Les Stations de l’amour/2

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L’Île des Pingouins (p. 13-27).

II

Calcutta, 3 décembre 18…

Hier, vers trois heures, après ma sieste, au moment où, j’allais prendre mon bain, mon boy me remit une carte correspondance ornée à l’un des coins d’une feuille de fougère, et qui ne contenait que ces mots : « Attendez-moi ce soir, chez vous, à six heures. Dora. »

J’eus un soubresaut en lisant ce billet. Quoi ! la belle Dora Simpson allait venir chez moi, après ce qui s’était passé l’avant-veille au bal du lieutenant-gouverneur ?… Mais alors ?… Cependant, l’idée me vint que c’était probablement une mystification de quelques jeunes gens qui, ayant remarqué mes assiduités auprès d’elle, voulaient se moquer d’un Français. Ou peut-être était-ce une femme qui désirait compromettre Dora et me mettre dans une situation ridicule ?… Peut-être aussi la capricieuse jeune fille, excentrique et volontaire comme je la connaissais depuis la scène du jardin, éprouvait-elle vraiment, pour moi, un caprice, sur les suites duquel je n’osais pas trop arrêter ma pensée ?… Bref, j’étais fort perplexe ; mais, mon hésitation ne fut pas longue.

Bah ! me dis-je, si c’est une mauvaise farce, nous le verrons bien ! Le rendez-vous est pour six heures ; d’habitude je ne sors guère avant ; si, à six heures dix, personne n’est venu, je monte dans mon buggy et vais, comme tous les jours, me montrer au Maiden[1]. De cette façon, personne ne pourra se vanter de m’avoir fait attendre sous l’orme.

Mais je ne te cache pas, ma chérie, que je fus fort agité pendant tout le reste de la journée et qu’il me fut impossible de travailler. J’étais inquiet, impatient, énervé ; je ne me reconnaissais plus, moi, l’homme habitué aux aventures et aux bonnes fortunes.

C’est qu’elle était bien séduisante et paraissait dénuée de tous préjugés, cette ravissante Dora, Deux jours auparavant je l’avais tenue dans mes bras, seule à seule ; j’avais pu l’embrasser et elle m’avais rendu mon baiser ; de plus, elle avait consenti à des attouchements qui n’avaient cessé que par la crainte où nous étions d’être surpris. Dans le peu de temps que j’avais passé avec elle, Dora m’avait paru extrêmement avancée. Elle s’était révélée à moi comme aimant le plaisir avec passion, d’une dépravation précoce qui n’excluait ni la raison, ni la décence extérieure, et d’une science qui ne lui laissait pas ignorer les rapports sexuels, et même quelque chose de plus ; car, après ce que j’avais vu et entendu, je ne pouvais guère me tromper sur la nature de ses relations avec son amie Flora.

Qu’elle était charmante aussi, cette Flora, avec ses cheveux si noirs, ses grands yeux d’un azur profond, d’une douceur, d’une tendresse incomparable, qui parfois se fermaient à demi, comme sous l’empire d’une jouissance qu’elle savourait par la pensée ! Et quand mon souvenir se fixait sur elle, je la préférais certainement à Dora. Si celle-ci inspirait des idées de volupté, même de débauches inouïes, Flora semblait faite pour l’amour dans ce qu’il a de plus tendre et de plus délicat, sans en exclure la sensualité qui dans notre pauvre humanité, chez moi du moins, l’accompagne toujours.

J’étais tellement plongé dans mes réflexions, et hypnotisé par ma douce vision, que je n’entendis pas sonner l’heure, que pourtant j’avais appelée avec tant d’impatience. Tout à coup je tressaillis en sentant une légère pression sur mon épaule, suivie de ces mots : « Eh bien ! monsieur ?… »

D’un bond je fus debout.

— Vous, mademoiselle !… Vous, miss Dora !…

— Oui, moi, ou plutôt nous…

En effet, Flora, que je n’avais pas vue d’abord, accompagnait son amie, me regardant avec le plus troublant sourire. Dora continua avec une expression légèrement railleuse : « Ne nous attendiez-vous pas ?… moi, du moins ?… Vous avez reçu mon billet ?… »

— Cela est probable, fit à son tour Flora, en montrant du bout de son éventail les fleurs dont j’avais, à profusion, orné mon salon.

— Oui, mais je vous comprends : il n’est pas commun qu’une jeune fille du monde écrive à un monsieur qu’elle connaît à peine et vienne le trouver chez lui ; mais vous le savez, je ne suis pas faite comme les autres, moi !

— Vraiment, je ne pouvais croire à tant de bonheur…

— Qu’appelez-vous tant de bonheur, monsieur ? reprit Dora, toujours sur un ton railleur. Nous sommes venues simplement par curiosité, voir un intérieur de garçon, de Français…

Flora se mit à rire.

— Tu vois, Dora, M. Fonteney croyait déjà à une bonne fortune, peut-être même à une double bonne fortune. Est-ce bien comme cela que l’on dit en français ?…

J’étais un peu décontenancé, bien que ni l’une ni l’autre n’eût l’air hostile. Elles s’assirent sur mon sofa, tandis que je prenais place auprès d’elles sur un petit fauteuil bas en rotin, lorsque Dora me dit, d’un ton sérieux : « Vous voyez, cher monsieur, avec quelle confiance nous sommes venues, Flora et moi, nous en remettre à votre discrétion. Nous aimons à croire que nous n’aurons pas à nous en repentir et que jamais vous ne révélerez, à qui que ce soit, la visite que nous vous faisons en ce moment, pas plus que les entrevues que nous pourrons avoir par la suite…

— Oh ! mademoiselle !…

— Laissez-moi finir. Vous allez nous jurer le plus grand secret sur ce qui se passera entre nous, et nous promettre que dans nos relations mondaines, qui seront sans doute fréquentes, vous aurez le même respect pour miss Flora Barnby et miss Dora Simpson, et que vous garderez vis-à-vis d’elles la même réserve que si vous les voyiez pour la première fois.

Flora ajouta, sur un ton un peu moins solennel, mais avec un sourire plutôt mélancolique : « Les Français passent pour légers et indiscrets. »

Je me levai alors, et gravement : « Mademoiselle, fis-je en m’adressant à Dora, votre demande était inutile ; j’ignore encore pourquoi vous êtes venues toutes deux chez moi, et quelles seront les suites de votre visite ; mais je suis un homme d’honneur, et jamais je n’en aurais ouvert la bouche à personne, même si vous ne m’aviez pas demandé la discrétion. Sur quoi voulez-vous que je vous le jure ?… »

— Oui, oui, je sais, interrompit Dora, en riant, mais non, il n’est pas besoin de jurer. Nous croyons que vous êtes un vrai gentleman. Votre parole nous suffit. Maintenant, venez vous mettre là, entre nous deux, et embrassez-nous.

À peine avait-elle achevé, que déjà j’avais collé ma bouche à ses lèvres, tandis qu’elle jetait ses bras autour de mon cou et que je sentais sa langue chercher la mienne. Pendant ce temps, Flora allait poser son chapeau et son mantelet sur un fauteuil.

— Quand vous aurez fini, dit-elle en revenant vers nous.

Je me séparai à grand’peine de Dora, qui alla aussi se débarrasser de ses vêtements, et pris à son tour Flora dans mes bras, tandis que son amie se renversait sur le dossier du canapé en écartant les jambes comme malgré elle, et murmurant : « Que c’est bon !… que c’est bon !… »

Elle se pâmait, pendant que je couvrais de baisers fous le cou, les yeux, la bouche de Flora, qui s’abandonnait et m’enlaçait d’étreintes passionnées. Je sentis en même temps la main de Dora chercher, à travers mon pantalon, l’objet que tu devines, et qui y faisait des mouvements désordonnés. Je n’y pouvais plus tenir et j’allais décharger, quand Dora s’arrêtant, me dit : Nous sommes bien seuls ?… Personne ne nous dérangera ?… »

— Absolument personne, mais si vous vouliez venir dans ma chambre, nous y serions plus à notre aise.

— Oh ! oui, allons-y, dirent-elles en même temps.

À peine entrés, Flora m’entraînait vers une chaise longue, s’y asseyait, appuyée au dossier, et m’étreignait contre sa poitrine, tandis que Dora se précipitait entre mes jambes écartées — car j’étais presque couché, le dos sur le ventre de Flora.

— Et maintenant, cher ami, dit-elle en s’étendant à son tour sur moi et en cherchant ma bouche, nous sommes à vous jusqu’à huit heures. Faites de nous ce que vous voudrez.

Dans la position où j’étais, Dora sentit ma main qui allait desserrer le cordon de ma mauresque pour délivrer certain prisonnier qui se démenait furieusement. Elle ne m’en laissa pas le temps, et sa menotte alla chercher le captif qu’elle mit en liberté. Il était temps…

— Regarde donc, Florie, comme il est beau !…

En effet, M. Jacques levait fièrement sa tête et, par ses soubresauts, semblait vouloir s’élancer. Flora paraissait hypnotisée par le bijou qu’elle voyait pour la première fois, et elle laissait ma main s’égarer sous sa jupe et atteindre sa fourrure. Je sentis qu’elle s’offrait, mais au moment où j’allais mettre le doigt sur le bouton sacré, je compris que je ne pourrais plus retenir mes écluses, car Dora n’avait cessé de manier messire Priapus, dont la force de résistance était à bout. Retirant ma main d’un mouvement rapide, je saisis presque brutalement le bras de Dora qui comprit et me murmura amoureusement : « Oh ! venez, je n’en puis plus, venez me le mettre… »

Flora, un peu confuse de se voir abandonnée, devina plutôt qu’elle n’entendit, et se levant, céda sa place à Dora qui s’étendit aussitôt, la retenant près d’elle.

Pendant que rapidement je me débarrassais de mes vêtements, Dora dit à son amie : « Viens, ma petite Florie, que je te fasse jouir aussi. »

Vêtu seulement de ma chemise, je m’étendis sur Dora, qui ouvrait ses lèvres à mes baisers, et me dit : « Entre, chéri, je ne suis plus vierge, tu n’aurais que du plaisir… »

Bien qu’elle fût étroite, en deux coups de reins je fus au cœur de la place, et aussitôt près de fondre ; je voulus alors me retirer, mais d’un bras vigoureux, Dora me retint et, d’une voix entrecoupée murmura : « Reste, reste, donne-moi tout… Et moi aussi je jouis… je jouis… Ah ! tiens !… tiens !… »

Et elle resta inerte, écrasant presque, dans son spasme, entre ses doigts, le clitoris de Flora, qui poussait un cri de douleur autant que de jouissance, et se tordant, se penchait sur moi en me mordant la nuque.

— Je suis morte ! eut-elle seulement la force de soupirer. J’étais un peu honteux que la bataille fût si tôt finie, mais vraiment nous avions trop attendu tous trois, et la promptitude du dénouement prouvait au moins l’intensité de nos communs désirs.

Quand nous reprîmes nos sens, et pendant que Dora me remerciait par un doux sourire, je sentis ses fesses remuer légèrement. Maître Jacques, demeuré en bonne place, revint à la vie. Elle me dit tout bas : « Encore !… »

Et sa main droite s’agita comme pour chercher le chat de Flora et recommencer à le caresser. Mais celle-ci, qui se réservait, s’était mise à genoux à côté de moi et d’un œil avide et curieux suivait tous les détails de l’opération, qu’elle seconda du reste de son mieux, caressant d’une main légère les boules vivantes qui bondissaient sous son nez et, du bout de son doigt, chatouillait l’orifice qui s’offrait à elle : ces titillations augmentaient encore l’intense volupté qui courait dans tous mes membres. Elle avait du reste de quoi satisfaire ses regards.

Plus maître de moi, cette fois, je distillais le plaisir et le faisais durer ; je revenais au bord et du bout de mon gland je chatouillais le clitoris de Dora qui, les bras jetés autour de mes reins, me serrait contre elle à m’en faire perdre la respiration : puis je me plongeais doucement jusqu’au fond de l’abîme, pour le quitter et remonter, après quelques coups rapides, tandis que ma victime poussait de petits cris de plaisir : « Oh ! c’est bon… comme ça… oui… darling… plus vite… my love… oh ! va ! va !… Florie, chatouille-le bien… Ah ! il te fera bien jouir aussi… tiens, tiens… voilà… donne… donne… je meurs… »

Je me pâmais de mon côté, et cette fois, je l’inondai d’un torrent de… ce que tu sais bien, ma chérie, et je demeurai pantelant dans ses bras.

Quand je fus sorti de mon extase, elle se redressa, la robe et la chemise relevées, et regarda autour d’elle.

— Là, lui dis-je, vous trouverez tout ce qu’il vous faut.

Elle disparut dans mon cabinet de toilette. Au même instant, et tandis que j’étais resté anéanti sur la chaise longue, Flora sortit du lavatory, où elle était allée se purifier, et s’approcha de moi en souriant, avec une petite cuvette pleine d’eau parfumée et une éponge, en me disant gentiment : « Étendez-vous et laissez-mois faire… »

En même temps elle lavait monsieur Jacques qui, tout ratatiné, laissait piteusement pendre sa tête : elle promena l’éponge sur toute la longueur et sur les environs, sans oublier l’endroit où elle avait si à propos mis le doigt : bref, elle me fit une toilette complète que je subis, plongé dans une douce et parfaite béatitude. Cependant le contact de l’eau fraîche et de ses menottes caressantes avait rendu toute sa vigueur au cher instrument, qui commença à donner des signes non équivoques de résurrection. Flora déposa sa cuvette, et venant m’embrasser, toute joyeuse : « Là !… voilà qui est fait, dit-elle… Mais regardez comme il est beau ! On dirait qu’il est tout prêt à recommencer… Est-il joli avec sa petite tête rose !… »

Et se jetant sur lui, elle le prit entre ses lèvres, lui donnant de petits coups de langue, promenant celle-ci sur toute la longueur, essayant de mettre l’un après l’autre mes globes d’amour dans sa bouche trop petite ; puis, revenant au gland, elle l’absorba tout entier avec la colonne qui le supporte et se mit à le sucer doucement, comme pour mieux le savourer. Moi, pendant ce temps, j’avais passé une main dans sa chemise ouverte et je chatouillais les boutons de ses seins que je sentais durs et fermes.

Dora rentra à ce moment ; elle avait laissé sa robe dans le cabinet de toilette et n’avait plus que sa chemise.

— Eh bien ! c’est cela, fit-elle gaiement, on profite de mon absence pour s’amuser sans moi ! Dis donc, gourmande, ne mange pas tout, laisse-m’en un peu… Mais quelle heure est-il ?

Flora s’était relevée avec un soupir de regret et regarda la pendule ; « Sept heures moins un quart. »

— Oh ! bon, alors : nous avons encore près d’une heure. Dites donc, chéri, j’ai soif, avez vous quelque chose à nous offrir ?

J’entrai dans le salon et en rapportai un plateau, que j’avais fait préparer par mon boy, sur lequel se trouvaient une coupe pleine de jus et de grains de grenade macérés dans du porto, des biscuits et quelques bananes. Dora se mit à faire les honneurs du goûter, tandis que Flora s’asseyait sur mes genoux et penchait vers moi son gracieux visage, en disant : « Qu’est-ce que vous allez penser de nous ?… »

— Que vous êtes deux charmantes créatures et que je vous adore, lui répondis-je, en la pressant sur ma poitrine.

— Moi, ça m’est bien égal ce que vous pensez de nous, fit à son tour Dora, et je ne sais pourquoi, mais j’ai une entière confiance en vous.

Elle but ce qui restait dans sa tasse et vint se placer sur la cuisse inoccupée.

— Moi aussi, mon cher, fit câlinement Flora… Au fait, comment vous appelez-vous ?…

— C’est drôle, reprit Dora, avoir un amant dont on ne sait pas le petit nom…

— Je m’appelle Léo… mais je dois vous avouer que mon acte de naissance porte le nom bizarre de Léonard.

— Léo-nard, c’est joli ; cela veut dire que vous avez la force du lion et la ruse du renard, dit Flora.

— Alors, je suis un double animal ?…

Elle éclatèrent de rire, et Dora, qui grignotait un biscuit, faillit s’étrangler : « À boire, fit-elle. »

Flora lui tendit un verre de porto qu’elle avala d’un trait.

— Vous ne savez pas encore combien Florie est spirituelle ; autant qu’elle est jolie. Lion… renard… je n’aurais jamais songé à cela… Alors vous serez notre petit lion.

Et déclamant :

— Vous êtes mon lion superbe et généreux ? comme dans Ruy Blas.

— Ah ça ! vous savez tout ?…

— Oh ! tout… excepté ce que vous aurez à m’apprendre.

— Mais il me semble…

— Oui, oui, je sais… vous avez dû être joliment étonné tout à l’heure et peut-être même vexé quand je vous ai dit que je ne l’avais plus… C’est comme cela que l’on dit à Paris, n’est-ce pas ?…

— Moi ! non, pas du tout… Et puis, j’aime autant cela…

Sept heures sonnèrent. La collation était terminée.

— Maintenant, fis-je, les tenant toujours enlacées, si nous allions sur mon lit ?… Voyez, il est très large…

— Oui, dit Dora en riant, allons nous reposer !

— En tous cas répliqua Flora, qui avait reprit mon outil, voici un monsieur qui, lui, n’a guère envie de se reposer…

— Oh ! non, il est plutôt prêt à recommencer ses fredaines…

Toutes deux s’étaient élancées sur le lit et s’embrassaient ardemment en entrelaçant leurs cuisses. J’apportai deux gros coussins pour la commodité de nos ébats.

Dites donc, petit lion, me dit Dora au moment où je venais sur le lit, vraiment ça n’est pas beau un homme en chemise. Enlevez donc ça !

— Je ne demande pas mieux, répondis-je, mais à une condition : vous en ferez autant. Je ne vous ai pas encore bien vues.

— Oui, oui, tu veux, Florie ?…

Et sans attendre la réponse, elle lui enleva son dernier vêtement et se débarrassa du sien. Elles étaient assises, toutes nues, sur le lit.

— Oh ! je vous en prie, descendez une minute que je vous voie debout tout entières… Que vous êtes belles !…

— Voilà, fit Dora en se dressant devant moi et en entraînant Flora rougissante qui retenait d’une main, sur ses seins, la chemise qu’elle venait de quitter, et cherchait, de l’autre main à cacher le triangle d’une superbe toison noire, brillante et veloutée.

— Vrai, ma chérie, depuis que je t’ai quitté, je n’avais jamais rien vu d’aussi parfait que ces deux corps de femmes, frissonnant d’impudeur, devant mes yeux éblouis. Dora, plus grande, plus imposante, la taille cambrée nerveusement : des seins petits, piriformes, d’une pureté exquise ; une toison fauve mettant une ombre dorée sur un ventre blanc comme du marbre. Flora, un peu plus petite, plus potelée, les contours plus arrondis : un charme infini émanant de toute sa personne, quelque chose d’alangui et de caressant ; des seins bien ronds, d’une fermeté admirable, un pubis soyeux et rebondi. Quelles belles créatures !

Toutes deux se retournèrent et je pus admirer encore un torse d’une souplesse étonnante, de belles hanches, plus rondes et plus charnues chez Flora, plus vigoureusement accentuées chez Dora, mais d’un dessin également pur, et qui surmontaient chez l’une et chez l’autre deux fesses fermes, élastiques, palpitantes, d’une opulence de chair rappelant celles des femmes de Rubens.

Je me baissai et leur appliquai à toutes deux, à toutes quatre, devrais-je dire, d’ardents baisers, qui s’égaraient jusque dans les sillons entr’ouverts dont je sentais les plis se contracter sous cette caresse nouvelle. En me relevant, je vis mes deux déesses seins contre seins, en train de se passer d’ardentes langues.

— Vous nous avez assez vues, venez au lit, dit alors Flora en entraînant sa compagne sur la couche où je fus en même temps qu’elles.

— Mais un homme aussi est beau tout nu, dit Flora en me couvrant de baisers fous… et en m’enlevant ma chemise.

— Surtout dans cet état, ajouta Dora en riant ; allons, monsieur, fit-elle en s’adressant à maître Jacques, tenez vous un peu tranquille, soyez sage…

Et elle lui donna une petite tape sous laquelle le mutin eut un mouvement de révolte.

— Là, là, reprit la folle, on ne vous veut pas de mal : tenez… et elle lui donna un baiser. Mais attendez votre tour… Nous allons maintenant nous occuper de toi, ma chérie, continua-t-elle en se tournant vers Flora ; tu n’as pas eu ton compte tout à l’heure.

— J’ai pourtant bien joui…

— Parbleu, j’ai écrasé ton pauvre petit bouton ; mes doigts en étaient tout mouillés.

— Et moi, dit Flora, je crois que je vous ai mordu. Oh ! regarde donc, Dora, notre ami a l’épaule toute meurtrie. Oh ! pardon chéri : cela ne vous fait pas mal ?…

Et de sa langue, elle imbiba et couvrit de salive la morsure où je ressentais, en effet, une légère douleur.

— Étends-toi, dit Dora, en glissant sous ses reins un des coussins que j’avais apportés.

Flora, écartant d’elle-même ses jambes, mit en évidence une motte ravissante, exhiba le plus joli petit conin qu’on puisse voir, qui bâillait déjà, attendant une caresse.

Je crus que Dora voulait se réserver son amie, et je me préparai à le lui mettre, à elle, en levrette. Mais elle devina mon intention, et me dit : « Non, pas cela ; c’est vous qui allez donner votre langue au chat de notre petite chérie, pendant qu’elle m’en fera autant. »

Et se tournant de mon côté, elle s’installa sur le visage de Flora, lui prenant les seins entre les deux mains, pendant que je commençais une ardente minette à l’adorable enfant.

Dora finit par s’affaisser sur moi, et je sentais son souffle haletant, caresser mes cheveux ; Flora ne pouvait parler, mais elle laissait parfois échapper des cris étouffés, et son ventre, vers lequel Dora avait glissé une main, bondissait sous mes lèvres.

Tout à coup, ayant fouillé l’intérieur d’un énergique coup de langue et pris à pleine bouche le clitoris dans une forte succion, je la sentis se pâmer ; un double cri de jouissance retentit, tandis que Dora s’affalait en rugissant, le nez sur la toison de son amie.

J’étais remonté vers Flora toujours immobile, qui me saisit la tête à pleins bras et se mit à boire sur mes lèvres la liqueur qu’elle y avait fait couler. Dora reprit ses sens. « Oh ! chérie, dit-elle comme tu m’as fait jouir !… Et toi, tu as joui aussi, petite cochonne, tu décharges encore… attends, attends, je vais te nettoyer… »

Et passant rapidement, entre ses jambes, un mouchoir qu’elle avait eu la précaution de mettre sur le lit, elle reprit la position que je quittais à peine et recommença l’exercice lingual auquel je venais de me livrer, sans la moindre protestation de la part de Flora.

Dora, cependant, levait en l’air son superbe cul ; je fus tout de suite devant la porte qui se présentait et à laquelle Priape frappa impatiemment ; mais la lesbienne, passant rapidement la main par derrière elle, le remit dans le bon chemin.

Que te dirai-je, chère amie ?… Au bout de quelques minutes, nous nous pâmions de nouveau dans une triple jouissance, aussi intense que les précédentes… Dora sauta du lit la première et courut au cabinet de toilette.

Flora revint à elle et, quoique à moitié morte de plaisir, se précipita sur le pauvre Jacques, très affaibli, qu’elle mit dans sa bouche, pour en faire jaillir encore quelques gouttes : « C’est bon, fit-elle, en passant avec volupté sa langue sur les lèvres. Vous aimez aussi qu’on vous suce ? »

— Certainement : une jolie bouche comme la vôtre et de douces lèvres valent mieux que le plus joli des minets.

— Oh ! tenez, il relève encore la tête, ce polisson-là !…

Et se mettant à genoux, elle le reprit avidement dans sa bouche, décidément prodigue de cette caresse.

Dora revenait en chemise.

— Il est sept heures vingt, dit-elle, nous avons encore un peu de temps.

Puis, voyant l’occupation à laquelle se livrait son amie, elle s’écria : « Encore ! fit-elle… et voyez comme monsieur se laisse faire… Mais vous allez vous tuer, chéri… »

— Oh ! pour trois ou quatre petits coups !… Il me semble que je pourrais passer une nuit entière entre vous deux, à vous baiser tout le temps.

— Oui, et vous seriez sur le flanc pendant un mois. Au moins, restaurez vous !…

Elle trempa un biscuit dans du porto, et nous passa à chacun un verre de claret et une banane.

— Tiens, Flora, change de banane !…

— Oh ! fit celle-ci, en saisissant toutefois le fruit qu’on lui présentait, tu me déranges toujours !

— Croirais-tu, mon petit Léo, que Flora est encore pucelle et qu’elle ne veut pas qu’on le lui mette ?… À dix-neuf ans, n’est-ce pas honteux ?…

— D’abord, mademoiselle, je n’ai pas encore trouvé d’occasion qui me tentât…

— Et maintenant, ma petite chatte ? lui demandai-je en lui passant la langue autour de l’oreille, caresse qui la fit tressaillir.

Avec vous, cher ami, répondit-elle câlinement, je ne dis pas non !… mais pas aujourd’hui… je t’en prie : je le dirai quand j’en aurai envie…

Et déjà elle avait repris la banane vivante qui se morfondait, et de ses lèvres de velours lui rendait sa fière prestance.

— Comme tu es gourmande, dit Dora ; vous n’allez pas recommencer tous les deux, je suppose !

— Non, non, répondis-je ; c’est moi qui remerciais Flora.

— Je crois, en effet, qu’elle le mérite, répliqua Dora en riant… Et moi, on ne me remercie pas ?

— Oh ! si : vous m’avez donné plus de bonheur que je n’aurais osé en rêver. Vous êtes la plus délicieuse petite…

— Petite cochonne, dites le mot.

— Eh bien ! oui. Mais où donc avez-vous appris toutes nos expressions ?

— Je vous ai dit, je crois, que j’avais passé deux ans à Neuilly, dans une pension anglo-française. C’est là que j’ai connu Flora, et c’est à Paris que j’ai sauté le pas… Je vous conterai cela… Oh ! ce Paris !… je l’adore…

— Allons, allons, bavarde, il est huit heures moins vingt.

— Et papa, qui a du monde à dîner, reprit Dora. Je n’ai que le temps de déposer Flora chez elle et d’aller m’habiller.

— Quand vous reverrai-je ?

— Attendez… C’est aujourd’hui vendredi… je ne crois pas avant jeudi… Et toi, Flora ?…

— Quand vous voudrez…

— C’est bien long…

— Reposez-vous pendant ce temps-là… Maud en sera…

— Maud ?…

— Oui, dit à son tour Flora, Maud est la troisième amie. Ne vous ai-je pas dit que nous étions trois ?…

— Ah ! oui… Est-ce que… ?

— Oui, oui, dit Dora en riant… comme avec nous… ou plutôt comme avec Flora… Vous verrez… et puis, nous lui ferons la leçon… Allons, good bye !…

Un dernier baiser à chacune d’elles et les voilà parties…

. . . . . . . . . . . . . .

  1. Le Maiden est une promenade de Calcutta où le « high life » va entendre la musique avant l’heure du souper.