Le Parnasse contemporain/1869/À un poëte

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Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]II. 1869-1871 (p. 138-139).


A UN POËTE


Rien n’est plus ennuyeux que ces villes banales
Débitant le soleil à faux poids, ou des eaux
Qui doivent aciérer nos muscles & nos os,
Pays d’albums usés, stations hivernales.

Des princes vagabonds illustrent leurs annales ;
Les hôteliers hargneux combinent des réseaux,
Et l’on voit fuir au loin la joie & les oiseaux
Devant de laids bourgeois livrés aux saturnales.


Mais qu’un jour, le hasard, généreux quelquefois,
Fasse se rencontrer dans ces hôtelleries
Deux amoureux de vers & de rimes fleuries,

Tout s’égaye aussitôt : on voit germer des bois
Sur le trottoir fangeux, & les Muses fidèles
Font taire tous les bruits épars à grands coups d’ailes.