La voir, sentir son bras s'appuyer sur le mien

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VIII


La voir, sentir son bras s’appuyer sur le mien,
Marcher comme en un rêve et sans songer à rien
Qu’à l’extase présente, à la commune ivresse
De nos regards unis dans la même caresse ;
Lui dire toi, lui parler d’elle, improviser
Cent romans de bonheur qu’achève un doux baiser ;
Faire sans y songer, sans s’en douter, des lieues
Par les chemins perdus des lointaines banlieues ;

Et puis, le soir venu, s’arrêter prés d’un champ
Désert, pour admirer un beau soleil couchant,
Pour contempler, noyé dans la brume indécise,
Paris, ses dômes d’or, la flèche d’une église,
Et l’océan confus des toits et des maisons
Se perdant dans la nuit des sombres horizons
Où quelque vitre en feu met sa rouge étincelle ;
— Et penser qu’on voudrait mourir d’amour pour elle.