Les Jeux rustiques et divins/L’Allusion à Narcisse

La bibliothèque libre.
Mercure de France (p. 16).


L’ALLUSION À NARCISSE

  
Un enfant vint mourir, les lèvres sur tes eaux,
Fontaine ! de s’y voir au visage trop beau
Du transparent portrait auquel il fut crédule…
Les flûtes des bergers chantaient au crépuscule ;
Une fille cueillait des roses et pleura ;
Un homme qui marchait au loin se sentit las.
L’ombre vint. Les oiseaux volaient sur la prairie ;
Dans les vergers, les fruits d’une branche mûrie
Tombèrent, un à un, dans l’herbe déjà noire,
Et, dans la source claire où j’avais voulu boire,
Je m’entrevis comme quelqu’un qui s’apparaît.
Était-ce qu’à cette heure, en toi-même, mourait
D’avoir voulu poser ses lèvres sur les siennes
L’adolescent aimé des miroirs, ô Fontaine ?