Le Mahâbhârata (traduction Ballin)/Volume 1/Chap24

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Traduction par Ballin, L..
Paris E. Leroux (1p. 154-157).


CHAPITRE XXIV


COMBAT GÉNÉRAL


Argument : Les fils de Draupadî rejoignent Dhrishtadyoumna. Sahadeva rejoint Youdhishthira. Çakouni attaque de nouveau Dhrishtadyoumna. Combat terrible.


1238. Sañjaya dit : De même, l’armée Pândouide, couverte de sang, ayant ses équipages fatigués, s’approchait avec six mille chevaux (qui lui) restaient.

1239. Arrosés de sang, les cavaliers Pândouides (décidés à faire) le sacrifice de leur vie dans la grande lutte qui était très proche, disaient :

1240. Ici, on ne peut pas combattre avec des chars, comment (le pourrait-on) avec des éléphants ? Que les chars aillent contre les chars, et les éléphants contre les éléphants.

1241. Certes, Çakouni s’est retiré vers son armée et s’y tient. Le fils de Soubala, ô roi, ne reviendra pas au combat.

1242. Alors les fils de Draupadî et les grands éléphants furieux se dirigèrent vers le lieu (où se trouvait) le grand guerrier Dhrishtadyoumna.

1243. Sahadevva aussi, ô Kourouide, quand le nuage de poussière eut disparu, alla seul, là où était le roi Youdhishthira.

1244. Puis, après que ceux-ci furent partis, le Soubalide Çakouni, irrité, attaqua de nouveau l'armée de Dhrishtadoumna, sur les côtés.

1245. Le combat s’engagea alors de nouveau entre les tiens et les ennemis, les (combattants) ayant fait le sacrifice de leurs vies, et désirant se tuer les uns les autres.

1246. Dans ce conflit de héros, ô roi, ces guerriers se regardaient réciproquement (et) se précipitaient par centaines et par milliers (les uns sur les autres).

1247. On entendait, dans cette destruction du monde, un grand bruit de têtes coupées par les épées (et tombant sur le sol), pareil (au bruit que ferait) la chute de noix de palmier.

1248-1250. Un bruit et un fracas tumultueux, faisant hérisser le poil (de terreur), était (produit) par la chute à terre des corps ayant perdu le souffle vital, des bras avec leurs armes, des cuisses détachées (du reste du corps), ô maître des hommes. Les guerriers tuant avec des armes aiguës leurs frères, leurs fils, leurs pères, volaient, comme des oiseaux à la recherche de leur proie. Enragés les uns contre les autres, ils s’attaquaient mutuellement,

1251-1253. Se frappaient des milliers de fois en disant : « à moi d’abord, à moi d’abord (de porter le premier coup). » Les chevaux s’enfuyaient, leurs cavaliers tués étant tombés de leurs selles en se heurtant (les uns contre les autres). Ô maître des hommes, il se produisait un bruit tumultueux de lances, d’épées, de lions, de chevaux luttant et se froissant (réciproquement) dans leur course rapide, et d’hommes munis de leurs armures et criant,

1254. Détruisant les parties vitales de leurs ennemis, dans (cette lutte qui était le résultat des) mauvais conseils (que tu avais suivis). Brisés par la fatigue, enragés, ayant leurs chevaux fatigués, mourants de soif,

1255. Et blessés par des armes aiguës, les tiens attaquaient (cependant leurs adversaires). En ce lieu, de nombreux guerriers éperdus, grisés par l’odeur du sang,

1256, 1257. Tuaient leurs ennemis, et aussi leurs (camarades), qu’ils atteignaient (de leurs armes), en arrivant (auprès d’eux). De nombreux Kshatriyas avides de la victoire, tombaient morts à terre, tués par des pluies de flèches. Dans ce jour, réjouissant pour les loups, les chacals et les vautours,

1258. La destruction de l’armée, (qui avait lieu) sous les yeux de ton fils, fut terrible. Ô maître des hommes, la terre était jonchée des corps des hommes et des chevaux,

1259. Arrosée de sang en guise d’eau, elle accroissait l'effroi des gens craintifs ; se blessant incessamment avec les épées, les patticas et les piques,

1260. Ô Bharatide, les tiens et les Pândouides ne reculaient pas ; frappant selon leur pouvoir tant qu’il leur restait un souffle de vie,

1261. Les guerriers tombaient, répandant du sang par leurs plaies. On voyait, (par ci par là), un corps sans tête qui tenait une tête par les cheveux,

1262. Et brandissait un glaive tranchant, humide de sang. Ô roi, de nombreux corps sans tête étant (ainsi) dressés,

1263. 1264. Des guerriers s’évanouirent à l’odeur du sang. Ensuite, le bruit s’étant affaibli, le Soubalide, avec le peu de chevaux qui lui restaient, attaqua l’armée des Pândouides qui, avides de la victoire, se hâtèrent de courir contre lui.

1265. Les fantassins, les éléphants et les cavaliers, l’ayant environné et entouré de toutes parts, avec leurs armes levées,

1266. Désireux de terminer la guerre, le frappèrent avec des armes de diverses sortes. Mais, en voyant les tiens attaqués de tous côtés,

1267, 1268. Les chars, les cavaliers, les fantassins et les éléphants coururent sur les Pândouides. Quelques héroïques fantassins, ayant épuisé leurs armes, se tuaient réciproquement à coups de pieds et à coups de poing. Les maîtres de chars (tombaient) de leurs chars, ceux montés sur des éléphants (tombaient) de leurs éléphants,

1269. Comme les saints tombent du ciel à l’expiration de leurs mérites. Ainsi, les guerriers, en s’approchant les uns des autres dans la grande bataille, tuèrent

1270, 1271. Leurs pères, leurs amis, leurs frères, et aussi leurs fils, de sorte que le combat était sans pitié, ô le plus grand des Bharatides, la confusion des javelots, des épées et des flèches étant devenue très effrayante.