Les Renaissances/Lemerre, 1870/Sans cesse refoulé

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Les Renaissances Voir et modifier les données sur WikidataAlphonse Lemerre, éditeur (p. 31-32).

IV


Sans cesse refoulé, sans cesse jaillissant,
Aux flancs de la Matière entrouvrant des gerçures,
Un flot profond et sourd perle, comme le sang
Que filtrent lentement les vieilles meurtrissures.

C’est la source sacrée où, pas à pas, descend,
Pour y boire en silence et laver ses blessures,
Le troupeau des vivants saignant sous les morsures
Dont le Temps, dur pasteur, les déchire en passant.


C’est la Vie inconnue, éternelle et profonde
Dont vous vivez encore et fécondez le Monde,
O frères que pleurait la pâle humanité !

Car, après l’agonie et les adieux suprêmes,
Ce qui reste de vous est plus grand que vous-mêmes,
O Morts dont l’âme errante emplit l’immensité !