Le Dialogue (Hurtaud)/105

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Traduction par Hurtaud.
Lethielleux (p. 383-385).


CHAPITRE VIII

(105)

Résumé de ce qui précède, avec une addition sur la correction du prochain.

J’ai donc, très chère fille, satisfait à ton désir en t’expliquant ce que tu me demandais sur la manière de reprendre ton prochain, sans te laisser tromper par le démon ou par ta faible vue. A moins de révélation expresse venant de moi et concernant une faute particulière, ta correction doit toujours demeurer générale. Elle doit âtre accompagnée d’humilité et observer la méthode que je t’ai indiquée, qui consiste à te réprimander toi-même en même temps que les autres.

Je t’ai dit ensuite et je te répète, qu’il n’est permis d’aucune manière, de juger les créatures en général, ni mes serviteurs, en particulier, en induisant l’état intérieur de leur âme des dispositions heureuses ou fâcheuses dans lesquelles ils se trouvent. Je t’ai donné la raison pour laquelle tu ne peux pas juger, et serais, si tu jugeais, trompée dans ton jugement. Ce que vous devez au prochain en ce cas, toi et les autres, c’est la compassion. Le jugement doit m’être réservé.

Je t’ai exposé encore la doctrine et le principe fondamental que tu devais inculquer à ceux qui viendraient te demander conseil pour sortir des ténèbres du péché mortel et suivre le chemin de la vertu. Enseigne-leur comme principe et fondement l’amour de la vertu par la connaissance d’eux-mêmes et de ma Bonté envers eux, et demande-leur de mortifier et d’anéantir leur propre volonté. pour qu’elle ne se révolte en rien contre Moi. Indique-leur aussi la pénitence, mais comme un moyen, non comme le but principal, ainsi qu’il a été dit. La pénitence ne doit pas, non plus, être égale pour tous, mais se mesurer aux aptitudes, aux forces et à la condition de chacun. Suivant cette règle, les uns useront peu, les autres beaucoup, de ces moyens extérieurs.

Il ne t’est pas permis, ai-je dit, de reprendre le prochain d’une faute en particulier, mais seulement de façon générale, selon la manière que je t’ai indiquée. Je ne voudrais pas cependant que tu croies, que devant une faute extérieure bien caractérisée, tu ne puisses lui en faire la correction entre toi et lui. Tu le peux faire, et même, s’il s’obstine et refuse de s’en amender, il est permis de la faire connaître à deux ou trois personnes. Si cela encore ne suffit pas, tu peux dénoncer le coupable au corps mystique de la sainte Église (Mt 18, 15-17). Ce que j’ai voulu te dire, c’ est que cela ne t’était pas permis, pour toute vision ou sentiment intérieur que tu aurais dans l’esprit. Encore que tu aurais été témoin du fait, il ne faudrait pas te hâter, à moins que tu ne l’aies vu sans doute possible, ou que tu en aies reçu de Moi, dans ton esprit, la révélation expresse. Et, même alors, tu dois employer la méthode de correction que je t’ai expliquée. C’est le plus sûr, pour éviter d’être induit en erreur par le démon, sous le couvert de la charité du prochain.

Maintenant, j’ai fini, ma fille très chère, de t’exposer sur ce point, ce qu’il est nécessaire d’observer pour conserver et accroître la perfection de l’âme.