Les Amours, galanteries et passe-temps des actrices/02

La bibliothèque libre.
, Une Bayadère de l’opéra
A Couillopolis. 1700 [i.e. ca 1833] (p. 19-23).




CHAPITRE II.

Récit de madame Théodorine.


Pour moi, s’empressa de dire madame Théodorine, il est une façon de jouir que je préfère de beaucoup à celle que vous nous citez, c’est celle que m’enseigna un soir le jeune comte de C… ; aussi mesdames, quand vous saurez en quoi consiste cette façon-là et les plaisirs qu’elle m’a procurés, vous ne serez pas étonnées d’apprendre que depuis, elle est ma posture de prédilection dans les ébats amoureux.

Vous connaissez toutes de vue l’amant dont je veux vous parler, c’est un des plus jolis hommes de Paris et je ne vous ferai donc pas son portrait, je vous dirai seulement qu’il joint à ses agrémens extérieurs la plus exquise amabilité dans son commerce avec les femmes ; c’est le mauvais sujet le plus délicieusement roué qu’il soit possible de voir, et si je n’en étais qu’à l’A B C dans l’art de jouir quand il me prit pour maîtresse, j’ai fait sous sa direction de rapides progrès, il avait mille moyens de centupler le plaisir et ce qui avec un autre homme eut paru commun et trivial, il savait par un raffinement séduisant de libertinage le faire adopter au point qu’on était tenté souvent de lui demander de recommencer une action dont on n’avait qu’une idée de dégoût.

Le goût de ce jeune seigneur pour le socratisme m’était fort connu, mais jamais il n’osa s’ouvrir à moi sur cette passion anti-physique, il savait trop bien qu’il aurait été repoussé avec perte, je ne suis pas plus bégueule qu’une autre, mais jamais je n’ai pu concevoir l’idée de ces hommes qui vont chercher la volupté dans un lieu si peu propre à lui servir d’asile, donc mon jeune amant n’osant m’insinuer de me prêter à sa fantaisie, s’en dédommageait en ne prenant dans nos ébats amoureux que des attitudes où l’autel sur lequel il brûlait de sacrifier fut au moins en évidence, c’est ainsi qu’il en vint à imaginer la posture charmante que je vais vous décrire.

C’était un soir après avoir fait ensemble les plus agréables folies : Tiens ma chère amie, me dit-il, si tu veux te prêter à mes désirs, nous allons jouir d’un bonheur que tu n’as pas encore connu, moi qui m’imaginais qu’il voulait me traiter comme Jupiter traita Ganimède. N’espérez pas, lui dis-je, que vous me déciderez jamais à de pareilles horreur. — Enfant, me dit-il en souriant, l’horreur n’est que dans ton imagination, et si jamais tu avais éprouvé une seule fois tout ce qu’une femme peut sentir de délices en sentant un outil masculin bien poli s’introduire dans les replis les plus secrets de cet admirable lieu, tu serais la première à renoncer à toute autre espèce de culte, toutefois, rassure-toi, comme je ne veux pas d’un plaisir que tu ne partagerais pas, ce n’est pas ce que je te demande en ce moment, seulement quitte tous tes vêtemens.

J’obéis et je ne gardai bientôt plus de toute ma toilette que ma chemise, que mon amant m’invita à relever plus haut que la ceinture, afin qu’il pût, disait-il, admirer tout à son aise mes belles fesses et ma charmante chute de reins, à cet effet, m’ayant fait lui tourner le dos, il plaça devant moi une chaise sur les bâtons de laquelle je plaçai mon pied droit, laissant le gauche par terre et bientôt je sentis par derrière moi se glisser entre mes cuisses le dard ardent de mon aimable comte, peut-être ne fut-ce pas sans quelque regret qu’il vint se placer dans la route frayée sans pouvoir s’arrêter dans celle qui ne l’était pas, quoi qu’il en soit, jamais plaisir ne fut égal à celui que nous goutâmes en ce moment ; la position où j’étais, faisait que mon objet tant soit peu contourné serrait son outil comme dans une gaîne, je sentais à ses fréquens soupirs tous les plaisirs qu’il avait, tandis que moi-même j’en étais inondée, car tandis qu’il me travaillait ainsi mon petit réduit, ses deux mains placées sur mes tétons en chatouillaient doucement les extrémités, ce fut dans des extases célestes que l’œuvre s’accomplit et depuis cette posture est devenue ma posture favorite, et je la conseille à mes amies, elles m’en diront des nouvelles si elles veulent bien la mettre à exécution.