Les Mains (Le Roy)

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Les Mains (Le Roy)
Parnasse de la Jeune BelgiqueLéon Vanier, éditeur (p. 199-200).


Les Mains


Sur les fenêtres de mon cœur
Deux pâles mains se sont collées :
Mains de douleur et de malheur,
Mains de la Mort, mains effilées…


C’était sinistre de les voir
Si nocturnement illunées,
Levant vers moi leur désespoir,
Telles que des mains de damnées.


Et Celle de ces mains de deuil
Qui donc pouvait-elle bien être,
Pour que la mort fût sur mon seuil
Depuis ce soir de la fenêtre ?


Non, ces mains ne pouvaient bénir,
Maudites, certes, étaient-elles,
Puisque j’ai désiré mourir
D’avoir vu leurs pâleurs mortelles,


Puisque le vin de mes amours,
Amertumeux et plein de larmes,
Endolorit le pain des jours
Depuis leur signe aux fatals charmes.


Mains sinistres ! Mains de poison !
Gestes de ténébreuses vierges !
Vous avez lui dans ma maison
Comme deux mortuaires cierges !


Ma douleur regarde la Mort,
Car l’Espoir a fermé sa porte,
Et, tristement, le vent du Nord
Souffle sur ma chandelle morte.