Le Piccinino/Chapitre 18

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Le Piccinino
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XVIII.

LES MOINES.

Combien de minutes, ou de secondes seulement, s’écoulèrent pendant que Michel fut plongé dans cet accablement insurmontable, il n’en eut pas conscience. La force de l’imagination, rapidement emportée dans le domaine des songes, fait tant de chemin et franchit tant tant d’obstacles d’un seul bond, que le temps ne peut plus lui servir de mesure, surtout dans le premier sommeil.

Michel fit un rêve étrange. Une femme entrait doucement dans la grotte, elle s’approchait de lui, elle se penchait sur son visage, elle le contemplait longtemps ; il sentait sa respiration embaumée caresser son front, il croyait sentir aussi la chaleur de son regard attaché sur lui avec passion. Mais il ne pouvait la voir, il faisait nuit dans la grotte, et, d’ailleurs, il lui était impossible de soulever ses paupières appesanties ; mais c’était Agathe : le sein de Michel, embrasé par la présence de cette femme, le lui disait assez.

Enfin, comme il essayait de s’éveiller pour lui parler, elle posa ses lèvres fraîches et douces sur son front, et y imprima un baiser si long, mais si léger, qu’il ne trouva pas la force d’y répondre, vaincu qu’il était par la joie, et en même temps par la crainte que ce ne fût un rêve.

« Mais c’est un rêve en effet, hélas ! ce n’est qu’un rêve. » se disait-il tout en dormant ; et pourtant, la crainte de s’éveiller fit qu’il s’éveilla. C’est ainsi que, dans le sommeil, le désir instinctif et violent de prolonger l’illusion la fait envoler plus vite.

Mais quel rêve étrange et obstiné ! Michel, les yeux ouverts, et à demi soulevé sur son bras tremblant, vit et entendit fuir cette femme. Le rideau qui ornait l’entrée de la grotte étant baissé, il ne put distinguer qu’une forme vague ; il sentit le frôlement d’une robe de soie ; le rideau s’entr’ouvrit et se referma si vite qu’il lui sembla que le fantôme le traversait, sans y toucher.

Il fit un mouvement pour le suivre ; mais tout son sang refluait vers son cœur avec tant de violence qu’il ne put se soutenir, et, forcé de retomber sur le divan, ce ne fut qu’au bout d’une minute environ qu’il put se précipiter vers la portière de velours bleu qui le séparait de la salle.

Il l’entr’ouvrit d’une main convulsive, et se trouva en face de son père, qui lui dit d’un air riant et tranquille : « Il me paraît que nous avons fait un somme, enfant ? Maintenant, tout est rangé, allons-nous-en voir si la petite Mila est éveillée chez nous.

― Mila ? s’écria Michel, Mila est-elle ici, mon père ?

― Il se pourrait bien qu’elle ne fût pas loin, répondit le vieillard. Je parie qu’elle n’a pas fermé l’œil de la nuit ; elle avait tant d’envie de venir voir le bal ! Mais je lui avais défendu de sortir avant qu’il fît grand jour.

― Il fait grand jour, en effet, dit Michel, et Mila doit être ici ! Mon père, dites-moi, une femme, ma sœur, peut-être, vient d’entrer dans la grotte ?

― Tu as rêvé cela ? je n’ai vu personne. Il est vrai que je n’ai pas eu les yeux toujours attachés de ce côté, et que j’ai vu rôder dehors des jupons bariolés qui m’annoncent que de jeunes curieuses ont pénétré dans les jardins. Mila serait-elle entrée jusqu’ici pendant que j’avais le dos tourné ?

― Mais, à l’instant même, mon père, comme vous approchiez de ce rideau, quelqu’un en sortait, une femme… j’en suis certain !

― Pour le coup, tu divagues, car je n’ai vu que mon ombre sur ce rideau. Allons, tu as besoin d’un bon somme, rentrons. Voici la dernière porte qui va se fermer. Si ta sœur est par là, nous la retrouverons bien. »

Michel s’apprêta à suivre son père ; mais quelque chose qu’il vit briller dans la grotte, au moment de s’en éloigner, l’engagea à y jeter un dernier regard. Était-ce une étincelle tombée sur le tapis, auprès du divan ? Il se baissa : c’était un bijou qu’il examina au jour après l’avoir ramassé. C’était le médaillon d’or entouré de brillants et orné du chiffre de la princesse, que celle-ci avait donné à Mila. Il l’ouvrit pour bien s’assurer que c’était le même. Il y reconnut une mèche de ses propres cheveux.

« Je savais bien que Mila était entrée dans la grotte, dit-il à son père en s’avançant vers le jardin ; elle m’a donné un baiser qui m’a réveillé.

― Apparemment, Mila est entrée dans la grotte, répéta Pier-Angelo avec insouciance. Mais je ne l’ai point vue. »

Au même instant, Mila sortit d’un massif de magnolias, et s’avança en riant et en sautant au-devant de son père, qu’elle embrassa tendrement ainsi que Michel.

« Il est bien temps de venir vous reposer, dit-elle ; je venais vous dire que votre déjeuner vous attend. J’étais impatiente de vous revoir ! Êtes-vous bien fatigué, pauvre père ?

― Pas du tout, répondit le bonhomme, je suis habitué à ces choses-là, et une nuit blanche n’est que plaisir quand on soupe jusqu’au matin. Ton déjeuner aura tort, Mila ; mais voici ton frère qui dort debout. Allons, enfants ! sortons, voilà qu’on ferme aussi les grilles du jardin. »

Mais, au lieu de continuer à fermer les grilles, les portiers du palais se mirent à les rouvrir toutes grandes, et Michel vit entrer une procession de moines de divers ordres, portant tous des besaces et des escarcelles : c’étaient les frères quêteurs de tous les ordres mendiants, qui ont de nombreux établissements à Catane et dans les environs. Ils venaient faire leur ronde et recueillir les restes de la fête pour leurs couvents respectifs. Il en passa lentement une quarantaine ; la plupart avaient un âne pour emporter le produit de leur quête. Leur attitude obséquieuse et leur démarche solennelle, lorsqu’ils franchirent la grille, escortés de leurs baudets, hôtes étranges d’une matinée de bal, avaient quelque chose de si imprévu et de si comique, que Michel, distrait de son émotion, eut beaucoup de peine à s’empêcher de rire.

Mais, à peine ces capucins furent-ils entrés dans le jardin, que, rompant leurs rangs, et secouant leur mine empesée et discrète, ils se mirent à courir vers la salle de bal, qui poussant son voisin pour le devancer, qui battant son âne pour le faire marcher plus vite, tous se hâtant, se disputant la place, et laissant voir leur convoitise et leur jalousie. Ils se répandirent dans la salle de bal, dont ils forcèrent presque les portes fragiles, et tentèrent de monter le grand escalier du péristyle, ou de s’introduire dans les cuisines. Mais le maître d’hôtel et ses officiers, préparés à l’assaut, et connaissant leurs allures, avaient barricadé avec soin toutes les issues, et apportèrent leur pitance, qui fut distribuée avec autant d’impartialité que possible. C’étaient des plats de viande, des restes de pâtisserie, des cruches de vin, et jusqu’à des débris de verres et de porcelaines qui s’étaient brisés durant le service, et que les bons frères recueillaient avec soin et raccommodaient ensuite avec art pour en orner leurs buffets ou les revendre aux amateurs. Ils se disputaient le butin avec peu de discrétion, et reprochaient aux domestiques de ne pas leur donner tout ce qui leur revenait de droit, de traiter l’un mieux que l’autre, de manquer de respect au saint patron du couvent. Ils les menaçaient même des infirmités que ces saints étaient réputés guérir spécialement quand on se les rendait favorables.

« Fi ! le pauvre jambon que tu me donnes ! s’écriait l’un. Tu es déjà sourd d’une oreille, tu peux bien compter qu’avant peu l’autre n’entendra pas le tonnerre.

― Voici une bouteille à moitié vide, criait l’autre. Il ne sera pas fait de prières pour toi chez nous, et tu ne guériras jamais de la pierre, si tu prends cette vilaine maladie. »

D’autres mendiaient gaiement avec des lazzis qui faisaient rire les distributeurs, et montraient tant d’esprit et de bonhomie que les valets leur glissaient de meilleures parts en cachette des autres frères.

Michel avait vu à Rome de beaux capucins, parfumés sous leur froc, et traînant avec une solennité poétique leurs sandales tout auprès de la pantoufle sacrée du saint-père. Les pauvres moines de Sicile lui parurent bien malpropres, bien grotesques et tant soit peu cyniques, lorsqu’ils s’abattirent, comme une nuée de corbeaux avides et de pies babillardes, sur les miettes de ce festin. Cependant, quelques-uns lui plurent par leur physionomie hardie et intelligente. C’était encore le peuple sicilien sous la bure du cloître, noble race que le joug fait plier et ne peut jamais rompre.

Le jeune artiste était rentré dans la salle de bal pour assister à ce curieux spectacle, et il en observait les incidents avec l’attention d’un peintre qui fait son profit de tout. Il remarqua surtout un de ces moines qui avait le capuchon rabattu jusque sur le bout de sa barbe, et qui ne mendiait pas. Il s’éloignait des autres et se promenait dans la salle, comme s’il se fût plus intéressé au local de la fête qu’au profit qu’il pouvait en retirer. Michel essaya plusieurs fois d’apercevoir ses traits, et de juger, à sa physionomie, si l’intelligence d’un artiste ou les regrets d’un homme du monde se cachaient sous ce froc. Mais ce ne fut qu’une seule fois, et à la dérobée, qu’il put le voir écarter son capuchon, et il fut frappé de sa laideur repoussante. Au même instant, les yeux du moine se portèrent sur lui avec une expression de curiosité malveillante, et s’en détournèrent aussitôt, comme si cet homme eût craint d’être surpris en examinant les autres.

« J’ai déjà vu cette laide figure quelque part, dit Michel à sa sœur, qui se tenait près de lui.

― Tu appelles cela une figure ? répondit la jeune fille. Je n’ai vu qu’une barbe de bouc, des yeux de chouette et un nez qui ressemble à une vieille figue écrasée… Tu ne feras pas son portrait, j’espère ?

― Mila, tu connais, disais-tu tout à l’heure, plusieurs de ces moines pour les avoir vus quêter dans le faubourg : n’as-tu jamais rencontré celui-ci ?

― Je ne le crois pas ; mais, si tu es désireux de savoir son nom, ce sera très-facile, car voici un frère qui me le dira. »

Et la jeune fille courut à la rencontre d’un moine qui arrivait le dernier, sans besace et sans âne, avec une petite escarcelle seulement. C’était un grand et bel homme, entre deux âges ; sa barbe était encore noire comme de l’ébène, quoique sa couronne de cheveux commençât à blanchir. Le noir de ses yeux vifs, la noblesse de son nez aquilin et le sourire de sa bouche vermeille, annonçaient une belle santé jointe à un caractère heureux et ferme. Il n’avait ni la maigreur maladive ni l’obésité ridicule de la plupart de ses confrères. Son vêtement marron était propre, et il le portait avec une certaine majesté.

Ce capucin gagna, dès les premiers regards, la confiance de Michel ; mais il fut subitement courroucé de voir Mila sauter presque à son cou, et lui prendre la barbe dans ses deux petites mains, en riant et en feignant de vouloir l’embrasser malgré lui.

« Allons, petite, modère-toi, dit le frère en la repoussant avec une douceur paternelle. J’ai beau être ton oncle, on ne doit pas embrasser un moine. »

Michel se souvint alors du capucin Paolo-Angelo, dont son père lui avait si souvent parlé, et qu’il n’avait encore jamais vu. Fra-Angelo était, par le sang comme par le cœur, le frère de Pier-Angelo. C’était le plus jeune des oncles de Michel. Son intelligence et la dignité de son caractère faisaient l’orgueil de la famille, et, dès que Pier-Angelo l’aperçut, il courut prendre Michel pour le lui présenter.

« Frère, dit le vieil artisan en serrant cordialement la main du capucin, donne ta bénédiction à mon fils ; je l’aurais déjà conduit à ton couvent pour te la demander, si nous n’eussions été occupés ici un peu au delà de nos forces.

― Mon enfant, répondit Fra-Angelo en s’adressant au jeune homme, je te donne la bénédiction d’un parent et d’un ami ; je suis heureux de te voir, et ta figure me plaît.

― C’est bien réciproque, lui dit Michel en mettant sa main dans celle de son oncle. »

Mais, pour lui témoigner son affection, le bon moine, qui avait les muscles d’un athlète, lui serra les doigts si fort que le jeune artiste crut un instant les sentir brisés. Il ne voulut pas avoir l’air de trouver cette caresse trop rude ; mais la sueur lui en vint au front, et il se dit en souriant qu’un homme de l’étoffe de son oncle le capucin était plus propre à exiger l’aumône qu’à la demander.

Mais, comme la force est presque toujours unie à la douceur, Fra-Angelo s’approcha de l’élémosinaire du palais avec autant de retenue et de discrétion que ses confrères y avaient mis d’ardeur et d’insistance. Il le salua d’un sourire, lui ouvrit son escarcelle sans daigner tendre la main, et la referma sans regarder ce qu’on y avait mis, en murmurant une formule de remercîment très-laconique, après quoi il revint vers son frère et son neveu, refusant de se charger de vivres d’aucune espèce.

« En ce cas, lui dit un valet fort dévot en s’approchant de lui, vous n’avez pas reçu assez d’argent !

― Vous croyez ? répondit le moine. Je n’en sais rien. Quoi que ce soit, il faudra bien que le couvent s’en contente.

― Voulez-vous que j’aille réclamer pour vous, mon frère ? Si vous voulez me promettre de prier pour moi tous les jours de cette semaine, je vous ferai donner davantage.

― Eh bien, ne prends pas cette peine, repartit en souriant le fier capucin ; je prierai pour toi gratis, et ma prière en vaudra mieux. Ta patronne, la princesse Agathe, fait bien assez d’aumônes, et je ne viens chez elle que pour obéir à ma consigne.

― Mon oncle, dit la petite Mila en lui parlant bas, il y a là-bas un frère de votre ordre dont la figure tourmente mon père et mon frère. Ils trouvent qu’il ressemble à un autre.

― À un autre ? Que veux-tu dire ?

― Regarde-le, répondit Pier-Angelo. Michel a raison, il a une mauvaise figure. Tu dois le connaître. Il se tient là-bas tout seul, sous l’estrade des musiciens.

― À sa taille et à sa démarche, je ne le reconnais pour aucun frère de mon couvent. Pourtant, il a la robe d’un capucin. Mais en quoi cela peut-il vous intéresser ?

― C’est que nous trouvons, répondit Pierre en baissant la voix, qu’il ressemble à l’abbé Ninfo.

― En ce cas, allez-vous-en, dit vivement Fra-Angelo ; moi, je vais lui adresser la parole, et je saurai bien ce qu’il est et ce qu’il vient faire ici.

― Oui, oui, partons, répondit Pier-Angelo. Enfants, passez devant. Je vous suis. »

Michel prit le bras de sa sœur sous le sien, et fut bientôt sur le chemin de Catane.

« Il paraît, dit Mila à son frère, que cet abbé Ninfo nous en veut et peut nous faire du mal ? Sais-tu pourquoi, Michel ?

― Pas très-bien ; mais je me méfie d’un homme qui se déguise, apparemment pour espionner. Que ce soit à propos de nous ou de tout autre, le mystère cache ici de mauvais desseins.

― Bah ! dit l’insouciante Mila après un moment de silence, ce n’est peut-être qu’un moine comme les autres. Il se tenait à l’écart et furetait dans les coins, comme quelques-uns font souvent après le passage des foules dans les processions et les fêtes, pour voir s’ils ne trouveraient pas quelque bijou perdu… Alors, ils le ramassent sans rien dire, et portent cela à leur couvent, pour le rendre, moyennant une ou deux messes bien payées, ou pour découvrir quelque secret d’amour ; car ils sont, en général, assez curieux, ces bons pères !

― Tu n’aimes pas les moines, Mila ? Tu n’es qu’à demi Sicilienne.

― C’est selon. J’aime mon oncle et ceux qui lui ressemblent.

― À propos ! reprit Michel, ramené par le mot bijou perdu à l’aventure dont les capucins l’avaient distrait ; tu étais entrée dans la salle du bal avant le moment où je t’ai rencontrée dans le jardin ?

― Non, répondit-elle ; si tu ne m’y avais fait entrer pour assister à la quête, je n’y aurais pas songé. Pourquoi me demandes-tu cela ? J’avais vu la salle terminée avant la fête. Que m’importe une salle vide où l’on ne danse pas ? C’est le bal, et la danse, et les toilettes, que j’aurais voulu voir ! Mais tu n’as pas voulu m’emmener seulement à la porte, cette nuit !

― Pourquoi ne pas me dire la vérité, lorsque le fait n’a aucune importance ? Il n’y a rien d’étonnant, chère petite sœur, à ce que tu sois venue tout à l’heure me réveiller dans la grotte de la Naïade.

― Mon père dit que tu dors debout, Michel, et je vois bien qu’il dit vrai. Je te fais serment que, depuis hier matin, lorsque je t’ai apporté les feuillages que tu m’avais demandé de cueillir, je ne suis pas entrée dans la grotte.



Le lendemain matin, on trouva Ercolano assassiné… (Page 42.)

― Ah ! Mila, c’est trop fort. Tu n’étais pas menteuse autrefois, et je suis fâché de te voir ce vilain défaut maintenant.

― Taisez-vous, frère, vous m’offensez, dit Mila en retirant son bras avec fierté. Je n’ai jamais menti, et je ne commencerai pas aujourd’hui pour vous faire plaisir.

― Petite sœur, reprit Michel en se rapprochant d’elle et en doublant le pas pour la suivre, car elle s’en allait en avant, piquée et affligée, voulez-vous bien me montrer le bijou que madame Agathe vous a donné ?

― Non, maître Michel-Ange, répondit la jeune fille ; vous n’êtes pas digne de le regarder. Dans le temps où je coupais vos cheveux pour les porter sur mon cœur, vous n’étiez pas méchant comme vous l’êtes devenu depuis.

― À votre place, j’ôterais le médaillon de mon sein, dit Michel avec ironie, et je le jetterais tout de suite au nez du méchant frère qui me tourmente de la sorte.

― Tenez ! le voilà ! dit la petite fille en saisissant dans son corset le médaillon, et en le remettant à Michel avec dépit ; vous pouvez reprendre vos cheveux, je n’y tiens plus. Seulement, rendez-moi le bijou : j’y tiens, parce que c’est le don d’une personne meilleure que vous.

― Deux médaillons semblables ! se dit Michel en les réunissant dans sa main : est-ce la suite de ma vision ? »