore de débris trouvés sur le rivage, amoncelés les uns par-dessus les autres, avec aussi peu d’ordre et d’art que le comportent les pattes palmées et le bec grossier de ces oiseaux ; le bec surtout est plus propre à prendre le poisson qu’à bâtir un nid délicat.

Le flamant aux longues jambes et au large bec, qui arpente continuellement les bas-fonds humides, se fait avec de la boue un siège conique, au sommet duquel il dépose ses œufs. Il peut de la sorte les couver à son aise, et ils restent à sec, hors de la portée des marées.

Maintenant je crois que, dans toute la classe des oiseaux, on trouvera les mêmes principes généraux, plus ou moins faciles à découvrir, selon que les mœurs de l’espèce sont plus ou moins marquées ou leur conformation plus ou moins spéciale. Il est vrai que, parmi des oiseaux qui diffèrent peu sous ces deux rapports, nous voyons des systèmes de nids très-divers. Mais il n’est point difficile d’expliquer l’origine de ces différences. Elles résultent de ces grands changements climatériques et géologiques que nous savons avoir eu lieu depuis l’apparition des espèces actuelles. On sait que les habitudes simples sont héréditaires, et, comme chaque espèce occupe aujourd’hui un espace différent des autres, nous pouvons être sûrs que de tels changements agiraient différemment sur chacune, réunissant souvent des espèces qui, dans des régions distinctes et soumises à des conditions différentes, avaient déjà acquis leurs habitudes particulières.


Comment les jeunes oiseaux apprennent à construire leurs premiers nids.


On objecte que les oiseaux n’apprennent pas à faire leur nid comme l’homme apprend à bâtir, car tous les individus d’une espèce font exactement le même nid, même s’ils n’en ont jamais vu un seul, et on prétend que cela ne peut s’expliquer que par l’instinct.

Sans doute ce serait là de l’instinct, si c’était vrai, et je demande simplement une preuve du fait allégué. Ce point, si important pour la question en litige, est toujours admis sans preuve, et même contrairement aux preuves, car les faits connus lui sont opposés.

Un oiseau, élevé en cage dès sa naissance, ne fait pas le nid caractéristique de son espèce, même si on lui fournit les matériaux nécessaires ; souvent même on ne lui verra faire aucun nid quelconque, mais entasser grossièrement les matériaux.

On n’a jamais convenablement essayé de lâcher dans un enclos couvert d’un filet, un couple élevé de cette façon, pour voir quel nid pourront produire ses efforts inexpérimentés ; l’expérience a été tentée pour le chant des oiseaux, qui est censé également instinctif et l’on trouve que de jeunes oiseaux n’ont jamais le chant particulier à leur espèce s’ils ne l’ont pas entendu auparavant, tandis qu’ils apprennent facilement le chant de tout autre oiseau avec lequel ils sont associés.


Les oiseaux chantent-ils par instinct ou par imitation ?


L’honorable Daines Barrington soutenait l’opinion que « le chant n’est pas plus inné chez les oiseaux que le langage ne l’est chez l’homme, mais qu’il dépend entièrement de l’enseignement qui leur est donné en tant que leurs organes leur permettent d’imiter les sons qu’ils ont souvent l’occasion d’entendre. »

Il a exposé ses observations dans les « Philosophical Transactions, » 1773 (vol 63). Il dit : « J’ai élevé des linottes prises dans le nid avec les trois alouettes qui chantent le mieux : l’alauda arvensis, l’alauda arborea, et l’anthus pratensis. Chaque linotte, au lieu du chant de son espèce, adopta entièrement celui de son maître. Lorsque le chant de la linotte-alouette des prés fut tout à fait fixé, je plaçai l’oiseau avec deux linottes communes dans une chambre où elles restèrent ensemble pendant trois mois ; la linotte n’emprunta pas un seul passage au chant de ses nouvelles compagnes, mais conserva constamment celui de l’alouette. »

L’auteur expose ensuite que les oiseaux retirés du nid à l’âge de trois ou quatre semaines, ont déjà appris le cri d’appel de leur espèce ; pour éviter cela, il faut les ôter du nid un jour ou deux après leur naissance ; il cite l’exemple d’un chardonneret qu’il avait vu à Knighton (Radnorshire), et qui chantait exactement comme un troglodyte, sans aucun des sons particuliers à son espèce. Cet oiseau, enlevé de son nid un jour ou deux après sa naissance, avait été placé à une fenêtre donnant sur un petit jardin : c’est là sans doute qu’il avait acquis le ramage du troglodyte, n’ayant aucune occasion d’apprendre même l’appel du chardonneret. Le même auteur avait vu aussi une linotte qui, enlevée de son nid à l’âge de deux ou trois jours, avait presque appris à articuler et pouvait répéter les mots « Pretty boy » et quelques autres courtes phrases, aucun autre son n’ayant été proposé à son imitation. Il éleva une autre linotte avec une vengolina (petit pinson d’Afrique) qui, à ce qu’il dit, chante mieux qu’aucun oiseau étranger, excepté l’oiseau moqueur d’Amérique, et l’imitation du maître par l’élève fut si parfaite, qu’il était impossible de les distinguer l’un de l’autre. Chose plus extraordinaire encore, un moineau commun, oiseau qui d’ordinaire ne fait que gazouiller, apprit le chant de la linotte et du bouvreuil en étant élevé avec ces oiseaux. Le rév. W. H. Herbert fit des observations semblables et raconte que les jeunes, quand ils sont enfermés, apprennent facilement le chant des autres espèces et deviennent d’assez bons chanteurs, quoique, dans l’état de nature, ils soient pauvrement doués sous ce rapport. Le bouvreuil, dont le ramage est naturellement faible, dur et insignifiant, a néanmoins une faculté musicale remarquable, car on peut lui enseigner à siffler des airs complets. D’autre part, le rossignol, dont le chant naturel est si beau, montre une grande aptitude, dans la domesticité, à apprendre celui d’autres espèces. Bechstein parle d’un rouge-queue qui, ayant niché sous le bord de son toit, imitait le chant d’un pinson en cage sur une fenêtre au-dessous de lui, tandis qu’un autre, dans un jardin voisin, répétait quelques-unes des notes d’une fauvette à tête noire dont le nid était tout près.

Ces faits, et beaucoup d’autres qu’on pourrait citer, donnent la certitude que le chant particulier de chaque oiseau est acquis par imitation, aussi bien que l’enfant apprend l’anglais ou le français, non par instinct, mais en entendant le langage parlé par ses parents.

Il est particulièrement remarquable que, pour faire acquérir à de jeunes oiseaux un nouveau chant correctement, il faut les soustraire à leurs parents de très-bonne heure ; car, les trois ou quatre premiers jours leur suffisent pour connaître et imiter plus tard le chant de ceux-ci. Cela montre que de très-jeunes oiseaux peuvent entendre et se souvenir, et il serait fort extraordinaire que, puisqu’ils peuvent voir, ils ne pussent ni observer ni se rappeler, et vécussent des jours et des semaines dans un nid sans rien savoir ensuite des matériaux dont il est fait et de la façon dont il est construit. Pendant qu’ils apprennent à s’envoler et à revenir souvent à leur nid, ils peuvent l’examiner à fond à l’intérieur et à l’extérieur ; comme d’ailleurs la recherche de leur nourriture les conduit invariablement parmi les matières dont le nid est composé et à des places semblables à celles où il se trouve, est-il donc bien étonnant qu’ils soient ensuite capables d’en faire un semblable pour leur propre usage ? Ne serait-ce pas bien plus remarquable, s’ils se dérangeaient pour trouver des matériaux tout différents de ceux qu’ont employés leurs parents, les combinaient d’une façon dont ils ne connaîtraient aucun exemple, et formaient une construction tout autre que celle où ils ont été élevés ? Celle-ci est d’ailleurs probablement celle que toute leur organisation peut assembler le plus vite et le plus facilement.

On a cependant objecté que l’observation, l’imitation, la mémoire, ne peuvent rien avoir à faire avec l’habileté architecturale d’un oiseau, parce que les jeunes qui en Angleterre naissent en mai ou juin, bâtissent au mois d’avril ou de mai suivant un nid aussi parfait que celui où ils ont été élevés, sans pourtant en avoir jamais vu bâtir. Mais ces jeunes oiseaux, avant de quitter le nid, ont pu certainement en observer bien des fois la forme, la grandeur, la situation, les matériaux et leur disposition, et en conserver le souvenir jusqu’au printemps suivant, alors que la recherche de leur nourriture met à leur portée les matériaux voulus ; il est très-probable que les oiseaux les plus âgés font leurs nids les premiers, ceux de la dernière couvée suivent alors leur exemple, apprenant d’eux à faire les fondations du nid et à en assembler les éléments[1] ; de plus nous n’avons aucune raison de croire que les jeunes s’accouplent en général entre eux. Il est plus probable que chaque couple ne contient fréquemment qu’un seul sujet né l’été précédent, et qui est donc plus ou moins guidé par l’expérience de l’autre.

Mon ami M. Richard Spruce, bien connu comme voyageur et botaniste, pense que tel est en effet le cas. Il a bien voulu me permettre de publier les observations suivantes, dont il m’a fait part après avoir lu la première édition de mon livre.


De quelle façon les jeunes oiseaux peuvent apprendre à construire leurs nids.


« Parmi les Indiens du Pérou et de l’Équateur, qui ont conservé beaucoup des usages qui caractérisaient leur demi-civilisation avant la conquête espagnole, il règne la coutume que les jeunes gens épousent de vieilles femmes, et réciproquement, les jeunes filles épousent des vieillards. Ils disent qu’un jeune homme, habitué à la sollicitude de sa mère, serait mal partagé s’il n’avait qu’une jeune fille ignorante pour prendre soin de lui, et la jeune fille, de son côté, se trouve mieux d’un homme d’âge mûr, qui peut lui servir de père.

« Nous retrouvons, chez beaucoup d’animaux, quelque chose d’analogue à cette coutume. Un vieux daim vigoureux peut généralement conquérir la femelle de son choix, et même toutes les femelles auxquelles il peut suffire, mais un jeune daim « du premier bois » doit se résigner au célibat, ou se a contenter de quelque respectable douairière.

« Comparez le cas très-semblable du coq domestique et de beaucoup d’autres oiseaux ; considérez quelles seront les conséquences de l’accouplement d’un vieux mâle avec une jeune femelle, ou d’une vieille femelle avec un jeune mâle, ce qui, je crois, a lieu chez le merle, et chez d’autres oiseaux, qui, on le sait, se disputent la possession des femelles les plus belles et les plus jeunes ; dans chaque couple, l’un des conjoints ayant déjà de « l’expérience », enseignera à son jeune compagnon, non-seulement les choses futiles, mais aussi le choix d’un emplacement pour le nid et la manière de le construire : il lui montrera aussi comment on couve les œufs et comment on élève les petits. Telle est, en peu de mots, l’idée que je me fais, de la manière dont un oiseau, à ses premières noces, apprend peut-être tous les devoirs de la vie conjugale. »

J’ai demandé, sur ce point difficile, des renseignements à quelques-uns de nos meilleurs ornithologistes vivant à la campagne, mais sans succès, parce qu’il est presque toujours impossible de distinguer après la première année les jeunes oiseaux des vieux. On m’apprend cependant que chez les merles, chez les moineaux, et beaucoup d’autres espèces, les mâles se battent avec fureur, et le plus fort a naturellement le choix de sa compagne. L’opinion de M. Spruce est au moins aussi vraisemblable que l’opinion contraire, qui veut que les jeunes oiseaux, dans la règle, s’accouplent ensemble, et elle est confirmée, jusqu’à un certain point, par le célèbre observateur américain Wilson. Ce dernier insiste avec force sur la variété des nids d’une même espèce : il dit que les uns sont beaucoup mieux faits que les autres, et il pense que les nids les moins parfaits sont l’ouvrage des oiseaux les plus jeunes, les plus parfaits aux contraire, celui des plus vieux.

En tout cas l’expérience capitale n’a point été faite : on n’a point encore montré qu’un couple d’oiseaux, élevés à part depuis leur naissance et n’ayant jamais vu de nid, soit à même d’en faire un exactement sur le type de celui de leurs parents. Ce serait là l’expérience décisive. Tant qu’elle n’a pas été faite, je ne pense pas que l’on doive attribuer à une faculté inconnue et mystérieuse, un acte parfaitement comparable aux constructions de l’homme sauvage.

Du reste, il ne faut point s’exagérer le degré de connaissance ou d’habileté acquise (d’autres diraient d’instinct) que doit posséder un oiseau pour construire un nid qui nous semble délicatement et artistement fabriqué. N’oublions pas que ce nid a été formé branche par branche, fibre par fibre, grossièrement d’abord, puis les fentes et les irrégularités qui doivent paraître des brèches et des trous énormes aux petits architectes, sont bouchées avec des bouts de branches ou des rejetons introduits au moyen de leur bec mince et de leurs pattes souples ; brin par brin ils déposent les poils, les plumes, le crin, et le résultat nous semble une merveille de dextérité ; il en serait de même de la plus grossière hutte indienne, aux yeux d’un natif de Brobdingnag.

Levaillant décrit le nid d’un petit oiseau africain, qui montre bien que très-peu d’art peut produire une construction très-parfaite. La base en est faite de mousse et de lin entremêlés d’herbe et de touffes de coton ; cette masse d’abord informe, ayant 5 à 6 pouces de diamètre et 4 pouces d’épaisseur, devient sous les pieds de l’oiseau qui la presse et la foule avec persistance, une sorte de feutre. L’oiseau le comprime avec son corps, se retournant dans tous les sens, de façon à le rendre bien ferme et égal, avant d’élever les bords. Ceux-ci sont ajoutés bout par bout, ajustés et battus des pieds et de l’aile, et bien comprimés, le bec servant à rentrer de temps à autre les fibres qui projettent au dehors. Par ces moyens simples et en apparence insuffisants, la surface intérieure du nid est rendue presque aussi unie et aussi compacte qu’une pièce d’étoffe.


Que les œuvres de l’homme sont surtout imitatives.


Mais voyez l’homme civilisé ! dira-t-on. Voyez l’architecture grecque, égyptienne, romaine et gothique ! Quel avancement ! quel progrès ! quels raffinements ! Voilà à quoi mène la raison, tandis que l’oiseau reste toujours au même point.

Mais si ces progrès-là sont nécessaires pour prouver les effets de la raison opposée à l’instinct, alors il n’y a pas de raison chez les peuples sauvages et chez plusieurs des races à moitié civilisées, et celles-ci construisent par instinct, aussi bien que les oiseaux.

L’homme se répand sur toute la terre, et existe dans les conditions les plus diverses ; de là nécessairement des habitudes également variées, il émigre d’un pays à un autre ; il fait la guerre et des conquêtes ; le mélange des races met en contact des coutumes différentes ; celles par exemple d’un peuple émigré ou conquérant sont modifiées par les circonstances nouvelles du pays où il arrive.

La race civilisée qui conquit l’Égypte doit avoir développé son architecture dans un pays de forêts où le bois était abondant ; car il n’est pas probable que l’idée de colonnes cylindriques prit naissance dans une contrée sans arbres. Une race indigène aurait peut-être construit les pyramides, mais non les temples de Luxor et de Karnak. Dans l’architecture grecque, presque chaque trait caractéristique a son origine dans les constructions en bois. Les colonnes, l’architrave, la frise, les astragales, les modillons, la forme du toit, tout cela doit avoir eu son origine dans quelque contrée boisée du Midi ; confirmation frappante de ce qu’enseigne la philologie, savoir, que la Grèce fut colonisée par des peuples venus du nord-ouest de l’Inde. Mais, élever des colonnes et les relier par d’immenses blocs de pierre ou de marbre, ce ne sont pas des actes de raison, mais bien de pure imitation, car c’est la voûte qui est le moyen rationnel de couvrir de grands vides avec la pierre : par conséquent, l’art grec, si parfaitement beau d’ailleurs, est faux dans son principe, et ne constitue point un bon exemple de la raison appliquée à l’architecture.

Que faisons-nous presque tous aujourd’hui, sinon imiter les constructions de ceux qui nous ont précédés ? Nous n’avons pas même été capables de découvrir ou développer un style défini approprié à nos besoins. Nous n’avons aucun style d’architecture nationale, et sous ce rapport nous sommes même inférieurs aux oiseaux, dont chacun a sa forme de nid caractéristique, exactement adaptée à ses besoins et à ses habitudes.


Que les oiseaux changent et améliorent leurs nids lorsque des conditions nouvelles l’exigent.


La grande uniformité qu’offre l’architecture de chaque espèce d’oiseau ne prouve donc point, ainsi qu’on l’a supposé, un instinct spécial, mais nous pouvons l’attribuer à l’uniformité des conditions dans lesquelles vit chacune des espèces. Leur domaine est souvent très-limité, et il est rare qu’elles se rendent dans un pays nouveau pour y rester, de façon à être placées dans des conditions nouvelles. Cependant, lorsque celles-ci se présentent, les oiseaux en profitent aussi librement et aussi sagement que l’homme pourrait le faire.

Les hirondelles de cheminée et de fenêtre sont une preuve vivante d’un changement d’habitudes qui a dû se faire depuis que l’on construit des maisons et des cheminées, c’est-à-dire en Amérique par exemple, dans les trois derniers siècles. Beaucoup de nids sont faits aujourd’hui avec des fils de coton ou de laine au lieu de laine brute ou de crin ; et le choucas montre une prédilection pour les clochers, qui ne peut guère s’expliquer par l’instinct.

Dans les parties les plus peuplées des États-Unis, le troupiale-ballimore construit son nid suspendu, avec toutes sortes de bouts de cordons, d’écheveaux de soie, de tille de jardinier, au lieu des quelques poils et fibres végétales, qu’il ne trouve que difficilement dans les régions sauvages ; et Wilson, observateur très-exact, croit que cet oiseau perfectionne ses nids par la pratique : les individus les plus âgés faisant mieux que les autres.

L’hirondelle pourpre (Progne purpurea) s’empare des gourdes vides et des petites boîtes, qui, dans presque tous les villages et fermes d’Amérique, sont disposées au dehors pour la recevoir ; plusieurs troglodytes d’Amérique font volontiers leurs nids dans des boîtes à cigares, percées d’un petit trou, si celles-ci sont placées dans une situation convenable. Le Xanthorius varius des États-Unis est un excellent exemple des changements que les oiseaux apportent à leurs nids suivant les circonstances : lorsqu’il établit son domicile sur des branches fortes et raides, son nid est presque plat, mais souvent il le suspend aux branches minces d’un saule pleureur, il le fait alors beaucoup plus profond, pour éviter que le vent, en le secouant avec violence, n’en fasse tomber les petits.

On a aussi observé que, dans les contrées chaudes du Midi, les nids sont construits plus légèrement et d’une substance plus poreuse que dans les régions plus froides du Nord.

Notre moineau commun sait aussi bien se conformer aux circonstances. Quand il s’établit sur un arbre (ce qui sans doute était sa seule manière à l’origine), il fait un nid bien construit et couvert, où ses petits sont très-bien abrités ; mais il ne se donne pas autant de peine lorsqu’il trouve un trou commode dans un bâtiment ou dans du chaume : son nid est alors très-imparfaitement construit.

On a observé dans la Jamaïque un curieux exemple de changement d’habitudes récent. Avant 1854 le Tachornis phænicobea habitait exclusivement les palmiers dans quelques districts du pays. Une colonie de ces oiseaux s’établit alors dans deux palmiers cacaotiers à Spanish-Town et y resta jusqu’en 1857, année où un orage abattit l’un de ces arbres et dépouilla l’autre de ses feuilles. Au lieu de rechercher d’autres palmiers, les oiseaux chassèrent les hirondelles qui vivaient dans la cour du palais du Gouvernement, s’emparèrent de la place, et y firent leurs nids sur le sommet des murs d’enceinte et dans les angles formés par les poutres et les solives ; ils occupent encore en grand nombre cet endroit. On remarque qu’ils y forment leurs nids avec beaucoup moins de soin que lorsqu’ils vivaient sur les palmiers, probablement parce qu’ils sont moins exposés.

Au moment où la première édition de cet ouvrage venait de paraître, M. F.-A. Pouchet publia, dans la dixième livraison des Comptes rendus pour l’année 1870, ses observations relatives à un exemple encore plus curieux de perfectionnement dans la construction des nids. Il y a quarante ans, M. Pouchet avait lui-même recueilli, dans de vieilles maisons de Rouen, des nids d’hirondelles de fenêtres (Hirundo urbica), et les avait déposés dans le musée de cette ville. S’étant récemment procuré de nouveaux nids, il fut surpris, en les comparant avec les anciens, d’y voir un changement positif dans la forme et l’arrangement. Cela le décida à étudier la chose de plus près. Les nids modifiés avaient été pris dans un quartier neuf de la ville, et M. Pouchet constata que tous ceux qui provenaient des rues neuves avaient la forme modifiée ; mais en examinant les églises et d’autres bâtiments anciens, ainsi que des rochers habités par ces oiseaux, il trouva beaucoup de nids du type ancien, mélangés avec quelques-uns du nouveau modèle. Il étudia alors les dessins et les descriptions des anciens naturalistes, et il n’y trouva absolument que la forme primitive. Voici, suivant lui, en quoi consiste la différence. L’ancienne forme est une portion de sphère, elle est égale au quart d’un hémisphère quand le nid est situé dans l’angle supérieur d’une fenêtre ; l’ouverture est circulaire et très-petite, tout juste suffisante pour laisser passer l’oiseau. Le nid moderne est, au contraire, plus large que haut, sa forme étant celle d’un segment de sphéroïde aplati ; l’ouverture est très-large et basse, et placée tout près de la surface horizontale à laquelle le nid tient par sa partie supérieure.

M. Pouchet pense que la forme nouvelle est indubitablement un perfectionnement de l’ancienne. Le fond élargi doit laisser aux petits plus de liberté de mouvements qu’ils n’en avaient dans l’ancien nid étroit et profond ; de plus, l’agrandissement de l’ouverture leur permet de regarder au dehors et de prendre l’air ; elle est même assez large pour leur servir en quelque sorte de balcon, et l’on y voit parfois deux petits qui peuvent s’y tenir sans gêner le passage des parents. En même temps, placée si près du sommet, elle a moins d’inconvénients aux points de vue de la pluie, du froid et des ennemis, que le petit trou rond de l’ancien nid. Voilà donc, dans la construction des nids, un progrès aussi évident qu’aucun de ceux qui s’accomplissent en un temps si court dans l’architecture humaine.

Du reste, les nids ne sont pas toujours caractérisés par une structure parfaite et une excellente conformation ; chez beaucoup d’oiseaux, ils présentent de véritables imperfections ; celles-ci sont parfaitement compatibles avec notre théorie, mais beaucoup moins explicables dans l’hypothèse de l’instinct supposé infaillible. Le pigeon voyageur d’Amérique couvre souvent les branches de ses nids jusqu’à les faire casser par le poids, et l’on voit alors le sol couvert de nids, d’œufs et de jeunes oiseaux détruits. Les nids de freux sont souvent si imparfaits que les vents violents en font tomber les œufs ; mais l’oiseau le plus mal partagé sous ce rapport est l’hirondelle de fenêtres ; White de Selborne nous dit en avoir vu s’établir chaque année dans des places où elles risquaient de voir leurs nids emportés par une forte pluie et leurs petits détruits.


Conclusion.


Une appréciation impartiale de tous ces faits confirme, je pense, l’assertion par laquelle j’ai commencé, savoir, que les facultés mentales manifestées par les oiseaux dans la construction de leurs nids, sont de même nature que celles que montre l’homme dans la construction de sa demeure.

Ces facultés sont essentiellement l’imitation, unie à une adaptation partielle et lente aux conditions nouvelles qui s’imposent.

Comparer l’ouvrage des oiseaux avec les manifestations les plus élevées de la science et de l’art humain, c’est rester tout à fait à côté de la question. Je ne prétends pas que l’oiseau soit doué d’une faculté de raisonnement qui en variété ou en étendue soit le moins du monde comparable à celle de l’homme. Je dis simplement que le mode de construction des nids nous offre des phénomènes qui, si on les compare impartialement avec ceux que présente la grande masse des hommes dans la construction des maisons, n’indiquent aucune différence essentielle dans la nature ou l’espèce des facultés employées. Si l’instinct signifie quelque chose, ce ne peut être que la capacité d’accomplir un acte complexe sans enseignement ni expérience. Il implique des idées innées bien définies, et, s’il était prouvé, il renverserait le sensationnalisme de M. Mill et toutes les idées de la philosophie moderne sur l’expérience.

Que l’existence de l’instinct puisse être établie dans d’autres cas, cela n’est pas impossible ; mais dans l’exemple particulier des nids d’oiseaux, qui est généralement considéré comme un de ses principaux appuis, je ne puis rien trouver absolument qui prouve l’existence de quelque chose d’autre que ces facultés rudimentaires de raisonnement et d’imitation qui sont universellement attribuées aux animaux.


  1. J’ai entendu faire à un ami une remarque ingénieuse, c’est que si les jeunes oiseaux observent le nid dans lequel ils ont été élevés, ils doivent le considérer comme une production naturelle aussi bien que les branches et les feuilles entrelacées qui l’entourent, et ne peuvent absolument pas supposer que leurs parents l’aient construit. Cette objection est peut être juste, et, dans ce cas, nous devons avoir recours au mode d’enseignement décrit dans les paragraphes suivants. Du reste la question ne peut être définitivement résolue que par une série d’observations attentives.