Les Fleurs (Verhaeren)

La bibliothèque libre.
Œuvres de Émile VerhaerenMercure de FranceIX. Toute la Flandre, II. Les Villes à pignons. Les Plaines (p. 171).
◄  PÂQUES


LES FLEURS


En ces heures de jeune et bel avril dardé,
L’hiver, à tout jamais, semble barricadé
Là-bas, au nord, derrière un mur géant de glace.
Des souffles doux à de longs vols d’oiseaux s’enlacent
Et visitent les champs, les bois et les vergers.
Les abricotiers clairs et les pêchers légers
Se décorent de fleurs blanches, roses, vermeilles
Pour leurs noces avec le peuple des abeilles.
Voici la bugle et le narcisse et le genêt
Et la surelle et la bourse-à-pasteur, qui naît
Aux premières clartés et vit jusqu’en décembre.
Pistils couleur de sang, pétales couleur d’ambre,
Toutes les fleurs, miettes de pluie ou de soleil,
Avec joie et candeur sortent de leur sommeil
Et regardent, avec leurs millions d’yeux chastes,
Le printemps fourmillant ramper sous le ciel vaste.