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Les Merveilles de la science/L’Électro-magnétisme et Machines à courant d’induction - Supplément

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Furne, Jouvet et Cie (Tome 1 des Supplémentsp. 428-451).
SUPPLÉMENT
à
L’ÉLECTRO-MAGNÉTISME
et aux
MACHINES À COURANT D’INDUCTION



CHAPITRE PREMIER

les machines dynamo-électriques. — généralités. — définitions. — l’anneau de gramme. — classification des machines dynamo-électriques. — principe de la machine auto-excitatrice.

Dans la Notice des Merveilles de la science sur l’Électro-magnétisme et les Machines à courant d’induction [1], nous avons exposé les principes généraux de l’induction voltaïque et de l’induction magnétique, et nous avons décrit les premières machines magnéto-électriques de Pixii, de Clarke et de Nollet, cette dernière perfectionnée, ainsi que nous l’avons dit, par la Compagnie l’Alliance, et connue, à cette époque, sous le nom de Machine de l’Alliance. Nous avons également parlé de la machine de Wilde, dans laquelle les aimants sont partiellement remplacés par des électro-aimants.

Dans ce Supplément, consacré à consigner les inventions et découvertes faites dans l’Électro-magnétisme, depuis l’année 1870 jusqu’à ce jour, nous n’avons à ajouter rien de particulier concernant les lois de l’influence réciproque des courants, qui ont été exposées dans cette Notice, parce qu’ils n’ont fait aucun progrès pouvant, par ses applications, intéresser nos lecteurs. Mais une application de premier ordre de l’Électro-magnétisme a été réalisée : c’est la machine dynamo-électrique. Cette machine est fondée sur les mêmes principes de l’électro-magnétisme que les machines magnéto-électriques que nous avons décrites, mais elles les ont à peu près entièrement supplantées.

Ce sont les machines dynamo-électriques qui, en fournissant la source d’électricité la plus puissante et la plus sûre, ont amené l’immense développement qu’a pris de nos jours l’électricité, avec les nombreuses applications industrielles qu’elle a reçues : éclairage électrique, galvanoplastie, électro-métallurgie, transport et distribution de la force à distance, etc., etc.

Nous avons également à parler, mais plus brièvement, des perfectionnements apportés aux machines magnéto-électriques, qui, dans certains cas particuliers, sont employés de préférence aux machines dynamo-électriques.

Mais avant d’aborder l’étude et la description de ces deux ordres d’appareils, il est indispensable de donner des définitions précises et de rappeler quelques principes généraux.


On appelle champ magnétique la portion d’espace dans laquelle se fait sentir l’influence d’un aimant, et dans laquelle existent des forces spéciales d’attraction et de répulsion.

Faraday a eu l’idée de représenter la direction et l’intensité de ces forces, qui varient de chaque point du champ magnétique, par des courbes, qu’il a appelées lignes de force.

On appelle intensité du champ magnétique en un point quelconque, l’intensité de la résultante des forces d’attraction et de répulsion en ce même point.

Par machine dynamo-électrique, dans le sens le plus large du mot, on doit entendre un appareil destiné à convertir l’énergie, prise sous la forme d’un mouvement mécanique, en énergie sous forme de courants électriques, et vice versâ.

Les machines dynamo-électriques reposent toutes sur le principe d’électro-magnétisme découvert par Faraday en 1831, et que nous rappellerons ici. « Quand on fait mouvoir dans un champ magnétique un conducteur faisant partie d’un circuit fermé, ce conducteur devient le siège d’un courant électrique induit. »

La cause de la production de ce courant se comprend sans peine. Pour déplacer le conducteur dans le champ magnétique, on éprouve une certaine résistance, car il faut vaincre les attractions et répulsions qui s’exercent dans ce champ. On est donc obligé de dépenser une certaine quantité de travail ; et c’est ce travail qui produit le courant d’électricité d’induction.

Le champ magnétique peut être produit par un aimant permanent, comme dans l’ancienne machine de l’Alliance. On a alors une machine magnéto-électrique. Mais on réserve plus particulièrement le nom de machine dynamo-électrique ou plus brièvement de dynamo, à celle dans laquelle le champ magnétique est produit par un électro-aimant, et où le magnétisme se développe par le fonctionnement de la machine elle-même.

La machine de Wilde, que nous avons décrite dans les Merveilles de la science [2], est une machine dynamo-électrique, dont les électro-aimants sont excités par une petite machine magnéto-électrique.

Cette distinction des machines électriques en magnéto et dynamo est peut-être un peu arbitraire, au point de vue scientifique, mais elle est commode, et elle est employée dans l’usage courant. Nous la conserverons pour la clarté de l’exposition.

Les machines électriques comprennent toujours deux systèmes, animés d’un déplacement relatif. On appelle inducteur le système destiné à produire le champ magnétique, que ce soit un aimant ou un électro-aimant, et on appelle induit, ou armature, le système approprié à la production des courants induits.

C’est un étudiant italien, Pacinotti, qui a eu le premier l’idée de constituer l’armature comme on le fait généralement aujourd’hui, et c’est le même physicien qui a construit la première machine dynamo-électrique.

Le mode d’enroulement de l’induit employé par Pacinotti a été repris et modifié par M. Gramme, ancien ouvrier de la Compagnie l’Alliance, qui lui a donné la forme connue sous le nom d’anneau de Gramme. C’est donc à M. Gramme que revient l’honneur d’avoir amené d’un seul coup la machine dynamo-électrique à sa forme, pour ainsi dire, parfaite et définitive. M. Gramme a été, pour la machine dynamo-électrique, ce que fut James Watt pour la machine à vapeur de Newcomen. C’est pour consacrer ce fait historique que le gouvernement français a décerné, en 1888, le grand Prix Volta de 50 000 francs à M. Gramme.


Nous allons décrire en détail l’anneau de Gramme, dont la connaissance est fondamentale, et indispensable pour l’étude des machines dynamo-électriques.

Supposons un anneau de fer doux sur lequel est enroulé un fil de cuivre sans fin, et plaçons cet anneau entre deux pôles magnétiques. Il s’aimantera par influence, et prendra des pôles magnétiques, qui seront respectivement de noms contraires à ceux des pôles inducteurs. Si l’on fait tourner l’anneau, ses pôles resteront fixes dans l’espace, et toujours en regard des pôles inducteurs. Les phénomènes seront les mêmes que si le fil tournait seul sur l’anneau.

Dans ce mouvement, toutes les spires de fil, situées, à un moment donné, d’un même côté du diamètre perpendiculaire à la ligne des pôles, sont parcourues par des courants induits, de même sens. Toutes les spires situées de l’autre côté du diamètre sont parcourues par des courants induits de même sens, mais de sens contraire à ceux des premières spires.

Le diamètre considéré, suivant lequel les courants induits changent de sens, est ce qu’on appelle le diamètre de commutation. Il partage le champ magnétique en deux régions, dans lesquelles les lignes de force sont de sens contraire. Si, maintenant, nous considérons une spire dans sa demi-révolution d’un côté du diamètre de commutation, le courant induit qui la parcourt varie constamment d’intensité, et atteint son maximum quand elle est en face du pôle correspondant.

Dans chaque moitié de l’anneau, tous les courants induits étant de même sens s’ajoutent et produisent un courant résultant, égal à leur somme. La même chose se passe dans l’autre moitié de l’anneau, où les courants résultants sont égaux, mais de sens contraire.

L’anneau ainsi disposé présente une disposition absolument semblable à celle de deux éléments de piles, combinés en quantité.

Pratiquement l’anneau de Gramme, dont nous donnons, ci-dessous, une coupe est composé d’un faisceau A, de fils de fer doux. Le fil induit B, qui recouvre l’anneau, se trouve partagé en bobines distinctes, placées les unes à côté des autres et réunies en tension, le bout finissant de l’une étant soudé au bout commençant de l’autre.

Fig. 361. — L’anneau de Gramme.

Pour recueillir les courants produits dans les deux moitiés de l’appareil, l’arbre de rotation, sur lequel est fixé l’anneau, porte une série de lames de cuivre, R, R, disposées de manière à former, par leur ensemble, un cylindre autour de l’arbre. Ce cylindre constitue le collecteur de la machine. Les lames sont en nombre égal à celui des bobines, et elles sont isolées les unes des autres. À chaque bande de cuivre on attache le bout finissant d’une bobine et le bout commençant de la suivante.

Dans le plan du diamètre de commutation, deux ressorts frotteurs métalliques, b, b′, composés de fils fins métalliques, et appelés balais, procurent le contact avec les lames métalliques, recueillent le courant et le transmettent au conducteur extérieur qui leur est fixé.

Les balais d’une dynamo sont analogues aux pôles d’une pile. L’un est le balai positif, l’autre le balai négatif. Entre les deux, il existe une différence de potentiel qui constitue la force électro-motrice utilisable dans le circuit extérieur.

Telle est l’armature, ou l’anneau de Gramme, qui constitue la partie essentielle d’une machine dynamo-électrique. Il a subi des modifications et des perfectionnements nombreux, mais il est resté jusqu’à ce jour le type classique des armatures.

La disposition du collecteur de l’anneau Gramme permet de recueillir un courant dont le sens est toujours le même, qui ne subit pas d’interruption complète, et dont l’intensité est, pour ainsi dire, constante, parce qu’il est la somme des courants induits dans la moitié des bobines, dont quelques-unes sont toujours à leur maximum de potentiel.

Dans d’autres machines, au contraire, les courants sont pris tels qu’ils sont développés dans les bobines induites. Comme ils changent de sens dans chaque bobine, au moment où elle passe d’un champ magnétique dans un autre, le courant résultant se modifie également. Il peut ainsi se trouver renversé jusqu’à trente mille fois par minute en passant chaque fois par zéro.

De là une subdivision à établir dans les machines dynamos. Les premières sont à courants continus ; les secondes à courants alternatifs.

On peut, il est vrai, redresser les courants alternatifs au moyen d’un commutateur, mais ils ne deviennent pas continus pour cela. Ils sont constamment de même sens, mais leur intensité varie de zéro à zéro, en passant chaque fois par un maximum.

Nous avons dit que les machines dynamo-électriques proprement dites sont celles dans lesquelles le champ magnétique est produit par un électro-aimant. Les dynamos se distinguent encore les unes des autres par le mode d’excitation de leur champ magnétique.

Les unes sont à excitation indépendante : le courant qui parcourt le fil des électros est fourni par une autre machine magnéto ou dynamo.

Les autres sont auto-excitatrices, c’est-à-dire que c’est la machine elle-même qui produit l’excitation de son champ magnétique.

Le principe de l’auto-excitation repose sur le magnétisme rémanent. Si le fer doux des électros était parfaitement pur, et ne présentait aucune trace d’aimantation, le mouvement de l’anneau de Gramme ne produirait aucun courant induit. Mais au moment où ce mouvement commence, le fer doux possède un magnétisme rémanent, qui donne naissance à un courant, très faible, il est vrai, mais suffisant, pour commencer l’excitation des électros. Ceux-ci peuvent, à leur tour, agir sur la bobine ; et il se produit ainsi une série de réactions successives, qui augmentent l’intensité du courant, jusqu’à ce qu’elle ait atteint l’intensité nécessaire. Ces opérations se passent, d’ailleurs, dans un temps très court.

Il faut remarquer que les machines à courants alternatifs ne peuvent être autoexcitatrices, que si l’on a soin de redresser les courants, avant de les envoyer dans le fil des électros ; sinon elles doivent être excitées par une machine magnéto-électrique, ou par une autre dynamo à courants continus.

Mais parmi les machines auto-excitatrices, il faut encore distinguer, car l’excitation peut se faire de plusieurs manières. La machine est à excitation simple, ou en série, quand l’inducteur est parcouru par le courant total de la machine. Elle est à excitation dérivée, lorsqu’ils sont parcourus par une simple dérivation du courant principal. Enfin elle est à excitation en double circuit, quand les électros sont excités à la fois par le courant total et par une dérivation. Dans ce dernier cas, la machine est dite à enroulement compound, c’est-à-dire composé, par analogie avec les machines à vapeur dites compound.


Telles sont les notions générales, indispensables pour comprendre le fonctionnement des différentes machines dynamo-électriques.

Nous passerons maintenant en revue : 1o les machines dynamo-électriques à courants continus ; 2o les machines dynamoélectriques à courants alternatifs ; 3o les machines magnéto-électriques.




CHAPITRE II

machines dynamo-électriques à courant continu. — machine de gramme. — machine gramme à grand débit. — machines gramme-bréguet, machines siemens, siemens à barres, brush, edison, burgin, schuckert, victoria, gérard, weston, elmore, mather.

Nous étudierons les principales machines dynamo-électriques, en suivant à peu près l’ordre chronologique de leur apparition.

Fig. 362. — Première machine dynamo-électrique de Gramme.

La figure 362 représente la première machine Gramme à courant continu, qui ait été créée en vue de l’emploi industriel. L’inducteur comporte deux électro-aimants, A, A′, B, B′, montés l’un en face de l’autre, de façon que leurs pôles de même nom se trouvent vis-à-vis l’un de l’autre. Chacun de ces pôles s’épanouit en une coquille de fonte, qui enveloppe l’armature par un arc un peu moindre qu’une demi-circonférence. C, D est la bobine dans laquelle se développent les courants d’induction, F est le collecteur, E la poulie, actionnée par la machine à vapeur, qui fait tourner la bobine d’induction C D.

La figure 363 représente le modèle actuel le plus répandu de la machine Gramme.

Fig. 363. — Machine dynamo-électrique, modèle actuel.

Nous n’avons pas à revenir sur la description de l’anneau de Gramme et de son collecteur. Le seul désavantage de cet anneau, c’est que la portion intérieure du fil de ses bobines se trouve en dehors de l’action directe des électro-aimants, et constitue une résistance inutile.

Lorsque la machine est au repos, les inducteurs, qui sont pourvus de magnétisme rémanent, agissent sur le fer de l’anneau. Dès que celui-ci est mis en mouvement, le fil qui l’entoure est traversé par un courant, qui passe dans les inducteurs et augmente leur action magnétique. Cette action agit de nouveau sur l’anneau, qui fournit alors un aimant plus intense. Toutefois, cet accroissement d’intensité atteint son maximum, lorsque le maximum magnétique, correspondant au maximum de vitesse de l’anneau, est lui-même atteint.

Fig. 364. — Machine dynamo-électrique Gramme, octogonale.

La machine Gramme octogonale représentée sur la figure 364, et qui a été construite pour la transmission de la force, est caractérisée par l’emploi de quatre électro-aimants, produisant quatre champs magnétiques, dans lesquels a lieu la rotation de l’anneau. C’est donc une machine multipolaire. Il y a, par suite, quatre balais, qui touchent le collecteur dans les plans des deux diamètres du commutateur.

Fig. 365. — Machine dynamo-électrique Gramme, cylindrique.

Dans la machine Gramme cylindrique, que nous représentons dans la figure 365, l’électro-aimant est placé entre les deux plaques de fonte qui servent de support à l’appareil. Les noyaux du fer doux sur lesquels sont enroulées les deux bobines ont, en coupe, la forme d’un croissant ; ils se prolongent par deux demi-cylindres entre lesquels tourne l’armature.

Fig. 366. — Machine dynamo-électrique Gramme à grand débit.

Pour les machines à grand débit, M. Gramme a adopté la disposition qui se trouve indiquée sur la figure 366. Les électro-aimants verticaux y sont très multipliés ; on en compte jusqu’à 14, dans certaines machines destinées à des éclairages électriques d’une grande importance. Leurs noyaux sont assemblés entre deux plateaux de fonte, portant en leur milieu un encadrement de bronze, qui sert de support à l’arbre central.

La partie la plus intéressante de ce dernier type de machines est son armature, que nous représentons dans la figure ci-dessous.
Fig. 367. — Armature de la machine dynamo-électrique Gramme, à grand débit.


L’anneau, ou cylindre, est creux, constitué par cent lames de cuivre, en forme de coin, recouvertes chacune d’enveloppes isolantes, puis assemblées en un seul faisceau cylindrique. Sur chacune de ces lames sont fixées, perpendiculairement, des rais en cuivre, qui, vues de champ, forment deux étoiles séparant l’anneau proprement dit des collecteurs, également au nombre de deux. L’espace libre entre ces deux étoiles est rempli de fer doux, enroulé perpendiculairement aux génératrices du cylindre. L’anneau magnétique ainsi constitué est revêtu de cent nouvelles lames de cuivre, de section trapézoïdale, comme les premières, mais moins longues. Les extrémités de ces lames, qui forment la partie active de l’anneau, sont reliées aux rais, en cuivre, de manière à assurer l’unité et la continuité du circuit autour de l’âme du fer.

M. Bréguet, a construit, pour l’Hôtel continental, à Paris, une machine Gramme d’une puissance considérable, que l’on voit représentée dans la figure 368.

Fig. 368. — Machine dynamo-électrique Bréguet.


Cette machine, dont la vitesse est de 350 tours par minute, fournit un courant de 400 ampères, avec une tension de 100 volts. Elle est bi-polaire et à électro-aimants horizontaux. Le diamètre extérieur de l’induit est de 0m,85 ; la résistance du fil qui le constitue, et dont le poids n’est que de 71 kilogrammes, est de d’ohm. La résistance des inducteurs, dont l’excitation est en dérivation par rapport au circuit principal, est de 6,20 ohms, et le poids du cuivre enroulé de 600 kilogrammes.

L’excitation du champ magnétique se règle au moyen d’un rhéostat à touches, placé près de la machine, et qui, en introduisant dans le circuit d’excitation une résistance variable, permet de graduer l’intensité du courant qui le traverse.

Le travail électrique de cette machine est de 55,8 chevaux et son poids total de 8 000 kilogrammes.

Fig. 369. — Mode d’enroulement de la machine dynamo-électrique de M. Siemens.

Les machines à courants continus connues sous le nom de machines Siemens se distinguent des dynamos Gramme par la forme de l’induit. Cet induit, que nous représentons dans la figure 369, se compose d’un noyau cylindrique en fer. Le fil est enroulé dans le sens longitudinal et seulement sur la partie extérieure du cylindre. On évite ainsi la perte due à la résistance de la partie intérieure des bobines, qui est le défaut de l’anneau de Gramme ; mais les portions de fil qui se croisent sur les deux bases du cylindre sont encore sans action utile. Le fil de l’armature est divisé en huit bobines.

Quant aux inducteurs, ils sont constitués par une série de lames de fer, légèrement arquées près de la bobine et qui permettent une meilleure répartition du champ magnétique.

Fig. 370. — Machine dynamo-électrique de M. Siemens, type horizontal.

La figure 370 représente le type horizontal de la machine Siemens, et la figure ci-contre le type vertical.

Fig. 371. — Machine dynamo-électrique Siemens, type vertical.

Dans la figure suivante, nous représentons une machine Siemens du type vertical, mise en mouvement par un moteur à vapeur Brotherhood.

Fig. 372. — Machine dynamo-électrique Siemens, type vertical, actionnée par un moteur Brotherhood.

Dans ces dernières années M. Siemens a donné un grand développement aux machines dites à barres, dans lesquelles les bobines sont constituées par des barres de cuivre, au lieu de fil.

La machine de M. Brüsh, de Philadelphie, dont nous donnons le dessin à cette page, présente un grand intérêt tant au point de vue de sa construction, qu’à celui de l’intensité et de la tension des courants qu’elle engendre.

Fig. 373. — Machine Brüsh (de Philadelphie).

L’induit se compose (fig. 374) d’un anneau de fer doux, sillonné de huit gorges, qui reçoivent le fil des bobines. Grâce à cette disposition, l’anneau s’échauffe moins rapidement et se trouve plus près de l’inducteur.

Fig. 374. — Induit de la machine Brüsh.

Celui-ci est formé de deux électro-aimants oblongs, disposés en fer à cheval, et placés de telle sorte que les pôles de même nom se regardent. Pour redresser les courants qui sont alternativement renversés et impropres, par conséquent, à magnétiser les inducteurs, M. Brüsh a relié les hélices de l’anneau à un commutateur redresseur, formé de quatre balais en fil de fer. Les bobines diamétralement opposées sont reliées bout à bout, en tension, et le commutateur est disposé de manière que, chaque fois que le courant change de sens dans les bobines, celles-ci soient retirées du circuit. On évite ainsi la résistance inutile qu’elles lui ajouteraient.

Cette machine, qui a été utilisée avec un certain succès pour l’éclairage électrique, a obtenu, en 1876, du comité de l’Institut de Franklin, le brevet de supériorité.


En 1879, M. Edison a construit une machine dans laquelle les inducteurs, contrairement aux appareils que nous venons de décrire, ne sont pas dans le circuit général. Ils sont composés par de forts électro-aimants, alimentés par une machine excitatrice du système Wilde. Quant à l’induit, il est constitué par une bobine Gramme munie de l’enroulement Siemens et du collecteur Gramme.

Cette machine ne présente, on le voit, aucune disposition nouvelle.

En 1886, M. Edison a construit, pour l’Opéra de Paris, une machine d’une très grande puissance, que nous représentons dans la figure 375, et qui peut alimenter mille lampes à incandescence. La disposition de ses organes diffère un peu des autres générateurs de ce genre. Les masses polaires sont comprises entre deux séries verticales d’électro-aimants inducteurs, formées chacune de quatre âmes de fer, de section circulaire, réunies en tension. Les deux séries sont réunies en quantité.

Fig. 375. — Machine dynamo-électrique Edison.

L’induit qui mesure 0m,80 de long, sur 0m,60 de diamètre, peut atteindre une vitesse maxima de 350 tours à la minute.

Il est formé de barres de cuivre rigides, disposées suivant les génératrices d’un cylindre. Les extrémités des barres de cuivre sont reliées transversalement par des disques de cuivre, isolés l’un de l’autre et présentant des saillies auxquelles sont fixées les barres de cuivre. Le champ magnétique est excité en dérivation : il ne consomme que 25 ampères et sa valeur atteint 5 000 unités, ce qui est considérable. Le courant est pris au collecteur par trois balais, disposés de chaque côté de cet organe.

La puissance de ce générateur, dont la marche est très régulière, est de mille ampères et de cent vingt-cinq volts.

La machine de M. Edison pèse environ 10 tonnes. Placée dans les caves de l’Opéra, elle est montée sur des rails, qui permettent de rectifier, pendant la marche, la tension des courroies de transmission.


La machine de M. Schückert, que nous représentons dans la figure 376, est assez employée en Allemagne. Elle possède des électro-aimants fixes, avec un induit mobile.
Fig. 376. — Machine dynamo-électrique Schückert.

Ces électro-aimants sont au nombre de deux, et leurs pôles de même nom sont placés vis-à-vis l’un de l’autre, en comprenant l’armature dans leur intervalle. Quant à l’anneau sur lequel se fait l’enroulement du fil, il est identique à celui de Gramme. D’une forme aplatie, il est composé d’une série de couronnes de tôle mince juxtaposées, et isolées les unes des autres. Le collecteur est le même que celui de Gramme.


La machine dynamo-électrique Schückert a été récemment modifiée par M. Mordey, qui a construit la machine Victoria, très employée en Angleterre.

Cette modification porte sur la forme des pièces polaires, dont l’épanouissement exagéré produit des actions nuisibles dans la machine Schükert.

Fig. 377. — Machine dynamo-électrique Victoria.

Les dynamos du type Victoria se construisent avec 4 pôles (fig. 377) et avec 6 pôles, mais elles n’ont que deux balais. Cette simplification a pu être réalisée en reliant les segments du collecteur qui ont toujours le même potentiel, c’est-à-dire les segments diamétralement opposés dans la machine à 4 pôles.

Les dynamos Victoria ont l’avantage de n’exiger qu’une vitesse assez faible.

Fig. 378. — Machine dynamo-électrique Gérard.

La machine de M. Gérard, que représente la figure ci-dessus, diffère notablement, par sa construction, des machines que nous venons d’examiner.

Elle se compose d’un tambour en fonte, soigneusement alésé, à l’intérieur duquel sont placés les inducteurs fixes. Les inducteurs sont constitués par quatre électro-aimants disposés aux extrémités de deux diamètres rectangulaires ; leur surface polaire, également alésée en forme de cylindre, contient l’induit. Les bobines de ces électros sont montées en tension, et reliées de telle sorte que les quatre pôles développés en regard de l’induit sont alternativement de signes contraires, et par conséquent de même signe sur le même diamètre.

L’induit est mobile et comprend un noyau en tôle de fer, ayant la forme d’une croix, qui se polarise sous l’influence des pôles inducteurs. On obtient ainsi quatre champs magnétiques, dans lesquels se meuvent les bobines induites. Celles-ci sont enroulées sur les branches du noyau. Elles sont au nombre de quatre, et fournissent un courant qui change quatre fois par tour, au moment où les bobines passent d’un champ magnétique dans un autre.

Elles sont réunies en tension, et leur enroulement est tel qu’à un moment donné le courant ait le même sens dans les quatre bobines.

Le courant changeant dans l’induit quatre fois par tour, il est nécessaire de le redresser, avant de l’envoyer dans les électros et dans le circuit extérieur. À cet effet, un commutateur, de forme spéciale, portant deux balais à 90° l’un de l’autre, est fixé sur l’arbre de l’induit.


La machine Weston, que l’on voit représentée dans la figure 379, comprend une armature mobile entre les pôles de deux électro-aimants. Les pôles qui sont placés vis-à-vis l’un de l’autre sont de même nom. Ils sont constitués par des plaques métalliques portant une série de fentes, afin de faciliter la ventilation. Les bobines de ces inducteurs placés en dérivation sur le circuit principal, sont formées de fil à grande résistance, de façon à ne dériver qu’une très faible partie du courant de la machine.

Fig. 379. — Machine dynamo-électrique Weston.

Le noyau de l’armature est formé d’une série de disques en tôle, munis de 16 dents à leur circonférence. C’est dans les intervalles compris entre les 16 dents de ces disques, qu’on enroule longitudinalement le fil induit. Le collecteur est identique à celui de Gramme.

Les dynamos Weston sont principalement employés, aux États-Unis, pour l’éclairage électrique par les foyers à arc Weston, et pour les lampes à incandescence Maxim.

Fig. 380. — Machine dynamo-électrique Elmore.

La machine Elmore a beaucoup d’analogie avec la précédente. Elle possède 6 électros, tournant devant les pôles de 6 électro-aimants fixes, et un commutateur extérieur. Seulement, les deux séries d’électros sont parallèles entre elles, au lieu d’être normales, et chaque électro est formé de deux bobines, au lieu d’une.

Cette machine présente une particularité intéressante. C’est le dispositif employé pour empêcher une trop grande élévation de température. L’arbre est creux, et tous les noyaux de bobines sont également creux ; ce qui permet d’établir une circulation d’eau ou d’air dans toutes les parties du disque en mouvement.


Fig. 381. — Machine dynamo-électrique de M. Mather, de New-York.

Enfin, parmi les machines les plus récentes ayant fourni de bons résultats, nous signalerons la machine que construit M. Mather, à New-York. Cette machine que nous représentons dans la figure ci-dessus, et qui a l’avantage d’être très stable, comporte une armature Siemens tournant entre les deux pièces polaires d’un puissant électro-aimant en forme de fer à cheval.




CHAPITRE III

machines dynamo-électriques à courants alternatifs. — machines gramme, siemens, de méritens, lontin, ferrati et thompson, gordon.

On a quelquefois besoin de courants électriques alternatifs, comme par exemple dans l’éclairage par les bougies Jablochkoff. On emploie alors des dynamos à courants alternatifs.

Fig. 382. — Machine Gramme à courants alternatifs.

Dans la machine à courants alternatifs, construite par M. Gramme et que nous représentons figure 382, l’inducteur est formé par un pignon magnétique, autour duquel rayonnent huit électro-aimants droits, qui se meuvent à l’intérieur de l’induit. Ces électro-aimants, qui sont de polarités contraires, engendrent successivement, dans chacune des sections de l’hélice induite, des courants alternatifs, et ils sont excités par une machine Gramme, à courants continus. L’induit, qui est fixe, est constitué par un cylindre de fer analogue à celui de la machine à courant continu du même inventeur ; quant aux bobines qui l’entourent, elles sont partagées en 32 sections et réunies en 4 séries différentes qui peuvent fournir chacune le courant à un circuit de 5 foyers.

C’est avec ces machines qu’étaient alimentées les bougies Jablochkoff qui ont éclairé pendant quelque temps l’avenue de l’Opéra à Paris, la place du Théâtre-Français, et qui éclairent encore la vaste salle de l’Hippodrome.

La disposition de cette machine a été simplifiée par M. Gramme. Sa machine nouvelle à courants alternatifs se compose, en réalité, de deux machines distinctes, mais qui sont montées sur le même axe et qui sont mises simultanément en mouvement. L’une d’elles est une dynamo ordinaire, à courants alternatifs ; l’autre sert d’excitatrice, et est à courant continu. L’installation est ainsi plus simple et moins coûteuse.


Fig. 383. — Machine dynamo-électrique Siemens à courants alternatifs, avec sa machine excitatrice.

La machine à courants alternatifs de M. Siemens que nous représentons dans la figure 383 diffère des précédentes en ce que les induits sont mobiles et les inducteurs fixes. Là, comme précédemment, c’est une petite machine Siemens à courant continu, qui alimente l’inducteur. Ce dernier se compose de deux séries de 16 électro-aimants, fixés sur des couronnes de fonte, de chaque côté de l’induit. Il est bien entendu que ces électro-aimants sont isolés du bâti qui les supporte, par des plaques d’ébonite, et que les fils qui les entourent sont disposés de manière à ce qu’un pôle sud soit toujours entre deux pôles nord, et réciproquement un pôle nord entre deux pôles sud.

L’induit est constitué par une roue en bronze, autour de laquelle sont fixées 16 bobines plates sans noyau, telles que des multiplicateurs galvanométriques. Tout ce système tourne rapidement autour des inducteurs, et le courant ne s’y développe que quand les sphères des hélices passent dans le champ magnétique des électro-aimants. Les fils de communication des bobines sont fixés sur un disque en bois, qui occupe la partie centrale de l’induit, et transmettent leur courant au collecteur de la machine.

Le type à 16 bobines que nous venons de décrire est divisé en deux circuits, pouvant alimenter chacun 10 lampes différentielles du système Siemens.


M. de Méritens construit une machine à courants alternatifs, dont le dispositif général rappelle celui de la machine magnéto-électrique du même constructeur, que nous décrirons plus loin, mais dans laquelle les aimants permanents ont été remplacés par des électro-aimants.


M. Lontin a inventé une machine à courants alternatifs, à armature polaire, et qui porte le nom de machine à division.

Un pignon mobile autour d’un axe horizontal, et muni de vingt-quatre dents de fer autour desquelles est enroulée une hélice, reçoit le courant de la machine excitatrice. Ce courant aimante chacune des dents du pignon, en alternant les pôles de la circonférence extérieure. Autour de l’inducteur se trouve l’induit, formé par un grand anneau de fer fixe, et garni intérieurement de vingt-quatre autres dents entourées d’hélices magnétisantes. Ces hélices sont réunies de l’une à l’autre par couples et leurs extrémités aboutissent à un manipulateur qui permet de grouper les bobines, soit en tension, soit en quantité, et de recueillir séparément ou collectivement, à l’aide de frotteurs, les courants qu’elles produisent. On peut à volonté, avec cet appareil, constituer vingt-quatre circuits distincts, alimentant autant de régulateurs, ou bien un seul circuit si l’on veut obtenir un foyer lumineux très puissant.

« Cette machine, dit M. du Moncel, auquel nous empruntons ces lignes, a été appliquée pendant quelque temps à l’éclairage de la gare du Chemin de fer de Lyon, où elle fournissait 31 foyers lumineux. Ces foyers résultaient d’un seul générateur électrique et de deux systèmes induits de 24 bobines chacun. En accouplant ensemble ces bobines et interposant sur chacun de leurs circuits plusieurs régulateurs de lumière électrique du système Lontin, on a pu, par une combinaison convenable de ces bobines, eu égard à la longueur du circuit extérieur, porter à 31 le nombre des foyers illuminés dont chacun était à peu près équivalent à 40 becs Carcel. »

Actuellement, ces machines sont installées à la gare des chemins de fer de l’Ouest (rive droite), où elles illuminent 12 foyers lumineux dont 2, situés à l’entrée de la gare, sont à 700 mètres de la machine, ce qui répond victorieusement à l’objection que certaines personnes ont faite contre l’emploi des courants alternativement renversés, qui, selon elles, ne devaient pas produire de lumière passé 200 mètres de distance.

L’excitation de cette machine à lumière est produite par une petite machine auxiliaire à courants continus.

La machine Lontin diffère de celle de Gramme en ce que l’induit, au lieu d’être constitué par un anneau, est formé par un tambour de fer à pignon magnétique, sur lequel sont assujetties quarante petites bobines, groupées quatre par quatre, et dont les axes sont dirigés dans le sens du rayon. Ces bobines se composent de noyaux de fer entourés d’hélices magnétisantes, disposées en tension, et formant une série d’électro-aimants qui tournent entre les pôles d’un fort électro-aimant inducteur. Dans cette machine, les courants engendrés dont le sens change à chaque demi-révolution sont recueillis par un collecteur disposé comme celui de l’appareil Gramme.

Fig. 384. — Machine dynamo-électrique à courants alternatifs de MM. Ferrati et Thomson.

La machine de M. Ferrati et de sir Thomson, que nous représentons dans la figure 384, a reçu quelques applications en Angleterre.

Comme la plupart des machines dynamo-électriques alternatives, elle comprend une armature induite tournant entre deux rangées circulaires d’électro-aimants inducteurs, dont les pôles sont alternativement de noms contraires.

Fig. 385. — Armature de la machine dynamo-électrique à courants alternatifs de MM. Ferrati et Thomson.

Chaque rangée contient 16 électros, dont la section est ovoïde, et qui sont montés en tension, et excités par une dynamo indépendante

L’armature présente une forme tout à fait originale, qu’indique la figure 385. Elle ne renferme aucune pièce de fer et se compose d’un long ruban de cuivre, de 36 mètres de longueur, de 12 millimètres de largeur et de 2 millimètres d’épaisseur. Ce ruban est contourné en forme de feston. Le nombre des boucles (L, L′) est de 8, c’est-à-dire moitié du nombre des électros ( NS, N′S′). Il s’enroule 12 fois suivant cette même courbe, en formant 12 courbes, isolées par des bandes de caoutchouc.

L’avantage de cette armature est d’être très légère, par suite de l’absence du fer ; ce qui lui permet de tourner à des vitesses de 1 900 à 2 000 tours par minute, et de présenter, en outre, une résistance électrique très faible.


La machine Gordon, la plus grande qui ait été construite jusqu’ici, est représentée figure 386.

Fig. 386. — Machine dynamo-électrique à courants alternatifs de M. Gordon.

Les armatures fixes sont constituées par des bobines en nombre double de celui des électro-aimants indicateurs mobiles. Il y a de chaque côté du disque mobile 32 bobines, tandis que chacune des plaques en porte 64.

Ces dernières sont roulées sur des noyaux en tôle de chaudière recourbés en forme de V aigu.

Les bobines alternées de la série fixe sont réunies ensemble en arcs parallèles, de manière à former deux circuits distincts, susceptibles d’alimenter des lampes, soit ensemble, soit séparément, et d’être couplés à volonté.




CHAPITRE IV

machines magnéto-électriques gramme, siemens, de méritens. — différents systèmes de distribution de l’électricité.

En ce qui concerne les applications, la machine magnéto-électrique est aujourd’hui à peu près complètement supplantée par la machine dynamo, en raison du coût relativement élevé des aimants permanents et de leur faible puissance. Cependant, elle est encore préférée pour certaines applications, comme par exemple pour la charge des accumulateurs.

La première machine Gramme, qui est connue sous le nom de modèle de laboratoire et qui est représentée figure 387, était une machine magnéto-électrique. Le champ magnétique est produit par un aimant permanent en fer à cheval, formé de plusieurs feuillets métalliques, entre les pôles duquel tourne une armature Gramme, du type ordinaire.


Fig. 387. — Machine magnéto-électrique Gramme. Fig. 388. — Machine magnéto-électrique Siemens à aimant naturel et à armature en navette.

La machine primitive de Siemens, construite dès 1855, et représentée dans la figure 388, était également une machine magnéto-électrique. Entre les deux pôles d’un aimant vertical en forme de fer à cheval, tournait une armature, d’une structure spéciale, et qui peut être considérée comme la première forme de l’induit Siemens, que nous avons décrit précédemment.

Ce noyau de fer doux a la forme en section d’un fer à double T, sur lequel le fil est enroulé en navette, parallèlement aux génératrices du cylindre.


M. de Méritens construit une machine magnéto-électrique, d’un usage assez répandu dans l’éclairage électrique, et dont nous donnons une vue (fig. 389).

Fig. 389. — Machine magnéto-électrique de M. de Méritens.

Dans cet appareil les courants d’induction, produits dans l’anneau d’une machine Gramme, viennent s’ajouter à ceux d’une machine magnéto-électrique ordinaire.

Pour bien comprendre ce qui se passe dans ce générateur d’électricité, il faut se rappeler : 1o que toutes les fois qu’on approche du pôle d’un aimant permanent le pôle d’un électro-aimant droit, le fil qui entoure ce dernier est parcouru par le courant d’induction qui y a pris naissance, et que si l’on vient à éloigner, avec une même vitesse et à la même distance, le pôle de l’aimant permanent, un courant égal, mais de sens contraire au premier, parcourt le fil de l’électro-aimant ; 2o qu’il se produit un courant d’induction, dit d’interversion polaire, lorsqu’on promène un aimant permanent d’une extrémité à l’autre d’un électro-aimant, à la condition de le tenir toujours très près du fil et parallèlement au noyau de fer doux. C’est sur ces deux modes particuliers d’induction qu’est fondé l’appareil de M. de Méritens.

L’anneau de cette machine se compose de seize bobines, qui passent successivement, à chaque tour de l’induit, devant un nombre égal de pôles d’aimants permanents. Le noyau de ces bobines est formé de soixante lames de tôle, de 1 millimètre d’épaisseur, rivées ensemble et présentant la forme d’un T à deux têtes, sur lequel est enroulé le fil qui constitue la bobine. Ce fil est gros ou fin, suivant que l’on veut avoir un courant de quantité ou de tension. L’avantage du noyau lamellaire est de pouvoir s’aimanter et se désaimanter instantanément, et de permettre de donner à la machine une vitesse d’environ mille tours à la minute.

Le générateur de M. de Méritens, dont la construction est d’ailleurs fort simple, présente encore cet avantage qu’il n’exige qu’une force motrice relativement faible ; que sa marche est d’une régularité parfaite, et qu’enfin les courants qu’elle fournit peuvent entretenir des régulateurs et alimenter quatre bougies Jablochkoff.


De grands progrès ont été réalisés, depuis quelques années, dans la construction des machines dynamo-électriques destinées à l’éclairage. Au début, en effet, les générateurs d’électricité étaient établis pour alimenter un nombre fixe de lampes ; de plus, lorsqu’on voulait éteindre un de ces appareils, on était obligé de lui substituer une résistance équivalente à la sienne, pour ne pas altérer la constance de la machine, qui dépensait toujours, et en pure perte, la même force motrice.

Avec les nouvelles machines, dites à distribution constante, on peut, sans troubler la marche du générateur, et en maintenant la proportionnalité entre l’éclairage effectué et la force motrice dépensée, allumer ou éteindre le nombre de lampes voulu.

Pour obtenir ce résultat, on a recours à deux systèmes de distribution. Dans le premier, ou système en dérivation ou à potentiel constant, la machine fournit, dans le circuit extérieur, une différence de potentiel constante et une intensité variable avec le nombre de lampes en service et la résistance de chacune d’elles.

Dans le second système, ou système de distribution en série, ou à intensité constante, la machine fournit un courant d’intensité constante et une force électro-motrice variable avec le nombre de lampes.

Dans les générateurs ordinaires, la résistance intérieure de la machine et la diminution de la force motrice occasionnée par le passage du courant qui traverse l’induit, produisent une différence de potentiel aux bornes. On compense cet effet, dans les machines à potentiel constant, par le double enroulement, imaginé par M. Brüsch, ou à l’aide de régulateurs.

Le double enroulement, appliqué pour la première fois à la distribution, par M. Marcel Deprez, consiste à recouvrir les inducteurs de deux circuits d’excitateurs. L’un, à fil long et fin, est placé en dérivation sur les bornes de la machine ; l’autre, monté en série, est traversé par le courant qui alimente les lampes.

Grâce à cette disposition, le courant d’excitation se trouve formé de deux courants, dont l’un, en dérivation, diminue quand augmente le débit de la machine, et dont l’autre, circulant dans les inducteurs en série, est proportionnel à ce même débit. La différence de potentiel aux bornes devenant, par ce moyen, presque invariable pour une vitesse constante, on peut, à volonté, allumer ou éteindre le nombre de lampes jugé nécessaire.

Parmi les machines dynamo-électriques de ce genre, il convient de citer le type connu en Angleterre sous le nom de machine Phœnix. Cette machine peut fournir jusqu’à 110 volts aux bornes et environ 800 ampères.

On peut encore obtenir une distribution à potentiel constant en corrigeant les variations de la force électro-motrice des machines dynamo-électriques, au moyen d’une sorte de relais, appelé gouverneur, ou régulateur électrique, et qui agit tantôt sur une résistance intercalée dans le circuit d’excitation, tantôt sur la vitesse de rotation de la machine.

Dans le système de distribution à intensité constante, telle qu’on l’obtient avec la machine Thomson-Houston, on fait varier la force électro-motrice du générateur proportionnellement au nombre de lampes à alimenter.

Pour atteindre ce but, MM. Thomson et Houston ont monté les inducteurs de leur machine dans le circuit général, et ils lui ont donné la disposition d’un solénoïde, à l’intérieur duquel tourne une bobine induite, formée par trois bobines qui engendrent des forces électro-motrices alternatives, changeant de sens à chaque demi-tour. Ces bobines sont couplées entre elles par le jeu d’un commutateur spécial, et de quatre balais reliés deux à deux, de manière à être toujours par deux en dérivation et en tension avec la troisième. D’autre part, les balais sont mobiles sur le commutateur, et peuvent, pendant un temps déterminé, mettre les bobines six fois par tour en court circuit.

MM. Thomson et Houston sont ainsi arrivés à compenser les variations du circuit extérieur et celles de la vitesse du moteur.

La machine Thomson-Houston fournit un courant moyen de 9,6 ampères, et une force électro-motrice pouvant varier de 50 à 1 600 volts, suivant le nombre de lampes à alimenter.

Ce générateur est appelé à rendre de très grands services, surtout dans les installations industrielles où l’on utilise souvent, comme force motrice, des machines dont la vitesse est très variable.

fin du supplément à l’électro-magnétisme et aux machines à courants d’induction.
  1. Tome Ier, pages 707-735.
  2. Tome Ier, page 725.