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Le Gars/II/1

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Des femmes — Antoinette Fouque (p. 67-69).

I

LE BARINE

File, vole, ma berline !
Brûle haltes et relais !
Est-il gai, notre barine !
Est-il grave, son valet !

Fourrure de zibeline,
Rouges reines, clair harnais.
Est-il beau, notre barine !
À fou maître — fin valet.

Hasard — mon valet !
Espoir — mon gros lot !
Filez, les relais !
Riez, les grelots !

Jeune — saute, vieux — vacille,
Neige cache temps et lieu.
Neige ! Poudre de nos filles,
Sel et sucre de nos gueux.


Neige — miche, neige — mie,
Neige — chaume, neige — nid,
Neige ! manne de Russie,
Farine de mon pays !

Relais restent, clochers percent,
Grelots be — er — cent,
Traîneaux ve — er — sent,
Allons, ve — er — stes !

Jeune chante, vieux rumine,
Poteau passe, passé meurt
— Tiens, barine ! hein, barine ?
En plein gel cette primeur !

Où quatre chemins
Se donnent la main,
Se jurent retour —
Fleur, fleur, rouge four !

Deux raisons pour m’en saisir :
Sa rougeur et — « mon plaisir ».

Doigts claquent, dents luisent :
— La rouge, la gente !
— Ne blesse, ne brise,
Bien rare, la plante !

Joints craquent, dents rient :
— Me tentes, me charmes !
— Au large, barine !
Beauté coûte larmes.


Deux raisons — d’une suffit :
Danger se nomme : défi.

À plat dans la neige,
Fourrures débordent.
Le vieux sur son siège :
— Désordre… désordre !…

— Merveille ! prodige !
S’échauffe, s’agite.
— Au large, te dis-je :
Carroir — mauvais gîte.

L’embrasse, la lisse,
Neige — fond,
Fourrures fleurissent,
— Hé, faucons !