Les Souspirs amoureux de F B de Verville 1589/Mille regrets sont peu pour plaindre vostre absence

La bibliothèque libre.


LIX.


Mille regrets sont peu pour plaindre vostre absence,
Il les faut infinis, mais helas ! mon malheur
Me fait le temps trop court pour plaindre la rigueur
Du sort qui me punit sans avoir fait offence :

Je suis tousjours de mesme en ma perseverance,
Et si j'ay de l'ennuy j'en pleure la douleur,
Ainsi que maintenant je fons en ma langueur,
En desirant sans plus vostre heureuse presence :

Las ! je ne change point, toutefois le destin
S'irrite contre moy, & j'ignore la fin
De l'injuste tourment, dont sans cesse il m'accable.


Je ne sçay si je faux, si ce n'estoit faillir
De me plaindre trop peu, me voyant sans mourir
Plus que tous malheureux mille fois miserable.