Les impôts en France/Conclusion

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L. Prévaudeau
Henri Gautier (p. 32-33).

CONCLUSION



Nous avons fait l’exposé, forcément ardu, des divers impôts établis en France sous l’ancien régime et depuis la Révolution. Le cadre restreint de cet ouvrage ne nous a pas permis d’entrer dans le détail de la législation, et nous avons dû nous attacher surtout à indiquer les différents systèmes qui ont été suivis par le législateur ou proposés par les économistes. Nous nous sommes efforcé de faire un résumé impartial ; c’est maintenant au lecteur, et non à nous, qu’il appartient de tirer de cette étude telle conclusion qu’il conviendra.

Cependant, après avoir énuméré les critiques formulées contre nos impôts, et notamment contre les impôts de consommation, après avoir exposé (voir les Impôts sous l’ancien régime) les doléances du village de Culmon : « Pourquoi donc est-ce que ce sont les riches qui payent le moins et les pauvres qui payent le plus ?… » après avoir indiqué les raisons qui déterminaient Montesquieu en faveur d’un impôt progressif, et montré les tendances actuelles, il nous semble tout au moins intéressant de mettre sous les yeux du lecteur les lignes suivantes, dans lesquelles l’auteur semble avoir considéré surtout les difficultés sans nombre que le législateur peut rencontrer pour modifier notre système d’impôts :

« Dire au peuple : La république va faire pour toi un miracle. Elle va te dégager de toute cette lourde responsabilité qui pèse sur la condition humaine. Elle te prendra au berceau, et après t’avoir conduit, à ses frais, de la crèche à la salle d’asile, de la salle d’asile à l’école primaire, de l’école primaire aux écoles secondaires et spéciales, de là à l’atelier de travail, et de l’atelier de travail aux maisons de refuge, elle te rendra à la tombe, sans que tu aies eu besoin, pour ainsi dire, de prendre soin de toi-même. As-tu besoin de crédit ? Te manque-t-il des instruments de travail, ou du travail ? Désires-tu de l’instruction ? Quelque sinistre est-il venu visiter ton champ ou ton atelier ? L’Etat est là, comme un père opulent et généreux, pour pourvoir à tout, pour tout réparer. Bien plus, il étendra sa sollicitude sur toute la surface du globe en vertu du dogme de la solidarité ; et, au cas qu’il te prenne fantaisie d’aller semer au loin tes idées et tes vues politiques, il tiendra toujours une grande armée prête à entrer en campagne. Voilà sa mission, elle est vaste, et pour l’accomplir il ne te demande rien. Sel, boissons, postes, octrois, contributions de toute sorte, il va renoncer à tout. Un bon père donne à ses enfants, mais il ne leur demande pas… Se peut-il rien imaginer de plus chimérique et de plus dangereux ?

La vérité est, et le peuple ne devrait jamais le perdre de vue, que la contribution publique s’adressera toujours et nécessairement aux objets de la consommation la plus générale, c’est-à-dire la plus populaire. C’est précisément là le motif qui doit pousser le peuple, s’il est prudent, à restreindre les dépenses publiques, c’est-à-dire, l’action, les attributions et la responsabilité du gouvernement. Il ne faut pas qu’il s’attende à ce que l’Etat le fasse vivre, puisque c’est lui qui fait vivre l’Etat. » (Bastiat, Paix et Liberté.)