Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume II/Vendidad/Fargard 2

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Traduction de James Darmesteter

Édition : Musée Guimet. Publication : Ernest Leroux, Paris, 1892.
Annales du Musée Guimet, Tome 22.


VENDIDAD
Fargard 2
2.
Yima Khshaêta refuse le rôle d’apôtre offert par Ahura ; il gouverne le monde, l’élargit, le fait prospérer, en chasse la maladie et la mort.

Ahura annonce à Yima l’approche d’un hiver qui dépeuplera la terre et, sur ses ordres, Yima bâtit un Var où il recueille les plus beaux spécimens de toutes les espèces pour repeupler la terre.


FAHGARD 2

Ce Fargard est consacré à deux légendes relatives à Yima Khshaêta •himsltifl)^ le grand héros de la préhistoire iranienne, le fondateur de Ja civilisation persane, l’idéal de toute puissance et de toute splendeur. Dans la première partie (§§ 1-20), Ahura offre à Yima de recevoir sa religion et de la communiquer aux hommes : Yima s’en excuse, mais accepte de se charger du gouvernement du monde, de le faire prospérer, d’en écarter la maladie et la mort. Il reçoit l’anneau d’or et l’épée, synilioles de la souveraineté, el à trois reprises élargit d’un tiers la terre, devenue trop étroite pour ses habitants’.

Dans la seconde partie (§v ; 21-13), Ahura annonce à Mma l’approche d’un redoutable hiver qui va détruire toute vie sur la terre : il lui ordonne de construire un Var on il recueillera les spécimens les plus parfaits de l’espèce humaine el de toutes les espèces animales et végétales. Yima construit ce Var et les hommes y vivent la plus heureuse des existences-, 1. Analyse dans le D’tnkart (VIII, 44, 3j : « Aulinna/<l iiniDtre la religion à Yim le premier ; Yim n’accepte point de se charger du service de la religion, mais il accepte de développer, faire croître, faire prospérer le monde. >> - M. West traduit les mots lii patiraf/ani Yim min pi’sh/dihi diii-asriinih n ils uon-accepiance by Yim owing to alfachmenl to the religion of Ihe ancienls » : mais il me semble que iliii-asrthiî/i n’est autre que dhi-handagîh (asrùnistan =r bastan),qui est une expres- >ioii absolue ; d’autre part « les anciens « se dit prx/ihiihtin el le sens ordinaire de Iii’kIiiiI ; est <( fonction, niéliei’ », ce qui donm- le sens ■• n" ;ii'ce[>to pas eu l’ail de IVuiclion celle (W’iir. un dhi hmidn -.

’-'. hiiiknrl, 5 ; i : .. Sur les raisons ([ui rcudriit di’sii’al)li’ la rousli uclion du ’ar de ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — FARGARD 2 17

La première légende appartient au cycle héroïque et royal. Dans l’histoire légendaire de l’Iran, telle qu’on la trouve dans l’Avesta^ Yiina Khshaêta, fils de Vîvanhat, est le troisième souverain universel^ : il règne mille ans, durant lesquels ne paraissent sur la terre ni maladie ni mort, et les hommes vivent la vie du Paradis". Mais il se laisse aveugler par l’orgueil ; la gloire divine, le Hvarenô, l’abandonne ; il est renversé du trône et scié en deux par le Serpent à trois têtes, AzhiDahâka (Zôhâk)% lequel à son tour dépeuplera la terre pendant mille ans, jusqu’au moment où Thaêtaona délivrera la terre et l’enchaînera au Damâvand*. Dans la chronologie du Bundahish (XXXIV, 4), Yima, au lieu de remplir tout un millénium, n’occupe que 616 années et 6 mois, ou plus exactement 716 ans et 6 mois ; car il règne 616 ans et 6 mois et reste caché pendant 100 ans’ : le reste du millénium est rempli par ses prédécesseurs, depuis le premier homme, Gayomart’". Dans les Védas, Yima, fils de Vivanhat, paraît, sous le nom de Yama, fils de Vivasvat, comme le premier homme et le premier mort, et comme le fondateur de l’institution du culte. Il est assez vraisemblable que le millénium prêté à Yima est le souvenir d’une conception plus ancienne oti il était lui aussi le premier représentant de l’humanité primitive ; et c’est quand le Zoroastrisme eut imaginé les personnages abstraits et symboliques de Gayomart, de Mashya et Mashyana, que Yima céda le premier rang à ces nouveau- venus et leur abandonna une partie de son hazdr. Son refus d’accepter le rôle d’apôtre est l’abdication au profit de Zoroastre d’un rôle qu’il remplissait jadis de Yim ; ordres et instructions d’Autirmazd àYim ; Yim fait comme Aulirmazd lui avait ordonné et enseigné. »

3. Et dans les formes dérivéesdu Kliudài .thna. 4. Ses prédécesseurs sont Haostiyanha et Taivhma Irupa. 5. Yt. IX, 10 ; XVII, 30 ; cf. V, 25-27 ; XV. 15 ; Vasna I, 4-5 ; et aux Fragments, Vd. II, 20.

6. Yt. XIX, 34.

7. Yt. XIX. 4G.

8. Yasna IX, 4-5 ; Yt. V,34.

9. S’étant enfui devant Zôhàk.

10. Gayomart, 30 ans ; Mashya et Mashyana, 40 -^- 50 + 93 ans, 6 mois (.çîc Grand Bundahish) ; Hoshyang, 40 ans ; Tahmùrath, 30 ans ; règne de Yim, 616 ans, 6 mois ; vie cachée de Yim, 100 ans. Total : 1000. Cf. Spiegf.i, ZMDG., XLIV, 190. T. H. 3 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/64 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/65 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/66 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/67 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/68 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/69 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/70 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/71 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/72 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/73 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/74 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/75 Page:Annales du Musée Guimet, tome 22.djvu/76 ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — FARGARD 2 31

C’est l’oiseau Karshiptan ’", ô saint Zarathushtra. 43 (140). Créateur du monde des corps, saint ! Qui est là le Seigneur et qui est le Maître^ ? Ahura Mazda répondit :

C’est Urvalatnara, et toi-même, ô Zarathushtra*’ . 65. L’oiseau l ;arshiptan est le Ratu des oiseaux : voir Comm. du Vispcred, I, 1 ; cf. vol. I, 444, note 5 ; Bundahisli, XXIV, 11 ; Minokhard, LXl, 9. « Il sait parler, il a porté et fait régner la Religion dans le Var fait par Yima : là. on récite TAvesta dans la langue des oiseaux » (Bund., XIX, 16). — Le karshiptaa est d’après la glose le cakhramk, c’est-à-dire le cakravàka, cher aux poètes de l’Inde. 66. L’Ahu et le Ratu, le maître temporel et le maître spirituel : voir vol. I, 162. 67. Zoroastre, fondateur de la religion, est de droit le Ratu du Var. UrvataJ-nara, un des trois fils qu’il a eus de son vivant, est le chef des laboureurs (les deux autres, Isat-vâstra et Hvare-cithra, étaient les chefs des deux autres classes). On a choisi pour régner dans le Var le chef des laboureurs sans doute parce que le Var est souterrain. Il est à remarquer que Yima n’est représenté nulle part comme régnant sur le Var : il l’a construit et colonisé et c’est tout.