La civilité des petites filles/12

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12 — Comment on doit se conduire dans les rues, les lieux publics, etc.


Le public a droit au respect.
B…


Si je vous demandais, mes chères petites, ce qu’on entend par la liberté, vous me répondriez sans doute :

— Être libre, c’est faire ce qu’on veut.

Votre réponse serait incomplète ainsi. Il faut ajouter : c’est faire ce qu’on veut, à la condition toutefois de ne pas gêner la liberté des autres.

La liberté n’est que le droit de faire ce qui ne nuit pas à autrui.

Ainsi, par exemple, vous êtes dans votre chambre, vous y faites ce que vous voulez, mais jusqu’à un certain point. S’il vous plaisait, durant la nuit, de chanter très fort, de faire de la musique, de jouer avec des instruments en cuivre de manière à empêcher les voisins de dormir, ils auraient le droit de se plaindre, se plaindraient, et on vous forcerait de cesser votre musique intempestive…

Il en est de même de la rue. Elle appartient à tous, on peut y faire ce qu’on veut, mais dans de certaines limites. Il n’est pas permis d’y gêner les autres, d’y faire des excentricités, du tapage, des actes que la bienséance réprouve.

Dans la rue, on doit éviter de courir. Il faut marcher avec naturel, ni trop vite, ni trop lentement, sans prétention, ni nonchalance. Il arrive parfois que des femmes en grande toilette se donnent une démarche Hère et arrogante, se carrent, se dandinent ayant l’air de dire : Suis-je assez belle ? Admirez-moi !… On ne les admire pas et l’on pense en soi-même : voilà des vaniteuses !

Si l’on sort avec une personne âgée ou à qui l’on doit des égards, il faut lui céder le haut du pavé, — côté des maisons, — et régler son pas sur le sien.

Quand on est deux, la droite est la place d’honneur ; si l’on est trois, c’est le milieu.

Si marchant sur un trottoir on se croise avec un vieillard, une ouvrière chargée d’un paquet, une mère portant son enfant dans ses bras, on doit leur céder le côté du mur et au besoin descendre pour les laisser passer.

Il n’est pas convenable de parler fort dans les rues et dans les lieux publics, de gesticuler, de rire à gorge déployée, de manière à se faire remarquer.

Durant une promenade ou une course, on se contente de saluer, d’incliner la tête si l’on rencontre de simples connaissances ; on s’arrête et on parle quand ce sont des parents ou des amis intimes.

Il ne faut pus appeler de loin, par leur nom, les personnes qu’on rencontre, mais attendre d’être arrivé près d’elles pour les saluer.

Il est d’usage, entre personnes ayant un certain degré d’intimité, de s’adresser quand on s’aborde diverses questions relatives à la santé. On emploie alors ces formules : Votre santé est-elle bonne ? Comment vous portez-vous ? et encore : Comment allez-vous ? Il faut bien se garder de dire : Comment que ça va ? Ça va-t-il bien ? Comment ça va-t-il ? Celui à qui la question s’adresse doit répondre d’un seul mot en disant : Je vous remercie, bien, très bien. Il serait ridicule, en cette circonstance, de donner un bulletin détaillé de sa santé.

Toute conversation avec une personne qu’on a abordée dans un lieu public doit être courte. La place ou la rue n’es pas un lieu d’entretien. Une personne qui va à ses affaires n’aime pas qu’on
l’arrête longtemps en chemin. Certaines gens ont la manie d’accoster à tous propos les allants et les venants, souvent dans un temps où ceux-ci sont pressés, pour les accabler de leur ennuyeux bavardage, malgré les incommodités du froid et de la chaleur.

C’est une incivilité de tirer par l’habit ou par la robe une personne que nous abordons et à laquelle nous voulons parler.

Si les personnes avec lesquelles nous nous trouvons saluent des personnes que nous ne connaissons pas, nous devons aussi saluer ces dernières.

A moins d’être très familier avec une personne, on ne doit pas lui demander où elle va, d’où elle vient.

Jamais, de loin ou de près, on ne doit montrer du doigt la personne dont on parle ou dont on entend parler.

Si l’on nous prie de donner un renseignement, d’indiquer une rue, et que nous puissions le faire, rendons ce bon office avec empressement ; si nous-mêmes nous nous trouvons dans le cas de réclamer ce service, faisons-le avec politesse et remercions avec amabilité.

Quand on se trouve dans une rue très fréquentée, dans un endroit renfermant beaucoup de monde, il est incivil de pousser, de bousculer ses voisins pour avancer. Si l’on suivait le précepte : à chacun son tour, il arriverait moins d’accidents dans les foules.

Il n’est jamais permis de manger dans la rue. Cet acte de
gourmandise n’est toléré que pour les tout jeunes enfants.

S’il pleut, et qu’on tienne un parapluie à la main, il faut le manœuvrer avec adresse, le hausser ou le baisser suivant le besoin, afin de ne pas blesser les gens à la figure.

En cas d’averse, une jeune fille peut offrir à une dame de partager son parapluie, c’est une prévenance à laquelle celle-ci sera fort sensible.

Dans une commune, il est bon que les enfants saluent les personnes honorables qu’ils rencontrent, ainsi que tous les fonctionnaires.

Pour bien terminer ce chapitre, je vous dirai, mes petites amies : le public a droit au respect. Il faut être en sa présence toujours digne et convenable, ne se permettre aucune action qui soit contre les bienséances et les usages reçus. Ne choquez personne par votre tenue, le ton de votre voix, le laisser aller de vos manières. Faites en sorte qu’on dise de vous en vous voyant passer : que ces petites filles ont donc un bon maintien, un air comme il faut !

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RÉSUMÉ


1. Dans la rue et dans les lieux publics, ne faites rien qui puisse attirer l’attention.

2. Marchez posément, sans arrogance comme sans laisser aller.

3. Cédez le pas (côté du mur) aux vieillards, aux mères chargées de leurs enfants, aux gens portant des fardeaux.

4. N’arrêtez pas une personne dans la rue, à moins que vous ne la connaissiez très bien, et, en ce cas, ne restez pas longtemps à causer, ne posez pas de questions indiscrètes.

5. Saluez en chemin les personnes respectables, les fonctionnaires.

6. Ne poussez pas, ne bousculez pas s’il y a foule.


MAXIME


Que votre maintien dans les rues soit un bon exemple pour tous.

Rédaction. Dites les règles de la civilité qu’il faut observer dans la rue et dans les lieux publics.


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