Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ12-2.

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Traduction par James Darmesteter.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21)p. 122-125).




HA 12, 8 ; 18 (SP. 13, 27 ; 14). — ÂSTUYÊ



8 (27) Àstuyê. Je loue la bonne pensée, je loue la bonne parole, je loue la bonne action ; je loue la bonne Religion de Mazda, qui repousse les querelles et fait baisser les armes 23 23.[1] ; qui suit le Hvaêtvadatha ; qui est sainte 24[2] ; qui est la plus grande, la meilleure, la plus belle des créatures, présentes, [passées] 25[3] et futures ; qui est suivante d’Ahura, suivante de Zarathushtra.

A Ahura Mazda je fais goûter toutes les choses bonnes 26[4].

Voilà la louange (âstûitish) de la Religion de Mazda 27[5].
G. XIII, 1 (Sp. XIV, 1). — 1. Je proclame Ahura Mazda Ratu du chef de maison 1[6], Ratu du chef de bourg, Ratu du chef de district, Ratu du chef de pays.

Je proclame Ratu des femmes la Religion Mazdéenne 2[7], Ashi Vanuhi 3[8], et Pârendi 4[9], et la Femme sainte 5[10], et la Terre qui nous porte 6[11].
2 (4). Je proclame le Feu d’Ahura Mazda Ratu de l’ami qui t’incarne le mieux 7[12].

Je proclame Ratu du laboureur 8[13] celui qui parmi les gens de bien peine le plus et laboure le mieux 9[14].

Je proclame Ratu du guerrier celui qui manie le plus légèrement l’arme pour la bonne cause 10[15].
3 (7). Je proclame Ratu du prêtre celui qui connaît le mieu 11[16] la Religion mazdéenne et qui l’enseigne [le mieux].
J’établis pour Ratus les Amesha-Speñtas et les Saoshyants 12[17] les plus sages 13[18] les plus véridiques, les plus empressés 14[19], les plus intelligents 15[20].

Je proclame la plus haule puissance de la Religion mazdéenne 16[21] Ratu du Prêtre, du Guerrier et du Laboureur.
4 (10). O Amesha-Speñtas, bons souverains et bienfaisants, je vous donne ma vie ; je vous donne tous les biens de la vie 18[22].


Zôt et Râspî ensemble ;


(12). Les deux Esprits ont pensé, ont parlé, ont agi :



5 (13) 18[23] « mais comme toi, Ahura Mazda, n’as pensé, n’as dit, n’as donné et n’as fait que le bien, ainsi te donnons-nous [le bien], ainsi l’enseignons-nous [aux autres], ainsi t’adorons-nous en t'abordant [avec le bien] ; ainsi te prions-nous [pour le bien], ainsi te mettons-nous en dette pour [le bien], ô Mazda Ahura !
Le Zôt.


6 (16). « Nous venons à toi, t’appartenant comme à un bon parent, appartenant à la bonne Sainteté, à la bonne Maîtrise, à la bonne Armaili. »


7 (18). Nous sacrifions àlaFravashi du Bœuf bienfaisant et du saint Gayô Mare tan 19[24].

Nous sacrifions à la Vertu et à la Pravaslii de Zaralhushlra, le saint d’ici bas 20[25].

Yênhê hâtâm 21[26]. Celui et ceux dont le culte, Ahura Mazda le sait, donne le bien aux êtres, en retour de leur sainteté, à ceux-là — à eux et à elles — nous offrons le sacrifice.


Le Zôt et le Hàspi ensemble ;


Yathâ ahû vairyô (4 fois).


En récitant les deux premiers Ahunvar, le Zôt prend les deux extrémités de l’Evanghin du Barsom et fait deux nœuds droits à la façon de ceux du kosti. Puis il récite les deux autres Ahunvar.


Ashem vohû (3 fois).


8. Nous sacrifions à l’Ahuna Vairya.

Nous sacrifions à l’Ashem 23[27], très bon, très beau, immortel, bienfaisant.

Nous sacrifions au Hà de la Profession de Foi 24[28].

Nous sacrifions à la Profession et la Louange de la Religion mazdéenne 25[29].

Yêńhê hâtâm.




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a


    à-dire son maître, son chef (page 7). Ce Ratu est l’être qui représente ou est supposé représenter au plus haut degré les qualités de l’espèce. Ainsi Ormazd est le Ratu des êtres célestes, Zoroastre des êtres terrestres, Tishtrya des étoiles (Yt. VIII, 48), Hôm des plantes salutaires, le kôsti des vêtements, le brassard (Bund. XXIV, 23) des armes défensives, etc. Voir au Vp. I, 1, l’énumération des principaux ratus de l’ordre animal, et dans le Bundahish, ch. xxiv, une liste plus complète. — Cette conception a laissé ses traces en Perse  : certaine secte motazélite admettait l’existence de communautés animales, chacune ayant son prophète (Dozy, Islam, 206).

  1. fraspà-jankhedhràm, frâj ramîtûat ayôjishn, parityaktaprativàdam (N.) : fraspà « jeter, rejeter » ; cf. Vd. III, 41, 142, où le mot est aussi employé à propos de la religion qui rejette loin du coupable (spayêiti) les fautes qu’il a pu commettre. Il s’agit ici des querelles et des procès qu’elle concilie ou qu’elle tranche. — nidhàsnaithishâm, composé comme fraspâ-yaokhedhràm.
  2. 24. Le mariage entre consanguins. Voir l’Appendice, p. 126.
  3. 25. Suppléé d’après le pehlvi yalvûntàn et d’après la formule haitimca bavaintimca bûshyêintîmca (Y. XIX, 9, 22).
  4. 26. « C’est-à-dire que je mets toute chose, racine et fruit, en la possession d’Auhrmazd ». — Cf. p. 119, note 2.
  5. 27. àstûitish : titre postposé qui a tout l’air d’une glose marginale entrée dans le texte.
  6. 1. Dans la hiérarchie stricte du Zoroastrisme, chaque classe d’êtres a son Ratu, c’est-
  7. 2. Ahura est le Ratu des chefs humains, étant Ratu par excellence. On prend le Ratu des femmes parmi les divinités les plus saintes.
  8. 3. Voir Y. 1, 14, note 56.
  9. 4. Pàreñdi, compagne d’Ashi et « gardienne des trésors cachés ». (N.).
  10. 5. Personnification de la vertu féminine.
  11. 6. La terre, qui porte tout, est femme (cf. Y. XXXVIII, 1).
  12. 7. fryêhê vàzîshtahê astôish ; imité des Gâthas, Y. XXXI, 22, note 81.

    L’ami  : allusion au nom du feu, vohu fryàna, uttamasakhi « l’excellent ami » (Y. XVII, 11, 64).
  13. 8. ashethwôzgatemà, olâ kabad ranj rasishntûm (cf. L.-H. Mills, Zend Avesta, III, 251), ce qui donne ashethwùzgatema ash thwakhshatema ; thwùzga thwakhsha.
  14. 9. gavâstrya-vareshtemà, kâr varzitârtûm ; gavàstrya* gau-vàstrya « travail du bœuf, labour » ; à côté de vàstra « herbe, foin », il y a un mot vàstra « travail, labour », contracté de * varez-tra (cf. Y. XXXI, n. 39 ; XXXIII, n. 11) ; gavâstrya est formé comme le grec γεωργόζ.
  15. 10. hastemà ashahê amà, shaditûntârtûm tîr pun ahlâyih (cf. inscription de Hàjîâbàd, ligne 15)  ; laghuhastatamam punyena çastrena (N.). De là semble suivre  : ama « flèche », hastema qui lance le mieux » de had « lancer » (cf. germanique send  ; cf. Yt. XIV, 56).
  16. 11. Litt. « d’après la plus grande connaissance (mazishtàîsh vaèdhyàish) de la Religion je proclame le Ratu » ; c’est le Maubadàn Maubad ; voir Y. X, 13, note 40 ; cf. la fin de ce paragraphe et la note 16. — cashânàsca aêshàmeit, litt. « et leurs enseignements », c’est-à-dire celui qui enseigne le mieux les Prêtres.
  17. 12. Les Saoshyañts ; voir Yasna IX, n. 7. — « On prend un parmi les êtres célestes et un parmi les êtres terrestres : l’homme le plus sage ». (Comm. P. ad Vp. III, 26.) D’après le Saddar, ch. xxvi, tout fidèle arrivé à l’âge de quinze ans doit choisir un Amshaspand pour le protéger, un sage (dânâ) pour le conseiller dans ses affaires, un Dastûr ou Mobad pour lui faire connaître ce qui est permis et ce qui ne l’est pas (shâyasta va nà-shâyasta). Le Saddar répartit entre un conseiller civil et un conseiller religieux les fonctions du sage avestéen. — Dans le texte le mot Amesha Speñta est probablement pris dans son sens large (Yasna I, note 14) : de là les noms divins qui se rencontrent si souvent dans l’onomastique sassanide : Auhrmazd, Bahram, Ashtâd, Mahraspand, c’est-à-dire « qui a pour Ratu Auhrmazd, Bahrâm, etc. ».
  18. 13. dàhishtà, dânâktum. Voir Yasna XLIV, note 36.
  19. 14. aiwyàmatema « les plus empressés [aux bonnes œuvres] » (aparmatâr ô kar û dinà ; Comm. ad Yasna, XXVI, 2, 9 ; Vp. III, 5, 27.
  20. 15. ashkhrâhvanutema, kabad khrat kartàrtùm, aigh kâri dâdistân î pun khrat apàyat kart vîsh kart yakôyamùnît (P. ad Vp. III, 27) « qui fait le plus acte d’intelligence ; c’est-à-dire qu’il fait le plus des œuvres de loi qui demandent intelligence » (il sait décider les questions de droit). Le mot est donc décomposé en ash kabad, khra khratu, kvanu kartâr ; pour khrà * khrat khratu, voir Y. XXVIII, note 19 ; hvanu semble isolé ; cependant il faut remarquer que hvanvañt (Y. IX, 1, 4 ; XVII, 7, 42 ; XXXII, 26) est traduit nîvak kart « bien fait » et que hvàmahi (Y. XXXV, 5, 14) est traduit karomi « je fais », ce qui renvoie de nouveau à un hvan « faire » (hvan-mahi).
  21. 16. « Le Maubadân Maubad » (P.), qui est le chef spirituel de l’État, l’inspirateur suprême.
  22. 17. Cf. Hâ XII, note 2.
  23. 18. Les §§ 5-6 sont pris du Yasna Haptañhâiti, XXXIX, 4-5 (10-15) : voir là le commentaire.
  24. 19. Gayô Maretan, le premier homme ; voir Yt. XIII, 87.
  25. 20. Cf. Yasna, X, 21.
  26. 21. Voir le commentaire de la prière dans l’introduction du Hâ XXI.
  27. 23. C’est-à-dire à la prière Ashem vohù.
  28. 24. fraoreitim hàitim, le Hà de la Profession de foi : « ce Fargard » dit le Commentaire, c’est-à-dire le Fargard de la Profession de foi, les Hâs XII-XIII.
  29. 25. Fraoreitimca Âstaothwanemca ne désignent point des Hâs ni des parties de Hâ, mais personnifient la foi qui professe la religion et l’exalte : ce sont « les Génies par la vertu desquels les hommes passent à la Religion et y sont affermis » (Comm. P.).