Le nouveau Panurge/Texte entier

La bibliothèque libre.
Michel Gaillard (p. 1-291).


LE NOUVVEAV
PANVRGE.
Auec ſa nauigation en l’Iſle Imaginaire ; ſon rajeuniſſement en icelle, & le voyage que fit ſon eſprit en l’autre monde, pendant le rajeuniſſement de ſon corps.


ENSEMBLE,
Vne exacte obſeruation des merueilles par luy veuës tant en l’vn que l’autre monde.



Comment Panurge arriuant à la foire de Beaucaire y rencontra Taumaste, Epiſtemon, & autres ſes camarades, leſquels eſtoient là venus pour faire amplette de Chats, leurs bienvenues, & pluſieurs diſcours qu’ils eurent enſemble.
Chapitre I.



DEa mes amis, hé qui m’eût dit vous rencontrer icy ? ô iournee pour moy fauorable ! heure la plus heureuſe de ma vie ! moment le plus fortuné que i’aye rencontré deſſus ny deſſous la terre. Eſt il poſſible que ſoyez icy, mes petits couſins ? eſt il vray que ie vous voye ? eſt cecy vn ſonge ? ſuis ie point encores là-bas parmi les ombres ? ça que ie vous embraſſe, Taumaſte mon amy, ça l’accolade à la Françoiſe, il y a ſi long temps que ie ne l’ay veu faire. Epiſtemon, mon camarade, baiſez moy, accolez moy, ça bras deſſus, bras deſſous ; ie ſuis voſtre Panurge qui viens de l’autre mondez ; ne ſoyez point incredules ; regardez bien, c’eſt moy meſme Panurge. Sus dites moy qui vous ameyne icy, que faites vous icy, parlez moy ; doutés vous encore, eſtes vous eſtaſiez ; auez vous perdu la parole ; voſtre eſprit s’en ſeroit-il volé par la feneſtre d’admiration ? n’appelez le ; & me croyez ; ie ſuis Panurge, voſtre bon amy Panurge, voſtre camarade Panurge. Ie voy bien vous meſcognoiſſez ma barbe qui à preſent n’a que le petit poil foller, & depuis ne l’auiez veuë eſtoit toute touffue, & couuerte de neige. C’eſt tout vn ie ſuis touſiours le meſme Panurge ; mais nouueau Panurge, renouuellé Panurge ; Panurge r’ajeuni ; non point comme Medee rajeunit Æſon ſon pere ; ny par le feu, ny par le ſoulphre, ny par l’eau, ny par decoction d’herbes, compoſitions, meſlanges, ny tels autres enchantemens, mais Panurge deifiquement r’aieuni dans la pure Maluoiſie. Ie vous en reciteray l’hiſtoire tout à loiſir, à preſent parlons d’autre choſe, qui vous ameine icy, qu’achetez vous ? que vendez vous à ceſte tant celebre foire de Beau-caire ? Taumaſte, ha Panurge mon amy, Scriptum eſt enim, qui bien aime, de loin cognoit ſoudain que ie vous ay veu, l’ay recogneu voſtre beau nez : il ne vous manque que d’en auoir vn autre ſur le derriere ; ainſi on vous porteroit par tout avec deux baſtons comme on fait les banaſtes. Panurge. Taumaſte mon bon amy, auez vous oublié ceſt adage qui court communement permi le vulgaire : ad formam nazi cognoſcitur ad te leuaui : vn Poëte l’autre iour m’en donna la verſion telle,


Trois fois autant qu’auez de nez
Soit en longueur ou en groſſeur
Voſtre Priape vous aurez
Et gros, & long ſoyez en ſeur.


Taumaſte
. C’eſt tout vn, allons boire Panurge mon grand amy, venez, ie payeray pour vous, i’ay Dieu merci ma gibeſſiere encores bien garnie ; & puis ie ſçay où l’on vend le bon vin ; ça à la friſcade ; ſuiuez moy ie paſſeray premier ; Epiſtemon ſerrera la fille, auec noſtre petit mignon Geophile ; ça l’hoſteſſe couurez la table, apportez vin blanc, vin rouge, vin clairet, ça rincez les verres, faites boüillir la marmite ; apportez quelque langue de bœuf à la vinaigrette, auez vous point d’andoüilles ? mon camarade les aime, il les appelle aiguillõs de vendanges. Panurge. Mes filiols, ie ſuis à preſent voſtre fils ſecundum barba, quoy qu’au ſiecle paſſé ie fuſſe voſtre pere. Mais ſus dites moy, venez vous point de Salmigondinois ? contez m’en des nouuelles, comment ſe portent mes feaux ; Gymnmaſte qu’eſt-il deuenu ? Eſiſthenes vit il encore ? ma grand amie Thelone a elle biẽ eſleué ſes enfans, le petit Carpalin, & le mignon Picrochole ? Elopas a-il recouuré la parolle ? Endemion eſt-il touſiours bien fortuné ? Xenomanes a-il acheué de circuir la terre, trauaille il encore à ſa Coſmographie ſupervniuerſelle ? Rhyſotome eſt-il d’accord auec Ægonome ? ont ils à force cheures ? eſt-il ſaiſon de fromages pour eux, & pour nous ? Thyropanoicte a-il encores crocheté la porte du threſor Lemnien ? Ponocrates trauaille-il touſiours ſans ſe laſſer. Et frere Iean des Entommeures conſerue il biẽ le clos de son abbaye ? porte-il touſiours son grand bracmard ? Mes reſueurs de Dipſoide parlent-ils de moy ? mes galoiſes ſe ſouuiennent elles encore de leur Panurge ? pour Hegemon ie vous en diray tantoſt des nouuelles. Mais parlez moy qu’acheptez vous en ceſte foire ? Taumaſte. Vous ſçauez, Panurge mon bon amy, qu’aux deux prouinces de Salmigondin, & Dipſoin, eſt arriué cete annee preſente, & ce depuis les feſtes Iuueniles, vne telle abondance de rats que non ſeulement ils gaſtent tous nos quaqueroliers & mangent nos hanetons, mais encores ſe ruent ils tout de nuict ſur nous, nos femmes & enfans ; tant helas ! quel creue-cœur ! les vns ont perdu le nez, les autres les oreilles, les autres, ha ie ne l’oſe dire, & pluſieurs en ſont morts. Iamais, iamais bon amy Panarge, la Sardaigne ne fuſt plus moleſtee des cõnils ; l’Egypte des raines, & ſauterelles, Lybie des Lyons, l’Ætiopie des fourmis, & ſcorpions : les Magarenſiens des mouches, les Epheſiens des gueſpes, que nous ſommes affligez de ces rats, ſi que nous auons peur (ſi Dieu ne nous ayde) d’eſtre comme Popiel deuorez par les rats, ou que tout Salmigondin, & Dipsoin ne demeurent deſerts comme firent autresfois certains lieux d’Italie, & l’Iſle de Giare, l’vne des Siclades, que cette maudite vermine rendit inhabitables. Parquoy mon bon amy Panurge, nous, que voyez icy, auons eſté deputez pour venir en cette foire de Beaucaire faire amplette de chats, parce qu’on nous a dit qu’il y en arriue de toutes les parts du monde : & de fait nous en auons deſia veu vn bon nombre, & des plus beaux. Ie m’aſſeure que ſi nous en pouuions conduire quelques vns à Salmigondin, & Dipſoin, auquel paï la race des chats eſt perduë, que nous ſerions toſt deliurez de ces maudites beſtes. Panurge. À la bonne heure ſoit tout dit, ie prophetiſe deſia que mon abſence a eſté cauſe de ce malheur ; & que Dieu verſe l’iniquité des peres ſur les enfans. Sans doute les villes de Sodome, & Gomorre ne fuſſent point peries, s’il s’y fuſt trouué tant ſeulement dix iuſtes. De meſme Salmigondin & Dipsoin ne souffriroient pas ceſte calamité, ſi entre vous tous fut trouué dix hommes de bien. I’ay eſté comme Loth tiré par la manche pour en partir auant que ce malheur arriuaſt, moy y eſtant les rats n’auoyent eu pouuoir d’y aborder. Encores voy ie que Dieu vous fait grace, d’autant qu’il vous donne le temps de vous repentir ; ſans doute ſi ne vous cõuertiſſez, il vous arriuera ce qu’aduint autreſfois à Choré, Datan, & Abiron ; la terre s’ouurira & perirez.Mais puis qu’eſtes icy ie vous conſeille de faire amplette de chats comme auez determiné ; poſſible, (que ſçait on) Dieu veut que toute la terre ſoit peupler de chats. Epiſtemon. Attendons demain nous en aurons meilleur marché : car touſiours il en arriue. Cependant mon doux & beatifié Panurge, pour paſſer ioyeuſement ceſte iournee ; racontez nous voſtre voyage : mais qu’il ne vous faſche, dites nous de point en point toutes vos fortunes & infortunes ; tout ce qu’auez veu, ſçeu, cogneu, entendu, & deſſus & deſſous la terre ; au Ciel ſi y auez eſté, ſur les mers, parmi les orages : nommez nous les prouinces, Royaumes, Iſles, Regions qu’auez ſuiuy. Et à peu pres le nom des villes deſquelles voſtre autentique memoire a tenu regiſtre. Panurge. Ca ie le veux : mais il faut treuuer premierement vn ſecretaire pour eſcrire : car il faut en meſme temps, & ainſi me plait, qu’on porte toute l’hiſtoire à Paris comme au cœur de la France, pour eſtre enregiſtree aux Chroniques françoiſes. Ie m’aſſeure que les Imprimeurs ſeront bien aiſes de m’auoir ſur leurs preſſes : & qu’vn chacun ne pouuant voir la face de Panurge rajeuni, voudra ſçauoir ſon hiſtoire, & ſon raieuniſſement. Epiſtem. Si ne tient qu’à cela, nous auons veu en ceſte foire le ieune Polygame, le grand pere duquel fut ſecretaire & Chroniqueur de noſtre bon Roy Panurge. C’eſt vn homme fort capable en matiere d’hiſtoires, nous n’en ſçaurions choiſir au monde vn meilleur. Panur. Qu’on l’enuoye querir. Creophile. Le voicy, tel parle du loup, qu’il le tient par la queüe. Panur. A la bonne heure : eſcriuez Polygame. Et vous mes amis ſoyez attentifs, ayez bonne oreille, & vne memoire ſolide pour entendre & retenir mon diſcours tres veritable.


Comment Panurge partant de Salmigondin pour aller en Phrygie, rencontra Hegemon, lequel voulut eſtre & luy seruir de guide. Leur embarquement au port de Sigee auec le nom des Iſles & mers qu’ils paſſerent, les grands perils & hazards qu’ils ſouffrirent à cauſe des tempeſtes. Et comme Panurge fut ſauue miraculeuſement des flots par vn Dauphin, & porté contre tout eſperance en l’Iſle Imaginaire
Chapitre II.
Panurge.


APres que i’eus mis ordre, comme vous ſçauez en toute ma chaſtelenie de Salmigondin & Dipsoin ; que mes menus affaires furent conclus & rãgez le tout en bon ordre. Apres mille adieux, s’il vous en ſouuient la plus part noyez de larmes d’vn coſté & d’autre : ie me partis tout beau ſeulet à pied ſans lance, & prins le chemin à gauche tirant du coſté de Phrygie. Et pour ne laiſſer rien en arriere, ie n’auois encores cheminé plus d’vn cart de lieuë Italienne, que i’ouys vne voix qui crioit apres moy, Panurge, Panurge, redoublant par pluſieurs fois les meſmes mots ; qui fut cauſe que me tournant ie vis vn homme courant apres moy, auquel parlant ie luy demande : qui esſtes vous mon amy, que me criez vous ? que me voulez vous ? Ie ſuis dit il Hegemon cogneu par tout le monde. C’eſt moy qui meyne, qui conduis, & qui guide toutes bonnes gens au vray chemin où qu’ils aillent, ou qu’ils vueillent aller. Teſmoin m’en ſoit Alexandre le grand, il auoit beau reguingamber en ſon Macedoine, ja ſans moy n’auroit-il veu, ny conqueſté les deux Poles da monde. Eſtiez-vous de ce temps, luy dis-ie ? ouy dit-il, c’est moy-meſme qui le conduiſant le fis eſtre Seigneur de tourte la terre. Retournez vous en mon amy, luy dis-ie, vous n’auez iamais eſté bon guide. Par ſainct bodin, que ie tiens en ma beſace, ie ne me ſçaurois iamais fier à vous, à la fin vous me tromperiez comme vous trompâtes Alexandre. Teſte verde, pourquoy le menaſtes vous en Oxidraque, il y fuſt ſi bien eſtrillé. Hegem, Ce ne fut pas par mon conſeil, ie vous promets que i’eſtois encores endormy ſur le roſty, quand il partit ; ayant la puce à l’oreille gauche. Panurge. Commẽt, n’eſt-il pas bon auoir la puce à l’oreille gauche ? Hegemon, non ma foy, monſieur, il eſt beaucoup meilleur à la droite ; car de ce coſté arriuent toutes bonnes nouuelles & bons preſages. Panurge. Ie ſuis dõc d’auis de chãger la mienne de l’autre coſté, & croirois volontiers ton dire, car non eſt bonum ſignũ » : toute la nuict paſſee elle n’a fait que tintamarrer, i’ay peur que cas ita mal, Dieu le bon Dieu, garde de mal Panurge, & du mauuais preſage des puces. Hegemõ. Ie ſuis celuy qui guidois Iupiter par la mer Pontique, le tenant par vne de ſes cornes, lors que metamorphoſé en taureau, il emportoit la troiſieſme partie da monde, à ſçauoir Europe. Plus ie le guiday dans le bois qu'il y culbuta la fille d’Inache, & en pluſieurs autres lieux, où ie l’ay fait barelicoquer ſon beau plein ſaoul, auec Deeſſes, Demi deeſſes, Nymphes, Driades, Oreades, Hamadriades, & Nanoydes. Et iamais ſans moy il n’auroit de ſon calibis, calibiſtonné Alcmene, d’où ſortit ce muſarno d’Hercule. Panurge. S. Gobelin, tu ne me parles que des culbutades de ce paillard, tu me romps ma deuotion ; fi au diable, ie croi que tu es heretique. Si tu me preſchois guieres tu me ferois damner à plus de cinq charretées des petits diablotins. Fi, fi ; du coton, çà que ie bouche mes oreilles. Hegemon. ha ! pauuret tu me fais pitié, & où voudrois tu aller ainſi, vnicus, ſingularis ? Panurge, per quam regulam, ne vois-tu pas ma gibeſſiere garnie de carrolus, & ce baculum ſenectutis, pour la deffendre. Hegem mais encore, permetez que i'aille auecques vous, où que diable ſoit. Panurge. Ie le veux, à cõdition toutesfois que tu ne me parleras plus de ces ruffiens des dieux que tu dis auoir ſeruis. Mais ie doute encore ; dis-moy, ſerois-tu point ce Mercure conſiſtorial, enuoyé pour enuoyer, de la part de ton paillard, maiſtre Caluin, ie voulois dire Iupin ? Hegem. ha, non ie le vous iure deuant & derriere, par la teſte, & par les pieds, & s’il en eſtoit beſoin, ie ferois icy le ſerment d’Atis, en danger d’auoit vn iour les (vous m’entendez bien) couppez à raſibus, deux doigts pres du fourreau de voſtre nez. Ie ſuis beaucoup plus que ce petit ruffien de Mercure. Et cot noir, ſans moy ce maquereau n’auroit iamais oſé entreprendre ſur Argus à tous ſes yeux de plumes ; ce fut moy qui guiday rhetoriquemẽt le coup de ſon courbé glaiue, deſſous le mentõ du ſurueillant, qui fit bondir ſa teſte en l’air comme ſi ce fuſt eſté la teſte d’vn petit chardõneret. Panurge. Quand i’eus ouy tous ſes diſcours, ie fus d’accord auec luy, à la charge toutesfois qu’il ne me couſteroit qu’vn peu du ſang de ma gibeſſiere. Parquoy apres nous auoir promis & iuré la foy l’vn à l’autre, nous voila en chemin. Et marchant enſemble, ie luy deſcouuris vne partie de mon deſſein. Pour faire court dixneuf iours apres nous arriuames en Phrygie, au port de Sigee, duquel partit autresfois Paris pour aller en Grece rauir Helene. Et là ayant fait aſſemblee des meilleurs Pilotes ; tous ſages & vieillards, ie leur demanday qui d’eux voudroit entreprendre de me conduire aux Iſles Canaries. Soudain ſe preſenterent à moy Glauque, fils de l’autre Glauque, iadis changé en poiſſon, & Polypheme nepueu du Dieu Neptune, deux forts ſages pilotes, & me dirent qu’il n’y auoit qu’eux deux en ces parties capables d’entreprẽdre ce voyage, & me promirent qu’à la bonne heure ils me rendroyent ſain & ſauue aux Canaries. Parquoy me demãdaiẽt comme ſçauans, en quelle des ſept ie voulois prendre terre, & leur ayant dit que c’eſtoit à S. Borondõ, ou Imaginaire, m’aſſeurerent de m’y rendre. Fut queſtion de partir, le vent eſtant fauorable : prouiſion faite pour dix ans, de toutes choses neceſſaires à la pauure nature humaine. On cõmence tout premierement de faire ſacrifice au grand Dieu Neptune, d’vne hecatõbe de forts taureaux, & demy hecatõbe de jeunes geniſſes, pour l’amour d’Amphytrite. Apres cela vous n’euſſiez ouy le ciel tõner à force de canonades, tambours, trompettes, &c. Et deuë colation faite on leue les rames, les voiles ſont dreſſees auec mille cris de ioye, & exclamations d’alegreſſe. Hegemon me promit bonne iſſue de ce nauigage. Nous ſinglames dõc vers la mer Heleſponte où Hegemon me monſtra le paſſage par lequel paſſa Iupiter portant Europe fille d’Agenor. Ainſi trauersant la mer Egée dite l’Archipel, enuirõnames pluſieurs Iſles Ciclades ; laiſſames Nigrepont à dextre & Candice à ſeneſtre, où par ſingularité Hegemon me monſtra vn grand plane ſous lequel (à ce qu’il me dit) Iupiter defflora Europe. En l’archipelague me fut auſſi monſtré le pont qui ioint Negrepont à l’europe baſti sur le canal qui eſt au coſté d’Attique. Et lors que nous aprochames le promontoire de la Malée, Morée, ou cap S. Ange ; ou bien l’Iſle S. Michel, pour crainte des perils qui s’y treuuent ; nous tournames aux ports de Cithærée, oppoſite à la grande cité de Lacedemone, où me furent monſtrees les ruines des deux Cités Citharee, & Chranac, enſemble le temple de Venus iadis tant renõmé pour s’y eſtre ladite Deeſſe apparue premier qu’en autre part du monde. Pres de Chranaé me fuſt auſſi monſtré le lieu où Paris print terre, amenant quant & ſoy la femme de Menelaüs, où il la cogneut pour la premiere fois. Et par ſingularité nous cueilliſmes de l’herbe Helenium, iadis ſortie des yeux de la belle Heleine. Puis prenant le Ponant nous voila en Achaie, à laquelle, comme on dit, Achée fils de Iupiter donna le nom. Ie priay mes pilotes de me faire prendre terre pour aller à Corinthe voir le temple de Venus, & pour achepter quelques choſes neceſſaires à ma ſanté, la mer m’ayant deſia baillé force attaques, & debilité mõ eſtomach, à force de vomiſſement. Puis de là nous fiſmes voile en Delos l’vne des Ciclades, & nous fut monſtré le lieu où Latone accoucha d’Apollon, & Diane, auec pluſieurs autres ſingularites que ie laiſſe pour abreger. Partant de Delos comme nous fuſmes aſſez auant en la mer, voilà vne forte tempeſte qui s’eſleua, Boreas, aquilon cum ſociis eius ſouffloient, petoyent, veſſoyent tant & ſi impetueusement contre noſtre pauure vaiſſeau, que ſans l’aide du bon Dieu, & le ſage gouuernement de Polypheme, qui inuoca son grand oncle Nepetune, coniura Amphitrite ſa tante, & adiura tous les Tritons ; Nous eſtiõs tous perdus : iamais Panurge, le pauure Panurge ne fuſt venu à Beaucaire, c’eſtoit fait de luy, & de toute ſa fortune. Hegemon me iura qu’il auroit voulu eſtre à ces heures deſjeunant de petits paſtez à Salmigondin. Mais comme Dieu n’oublie iamais les ſiens, les vents ayant ceſſé, & la mer s’eſtant rendue bonaſſe ; nous nous trouuames au dela de la ligne equinoctiale, huict degrés du pole Antartique, dixſept degrez & demy du tropique de Capricorne. Lors que Glaugaec eut remarqué l’aſſiete du pays il recogneut que nous ayant eſchappé les orages & tẽpestes de la mer, eſtions tombés en la terre des Margajacs, peuple du tout cruel & barbare, comme ceux qui ſont Antropophages. Helas ! ſi le pauure Panurge fut tombé entre leurs mains, ſans doute il fut eſté boucané ; mais Dieu m’en garentit, comme aurtresfois il m’auoit sorti de la broche tout lardé. Nous euitames ce danger & vinſmes en l’Amerique, qui eſt vn pays fort agreable, l’air y eſtant fort doux, & les gens du tout debonnaires. Ils vont tous nuds tant hommes que femmes ; qui fut cauſe qu’iceux ayant aborde noſtre vaiſſeau pour nous faire vne bien venue, tous nos gens ; ou ie me donne à S. Borondon ; voyant ces jeunes popines ainſi nues, belles, & fraiſches, ne pouuoient depeſtrer leurs yeux de deſſus leurs beautez Ameriquaines, tant que mõ paillard d’Hegemon en ayant ſaiſi vne, choiſie ſur toutes les autres, marchãdoit à leur patois de langage, à combien le picotin de l’auoine . Ce que voyant de peur de quelque trahiſon, apres auoir fait aiguade, & rafrechy nos viures, nous ſinglames en haute mer, & vinſmes en l’Iſle de Cuba, ou Fernandine. La nous fut aduis que le Soleil eclypçoit, pour la multitude des oyſeaux de paſſage, leſquels offuſquoient l’air de l’ombre de leurs aiſles, tenant iceux la route du Nord, au Sud. Sortans de ceſt’Iſle, toſt apres nous entraſmes en la mer herbue sous le tropique de Cancer. Là il nous fallut auoir des coignees au manche long, & autres ferremẽts pour couper ces herbes qui ſont fort eſpaiſſes flottantes ſur la mer, leſquelles empeſchoient le cours de noſtre vaiſſeau, non ſans grand peril. Et lors que nous euſmes franchy ce peril, voila la tempeſte qui ſoudainement ſe leuant en la mer : nous fit toſt recognoiſtre l’inconſtance de ceſt Element : le ciel, la mer & la terre n’eſtoyẽt plus qu’vn ; Tous les elements ſembloyent retourner à leur premier chaos, noſtre vaiſſeau s’attachoit tãtoſt aux cornes de la Lune, & puis ſoudain redeſcendoit iuſques au fonds des abyſmes ; nos patrons ſe rendent à la mercy des vagues, leur ſcience prend fin, le courage leur manque, adieu pauure Panurge. Hegemon criant miſericorde, de peur, de crainte, d’eſtonnement, print vn grand flux de ventre & chia fort copieuſement. L’incagade de Fargueiroles ny de Mornay, ne fut iamais plus copieuſe, l’vne a Niſmes, & l’autre à Fontaine beleau, Tout le monde crie miſericorde, & moy ne voyant aucun ordre dans ce deſordre : ſentant deſia la mort me ſaiſir le colet, noſtre vaiſſeau preſques remply des flots eſcumans, caſſé & briſé de la force des vagues, i’allois exhortãt mes pilotes, & taſchois de leur remettre le cœur au vẽtre, mais en vain, ils eſtoyent froids comme glace. Hegemon n’auoit plus qu’à rendre l’ame. Sur ces entrefaites il me vint en memoire l’hiſtoire de Ionas le Prophete, que i’auois leuë le iour precedent : parquoy me pensa que quelqu’vn de nous deuoit eſtre comme luy la cause de ces orages, & qu’il ſeroit bon de ietter le ſort pour le cognoiſtre, & puis ietter ce mal-heureux en la mer, afin d’apaiſer la tourmente. Ou bien le ſacrifier à Neptune, puis qu’à l’heure nous n’auions point de bœufs, que poſſible il ſe contenteroit d’auoir vn veau pour ceſte fois. Mais voicy le mal-heur ioinct à vne bonne fortune, le ſort tombe ſur le pauure Panurge, tellement que voila Panurge, le pauure Panurge, voſtre camarade Panurge, panurge voſtre bon amy, qui s’eſtant couppé de ſon couſteau, condamné de ſa propre bouche, le voila, le voila mes amis qui s’en va boire à vos bonnes graces. Toutesfois on me donne le chois, ou d’eſtre immolé à Neptune cõme vn veau, ou d’eſtre ietté entre les bras d’Amphitrite. Ie les pria de me donner à ceſte Deeſſe. Tandis le ciel tonnoit, la mer eſcumoit, Apollõ & Diane, de crainte, cõme ie croy, eſtoyent r’entrés au ventre de leur mere Latone. Et tous les Dieux & corps celeſtes. s’eſtoyent retirez ſur le grand Olympe. Deſia Iupiter auoit enuoyé Mercure aſſembler ſon conſeil, croyant que la guerre gigantine ne fut de retour. I’eſtois là à la miſericorde de Dieu & de mes pilotes, & ce qui augmentoit ma douleur, eſtoit que moy meſme eſtois cauſe de mon malheur. Ie me prepare pour boire plus que manger, dis adieu à Hegemon qui pleuroit comme vn veau : Ie prie que s’il ſe ſauue qu’il apporte de mes nouuelles à Salmigõdin & Dipſoin. Et qu’il face entendre ces tristes nouuelles à quelqu’vn de mes camarades croyãt que pour l’amour de moy, il feroit sonner toutes les cloches de Paris. Ces adieux acheués, il me print enuie de faire la mort d’vn Cygne, affin qu’on dit que Panurge auoit eu autant de courage en la mort qu’en la vie. Parquoy ie ſors de ma gibeſſiere mes cymbales, & me mettant ſur le bord du Nauire, commençay à iouër & chanter melodieuſement,

Et le filon, tire lire lire,
Et le filon tire lire bon.

Et puis.

Neptune, grand Dieu de la mer,
Vous qui commandez ſes riuages,
Faites vn peu ſes vents calmer,
Et me gardez de ſes naufrages,
Si i’arriue à Sainct Borondon,
Ie vous donneray mon bourdon.

Et apres encores plus ioyeuſement.

Pauures huguenots que le cœur vous tremble
Quand l’Aigle & le Lys ſe ſont ioints enſemble,
Guerindon, guerindon, guerindaine, guerindon.

Soudain voila vne troupe de Dauphins qui arriuent charmés de ceſte melodie, & cernans noſtre vaiſſeau faiſoient gambades parmy les flots & les vagues, & Panurge touſiours à ioüer & chanter comme deſſus. Tandis on me deçoit, Polypheme me pouſſe par derriere en la mer ; voila le pauure Panurge fricaſſé : faisant bouillõner les ondes beuuant touſiours d’autant. Toutesfois ie iouois touſiours de mes cymbales, ayant perdu ma canterelle, quand voila vn amoureux Dauphin, celuy meſme ( ſi ie ne me trompe) qui auoit sauvé autresfois Ariõ qui me charge ſur ſon eſchine nouãt en plaine mer. Ie fus poſſible dix ans à cheual sur le dos de ce Dauphin ſans prendre terre ioüant touſiours des cymbales. Le vnzieſme ie commençay à deſcouurir Polux & Castor, Heleine eſtant abſente. Ses feux me donnarent preſage que les tempeſtes ceſſeroyent bien toſt, ce qui fut vray ; car toſt apres ie vis le ciel ſerain, la mer demeura calme, à cauſe des Alcions qui pour lors couuoyẽt leurs œufs. I’aperçeu de loin la terre, & y euſſe deſia voula eſtre ; quand mon cheual habile nageur m’y ietta. Et de bonne fortune me treuſuay-je en l’Iſle Imaginaire où tendoit de tout temps mon voyage, ayant ſauué quand & moy, Dieu mercy, ma besace, mon bourdon & ma bouteille, pour ma gibeſſiere elle pendoit touſiours à ma ceinture, croyant que ſi quelque poiſſon la deuoroit, que par hazard on la pourroit treuuer dans ſon ventre, comme fit autresfois Maguelonne le Sendal où eſtoient pliez les bagues deſquelles elle auoit fiancé ſon Pierre de Prouence. Et que tel les recouureroit qui diroit vn In viam pacis, ou vn Requieſcat in pace, pour le pauure Panurge. Mõ Dauphin m’ayant ietté à terre, d’alegreſſe fit trois ou quatre ſoubreſſaux, & me dit adieu & moy à luy, en le remerciant à la pareille. Pour le pauure Hegemon i’en fus long temps en peine, enſemble de mes bons Pilotes, quoy que Polypheme m’eut ietté en la mer. Car i’ay touſiours creu qu’il ne l’auoit fait de malice. Ils arriuerent en fin apres la tẽpeste de l’Iſle de fer vne des Canaries ou fortunées comme i’ay ſçeu en l’autre monde ſains & ſauues Dieu ſoit loüé : il est vray qu’ils furent long temps à chercher l’Iſle Imaginaire, mais leur imagination ne la ſçeut oncques imaginer. Si iamais vous les voyés mes amis, demandez leur des nouuelles, ils vous en diront. Taumaſte. Aportez de pain, de vin, & de viande, hola Madame, & viſte depeſchés-vous courez touſiours, faites toſt, à la haſte, à la faim. Cor noir, Panurge mõ bon amy, vous auez ieuiné dix ans & demy ſauf le droit de plus, encores ne parlez-vous de manger ny de boire. Creophile. mon petit mignõ criez à la faim, à la faim. Panurge. Tout beau Taumaſte, ſçachez qu’vne des filles du grãd Atlas, donna autresfois à ma grãd mere vne riche pomme, & d’admirable vertu, qu’elle auoit cueillie au iardin de ſes ſœurs les heſperides. Sçachez auſſi l’ante qui porte ces põmes, eſt venu du Paradis terreſtre. Aſtolphe leur en auoit donné les greffes : car il y fut du temps qui cerchoit le ſens de Roland deuenu furieux pour l’amour d’Angelique : le Prophete Henoc les luy auoit donnez, & luy auoit apprins la vertu, qui eſt telle que l’homme qui la porte sur soy n’a iamais ny faim ny ſoif, que ſi l’vn ou l’autre luy arriue, en prenant ſeulement l’odeur de ceſte pomme, il ſe trouuera ſoudain guery. Et par droit de ſucceſſion i’ay acquis ceſte pomme, que ie porte touſiours ſur moy. Epistemon. Ce ſont d’autres nouuelles, ça donc continuez s’il. vous plait voſtre hiſtoire.

Panurge continue ſon hiſtoire ; la deſcription de l’Iſle Imaginaire : la peur queut Panurge voyant rajeunir les hommes : & comme Polymnestor le r’aſſeurant, print ſa vie au peril de la ſienne, & le fit ſon hoſte.
Chapitre III.


PAnurge apres auoir touſſi, & craché par cinq ou ſix fois : froté ſon nez auec le bout de la manche, releué la petite mouſtache : continua ſon hiſtoire par la deſcription de l’Iſle Imaginaire comme s’enſuit. Mes tres-chers amis, & feaux camarades ; l’Iſle Imaginaire eſt à quelque cent lieuës des autres Canaries ou fortunees ; ſon aſſiette eſt fort belle, quoy que l’imaginatiõ la rẽde mobile & voltigeãte, comme font les Iſles Calamines en lydie. ou comme les Saltuaires & Balarines en la petite Tartarie ; bref mes amis cet Iſle court auſſi viſte, que l’imagination ; & ne la treuue qui veut, il faut des Dauphins pour s’y conduire : & faut ſçavoir iouer des Cymbales, car ils aiment ceſte ſonnerie, & s’y plaiſent comme i’ay veu, & vous l’auez ouy. Au reſte elle eſt du tout bien peuplee, & les hommes y ſont fort gens de bien. Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/50 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/51 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/52 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/53 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/54 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/55 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/56 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/57 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/58 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/59 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/60 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/61 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/62 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/63 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/64 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/65 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/66 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/67 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/68 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/69 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/70 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/71 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/72 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/73 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/74 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/75 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/76 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/77 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/78 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/79 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/80 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/81 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/82 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/83 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/84 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/85 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/86 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/87 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/88 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/89 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/90 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/91 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/92 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/93 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/94 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/95 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/96 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/97 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/98 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/99 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/100 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/101 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/102 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/103 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/104 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/105 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/106 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/107 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/108 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/109 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/110 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/111 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/112 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/113 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/114 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/115 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/116 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/117 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/118 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/119 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/120 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/121 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/122 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/123 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/124 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/125 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/126 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/127 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/128 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/129 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/130 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/131 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/132 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/133 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/134 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/135 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/136 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/137 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/138 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/139 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/140 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/141 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/142 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/143 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/144 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/145 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/146 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/147 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/148 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/149 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/150 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/151 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/152 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/153 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/154 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/155 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/156 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/157 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/158 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/159 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/160 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/161 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/162 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/163 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/164 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/165 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/166 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/167 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/168 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/169 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/170 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/171 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/172 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/173 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/174 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/175 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/176 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/177 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/178 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/179 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/180 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/181 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/182 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/183 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/184 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/185 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/186 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/187 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/188 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/189 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/190 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/191 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/192 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/193 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/194 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/195 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/196 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/197 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/198 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/199 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/200 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/201 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/202 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/203 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/204 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/205 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/206 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/207 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/208 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/209 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/210 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/211 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/212 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/213 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/214 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/215 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/216 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/217 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/218 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/219 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/220 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/221 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/222 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/223 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/224 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/225 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/226 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/227 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/228 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/229 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/230 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/231 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/232 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/233 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/234 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/235 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/236 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/237 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/238 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/239 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/240 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/241 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/242 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/243 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/244 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/245 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/246 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/247 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/248 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/249 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/250 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/251 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/252 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/253 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/254 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/255 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/256 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/257 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/258 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/259 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/260 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/261 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/262 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/263 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/264 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/265 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/266 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/267 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/268 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/269 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/270 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/271 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/272 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/273 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/274 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/275 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/276 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/277 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/278 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/279 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/280 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/281 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/282 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/283 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/284 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/285 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/286 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/287 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/288 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/289 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/290 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/291 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/292 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/293 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/294 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/295 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/296 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/297 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/298 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/299 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/300 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/301 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/302 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/303 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/304 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/305 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/306 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/307 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/308 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/309 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/310 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/311 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/312 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/313 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/314 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/315 Page:Reboul - Le nouveau Panurge, 1614.djvu/316