Le Père-Lachaise/IX

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Chez l’auteur & Ledoyen & Mansart (p. 73--).

CHAPITRE IX.


Aumôniers attachés à la chapelle. — Arrêté archiépiscopal sur la matière. — Approbation par l’autorité civile. — Exhumations. — Construction de monuments. — Police qui les régit.


L’autorité ecclésiastique, par suite de l’institution des aumôniers des dernières prières dans les cimetières de Paris, a pris l’arrêté suivant :

« Nous, Marie-Dominique-Auguste Sibour, archevêque de Paris ;

« Vu notre lettre du…, etc. ;

« Avons arrêté ce qui suit :

« Art. 1er. Les aumôniers des cimetières seront spécialement et exclusivement chargés de recevoir gratuitement les corps de ceux qui devront être inhumés dans les terrains non concédés, de les conduire jusqu’à la tombe, et de réciter sur eux les dernières prières de l’Eglise.

« Art. 2. Pour avoir droit à ce service gratuit, les familles devront remettre, à leur entrée au cimetière, un certificat de présentation à l’église ; ce certificat sera délivré sur demande dans chaque paroisse.

« Art. 3. Les aumôniers ne devront faire aucune bénédiction de fosse concédée, soit à titre perpétuel, soit à titre temporaire, lors même que les corps ne seraient point accompagnés par le clergé paroissial, excepté dans les cas prévus à l’article suivant.

« Art. 4. Ils seront seuls chargés, dans les cimetières auxquels ils seront attachés, du service des exhumations, ainsi que de la réception et de l’inhumation des personnes étrangères au diocèse de Paris et décédées hors de son territoire ; ils ne pourront cependant prêter leur ministère que sur le vu d’un certificat de présentation à l’église.

« Art. Les familles pourront être admises à faire dire des messes basses dans la chapelle qui existe dans le cimetière de l’Est, et dans celles qui seront construites dans les deux autres du Nord et du Sud ; mais les services anniversaires et solennels, la présentation des corps, à l’exception de ceux apportés des départements, et en général les cérémonies qui appartiennent au service paroissial, n'y pourront avoir lieu. Dans aucun cas, aucune tenture ne pourra être apposée sur les murs ou à l’intérieur de la chapelle.

« Art. 6. L’honoraire des messes basses qui pourront être demandées est fixé à deux francs ; elles seront toujours suivies de la récitation du De profundis, sans qu’il soit permis, dans aucun cas, d’y ajouter d’autres prières, ni l’absoute.

« Art. 7. Le droit à percevoir pour les exhumations est fixé ainsi qu’il suit :

« A l’aumônier 8 fr.
« Au sacristain 1 50 c.
« A l’enfant de chœur 50

Ensemble 10 fr. 00 c.

« Art. 8, Lorsque le corps d’une personne décédée hors du diocèse sera inhumé dans l’un des trois cimetières du Nord, du Sud ou de l’Est, il pourra être célébré un service religieux dans la chapelle de ces cimetières, le corps présent. Ce service sera réglé de la manière suivante, sans qu’il soit permis, sous aucun prétexte, d’y rien changer.


SERVICE NON CHANTÉ.
personnel.
Présence du premier aumônier 3 f. c.
Idem du second aumônier 2 50
Messe basse 3 »
Enfant de chœur 1 »

Total 11 » 11 f. » c.
matériel.
Quatre souches à l'autel 2 »
Quatre souches autour du corps 2 »
Ornements 3 »
Croix et bénitier 2 »

Total 9 » 9 »

Ensemble 20 »
SERVICE CHANTÉ.
personnel.
Présence du premier aumônier 3 f. 50 c.
Idem du second aumônier 3 »
Messe chantée sans diacre ni sous-diacre 5 »
Sacristain 2 »
Deux chantres à 2 fr. 4 »
enfant de chœur 1 50

Total 19 » 19 f. » c.
matériel.
Six souches à l’autel 3 »
Six cierges autour du corps 12 »
Ornements 4 »
Croix et bénitier 2 »

Total 21 » 21 »

Ensemble 40 »


« Si le service religieux a lieu le soir, on chantera ou l’on récitera les vêpres des morts, et, le lendemain, il sera dit, par l’un des aumôniers, une messe pour le défunt. Si la famille du défunt dont le corps est apporté de l’extérieur ne réclame pas le service religieux à la chapelle, et ne demande que la bénédiction de la fosse ou du caveau, le droit à percevoir sera le même que pour une exhumation[1].

« Art. 9. Le casuel provenant des objets matériels fixés au tarif sera versé dans une caisse spéciale confiée au premier aumônier ; il sera affecté aux diverses fournitures du service religieux, à Tachât et à l’entretien des ornements.

« Art. 10. Il est interdit au sacristain et à l’enfant de chœur de rien demander aux familles.

« Art. 11. L’un de nos vicaires généraux est chargé de veiller à l’exécution du présent règlement.

« Fait à Paris, le 9 juin 1852. »

Ce règlement a été approuvé par décret impérial du 28 octobre de la même année 1852.

Le titre XI du règlement de M. le préfet de la Seine, en date du 13 septembre 1850, dispose :

« Art. 79. Aucune exhumation ne pourra avoir lieu, sans qu’au préalable on ait représenté une autorisation de M. le préfet de police.

« Les fossoyeurs, dans l’exécution des fouilles nécessaires pour opérer ces exhumations, auront soin de ne point mettre à découvert les corps voisins.

« Art. 80. Les exhumations seront opérées à des jours fixés à l’avance pour chaque cimetière. Il devra y être procédé de grand matin, en présence des seules personnes ayant qualité pour y assister[2].

« Art. 81. Les dispositions des deux articles précédents ne sont pas applicables aux exhumations ordonnées par l’autorité judiciaire.

« Art. 82. Sous aucun prétexte il ne sera accordé la permission de réinhumer en fosse commune, ou dans une fosse temporaire, un corps inhumé précédemment dans un terrain concédé à perpétuité.

« Art. 83. Les frais de chaque exhumation sont à la charge des fa « milles. Le tarif en est fixé à la somme de dix francs, qui sera répartie entre les agents et fossoyeurs, pour leurs vacations et salaires, dans les proportions qui sont fixées par un arrêté spécial. Les familles supporteront, en outre, la dépense résultant du renouvellement du cercueil.

« Il ne sera payé que ladite somme de dix francs pour toute fosse ou « verte, lors même qu’elle contiendrait les restes de plusieurs corps, si ces mêmes restes sont à l’instant réinhumés dans une même fosse ou un nouveau caveau.

« Art. 84. Il sera payé, pour salaire du fossoyage, une somme de trois francs par chaque inhumation faite dans les circonstances prévues au § 2 de l’article 3[3].

Donc une exhumation avec cérémonie religieuse coûterait :

Les frais détaillés art. 7 de l’arrêté archiépiscopal 10 fr.
Au conservateur, arrêté de M. le préfet de police du 27 mai 1850 5 fr. 10
Au fossoyeur 5

Total 20 fr.

Plus, la fourniture du cercueil, selon le choix qu’on en ferait, d’après les tarifs sur cette matière, page 48.

Mais, pour procéder à une pareille opération, il faut : 1o une autorisation émanée de M. le préfet de police, sur la demande faite par le plus proche parent du défunt ou par un fondé de pouvoir, et légalisée par le maire ou par le commissaire de police, auquel on justifiera de la qualité en vertu de laquelle la demande est faite ; 2o en ce qui concerne les cimetières de Paris, la justification d’un titre de concession perpétuelle délivré par M.le préfet de la Seine. (Arrêté de M. le préfet de police du 3 novembre 1852.)

L’inhumation d’un corps apporté de l’étranger ou des départements ne peut avoir lieu sans l’autorisation de M. le préfet de police.

Il en est de même du transport d’un cimetière dans un autre et du dépôt de corps soit dans une église, soit dans un lieu particulier (ibid.).

Une décision du 13 mars 1844 dispose que le transport, hors le ressort de la préfecture de police, des corps des personnes décédées récemment, est soumis aux conditions suivantes :

1o Le corps doit être renfermé dans un cercueil de bois de chêne, dont les compartiments auront 4 centimètres d’épaisseur, seront fixés avec des clous à vis et maintenus par trois frettes en fer serrées à écrous.

2o Quand le trajet à parcourir excédera 200 kilomètres, le corps devra être placé dans un cercueil en plomb, renfermé lui-même dans une bière en chêne. Le cercueil en plomb sera alors confectionné avec des feuilles de plomb laminé de 2 millimètres d’épaisseur au moins, et solidement soudées entre elles. Le cercueil de plomb pourra également être exigé même pour des distances moindres, toutes les fois que des circonstances exceptionnelles rendront cette mesure nécessaire.

3o Dans tous les cas, le fond du cercueil contenant le corps devra être rempli par une couche de 6 centimètres d’un mélange pulvérulent composé d’une partie de poudre de tan et de deux parties de charbon pulvérisé. Le corps devra être ensuite entièrement couvert de cette même poudre, avant la fermeture de ce cercueil.

Terminons cette notice par ce qui concerne le mode de construction et la police des monuments et caveaux sur les terrains concédés à perpétuité.

Comme nous l’avons dit, page 20, toute personne qui possède un terrain perpétuel dans l’un des cimetières peut y construire un caveau de famille et y élever un monument, qui devra porter en lettres visibles la date et le numéro de la concession.

Lorsqu’il y aura construction de caveau avec cases, la dalle de fond de la case supérieure devra être placée à 1 mètre 50 centimètres au moins en contre-bas du niveau du sol.

L’entrée des caveaux doit être disposée de manière à pouvoir s’ouvrir et se fermer dans les limites mêmes de la concession, sans qu’on puisse établir cette entrée par anticipation sur les chemins ou espacements (Art. 57 du règlement du 14 septembre 1850).

Avant d’entreprendre une construction de caveau ou de monument, le concessionnaire doit en faire la déclaration au bureau du conservateur du cimetière, qui la reçoit sur un registre à ce destiné, et qui remet au déclarant un permis de souille, indiquant la situation du terrain et la quantité acquise, le nom du concessionnaire et la nature des travaux à exécuter. Ce permis reste aux mains de l’entrepreneur, qui doit le représenter aux agents, à toute réquisition.

Le concessionnaire doit se renfermer dans les strictes limites de sa concession. S’il lui arrivait d’anticiper soit au-dessus, soit au-dessous du sol, il se verrait faire défense de continuer les travaux, soit par le conservateur, soit par le géomètre, qui, en ce cas, requerraient, s’il en était besoin, la force publique. Les travaux ne pourraient être repris que s’il obtenait la concession du terrain anticipé ; autrement la démolition en serait requise par les voies de droit.

Le minimum de l’ouverture de tout caveau ou chapelle est fixé à 65 centimètres, et si un sarcophage terminait le caveau à la surface du sol, l’ouverture devra en outre présenter 80 centimètres de hauteur. (Art. 58, ibid.).

Les fouilles doivent être entourées par les soins des concessionnaires, afin d’éviter les accidents qui pourraient en résulter pour les personnes qui visitent et fréquentent les cimetières (Art. 59, ibid.).

Si les sépultures devaient être établies dans l’épaisseur des talus, les conditions en seraient réglées par l’autorité préfectorale, qui seule délivrerait l’autorisation(Art. 60, ibid.).

S’il s’agissait d’un terrain en déclivité, les concessionnaires devraient pourvoir, à leurs frais, à la construction des murs de soutènement jugés nécessaires par l’administration pour la solidité des édifices et la régularité des concessions.

Si l’administration avait fait faire ces murs par anticipation, le coût lui en serait remboursé par le concessionnaire, pour la partie le concernant ; mais, avant la livraison, il devrait être prévenu de ce qui pourrait lui incombera ce sujet (Art. 61, ibid.).

Si la concession devait avoir lieu sur la première ligne de l’allée principale, devant la chapelle du Père-Lacliaise, elle devrait être autorisée par le préfet (Art. 62).

Une tolérance de 20 centimètres est accordée en dehors du terrain concédé à perpétuité, comme empiétement souterrain ; il en sera de même au-dessus du sol, dans le cas de construction de monument.

Lorsque les fondations auront été faites en meulières ou moellons, elles devront être couronnées par un fort dallage en granit ou pierre dure, taillé en forme de caniveau, engagé sous le monument ; mais suivant, en toutes circonstances, l’inflexion du sol.

Les corniches et entablements en saillies sont tolérés, pourvu qu’ils n’excèdent pas 15 centimètres, et qu’ils soient à une hauteur de 2 mètres au moins, à partir du sol ; il en est de même des patères et porte-couronnes. Le tout est autorisé au bureau de la conservation, sur les notes du géomètre.

Les concessionnaires seront tenus de se conformer, en tout temps, aux dispositions qui pourraient leur être prescrites postérieurement même à l’établissement desdites constructions. Les gouttières en plomb ou zinc, ainsi que tous autres détails d’architecture formant saillie sur les entablements ou corniches, sont prohibés (Art. 63, ibid.).

La taille et le sciage des pierres doivent avoir lieu avant leur entrée au cimetière, et les portiers ne laissent entrer aucune pierre qu’elle ne soit prête à être mise en place. Ils refusent également l’introduction de tout outil propre au sciage[4]. La chaux doit être éteinte avant son entrée (Art. 64, ibid.).

Les matériaux et les terres provenant des fouilles, qui ne pourront être déposés sur le terrain concédé, le seront dans l’endroit désigné par le conservateur. Ce dépôt ne pourra durer plus de trois jours. Ces terres seront ensuite conduites, sans délai, dans la décharge publique établie soit dans le cimetière, soit hors de son enceinte. Tous les débris devront ensuite être enlevés avec soin, afin que la place reste nette et libre comme avant la construction (Art. 65 et 68, ibid.).

Tous les échafaudages devront être disposés de manière à ne point nuire aux constructions voisines, ni aux plantations. Aucun dépôt, même momentané, ne peut être fait sur les tombes riveraines, soit de matériaux, outils, terre et autres objets. Les signes funéraires ne pourront, sous aucun prétexte, être déplacés pour les constructions voisines, sans l’autorisation de leur propriétaire et de l’administration (Art. 65, ibid.).

Les ouvriers ne doivent déposer aucune ordure dans le cimetière où ils travaillent, sous peine d’expulsion et de poursuites (Art. 70, ibid.).

Les travaux ne peuvent avoir lieu les dimanches et fêtes, à moins d’urgence et sur l’autorisation préfectorale, ou sur celle de l’inspecteur (Art. 28).

Les plantations d’arbres et arbustes doivent être disposées de manière à ne point gêner la surveillance et le passage ; autrement elles devraient être abattues à la première réquisition. Elles ne doivent pas non plus faire empiétement sur les concessions voisines (Art. 73).

Les entourages sur la fosse commune ne peuvent excéder lm, 50 de longueur sur 65 centimètres de largeur.
  1. Ce droit est fixé à 10 fr., détaillés article 7.
  2. Ces exhumations se font, au Père-Lachaise, les mercredi et samedi ; à Montmartre, les mardi et vendredi, et au Montparnasse, les lundi et jeudi ; savoir : du 1er octobre au 1er avril, depuis 7 heures et demie du matin, et du 1er avril au ler octobre, depuis 6 heures du matin (Arrêté de police du 27 mai 1850).
  3. Ce paragraphe porte : Toutefois, les corps des personnes étrangères à la ville de Paris, et décédées hors de ses murs, pourront être également inhumés dans ces cimetières ; mais seulement dans les terrains concédés à titre perpétuel.
  4. De nombreux chantiers sont ouverts aux abords des cimetières. Nous croyons être utile à nos lecteurs en leur donnant, en tête de ce volume, les noms des entrepreneurs auxquels ils peuvent s’adresser en toute confiance, dans le cas où ils n’auraient pas recours au ministère de l’architecte. Les grandes connaissances acquises à ces personnes, par suite de l’exécution de nombreux travaux, les mettent à portée de renseigner, d’une manière très-exacte, les familles sur tout ce qu’elles ont à faire.