Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ48.

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Traduction par James Darmesteter.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21)p. 314-319).




HÂ 48 (SP. 47). — GÂTHA SPENTA MAINYU 2



1. A l’heure de la défaite finale du démon, un hymne universel s’élèvera vers Ahura,

2-4. Comment sur cette terre, comment le juste abattra-t-il le méchant ? car c’est là le but de la vie du monde. — En suivant la doctrine d’un maître sage qui ressemble à Ahura (§3). — Le bon idéal et le méchant idéal (§ 4).

5. Devoirs du roi, du prêtre, du laboureur : gouverner, purifier, nourrir les hommes.

6-7. Éloge du bœuf qui nous nourrit : c’est pour le nourrir en retour qu’Ahura a fait pousser les plantes. — Nécessité de réfréner la brutalité (envers les animaux).

8. Le prophète demande quels sont les biens qu’Ahura donne au bon roi (§ 8). Quand viendra le jour où Ahura sera le maître universel ; où Zoroastre pourra accomplir les vertueuses et nécessaires destructions (§ 9) ; où les hommes recevront la parole de ses disciples et rejetteront la doctrine perverse qui fait les mauvais rois (§ 10) ; où la Vertu et la Piété triompheront ; et qui paralysera les oppresseurs (§11) ? — Ce seront les Bienfaiteurs du pays, créés pour réprimer les méchants et qui feront régner la doctrine d’Ahura (§ 12).


Dînkart, IX ; 48 (Sùtkar) ; 41 (Varshtmànsar) ; 63 (Rak).


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a 1 . Yêzî adâish. — A l’heure ofi Asha abattra la Druj’, à l’heure où viendra ce que niait le mensonge -, à l’heure où il n’y aura plus de nnort pour les démons ni pour les hommes, alors, par les bienfaits, grandira l’hymne en ton honneur^ ô Ahura !

2. Dis-moi, toi qui le sais, ô Ahura, avant que se présente devant moi le Pont de la terre *, comment le juste pourra abattre le méchant , ô Mazda : car c’est là clairement ^ la belle consommation du monde ’. 3. Pour le disciple ^ la meilleure des doctrines est celle qu’enseigne un maître sage, — Asha et Ahura". — un maître bienfaisant qui connaît mèmeles doctrines secrètes’", un maître qui te ressemble, ô Mazda, par l’intelligence de Vohu Manô ".

Celui qui livre [toute] sa pensée soit au bien, soit au mal, en toute sa religion ’-, — actes et paroles, — celui-là suit en perfection le plaisir et le 1. « A la résurrection », quand « Ashvahisht détruira Andar ». (Comm. P.). 2. hyat Asasliutâ jâ daihitànà fraolilità ; amat zak ijâmatùnêt manshânpun frlftàrih frâj gûfl niijli là yâmntùm’t << quand viendra cela dont il fut par eux déclaré mensongèrement qu’il ne viendra pas ». — daihilànà, abstrait, correspondant au thème d’infinitif en tana du perse ; cf. pour l’allongement de la première voyelle Hàjj^ma- (ÛDa.

3. A la résurrection, « tous les hommes, d’une voix unanime, chanteront un hymne retentissant à Auhrmazd et aux Amshaspands » [Bimdahhh, XXX, 23 ; cf. Sanhédrin, 11, fol. 91 Ij).

4. LePontCinvat qui conduit de la terre au paradis ou à l’enfer, yàméng ; perethâ, zak i pun dam’ik vitarg ; méùg signifie donc ’< terre » ; c’est le védique -gman, avec la chute de g initial devant m, comme dans le pehlvi mat en regard du perse gma-ta (de gain), comme dans le persan Hamadûn, en regard du perse Hàjrmatâna.

5. Comment Ormazd abattra Ahriman « par mes actions ». 6. -vistâ, padtàk.

7. « Il est clair que la vie future se produira ». 8. Taèdeninài « celui qui s’instruit » [hâvisht, le disciple). 9. Celle qu’enseignerait Asha même ou Ahura.

10. Il connait les doctrines occultes qu’enseignent les hérétiques [Aharmôkili) afin de pouvoir mettre en garde contre elles les ignorants et de les réfuter [ash cârak hard yamalalûnêt).

11. Doué des dons naturels de l’intelligence et les tournant au bien {aîghash âsn khrat n’ivak pun fràrûnUi yakhsûnîl).

12. daênâni ;, sa conduite religieuse, « constituée par les paroles qu’il dit et les actions qu’il fait » (cf. p. 254, n. 40)


désir de l’Esprit 13[1]. Chacun à la fin, homme ou femme, sera en ton intelligence 14[2].
5. Puissent sur nous régner de bons rois, ne point régner de mauvais ! [Qu’ils régnent] avec les œuvres de la bonne Connaissance 15[3], ô Armaiti !

La pureté est, après la naissance, le premier bien pour l’homme 16[4].

Que le laboureur travaille pour nous nourrir 17[5] !
6. C’est le bœuf qui nous donne le bien-être, c’est lui qui nous donne la vigueur et la force, selon le désir de Yohu Manô 18[6]. C’est pour lui 19[7] en récompense que Mazda Ahura a fait pousser les plantes, à la naissance du monde commençant.
7. Abattue soit la colère ! anéantissez la brutalité 20[8], vous tous qui tenez

fermement à Vohu Maiiô-’ et à ce désir de sainteté où se repose le croyant" qui remet le monde en la main, ô Ahura".

8. Quels biens donnes-tu, ù .Mazda, h la bonne royauté -’ ? Quelle est ta récompense, Ahnra, pour ceux qui me suivent -"’ ? Et quels dons, ô Asha, puis-je attendre de loi -, en m’altachant aux œuvres de Vohu Manô-’ ? 9. Queje sache quand viendra l’heure de la royauté universelle’" ; l’heure, ô Mazda et Asha, où tous mes doutes s’éclairciront *’ ! Où je pourrai honnêtement faire l’œuvre de vertueuse destruction de Vohu Manô’". Que le sainf sache la récompense à lui réservée !

21 « C’est-à-dire que vous vous tenez dans la vertu : aig/mlàn lanî nafskâ (= tan i khvêsh, khvèslUan) piin fràrûnih ynklisûnislin ». — didragfhzhôduyê, 2" personne pi. présent moyen du désidératif de tlarez.

22. Traduction conjecturale : ashà vyâm yèhyà hithàush nà spefttô : je rends vyàm d’après la traduction persane k/ivàhixh qui est aussi la traduction de vaya dans le Hddhôkht Nask, II, 16 ; d’un verbe vi « désirer », d’où vi-tar « qui veut du bien, vêh boyahûn » (Yt. I, 13) ; upa-vî « avec plaisir » [madam k/wskU (Vd. VII, 1", 45’,.

— hilhâush, traduit comme hilLa, XXXIV, 10).

23. hoi dàmàm tliwahmi à dam, litt. « à lui la création dans ta prise » ( ?; cf. page 292, n. 49] ou •< dans ta création ». Le pehlvi a : ■< ainsi cette création [est] la création ».

24. kà toi... vanhéusli islitish klishathraliyà ; ishti, litt. .< désir, objet désiré » (kkvahishn). est généralement employé au sens de « fortune ». 25. kâ toi ashôish tliwahyào maibyô : ashi au sens de récompense ; cf. Y. IX, note 8. Peut-être, au sens ordinaire de piété, en sous-entendant ishti du vers précédent : « Quels biens réserves-tu à la piété des miens envers loi » ? 26. kà twôi... âkào aredréiig isbyâ : « Quels dons (aredréfig — ràl) manifestés de toi désirerai-je » ?

27. javarô, construit avec le génitif : /jun yakhs[anyinltôrîb. 28. yèzî cahyâ khshayathà « quand vous régnerez sur n’importe qui ■> {amalnlnn pun ciknmcm pâtakhshahih).

29. mââithish dvaèthà ; cf. XXXII, 16 ; dvaèthà = gùmàn’ig’ili, cf. XXIX, n. 25 ; àithish : =. àshkàrâk, cf. XXXU, /. /., n. 67. Le commentaire semble entendre : « les doutes de mes disciples ».

30. eresh moi erezhùcàiu vailhéush vafusb mananhô. Glose : « en vivant honnêtement, je puis détruire la troupe des méchants » (mnnt pun fràrûnih zlvîm am gvndag I saritarôn tuvânyalivûnU rashiiftan) ; ce qui donne pour sens littoral : « à moi, en vie droite, la droite destruction de Vohu Manô » (la destruction du méchant faite par la vertu), erezbùcfun, traduit rcUl z’ivuhnUi « droite vie », est l’accusatif d’un féminin abstrait, erezhùeà, dérivé de *erezhv-ac, qui est le védique rijvac « qui va droit ».

31. Le Saoshyant (au sens général ; Y. IX, n. 7). i 0. Ouand viendra l’heure, A Mazda, où les hommes recevront la parole de mes disciples^- ? Où ils rejetteront l’ordure de cette perversité ", avec la méchanceté des Karapans ’* qui désole le monde et l’intelligence qui inspire les mauvais rois.

l. Quand, ô Mazda, viendra Asha avec Ârmaiti"’ ? Quand viendra Khshathra, et la Bonne Demeure " avec ses œuvres ? Quels sont ceux qui paralyseront ’Mes méchants qui nous torturent ? Ceux à qui viendra la sagesse ’■' de Yohu Manô ?

12*". — Ce seront les Bienfaiteurs du pays*’, qui réjouissent le monde avec Vohu Manô ’- et par les œuvres de sainteté de ton enseignement. Ces hommes ont été créés pour repousser la violence ". 32. mànarôish narô vîseiitê : mânari, old i H gahrà « l’homme de moi, l’tiomme mien » ; formé du thème pronominal ma et de nara, sur le même type que yâ-varena, tà-varena, hâ-kurena ; la voyelle est celle d’ahuri. — Glose : <i quand viendra le temps où mes disciples feront régner la loi dans le monde ? » 33. magahyâ : inaga signifie littéralement « pureté sans mélange » et désigne soit le bien, soit le mal absolu : il est glosé tantôt, comme ici et Y. IJll, 7 «, nvêzak sarltarih « méchanceté pure », tantôt avêzab skapîrîh « bonté pure » (Y. XXIX, H h ; li, 11 c) ; pour le sens propre, cf. Dàdistân, XXXII, 13 : les damnés, après le bain de métal fondu, sont pardonnes et deviennent môglûm avêzaknn. 34. Voir Y. IX, n. 5.5. — Litt. « cette perversité, par laquelle malfaisance les Karapans désolent le monde et par laquelle intelligence sont les mauvais rois ». 35. urupayêiiitî, probablement « mettent au pillage » (persan ruhûdan) ; le pehlvi traduit, par jeu éX^jmoXogique^rànhiênd pânali’ih « chassent protection, c’est-à-dire ne protègent pas le monde ».

36. Quand régneront la Vertu et la Piété ?

37. Le bon gouvernement et la sécurité, avec leurs œuvres de travail et de paix.

38. râmàm dàoùtê « leur imposeront l’immobilité » (râmâm, traduit armêsIMh « l’état de la personne qui ne peut pas bouger » ; glosé a-kârîh « impuissance, inertie ».

39. cistish ; voir page 16, note 57.

40. Réponse aux questions qui précèdent.

41. Sàoshyaùtô dahyunàm.

4’2. yôi khshnùm Vohù mananhâ hacâofitê « qui vont avec (c’est-à-dire qu’accom pagne) la joie par Vohu Manô » (la joie que produit autour d’elle l’honnêteté dans le gouvernement).

43. hamaêstârô Aèshem mahyà ; traduit hamestârlh t old } khishmûn « en lutte contre le violent » ; il faut lire sans doute aêshmahyâ en un mot, à moins que aèshem-ma ne soit un adjectif, pour *aêshemema.

Zôt et Râspi ensemble :


Par l’Esprit du Bien et la Pensée excellente... (Y. XLVII, 1 ; 2 fois).

Ashem vohù... (3 fois).


Nous sacrifions au Hâ Yêzî adâish.


Yèńhè hàtâm.







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a


  1. 13. Littéralement « de lui » (ahyà), c’est-à-dire du Bon ou du Mauvais esprit suivant le cas. Le sens de la phrase est que celui qui fait absolument le bien ou absolument le mal réalise l’idéal. Dînkart : « Celui qui fait imperturbablement soit bonnes œuvres, soit méfait, on peut le considérer comme réalisant l’idéal » (man frâj [pun] apêbimîh kirfak ayôp vinâs ohdûnênd pun and yakhsanûnishn aîghash mînishnîk kart ; le Commentaire pehlvi a la même glose, mais faussée par la perte des mots ayôp vinâs).
  2. 14. Ahura voit ce que chacun a été. — Pour nanâ, je suis le pehlvi gahrâ nisâman, qui néanmoins peut très bien n’être qu’une traduction explicative ; nanâ est peut-être un simple redoublement de nar, nà.
  3. 15. La bonne Cisti ; voir page 16, note 57. — Cette stance passe en revue les trois castes et leurs devoirs : la caste guerrière gouvernant, le prêtre purifiant, le laboureur nourrissant.
  4. 16. yaozhdào mashyài aipi zàthem vahishtà ; formule qui résume tout l’esprit du Vendidad (Vd. V, 21).
  5. 17. gavôi verezyâtàm tàm né hvarethài fshuyô ; litt. « de ceux qui travaillent pour (ou avec) le bœuf (les laboureurs, vâstryôsh), qu’il y ait travail d’elle (la terre ?) pour notre nourriture ! » Autrement dit : « mes disciples doivent travailler pour me nourrir, moi Zoroastre » (khôrishn î li man Zartûsht havà-am hâvishtân î li barâ sâjishn). Le prêtre leur donnant le premier bien du monde, la pureté, ils peuvent bien le nourrir en retour : « l’entretien du prêtre est à la charge du laboureur » (khôrishn dârishnî âsrûrân madam vâstryôshân ; Dînkart, IX, 41, 16). — Cf. Y. X, 20 (65).
  6. 18. Celui qui se nourrit bien fait œuvre de bon sens et par suite fait plaisir à Vohu Manô : peut-être y a-t-il déjà ici une allusion au rôle de Vohu Manô comme présidant à la vie animale ; cf. Vd. IV, 48.
  7. 19. Pour lui et de lui ; c’est-à-dire pour le nourrir (cf. le Hâ précédent, § 3, texte et note) et de son corps : car, lorsque mourut le Taureau Evakdât, de sa moelle, tombée à terre, sortirent cinquante-cinq espèces de grains et douze espèces de plantes (Bundahîsh, XIV, 1) — Ce vers est récité dans la purification des animaux (Vd. XI, 6) et en enterrant les cheveux (Vd. XVII, 5).
  8. 20. aêshmô, remem : la colère et la brutalité envers les animaux : cf. XXIX, 1 et XLIV, 20. — syodùm, nasînît ; de syah, d’où a-sishtem, anasînishn (Y. LX, 3).