Lettre *333, 1673 (Sévigné)

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Texte établi par Monmerqué, Hachette (3p. 238-239).
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1673

*333. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ.

Trois jours après que j’eus reçu ces lettres (no 327, p. 222), j’y fis réponse et premièrement[1] à Mme de Sévigné.
À Paris, ce 10e octobre 1673.

Je viens de demander au Roi plus de temps qu’il ne m’en avoit accordé pour faire ici mes affaires[2] Je ne sais s’il me l’accordera[3], quand ce n’est pas une conséquence que cela soit parce qu’il doit être. Je fais tous les pas du côté de la cour avec bien plus de défiance des bons succès qu’autrement ; et de la manière dont j’ai réduit mon esprit, ce ne seront que les grâces qui me surprendront. Je suis d’accord avec vous, Madame, que la fortune est bien folle, et une des choses qui me le persuade le plus, c’est que je suis malheureux ; et j’ai pris mon parti sur ce que cela[4] durera toute ma vie. Les grands chagrins même en sont passés, et comme je vous ai déjà mandé, ma raison m’a rendu fort tranquille. Faites comme moi, Madame ; il vous est bien plus aisé, car le sujet de vos peines est fort au-dessous du mien. Si le Roi ne me continue ses grâces, ou que vous ne veniez bientôt ici, vous ne m’y trouverez plus. J’en serois bien fâché. Adieu.


  1. Lettre 333. — 1. La réponse à Corbinelli que cet adverbe annonce n’est ni dans l’une ni dans l’autre de nos deux copies. — La lettre est datée du 10 octobre dans le manuscrit de l’Institut, du 3 septembre dans celui qui appartient à M. le marquis de Laguiche. C’est la première date qui est la vraie, et trois jours, qui est dans l’introduction, n’est point exact : voyez la note suivante.
  2. 2. La permission de Bussy expirait le 8 octobre. On ne lui avait accordé que trois semaines. Dans le manuscrit de l’Institut on lit une lettre écrite par Bussy à Pompone le 8 octobre, pour le prier de lui obtenir une prolongation de séjour, et la réponse de Pompone (15 octobre) qui apprend à Bussy que Sa Majesté « a bien voulu ajouter encore deux mois au terme qu’elle lui avoit donné. »
  3. 3. Dans le manuscrit de l’Institut : « Je crois qu’il m’en accordera. » Ce qui suit est omis, jusqu’à : « Je suis d’accord, etc. »
  4. 4. Sur ce que sa persécution. (Manuscrit de l’Institut.) — La lettre finit dans ce manuscrit à « au-dessous du mien. »