Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ65.

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Traduction par James Darmesteter.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21)p. 402-408).

HÂ 65 (SP. 64). — ÂB-ZÔHR

(Voir page 392.)

1 1[1]. J’offre le sacrifice (yazâi) à l’Eau Ardvi Sûra Anâhita 2[2], au loin répandue 3[3], guérissante, ennemie des Daêvas, fidèle à la loi d’Ahura ; digne de recevoir le sacrifice dans le monde des corps ; digne de recevoir la prière dans le monde des corps ; sainte, qui multiplie ses dons 4[4] ; sainte, qui multiplie les troupeaux ; sainte, qui multiplie les biens 5[5] ; sainte, qui multiplie la richesse ; sainte, qui multiplie tout le pays ;

2 (7). qui purifie la semence de tous les mâles 6[6] ; qui purifie, pour ter, la matrice de toutes les femelles ; qui donne un bon enfantement à toutes les femelles ; qui fait venir à toutes les femelles le lait qu’il faut et tel qu’il faut" ;

3 (11). grande, au loin célèbre ; aussi grande à elle seule que foutes les eaux réunies qui courent sur cette terre "* ;

qui court avec puissance de la hauteur Hukairyaàla mer Vouru-kasha’. 4 (15). Sur toutes les rives la mer Youru-kasha bouillonne’" et tout le centre de la mer Vouru-kasha bouillonne, quand y court, quand s’y précipite " Ardvi Sùra Anâhita ;

qui a mille lacs et mille canaux’— ; chacun de ces lacs, chacun de ces canaux est long de quarante journées de course d’un cavalier bien monté ".

5 (19). De cette seule mienne rivière, un seul canal s’épandrait sur les sept Karshvares de la terre’* ; cette seule mienne rivière porte eaux en tout temps, été et hiver. Celte mienne rivière purifie la semence des mâles, la matrice des femelles, le lait des femelles’^

7. dâitîm ratliwîin : dàitim a rapport à la quantité : cand apw/nt « autant qu’il faut » ; rathwîm à la qualité : bashn.

8. « Toutes les eaux n’ont pas la même valeur : Ardvi Sûr Anâhit vaut toutes les eaux de Khvauiras, des cieux et de la terre, à l’exception de la rivière.rang [le Tigre], créée par Auhrmazd » [Bundaliish, XXIV, 26). 9. « Hùgar, le haut, est [le sommet] d’où l’eau d’Ardvîsùr saute d’une hauteur de mille hommes » [Bundaliish, XII, 5 : cf. Yt. V, 96, 121 ; Yt. XllI, 6). C’est un sommet moins haut que le Taéra (cf. Bund. XII, 4-5), car l’Ardvisùr descend de la sphère des étoiles qui est la plus proche de nous (Comm. pehlvi ad LXV, 1 ; cf. Yt. V, 85). Sur le Hukairja, voir encore Yt. IX, 8 ; XV, 15 ; XVII, 28. — Sur l’Océan Vouru-kasha, voir Vd. V, 15, texte et notes.

10. jaozenti, ayôjêt ; glose kôpinêl « font montagne, font vague » (cf. JÂ ÂfcjS’ « vague » ).

11. f ratacaiti.., frazhgaraiti ; fràj tajét, pun jûl kurlaklli, « court, une à une »… ; fràj r’ijét pun cvkarlaklh « se précipite, d’ensemble ». 12. vairyanâm… apajrhzhâraDàni : vm manash mii’â miydn’, apakhs/i, zak manask dar laklwâr yakâyamîinêt : le var est donc le réservoir et Vapak/ish (apaghzhâra) est le canal par lequell’eau revient à Ardvisùr ( « selon d’autres, par lequel elle se rend ila mer » ). Frâmjî traduit vairya rjoplia « cave, cellule » et apag-LzLàra môrl, paravâha « canal ». Cf. Bundahisli, XIII, 1-2.

13. Un seul de ces apag-hzbàra suffirait à fournir d’eau les sept Karshvares. 44. Le lac en circonférence, le canal en longueur. 15. Vendidad, VII, 46. Le Zôl seul.

6 (22). Des justes qui sont et de ceux qui ont été, fie ceux qui sont nés et de ceux qui sont à naître, que viennent ici les Fravashis, nous apporter "* l’eau la plus proche ;

7 (24). mais non pas, Eaux, à celui de nous qui pense le mal, ni à celui qui dit le mal, ni à celui qui fait le mal, ni à l’irréligieux ’* ; ni à celui qui fait du mal à son ami, celui qui fait du mal au Mage ", celui qui fait du mal à son voisin •", celui qui fait du mal à son parent ; ni non plus pour le bien -’, ô Bonnes Eaux, Eaux excellentes ^-, créées par Mazda et saintes, de celui d’entre nous qui veut nuire à notre fortune, nous qui ne lui nuisons pas ; ni pour le bien, ô bonnes Eaux, Eaux excellentes, créées par Mazda et saintes, de celui qui veut nuire à notre personne, nous qui ne lui nuisons pas.

El le larron, le brigand, le bandit, meurtrier du juste ; le sorcier, l’enfouisseur de cadavres, le jaloux", l’avaricieux ; l’impie Ashemaogha-*, et 16. paitbyàpem, pa^îraA- « venant au devant » ; en retour du.zôhr qu’elles reçoivent elles nous apportent les eaux dont nos champs ont besoin : voir Yt. XIII, 53-54. 17. ma nôàpù dushmaiiaiihê ; le pehlvi ne rattache point ce paragraphe au précédent et entend : « puissions-nous n’avoir pas all’aire, Eaux, à celui qui veut le mal... » [al lanâ, mid, Ivalà old dushminishn.. ; amdn kdri dhià yalwûnât). 18. Ou : à celui qui a une mauvaise religion.

19. moffliu-tbishè, magûi-gabrddn ; seul exemple dans r-vesta du nom populaire des prêtres du feu, perse magu ; le nom ordinaire est « prêtre du feu » àthravan. Tir AndÂz, sans doute étonné de voir interrompre la série ordinaire « ami, voisin, parent » (v. page 235, note 2), traduit mojfhu « compagnon de route » «Ij^ : je ne sais sur quoi repose cette traduction, probablement toute de conjecture. 20. varezànô-tbishê ; TiR .

’DÂz traduit varezànù « associé » J^^ : cf. /. /. 21. mâdha nô ahmi frâdhàiti... yù ; litt. « ni avec accroissement ik. celui de nous qui », le tout dépendant toujours de jaseùtu « que viennent ». 22. 11 s’adresse aux eaux du sacrifice (v. I, 12, note 45), aux eaux du Zôhr. 23. tâyusli, celui qui dérobe ; hazaiîha, celui qui vole ouvertement : cf. Nh-angistdn : ainyô tiascit anhéusk astvatô parabaralti âkào bazanlia anakàusè tàyush « quiconque enlève quelque chose du monde matériel au grand jour est hazanba, en se cachant tàyusb ». — gadba est le voleur de grand chemin, le CjJ’^^j- — nasuspào ; un des crimes inexpiables dans la loi zoroaslrienue : voir Vd. I, 13 ; III, 36 seq. — sperezvào, AÔ4-/i ?d ?’ (lire kûshildi-), « celui qui fait effort contre, qui rivalise (cf. XXXI, 16 b), jaloux » ; TiR AndÂz : a-»l». « jaloux ».

24. Asbemaogfba : voir IX, note 57. le lyran méchant, — que leur malice retourne sur eux-mêmes ! Celui qui essaye de nous détruire, que la destruction l’atteigne" ! 9 (33). Eaux, restez en paix en votre place, en attendant que le Zaotar vous sacrifie !

— El comment le Zaotar sacrifiera-t-il aux bonnes Eaux avec une parole bien instruite^’* ?

Comment liera-t-il sa langue-’, quand il prononce dans le sacrifice des paroles qui ne sont pas de la loi’• Comment les paroles lui viendront-elles exactement — que lui ont enseignées les Maîtres —’? Comment seront-elles agréées ? Comment mettront-elles [les Dieux] en dette’" ? Commentlui seront-elles une source de dons, les paroles qu’Ahura Mazda a proclamées pour Zaralhushtraetque Zarathushtra a proclamées pour le monde des corps ? 10 (39). — Commence par ta demande". Demande leur faveur aux eaux, ô Zarathushtra ; ensuite apporte-leur des libations pures, examinées avec soin par un homme de bien. Prononce ces paroles : 11 (41). « Eaux, je vous demande une grande faveur : donnez-moi l’objet dontle don confère un bien à l’abri de toute injure’-. Eaux, je vous demande la fortune sous toutes ses formes, la fortune puissante’^ ; et une descendance pleine de bonté, 25. ithyèjào istia yô i dadha it’iyèjào yaùtu yù di dadha ; litt. « celui qui avec désir a fait destructions, que les destructions aillent à celui qui les a faites » ; la lecture et l’interprétatioa desdeux deraiersmols est incertaine ; la traduction pehlvie est corrompue. 26. « Connaissant par cœur l’Avesta ».

27. hitô-liizvào : la traduction pehlvie de ce mot est tombée : liita, qui se dit des chevaux attelés et dressés, est proprement « lié » (sscr. sita) : Tir And.Îz traduit exactement <U-j ijij. — Les formules qui ne ne sont pas de l’Avesta sont dites à voix étouffée ou en hdj.

28. Âpastdk rdst ; une des quinze qualités du Mobed ; cf. XVll, n. 2. 29. Les aètlirapaitis, les prêtres instructeurs. 30. liutbra tâo ishudô bavàn. « C’est-à-dire que nous déployons telle piété envers les dieux qu’ils font venir sur nous récompense et bonheur ; c’est-à-dire que nous avons une dette sur les dieux », cf. Xlll, 5 ; XXXIV, 15, note 45 ; XXXVI, 5, note 10. 31. « Fais ta demande avant de verser les libations (le zô/ir) ». L’offrande n’aura lieu en effet qu’au Ilâ LXVlll, 14, ou, comme dit la glose, « aux Ahiinvars qui précèdent le mot liusliiti ».

32. Selon la glose « la qualité de Maubad » [magûpatîh). 33. amavaitim ; c’est-à-dire qui rend puissant : « qui a beaucoup d’argent, on le respecte » [man khvdslak kabad ash shikûh azash). que beaucoup aiment et à qui nul ne veut nuire, que nul ne veut frapper, ni l’aire mourir, ni persécuter, ni enlever. Zol el llàspi ensemble :

1 2 (46). Eaux, voilà ce que je vous demande ; et à vous, ô terres, et à vous, ô plantes ;

et vous, ô Amosha-Spentas, bons souverains, bienfaisants, dieux bons, déesses bonnes^*, qui donnez tous les biens ; et vous, bonnes, redoutables, victorieuses Fravashis des justes’^ ; et vous, Mithra, mailre des vastes campagnes^* ; et vous, pieux Sraosha, à la belle taille" ; et vous, pur Rashnu’* ;

el vous, Âtar, fils d’Ahura Mazda ; et vous, le grand, le souverain, le Génie des femmes, aux chevaux rapides, Apàm Napât^° ;

et vous tous, saints Génies, qui donnez le bien ! 13 i55). Cela, donnez-le-moi, Eaux ; donnez-le-moi, terres ; donnez-le-moi, plantes ;

et vous, ô Amesha-Spentas, bons souverains, bienfaisants, dieux bons, déesses bonnes, qui donnez tous les biens ; el vous, bonnes, redoutables, victorieuses Fravashis des justes ; cl vous, Mithra, maitre des vastes campagnes ; et vous, pieux Sraosha, à la belle taille ; et vous, pur llashnu ;

et vous, Atar, lîls d’Ahura Mazda ; et vous, le grand, le souverain, le Génie des femmes, aux chevaux rapides, Apàm Napàt ;

et vous tous, saints Génies, qui donnez le bien ! 34. Amshaspands hommes, et Amshaspands femmes : v. page 175, note 1. — vuhunùiu dàtarô, co~f,pi : kxio’i. 35. Voir Yasht XIII, Introduction. 36. Voir Yasht X, Introduction.

37. Voir plus haut Hà LVll, Introduction. 38. Voir Yasht XII, Introduction. 39. Voir Hà 1, note 23. Zôt seul.

14 (56). Cela, et plus encore, mieux encore, plus bel encore, plus précieux encore

Donnez-nous ce don, saints Génies, qui pouvez ce que vous désirez^" ; donnez-le rapidement et aussitôt, selon celte parole des Gâthas" : « tout ce que peuvent souhaiter vos loyaux serviteurs » ". 15 (6i)* « Toi qui as créé le bœuf, et les eaux et les plantes, Amerelàt et Haurvatât, et l’énergie et la force, ô très bienfaisant Esprit, Mazda, donne les moi, car j’ai suivi l’enseignement de Vohu Manô ». Le Zôt se rassied, touche le Barsom avec le vase qui est dans sa main (le vase de zohr), puis le Hâvan, en disant :

16 ". « Celui et ceux dont le culte, Ahurale sait, donne le bien aux êtres, en retour de leur sainteté, à ces êtres qui ont été et qui sont, je sacrilie par leurs noms et leur apporte mon service ».

« Sur une royauté qui veut le bien, je confère toutes les faveurs de la fortune ». 17* Que prêtent l’oreille à ce sacrifice les bonnes Eaux, elles bons Génies, mâles et femelles, les Amesha-Spenlas, bons souverains, bienfaisants el bons ; et [que prête l’oreille] à ce sacrifice la bonne Ashi, accompagnée d’Asha, qui nous donne perfection de piété ! Que prêtent l’oreille à ce sacrifice les bonnes Eaux, avec bonne et dévote attention ; du commencement [du sacrifice] à la fin ! 18. Oui, que prêtent l’attention à ce sacrifice les bonnes Eaux, et les bons Génies, mâles el femelles, les Amesha-Spenlas, bons souverains, bienfaisants et bons ; et [que prête l’oreille] à ce sacrifice la bonne Ashi, accompagnée d’Asha, qui nous donne perfection de piété ! Que prêtent l’oreille à ce sacrifice les bonnes Eaux, avec bonne el dévole attention ; du commencement [du sacrifice] à la fin ! 40. IJtt:« pouvant, désirant ».

41. hatliia anagâtliwya vaca ; cf. X, 19, 6t. 42. liaithj âvaieshtàm byat vasnâ ferasliùtemein ; Y. L, 11 d. 43. §15 = U, 7; cf. XVUI, 1.

44. § 16 =:Ll, 22 et LI, 1 a; cités aussi XV, 2. 45. S§17-18 = LVI, 3-4.

Le Zôt dépose le vase sur la table.


Le Râspî.


19. Le désir du Seigneur... — que ce prêtre Zaotar me le dise !


Le Zôt.


Est la règle du bien. Que l'homme de bien qui la connaît la proclame !





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  1. 1. §§ 1-5 = Âbân Yasht (Yt. V), 1-5 : ces cinq paragraphes forment la partie essentielle du Nyâyish des Eaux.
  2. 2. La grande déesse des Eaux : voir l’introduction du Yasht V, qui lui est consacré.
  3. 3. perethù-frakàm, pûr frâj tâi (lire tâj ?), aîgh kulâ jîvâkê dar ozalûnêt.
  4. 4. âdhù-frâdhanàm ; le mot àdhù est obscur, le pehlvi le traduit par un mot de lecture multiple et qui peut se lire soit gân jân « vie », soit dân « don », soit jâv, synonyme dialectal de jûy « ruisseau ». La première lecture est celle qu’indiquent les points diacritiques de Pt4 et celle que suivent les traductions indigènes modernes (Framji : jîvni derâjinî karnâr « faisant longueur de vie » ; Tîr Andaz : îX-i^ù ^^\ ^ JJ « donnant vie en abondance ») ; la troisième a pour elle le passage du Yt. VIII, 29, apàm adhavù apaitl-eretâo jasâontiadhavô s’expliquerait bien par jûy. Nous nous décidons pour la seconde : elle a pour elle la glose du pehlvi, khvâstak, qui prouve la lecture ancienne dân, laquelle s’accorde aussi bien avec le passage des Yashts, « le don des eaux » ; âdhù serait un synonyme de âdà.
  5. 5. gaêthô-frâdhanâm : les biens ruraux (cf. Vd. XIII, 10) ; s’oppose à shaètô-fràdhanàm, qui a rapport aux biens en argent.
  6. 6. « De sorte qu’elle sorte pure et bonne, sans mélange de sang et d’impureté ».