Les Livres d’étrennes, 1905

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Les Livres d’étrennes, 1905
Revue des Deux Mondes5e période, tome 30 (p. 933-946).
LES LIVRES D’ÉTRENNES

Ce qui caractérise de plus en plus la production nouvelle des livres illustrés et tout particulièrement celle des livres de cette fin d’année, c’est l’application presque générale, aux plus somptueux comme aux plus modestes, des procédés mécaniques perfectionnés dans leur infinie variété, l’importance donnée au cliché dans l’impression photographique, la reproduction en couleurs obtenue directement d’après nature, enfin le talent presque parfait d’imitation. On ne crée presque plus rien de vraiment original, mais on imite admirablement, et, plus souvent, on corrige les inexactitudes, les exagérations et les indiscrétions de l’objectif, en introduisant le sentiment et la personnalité même dans une opération autrefois automatique, qui, désormais, se prête à toutes les combinaisons d’art, traduit fidèlement ou répète à peu de frais, et sans limite d’exemplaires, toutes les nuances de la palette et toutes les fantaisies du dessinateur. Grâce à ces progrès matériels, à l’habileté introduite dans le développement de la plaque ou le tirage de l’épreuve, à l’emploi du pinceau et du papier à dépouillement, la photographie a pris la place de toutes les anciennes et plus nobles méthodes des grandes époques de l’illustration : de l’eau-forte, avec ses teintes chaudes et sa liberté, de la pointe sèche avec sa finesse, sa précision et son velouté, et du burin avec son relief, sa vigueur et sa souplesse. La mode est à la photographie, qui par sa rapidité d’exécution et la variété dans la manière, se prête au caractère de l’illustration contemporaine, répond aux goûts d’information instantanée de plus en plus généralisés qu’exige la vie agitée et dispersée de notre époque. Il n’est pas un magazine, pas un recueil illustré, qui ne l’emploient. Elle convient à cette production hâtive et éphémère qui appelle l’élégance et la fraîcheur à défaut de solidité et de valeur. Hâtons-nous d’en jouir pendant que ces livres sont encore dans leur éclat ; ils ne sont pas faits pour durer, mais suffisent à leur action et à leur destinée. Ils sont agréables à feuilleter, amusans par leur diversité même, et intéressans par la comparaison des procédés d’illustration. Et quand à leur élégance s’ajoute le charme de quelques souvenirs historiques, la vue de nos merveilles d’art, — source inépuisable qui les alimentera longtemps, — c’est tout bénéfice pour les yeux et la rêverie.

De ces différentes manières des artistes photographes d’aujourd’hui, — qui sont symbolistes, impressionnistes, luministes, intimistes, qui sont, eux aussi, photographes de mœurs ou de paysage, de genre ou de portrait, et qui ne s’en tiennent plus à la gamme invariable des tonalités brunes, des sépias, mais nous créent l’illusion des pastels, des eaux-fortes, des fusains, des sanguines, — aucun ouvrage ne donnera une idée plus exacte que l’Épreuve photographique[1], avec ses impressions en taille-douce, fines, délicates, harmonieuses et qui portent toutes la marque personnelle. Et, dans l’Art et la Couleur, où trouver un ouvrage d’un caractère plus significatif, d’une individualité plus tranchée que les Maîtres contemporains[2], cette publication nouvelle et très originale, qui met à la portée de tous les œuvres des peintres modernes des diverses écoles et des différens pays, reproduites directement en couleurs, et nous fait connaître tout ce qu’il faut savoir d’eux dans de sobres et instructives notices, dues à la plume de critiques autorisés et d’écrivains compétens ?

Jamais peut-être les ouvrages consacrés à l’histoire de l’Art n’ont été d’ailleurs plus nombreux qu’aujourd’hui, comme en témoignent la collection des Grands Artistes[3], où viennent de paraître Gainsborough[4]et Ruysdaël[5], — les Villes d’art célèbres où ont paru récemment Florence[6], Milan [7], le Caire[8], — la collection les Maîtres de l’Art[9]d’une exécution si soignée, — enfin l’Histoire de l’Art depuis les premiers temps jusqu’à nos jours [I. l’Art chrétien][10], qui doit les résumer toutes sous la direction de l’un des maîtres de la critique, M. André Michel qui a groupé autour de lui les collaborateurs les plus compétens, aussi connus pour leur jugement sûr que par leur talent. Et quand on parle de critique d’art, comment ne pas nommer les Maîtres de Venise[11], de John Ruskin ?

Dans un volume d’une perfection soutenue et qui unit à l’intérêt historique le charme rare et l’exquise élégance, le vicomte de Reiset, que des traditions de famille et les souvenirs de son aïeul, le lieutenant général de la Restauration, désignaient pour cette tâche, a évoqué la toute gracieuse et fière, l’énergique et séduisante figure de la Duchesse de Berry[12], durant les années que l’on pourrait définir les années heureuses et les années françaises, — celles qui précédèrent et suivirent le mariage, où le bonheur devait être de si brève durée, qui furent si vite assombries par la mort tragique de son mari et, dix ans plus tard, par la ruine de la monarchie légitime, et l’exil. L’historien arrête là son récit, à la veille des hauts faits de la campagne de Vendée, que tant de biographes ont racontée. Rien de plus attachant que le récit de sa jeunesse simple et retirée en Sicile, de son arrivée si fêtée en France ; de cette existence, tout d’abord si brillante à la cour de Louis XVIII, et qui va se compliquer des plus graves soucis ; où l’espérance apportée par la naissance du Duc de Bordeaux devait bientôt sombrer, et la réalité dépasser en infortune tout ce qu’on peut imaginer. Ce n’est pas dans son rôle d’héroïne que nous la verrons ; c’est dans la période qui va de son enfance, déjà troublée dès l’âge de huit ans, où la première révolution avait obligé les Bourbons d’Espagne à s’éloigner du royaume de Naples jusqu’à celle de 1830 qui chassa les Bourbons de France. Sous tous les aspects de sa vie d’enfant, de jeune fille et de femme, de sa vie intime et officielle, la voici tout d’abord dans le palais royal de Palerme auprès de son grand-père et de sa grand’mère ou encore à Monreale et à Bocca di Falco, résidences habituelles du prince héréditaire, dans cette île pittoresque et lointaine d’où étaient bannies les rigueurs de la Cour de Madrid et de Vienne, et où elle avait été élevée dans les traditions de liberté et d’indépendance dont jouissent rarement les princesses royales ; puis, en France, « reine des élégances » à l’Elysée, aux Tuileries, sur la plage de Dieppe comme sous les ombrages de Rosny, et telle qu’elle se montrait elle-même dans le Journal qui consignait, régulièrement, en quelques lignes, les événemens de chaque jour. Elle nous y apparaît dans tout le laisser aller de son naturel capricieux et instinctif, qu’une éducation très sommaire, comme celle que recevaient toutes les jeunes filles napolitaines, n’a pas modifié, avec ce cœur généreux qui se livre dans un abandon naïf aussitôt qu’on lui a inspiré quelque confiance, mais que la moindre contradiction exaspère ; cet esprit vif et pénétrant, cette volonté assez forte pour dominer les événemens et lui faire braver toutes les fatigues et tous les dangers avec autant de patience et d’intrépidité que de courage et de noblesse d’âme.

C’est dans le château même de Brunnsee, où la Duchesse de Berry a vécu tant d’années, que le vicomte de Reiset a pu consulter le précieux Journal confié par M. le duc della Grazia, lire les lettres si spontanées que le Duc de Berry adressait à sa fiancée et c’est dans ces vastes salles où, depuis trente-cinq ans, sont conservés ces meubles, qui jadis ont orné les appartemens des Tuileries et les salons de Rosny, ces miniatures, ces portraits qui sont ceux de Marie-Caroline et de ses enfans ceux de ses parens les plus chers et de ses amis les plus fidèles, qu’il a évoqué son souvenir. Il revit au milieu même de tout ce qu’elle aima, de tout ce qui lui était familier. Musée incomparable, d’où sont sorties les illustrations de ce livre, comme la vérité et la précision des faits des archives du château, si riches, si complètes, qui étaient jusqu’ici restées fermées à tous, et grâce auxquelles l’historien de la Duchesse de Berry a pu faire justice de plus d’une calomnie intéressée, de ce que l’on appellerait aujourd’hui « le fait du Prince, » et qui sont de tous temps la souveraine ressource des hommes d’État. Tous ces témoignages sont appuyés par les renseignemens les plus solides, fortifiés des indications précises et des traditions les plus curieuses que M. de Reiset a reçus ou recueillis de Mgr le duc de Parme, de Son Altesse Royale Mme la comtesse de Bardi, de Mgr le comte d’Eu, ceux du comte Charles-Ferdinand de la Roche, dernier fils, encore vivant, du Duc de Berry ; de Mme Harson, ancienne lectrice de Madame, du baron de Mesnard, des comtes René de Monti, de Mefïray, René Talon, de la Rupelle, du duc Decazes, de la princesse de Montbart ; enfin par les papiers laissés par le lieutenant général vicomte de Reiset, et par tous les mémoires de l’époque.

Les illustrations sont aussi bien exécutées que le récit qu’elles accompagnent est original et attachant. De nombreuses planches en photogravure tirées en taille-douce, en camaïeu dans le texte et hors texte, reproduisent les traits de Marie-Caroline, ceux de ses ancêtres d’Autriche, les portraits de la famille du prince royal des Deux-Siciles et les principaux événemens de la vie de la Duchesse de Berry à l’Élysée-Bourbon, aux Tuileries, à Rosny, d’après les tableaux de David, Gros, de Chasselat, de sir Thomas Lawrence, de J. -B. Isabey, de H. Lecomte, de Renoux, de Dugoure, de Mme Vigée-Le Brun, de Dubois-Drahonet, de Robert Lefèvre, de Menjaud, de Hardivilliers, les aquarelles de la Duchesse de Berry elle-même, celles d’Eugène Lami, de Garneray, et les miniatures représentant la famille royale de France, peintes par la comtesse de Fordet, œuvres dont la plupart appartiennent à M. le duc della Grazia, et notamment les deux plus exquis de ces tableaux, la miniature de 1819 et le portrait peint par Mme Vigée-Le Brun vers 1828, que les fac-similés en couleurs rendent dans toute leur élégance apprêtée et leur si frais coloris. N’est-il pas piquant de rapprocher de ce livre celui de M. René Bazin sur le Duc de Nemours[13], qui abonde en souvenirs intimes, en documens originaux, en lettres inédites dont l’illustration est également faite d’après les collections du prince et qui apporte des renseignemens nouveaux sur le gouvernement de Juillet, le règne de Louis-Philippe, et l’exil de Claremont ?

Un volume qui obtiendra certainement un succès considérable est celui de M. Moreau-Vauthier. Après avoir montré, l’année dernière, la beauté et les grâces de la Femme[14], il nous donne cette année l’Homme et son image[15]. L’intérêt du commentaire s’y ajoute à celui qui naît de la vue des œuvres les plus belles qu’aient produites les artistes de tous les temps, de tous les pays et de toutes les écoles. Dans le portrait, l’art et l’histoire se complètent, se pénètrent et s’éclairent. Ce ne sont pas seulement les personnages plus ou moins fameux dont nous revoyons ici les traits, c’est encore l’histoire même de leur temps, dont leur physionomie porte en quelque sorte le caractère et marque l’évolution même des sociétés qui changent et des mœurs qui se transforment. Elles reflètent, ces images, l’âme même qui n’est plus, et qui semble affleurer au visage, le siècle où ces êtres d’élite ont vécu, ses rayons et ses ombres, et résument en quelque sorte les gloires qui ne passeront point et ce qui en reste d’immortalité. Après avoir imposé sa volonté par sa force, son épée, la grâce de ses manières, l’homme domine par la puissance de son intelligence et de la réflexion.

Que de merveilles dans cette incomparable galerie, qui s’ouvre avec les figures de bois ou de terre, les bustes des Pharaons : la statuette de l’intendant Sekhem-Ka, du Scribe égyptien, les pierres taillées représentant des Assyriens du palais de Khorsabad, les χοάνα (choana) des Grecs, les canopes des Étrusques, pour finir aux peintures de Bonnat, au portrait de Pasteur, aux bustes de Baudry par Dubois, et de Jean-Paul Laurens par Rodin, réunion universelle, où chacun se distingue dans l’individualité même de son génie ! Que de chefs-d’œuvre et que de chemin parcouru en art, en science et en civilisation ! et quelle idée heureuse de nous le faire parcourir à notre tour en nous mettant sous les yeux, dans les gravures les mieux choisies et les mieux exécutées, ceux qui ont été et sont l’honneur de l’humanité et qui restent les bienfaiteurs et les grands semeurs d’idées !

Dans l’Histoire contemporaine par l’image[16], c’est l’évocation, dans son mouvement général, de tout un siècle de notre existence nationale, la résurrection de tout ce qui en a marqué les heures brillantes ou mélancoliques, tristes ou glorieuses, qui surgit, à la lueur d’une flamme vivifiante, de cendres presque éteintes et, pour un moment, ranimées. Les grands faits de notre histoire moderne, toutes les manifestations de la vie sociale y apparaissent dans les détails les plus saisissans, sous les aspects les plus pittoresques, en une suite de scènes de mœurs et de tableaux historiques, qui commencent au début même de la Révolution, et dont la théorie se poursuit et se déroule, dans une succession d’images chronologiquement disposées, jusqu’à la fin du siège de Paris et la défaite de la Commune, toutes communiquant à chacune des pages une sorte de frémissement de vie et laissant une impression si forte sur l’esprit, que le souvenir des événemens qu’elles traduisent doit rester à jamais gravé dans la mémoire. 1789-18721 entre ces deux dates fatidiques et sinistres, que ne s’est-il point passé, et de quels spectacles la France n’a-t-elle point été témoin ? Sunt lacrymæ rerum, c’est la réflexion qui s’impose en fermant ces annales d’un siècle qui vit tant de bouleversemens, tant de révolutions, de changemens de régimes et de gouvernemens, de guerres étrangères et fratricides, d’un siècle que la Mort ouvre, domine et ferme du tranchant de sa faux.

Après les scènes vécues, les travers de notre temps. S’il est vrai que la caricature n’ait jamais pu convenir aux idéalistes, celles de Puvis de Chavannes[17]ne devaient pas faire exception ; et c’est bien ce que l’on constate en parcourant les croquis que le peintre de Ludus pro patria, du Bois Sacré cher aux Arts et aux Muses, de la Légende de sainte Geneviève, de l’Inspiration chrétienne, de Doux Pays, ne destinait pas sans doute à la publicité, mais qui sont curieux en ce qu’ils montrent ce qu’un artiste épris de la beauté, peut faire dans le domaine comique, dans le genre le plus opposé à la nature même de son génie, fait de simplicité et de noblesse, de pureté et d’harmonie. En sens, les caricatures d’une psychologie peu compliquée réunies dans cet album, où la verve burlesque, l’imagination excentrique, fantastique et fabuleuse, inventent des mascarades monstrueuses ou tragique qui font penser à Gallot, à Edgar Poë, à Flaubert et à Victor Hugo, sont Intéressantes à connaître. Et puis ne trouve-t-on pas, çà et là, quelques traits de génie qui rappellent le maître dans ces fantaisies imaginées par délassement et qui sentent la fatigue d’être sublime, dans la tension de cette vie de labeur, de foi et de désintéressement ?

Parmi les ouvrages originaux de l’année, il faut mettre encore en première ligne la magnifique publication de M. de Nolhac sur les Jardins de Versailles[18], sur tout ce solennel ensemble de plantations régulières, de bosquets, de pièces d’eau et de bassins de bronze et de marbre qu’ennoblit encore un assemblage merveilleux, un incomparable groupement de chefs-d’œuvre de la sculpture française dans sa robuste originalité et sa fi ère élégance. La grandeur d’un règne, la volonté d’une direction unique s’y manifestent dans la majesté de l’œuvre tandis que la puissance des décorateurs éclate dans les moindres détails et force l’admiration. Cette harmonie générale, cette relation étroite entre le décor et le cadre, cette adaptation parfaite de l’architecture au milieu, de l’ornementation à la construction, du dessin des parterres et tapis verts et du canal à la perspective, c’est bien l’impression qui naît de l’examen de ces deux cent cinquante gravures tirées en deux tons, — qui conviennent surtout pour donner l’idée juste et l’impression exacte des bronzes et des marbres, — et dont beaucoup représentent les créateurs, les architectes et les sculpteurs des jardins de Versailles et de ses aspects aux diverses époques.

Dans les Coins de Paris[19], c’est tout un voyage dans le passé, mais depuis les origines de notre histoire et jusqu’à nos jours, que nous pouvons entreprendre en admirant, chemin faisant, avec un guide toujours bien informé, des merveilles qui en font une ville incomparable.

Le volume sur les Colonies françaises[20], qui est le sixième de la Géographie pittoresque et monumentale de la France[21], publiée sous la direction de M. Charles Brossard, complète cette superbe collection, à laquelle ont collaboré les savans, les géographes, les voyageurs et les explorateurs les plus autorisés, et qui est aussi appréciée pour la-sûreté de son information, la précision des détails, des statistiques et des descriptions que pour le choix, l’élégance, la sincérité et la fraîcheur des planches dues à M. A. Slom, qui s’est chargé d’exécuter la totalité des aquarelles semées dans l’ouvrage. Plus de six cents gravures donnent la vue la plus exacte des sites les moins connus, de nos colonies, de l’infinie variété de leurs paysages, et de leurs habitans, comme de leurs ressources. C’est une véritable leçon d’histoire et de géographie de la France et de la plus grande France, en même temps qu’elle est un véritable enchantement pour les yeux. Avec la France s’achève également l’Album géographique[22], publié par MM. Marcel Dubois et Camille Guy, et dont les quatre premiers volumes sont la plus utile et la plus savante des études sur les Aspects généraux de la nature, — les Régions tropicales, — les Régions tempérées, — et les Colonies françaises. Chaque ouvrage contient de 400 à 500 gravures, qui sont ici le meilleur commentaire du texte. Rappelons aussi la collection des Voyages en France, en 50 volumes, de la maison Berger-Levrault.

Dans la situation présente, il suffira d’appeler l’attention sur le Maroc pittoresque[23]. Avec M. Jean du Taillis, nous pénétrions dans un pays, qui, s’il est resté mystérieux et fermé jusqu’à ces derniers temps, fait aujourd’hui beaucoup trop parler de lui. Sphinx dressé en face de l’Europe et dont elle ne devine point l’énigme. Mais aucune relation n’offre un intérêt plus soutenu et plus captivant que celle de M. Perceval Landon, correspondant du Times, et membre de l’État-major de la mission ou plutôt de l’expédition anglaise du Thibet, commandée par le colonel Younghusband. A sa suite, à travers les plateaux les plus élevés du monde, il est parvenu jusqu’à Lhassa[24], la ville sainte du bouddhisme, la ville du Dalaï-Lama et des gompas, ou monastères sacrés, la « ville interdite, » et nous décrit ce pays aux mœurs étranges, aux traditions mystérieuses. Rappelons aussi Trois ans au Klondike[25], de M. Jeremiah Lynch, qui a vécu plusieurs années sur les rives, et exploré les mines d’or, du Youkon.

Ceux qui aiment les récits de voyages lointains trouveront à satisfaire leur goût dans le Tour du Monde[26], qui nous conduit cette année dans les régions les plus opposées ; avec le docteur Lamy, en Afrique ; avec M. Raymond Bel, en Océanie ; avec M. Miramon Fargues, aux ruines d’Angkor ; avec M. Paul Gruyer à l’Ile d’Elbe sous Napoléon[27].

Mais, sans aller si loin, quel charmant voyage que celui que l’on peut faire, en quelques jours, Au vieux pays de France[28], guidé par un aimable cicérone aussi informé que M. Louis Rousselet, l’auteur de l’Inde des Rajahs ! La Touraine, l’Anjou, le Berry, la Sologne, la Vendée et la Bretagne, le bassin de la Loire, n’est-ce pas le pays qui a le plus contribué à la naissance et au développement de notre nationalité et qui est, par conséquent, le plus riche en souvenirs historiques, celui qu’un grand géographe, Elisée Reclus, a appelé la France par excellence ? Les Témoins du passé[29], de M. Charles Géniaux, nous montrent quelques-uns. des plus curieux monumens de nos vieilles provinces, châteaux forts, calvaires bretons, ruines féodales, maisons du moyen âge et de la Renaissance en nous instruisant sur leurs origines.

Tous ceux qui ont à cœur le souci de notre histoire nationale mais qui ne peuvent l’étudier à fond dans l’impartiale et imposante Histoire de France[30]composée sous la direction de M. Lavisse, et publiée chez Hachette, auront plaisir à lire le livre où M. Georges Montorgueil évêque l’énigmatique et déplaisante figure de Louis XI[31], dans ses grandes lignes et dans quelques-unes des attitudes de la légende. Mauvais fils, roi de mine vulgaire aux traits ignobles, avare et de mise sordide, défiant et tourmenté, traître et cauteleux, flatteur et persuasif, plaisant et plein de verve, à l’air confiant et bonhomme, mais qui n’eut point d’égal en dureté et en perfidie ; cruel comme tous les Valois, sans être débauché comme eux, et le plus remarquable de sa race, jaloux de son autorité et de mauvaise foi pour la conserver, s’appuyant sur les petits pour abattre les grands feudataires et les princes du sang, courageux dans les combats et tremblant devant la mort, sacrifiant à des dévotions mesquines, rendant un culte aux petites images de la madone de Cléry, tel on le voit passer dans ces compositions de Job, animées d’un entrain bien français, dans ces illustrations en couleurs ou monochromes, d’une fantaisie charmante, d’un caractère simple, grave ou noble, mais toujours appropriées au texte, qui nous retracent si bien le Louis XI des Chroniques. Voici le jeune Dauphin apercevant Jeanne d’Arc à la Cour de Charles VII, le Dauphin chez le Duc de Bourgogne, la cérémonie du Sacre, le combat de Montlhéry, la reddition des Liégeois après la défection du roi de France, la signature de l’ignominieux traité de Péronne sous la menace de Charles le Téméraire, la bataille de Granson, l’impression, dans l’appartement du prieur Jean de la Farre, à la Vieille Sorbonne, du Miroir de la vie humaine et des premiers livres composés par les maîtres Michel, Ulrich et Martin, l’agonie au Plessis-lez-Tours, et la mort, telle que Comines l’a décrite. Ils sont bien faits, ces tableaux, pour frapper les jeunes imaginations et leur mettre sous les yeux des spectacles qu’ils n’oublieront plus.

Et quand il est question de nos vieilles provinces françaises, de tout ce qui rappelle nos traditions de patriotisme et de gloire, comment ne pas évoquer le nom de l’Alsace, qui éveille tant de souvenirs tristes mêlés d’espérance, et quel plus beau livre, pénétré de plus d’amour du pays, pourrait nous venir d’elle que celui de M. Georges Spelz, d’Isenheim, qui est à la fois un artiste et un poète, et qui, dans les Légendes d’Alsace[32], choisies parmi les plus belles, a mis tout son cœur de patriote et a voulu, — dans un livre, entièrement illustré par des Alsaciens : Henner, Joseph Sattler, Léon Schnug et Charles Spindler dans des compositions qui s’adaptent à la superbe typographie de l’imprimerie alsacienne, — enfermer quelque chose de l’âme de sa patrie. Comme il est mélancolique et doux ce chant venu de là-bas, symbolique et touchant comme le son de l’Angélus, et ne semble-t-il pas qu’il porte plus loin et soit mieux entendu quand il sort de nos vieux clochers ?

Les amateurs de livres où l’élément scientifique se môle à l’étude de la nature et qui donnent des enseignemens présentés avec savoir et agrément ne sauraient trouver une ouvrage plus soigné et plus complet que le nouveau volume de la Vie des animaux illustrée[33]consacré aux Oiseaux[34]. Nous avons signalé la valeur des études déjà publiées sur les Mammifères par M. A. Ménégaux, sous la direction de M. Edmond Perrier. On retrouvera, dans cette monographie, toutes les qualités qui font, de ce précis savant, un livre de lecture toujours agréable, où rien ne rappelle la manière abstraite, la technique sévère des traités spéciaux. Les superbes planches en couleur et les figures qui accompagnent le texte sont les reproductions fidèles de peintures et de dessins d’un artiste de talent, M. W. Kuhnert, qui a représenté les diverses espèces d’oiseaux, la richesse du plumage, la variété du coloris, la grâce du geste et de la forme, avec autant d’art et d’exactitude que de vérité, dans tout l’éclat et l’animation de la vie.

Dans les Grandes cultures[35], nous apprendrons à connaître les produits de l’industrie humaine que nous utilisons tous les jours et dont l’origine et la préparation restent pour beaucoup lettre morte. Les sujets sont empruntés au monde végétal, aux espèces seulement qui sont d’un intérêt général, c’est-à-dire aux plantes de grande culture. Le lecteur verra défiler sous ses yeux tour à tour le laboureur, qui sème et récolte, le coolie, qui fournit son travail, le marin, qui transporte les marchandises, le petit marchand qui les vend et le consommateur qui les achète. Suivre les plantes, dans les diverses phases de leur existence, depuis le jour de leur éclosion jusqu’au moment où elles sont consommées, équivaut parfois à faire le tour du monde. La feuille de tabac conduira le lecteur chez les Peaux-Rouges d’Amérique, chez l’Islandais des régions polaires ; le grain de riz de la hutte du sauvage des Tropiques, à la boutique du parfumeur de la rue de la Paix et le grain de raisin, — emblème de la concorde et de l’union — peut le mener je ne sais où. Composé sous la direction du docteur Van Someren Brand, avec le soin et la conscience que les Hollandais apportent en toutes choses, ce livre, à la fois populaire et pittoresque, est illustré exclusivement par la photographie, et le choix et la diversité de ces vues prises dans les pays les plus lointains, de ces illustrations directes, au nombre de plus de 700, donnent bien la sensation de quelque chose de vu et de vécu.

Si l’on veut se tenir au courant du progrès et des découvertes de la science, aucun livre ne saurait mieux convenir que la Science au XXe siècle[36]. Que de régions encore inconnues à explorer et combien de manifestations de l’énergie universelle dont la cause reste et restera cachée ! Les phénomènes de la foudre[37], si curieux, si terrifians et singuliers dans leurs effets, l’existence de rayons cérauniques sont étudiés dans ce livre, si documenté, de M. Camille Flammarion, qu’il suffit de nommer pour dire tout l’intérêt de cette nouvelle œuvre de vulgarisation scientifique. Mentionnons encore dans les livres de science : la Navigation sous-marine[38]de M. Lecornu, et Promenades au pays des frivolités[39]de M. Louis Coupin.

Parmi les œuvres d’imagination qui ne vieilliront point, un livre qui occupera toujours une place d’honneur dans la bibliothèque des enfans, et qui s’adresse également à tous les âges parce qu’il amuse et exalte la volonté et l’esprit de décision et qu’il est un traité d’éducation naturelle, est assurément Robinson Crusoé[40], d’où se dégagent à la fois une leçon de philosophie et de courage, le robuste sentiment de la responsabilité personnelle mêlé d’utilitarisme pratique, qui unit l’esprit de discipline à l’esprit d’initiative. Elle est de tous les jours la moralité relative qui se laisse lire sous les voiles transparens de l’allégorie romanesque, et, si les compatriotes de Robinson en ont bien profité tous, pour conquérir le monde, d’autres lecteurs y goûteront les âpres joies de la solitude et de la lutte pour la vie, et y admireront la puissance de la volonté. A la fantaisie de l’artiste les aventures de l’immortel héros de Daniel de Foë offrent un thème inépuisable, et dans cette édition, nouvelle et charmante, M. Fraipont, dans ses aquarelles et dans ses dessins, a trouvé les inspirations les plus variées et les interprétations les plus originales.

De Robinson né presque en même temps que Gulliver[41]procèdent, après Don Quichotte[42], la plupart des conteurs qui, depuis le XVIIe siècle, ont mis dans leurs récits d’aventures extraordinaires, avec beaucoup de verve et d’humour, une dose de morale ou de philosophie, et dont la manière a eu une si prodigieuse fortune. Ils sont aujourd’hui légion, à la suite des Fenimore Cooper, des Gabriel Ferry, des Jules Verne. Et, puisque nous avons nommé un des conteurs les plus ingénieux et les plus féconds de notre temps, dont la disparition a laissé tant de regrets parmi ses lecteurs et a été ressentie de toute la jeunesse, mais dont l’œuvre restera toujours vivante, et appréciée, citons ses deux derniers romans : l’Invasion de la mer[43]et le Phare du Bout du monde[44]. Le premier se déroule dans le désert saharien et au milieu des chotts bouleversés par un tremblement de terre et envahis par la mer ; le second relate le drame de l’Ile des États, l’île des naufrages, et le dernier refuge d’une bande de pirates, pilleurs d’épaves. Comme la plupart des romans publiés par la maison Hetzel, ils ont tout d’abord paru dans le Magasin d’éducation et de récréation[45], où l’on a également pu suivre, dans le Maître de l’Abîme[46], par André Laurie, les explorations du sous-marin modèle l’Éperlan, et la nouvelle odyssée de son équipage, prisonnier, au Cambodge, du dernier rejeton des souverains khmers, Zinki-Johol, le savant magicien aux richesses merveilleuses, dans le palais duquel le commandant Aubry ne s’ennuie pas en la compagnie de la séduisante princesse Jali, en attendant l’heure de l’évasion. Le héros de M. Pierre Perrault obéit à sa Fière devise[47] : « Quand même ! » dans ce roman qui n’a rien d’un roman à clé, qui a pour théâtre les Balkans, et qui contient bien des scènes touchantes. On peut d’ailleurs, pour faire un choix dans ces collections comme dans celles de la Petite Bibliothèque blanche[48]et des Albums Stahl[49], s’en fier au goût de l’éditeur, à son habile et longue expérience, aux traditions de cette maison d’édition, enfin aux noms de leurs auteurs.

À ce genre de romans d’aventures où l’habileté, le fin de l’art est de faire accomplir aux personnages des exploits invraisemblables et de les faire accepter du lecteur, se rattachent l’Invasion jaune[50]du commandant Danrit, — Millionnaire malgré lui[51]de M. Paul d’Ivoi, où les deux gracieuses héroïnes, sont Américaines et où les Français, — les fiancés, — ont affaire aux Japonais et aux Chinois, — Champion du tour du monde[52]où l’on voit un Japonais, ancien polytechnicien, constructeur d’un insubmersible-aviateur, devenir l’allié des Américains contre les Anglais dans la future guerre, et tant d’autres récits où les Japonais et les Américaines ont remplacé encore les Boers et les Russes et quelquefois les Peaux-Rouges et les Nègres, et sont devenus les représentans de l’héroïsme, de l’intelligence et de la générosité, de l’esprit chevaleresque, etc., — ce que ne confirment pas toujours l’Histoire de la guerre russo-japonaise[53], de M. Gaston Donnel, écrite au cours des événemens, ni Trois mois avec le maréchal Oyama[54], de M. Villetard de Laguérie.

Parmi les récits qui se recommandent à la jeunesse par des aspirations généreuses, une brillante imagination au service de beaux sentimens, un tour ingénieux, plaçons en première ligne Madame Corentine[55]où l’auteur de Donatienne, de la Terre qui meurt et des Oberlé[56], dont une édition vient d’être illustrée par M. Charles Spindler, a porté une observation très précise, une fine sensibilité, dans l’admirable cadre de Jersey, de Lannion, Tréguier, Perros-Guirec, Trestrao et Ploumanach ; — le Fiancé de Catherine[57], par M. R. de Saint-Maur, épisode de la guerre de 1870, dont le héros, fait prisonnier à Sedan, s’échappe pour revenir se battre autour de Belfort, et, par son dévouement et sa vaillance, a bien mérité le bonheur qui lui échoit lorsqu’il retrouve sa fiancée, — une Idylle dans un drame[58], qui retrace les tragiques aventures de deux enfans, la fille d’un gentilhomme émigré et le fils d’un colonel de l’armée impériale, — le Chevalier de Puyjalou[59], par M. de Charlieu, — roman de cape et d’épée, avec les qualités de goût et de verve qui font le succès du genre, — le Serviteur du Lion de la Mer[60], histoire d’un marin anglais mêlé à la chouannerie, illustrée par Job, contée avec un grand souci de l’invention pittoresque et beaucoup d’originalité. Dans les Contes du Soleil et de la Brume[61], M. Le Braz évoque sous nos yeux ces « paysages de légende, » ces « nuits d’apparition et ces « équipées de printemps » qui traduisent le mysticisme et la fière mélancolie du génie breton et de la terre d’Armor, terre d’idéal, de résignation et de foi, dont il a sondé le mystérieux, pénétré le charme suranné et puissant et l’originalité profonde. Renvoyons pour les autres, st les meilleurs, aux Lectures pour tous[62], au Journal de la Jeunesse[63], au Saint-Nicolas[64], au Petit Français[65], à la Vie Heureuse[66].

Dans cette littérature, où tout a sa place, l’histoire et la légende, mais surtout les inventions étranges et la fantaisie, combien de livres seraient encore à nommer : Mérites obscurs[67], de M. L, d’Avezan ; — Ma Petite[68], de M. A. Dourliac ; — Juana, la Fiancée mexicaine[69], par M. Louis Boussenard, — Cartahul le matelot[70], par M. Henri Leturque, — l’Espion[71], nouvelle édition de Fenimore Cooper ; — les Bottes de sept lieues[72], de Mathilde Alanic ; — le Ko-Hi-Noor ou le Diamant du Rajah[73], par M. E. Salgari ; — Chasses en Abyssinie[74], par M. H. Decaux ; — La petite Colonelle[75], par M. F. Trémisot ; — le Petit fauconnier de Louis XIII[76], par M. J. Chancel ; — l’Œil de Tigre[77], par M. Georges Pradel, — les Briseurs d’épées[78], de MM. Paul d’Ivoi et Royet, — les Mémoires d’un cheval[79], — Nobles Cœurs[80], récit amusant, moral et pathétique de Mme Cazin, l’auteur de plusieurs petits contes distingués par l’Académie française. Citons encore parmi ces publications d’une fantaisie charmante, avec des illustrations en couleurs ou monochromes toujours si bien appropriées au texte, les Assiégés de Compiègne[81], livre écrit dans le genre des vieilles chroniques avec autant d’humour et d’esprit dans la narration que de verve dans les dessins, — le Soldat français[82], de M. Louis Tarsot, avec les croquis d’Eugène Chaperon ; — les Musiciens célèbres[83] ; — Perles noires et flocons de Neige[84], — Un voyage dans le Veut[85], de Mme Richard Lesclide ; — les Broderies[86], — les Audiences joyeuses[87], de Jean Drault, qui ne feront pas moins rire que les Petits drames du poste ; enfin les Quatre fils Hémon (sic)[88], par M. Albert Cim, avec les dessins d’Edouard Zier[89].

On n’attend pas que nous analysions ces romans, qui sollicitent surtout le lecteur par l’attrait de l’imprévu, et dont plusieurs n’ont, en fait de nouveauté, qu’un habit neuf et que l’illustration, parfois, d’ailleurs, d’une fantaisie charmante. Ne suffit-il pas au lieu de « feuilleter à cette heure un livre, à cette heure un aultre, sans desseing, à pièces descousues, » suivant l’expression de Montaigne, de renvoyer les jeunes lecteurs à tous ces romans, albums, bibliothèques et journaux, confidens de leurs premiers pleurs et de leurs premières joies : ils y pourront faire leur choix de même que l’abeille recueille tout nectar dans les prés en fleur :


Floriferis ut apes in saltibus omnia libunt.


J. BERTRAND.

  1. Henri Plon.
  2. Laurens.
  3. Laurens.
  4. Laurens.
  5. Laurens.
  6. Laurens.
  7. Laurens.
  8. Laurens.
  9. Librairie de l’Art ancien et moderne.
  10. Armand Colin.
  11. Hachette.
  12. Manzi et Joyant.
  13. Mame.
  14. Hachette.
  15. Hachette.
  16. Flammarion.
  17. Delagrave.
  18. Manzi et Joyant.
  19. Flammarion.
  20. Flammarion.
  21. Flammarion.
  22. Armand Colin.
  23. Flammarion.
  24. Hachette.
  25. Delagrave.
  26. Hachette.
  27. Hachette.
  28. Hachette.
  29. Mame.
  30. Hachette.
  31. Combet.
  32. Revue alsacienne illustrée. Strasbourg.
  33. Librairie J. -B. Baillière et fils.
  34. Librairie J. -B. Baillière et fils.
  35. Flammarion.
  36. Delagrave.
  37. Flammarion.
  38. Nony.
  39. Nony.
  40. Laurens.
  41. Laurens.
  42. Laurens.
  43. Hetzel.
  44. Hetzel.
  45. Hetzel.
  46. Hetzel.
  47. Hetzel.
  48. Hetzel.
  49. Hetzel.
  50. Flammarion.
  51. Combet.
  52. Flammarion.
  53. Ch. Delagrave.
  54. Hachette.
  55. Mame.
  56. Calmann Lévy.
  57. Combet.
  58. Mame.
  59. Hachette.
  60. Hachette.
  61. Ch. Delagrave.
  62. Hachette.
  63. Hachette.
  64. Delagrave.
  65. Armand Colin.
  66. Hachette.
  67. Hachette.
  68. Hachette.
  69. Combet.
  70. Combet.
  71. Combet.
  72. Combet.
  73. Delagrave.
  74. Delagrave.
  75. Delagrave.
  76. Delagrave.
  77. Mame.
  78. Juven.
  79. Juven.
  80. Hachette.
  81. Laurens.
  82. Laurens.
  83. Laurens.
  84. Nony.
  85. Juven.
  86. Juven.
  87. Mame.
  88. Mame.
  89. Hachette.