Lettres familières écrites d’Italie T.1/Promenade à Baia, Pozzuoli, etc

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LETTRE XXXII
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AU MÊME


Promenade à Baia, Pozzuoli, etc.


Rome, 26 novembre.


Le 14, à la pointe du jour, nous nous mîmes en marche pour aller dîner dans le golfe de Baies, chez don Michel Reggio qui nous vouloit faire un regalo sur sa reale. Toutes les galères, après avoir mené le roi à Procida, en attendant qu’il en revînt, faisoient une station dans ce golfe. Nous laissâmes nos chaises au pied du Pausilippe, pour aller, à la pointe du coteau appelé Mergellina, rendre visite au tombeau de Sannazar, dans l’église des Servites. L’église est jolie, et ce tombeau de marbre blanc de Carrare, placé derrière l’autel, en fait le principal ornement ; c’est un très-bel ouvrage d’un père servite nommé Montorsolo. Le buste de Sannazar entre deux petits Amours en fait le couronnement ; deux statues, l’une d’Apollon avec sa lyre, l’autre de Minerve avec sa lance, accompagnent le tombeau. Elles se sont faites chrétiennes depuis qu’elles sont là, et ont pris au baptême les noms de David et de Judith. Je ne vous fais pas mention de l’épitaphe qui est copiée partout. De là j’allai au tombeau de Virgile. Si vous avez jamais vu un bout de muraille ruinée, c’est la même chose. Il est tout solitaire dans un coin, au milieu d’une broussaille de lauriers dont le Pausilippe est farci, ce qui diminue un peu le prodige de l’honneur qu’avoit fait la nature au prince des poètes, en faisant, dit-on, croître un laurier sur son tombeau. Je trouvai dedans une vieille sorcière qui ramassoit du bois


dans son tablier, el qui paraissoit avoir près de quatrevingts siècles ; il n’j’ a pas de doute que ce ne soit l’ombre de la Sibylle de Cumos, qui revient autour de ce tombeau. Cependant je ne jugeai pas à propos de lui montrer ramum qui veste latebat. Avant que de descendre le Pausilippe, je ne manquai pas de courir chez le peintre Oratio qui a fait ces charmants tableaux de l’incendie du Vésuve, de la Solfatara, et autres que vous avez vus chez Monligny, pour en acheter de pareils. Le fat s’est laissé mourir depuis le mois de mai dernier. Tous ses ouvrages sont vendus, et il ne reste là qu’un mince écolier, son faible imitateur.


Remontés dans nos chaises, nous nous enfournâmes dans la grotte, ou chemin percé en voûte à travers le Pausilippe, par où l’on gagne l’autre côté de la colline ; c’est une fort singulière invention, pour s’épargner la peine de la monter. L’ouvrage est si ancien que quelquesuns l’attribuent aux premiers habitants du pays. Quoique le travail soit immense, il étonnera un peu moins, si l’on fait attention que le sol de cet,te caverne est plus souvent sablonneux que pierreux.


Sénèque en pense fort mal, épître 57, et il raconte de fort bonne foi la frayeur que lui causoit ce long passage obscur. Pour moi, j’en parlerai mieux ; je ne l’ai pas trouvé fort incommode, etil faut qu’on y ait fait quelques réparations depuis son temps.

Au milieu du chemin qui me parut avoir environ mille pas de long, on a fait à la voûte une ou deux grandes lucarnes qui percent jusqu’en haut pour donner un peu de jour. D’ailleurs, pour mieux éclairer la traversée de la caverne, on a tenu le chemin allant en s’élargissant depuis les deux entrées jusqu’au milieu. Enfin, quoique fort obscur, il ne l’est pas au point de se heurter, et deux voitures de front y passent assez commodément.


L’issue de la caverne vous mène droit au lac Agnano, ou l’eau bout naturellement sur le rivage sans être chaude. Il est assez spacieux, et le poisson ne peut pas se plaindre d’y être au court bouillon. Sur son bord, on trouve d’abord la Grotte du Chien, qui n’est qu’un mauvais trou carré, grand comme une cheminé, et quinze ou seize fois plus profond. Je ne vous en fais pas l’histoire, que vous savez du reste. La vapeur mortelle n’a pas d’activité à plus d’un


pied ou un pied et demi de la terre ; mais là, elle suffoque en peu de moments. Je crois avoir ouï dire que de tous les animaux, la vipère étoit celui qui y résistoit le plus longtemps. Nous y éteignîmes des flambeaux et des mèches soufrées, et fîmes rater nos pistolets. Le chien y joua son rôle, tomba en convulsion, et se vit prêt à mourir, si son maître ne l’eût tiré de là, et jeté sur l’herbe comme un cadavre, où il reprit bientôt ses esprits. Il ne fut pas besoin de le plonger dans le lac, ce qui apporte un soulagement plus prompt. M. le barbet qu’on a coutume de mettre en expérience, est fait à cela, comme un valet de charlatan à boire du jus de crapaud ; dès qu’il voit arriver des étrangers, il sait que cela veut dire couchez-vous, et faites le mort. Près de la grotte, sont des étuves naturelles, appelées II Sudario di San Germano. Quand on veut suer à grosses gouttes en deux minutes et être empesté d’odeur de soufre, il n’y a d’autre préparation que d’entrer un moment dans cette maison.


De là je viens à la Solfatara, autrefois la marmite de Vulcain, olla Vulcani ; elle n’est guère moins curieuse que le Vésuve, ou plutôt c’est un Vésuve sur le retour, qui a bien dû faire des siennes en son jeune âge, il y a dix mille ans. La montagne est d’un large diamètre et de peu de hauteur, comme si on en eût tranché net horizontalement les deux tiers ; si bien qn’on ne peut s’empêcher de dire en la voyant qu’elle avoit apparemment trois fois plus de hauteur, et que le volcan, à force d’agir, a consumé et dissipé ce qui en manque. Le dessus fait voir encore plus clairement qu’il est le fond de la chaudière, d’un volcan tout usé. Il a parfaitement la forme d’un amphithéâtre un peu ovale. L’arône est une plaine vaste, unie, de couleur sulfureuse et alumineuse ; quand on frappp- du pied contre terre, on entend tout alentour de soi un bruit sourd ; ce qui peut faire conjecturer que ce n’est qu’une voûte ou faux-fond. La fumée s’élève de toutes parts, tant de la plaine que des éminences qui en font l’enceinte. Elle est de mauvaise odeur, et, quand nous sortîmes de là, nous nous aperçûmes que nos cannes, nos montres, nos épées, les galons de nos habifs, et tout ce que nous avions en or ou doré, étoit noir et terni : les galons n’ont pu se nettoyer assez bien pour reprendre leur lustre. Il y a dans la plaine quelques


flaques d’eau tellement imprégnées d’alun, qu’il suffit de la faire chauffer jusqu’à évaporation, pour avoir l’alun pur. Pour faire boullir les chaudières, on fait un creux à terre sur lequel on les pose ; il n’y faut ni feu ni plus .grande préparation. Près de là sont des halles où l’on achève de travailler l’alun. Pour le soufre, on le tire ‘presque tout pur.


Le chemin n’est pas long de là à Pozzuoli, où, dès que nous arrivâmes, nous nous vîmes entourés de polissons qui nous vouloient faire acheter une foule de petits bronzes, de pierres gravées, de morceaux de statues et autres chiffons, dont le meilleur ne valoit pas quatre parpaiolles, et dont nous ne jugeâmes pas à propos de nous charger. Pozzuoli est bien situé, tout au bout du cap. J’y vis, en passant, un petit colisée ou amphithéâtre, cl les restes d’un temple de Jupiter, aujourd’hui SaintProcule. Je ne fis que jeter les yeux là-dessus, n’ayant pas le loisir de l’examiner, parce -qu’en arrivant nous trouvâmes le prince Jacci, qui étoit venu au-devant de nous, nous prendre dans la chaloupe du roi ; nous y entrâmes pour traverser la baie, et passâmes devant le môle ou pont de Caligula. Voici encore un ouvrage merveilleux des Romains. Ce môle, qui s’étend fort avant dans la mer, fermoit le port de Pozzuoli. Il est ouvert par des arcades, dont quelques-unes sont ruinées, il y en avoit vingt. (Voy. Jul. Capitol, in Antonino Pio). J’en comptai encore quatorze. Que ce ne soit pas là le pont sur lequel Caligula traversa le golfe à cheval, c’est ce qui paraît assez clairement par l’inscription que rapporte Adisson ; elle prouve que ce môle est un ouvage d’Antonin-le-Pieux. Si Misson l’eût connu, il en auroit tiré une autorité bien meilleure encore qu’il ne l’a fait de Suétone ; je vous y renvoie et je mettrai ici une autre inscription pareille, trouvée il y a deux siècles ; elle est sur la porte de la ville : Imp. Cœsar. Divi. Adriani. fil. Divi Trajani Parthici. nepos. Divi Nervœ. pronepos. T. ^lius. Adrianus. Antoninus. Aug. Pius. pont. max. trib. pot. IL cos. IL desig. III. P. P. opus. piiarum. vi. maris, conlapsum. a. ‘Divo. pâtre, suo. promissum. restituit.


En arrivant à Baia, nous allâmes d’abord donner le bonjour à don Michel, qui étoit à peine remis d’une chute fâcheuse qu’il avoit faite l’avant-veille dans la mer, où il

se seroit noyé sans le roi, qui fut le plus prompt de tous à le secourir ; après quoi nous nous mîmes au plus vite à continuer notre visite des curiosités. Le golfe de Baia et sa colline eu demi-amphithéâtre, si renommée chez les Romains pour être le plus voluptueux endroit de l’Italie, sont comme ces vieilles beautés qui, sur un visage tout ruiné, laissent encore deviner, à travers leurs rides, les traces de leurs anciens agréments ; ce n’est plus qu’une colline pleine de bois et de masures, qui se mirent dans une mer toujours claire et calme. On n’y sait presque ce que c’est que froid ni qu’hiver, la terre étant d’une nature très-chaude en ce lieu et aux environs ; aussi étoit-ce là que les Romains venoient en villeggiatura à la fin de l’automne. Toutes les louanges qu’on a données à cette charmante baie ne me paraissent point outrées. Quant à la vue de la colline et des masures, je me représente quel spectacle admirable c’étoit que cette lieue demi-circulaire de terrain, pleine de maisons de campagne d’un goût exquis, de jardins en amphithéâtre, de terrasses sur la mer, de temples, de colonnes, de portiques, de statues, de monuments, de bâtiments dans la mer, quand on n’avoit plus de place, ou qu’on se lassoit d’avoir une maison sur la terre. Que je me répandrois là-dessus en citations des poètes, si Adisson ne m’avoit prévenu ! La bonne compagnie que l’on trouvoit là du temps de Cicéron, de Pompée, d’Horace, Mécénas, Catule, Auguste, etc. ! Les jolis soupers qu’on alloit faire en se promenant à pied à la bastide de Lucullus, près du promontoire de Misène ! Le beau spectacle pour sa soirée que ces gondoles dorées, ornées tantôt de banderolles de couleur, tantôt de lanternes, que cette mer couverte de roses, que ces barques pleines de jolies femmes en déshabillé galant, que ces concerts sur l’eau pendant l’obscurité de la nuit ; en un mot, que tout ce luxe si vivement décrit et si sottement blâmé par Sénèque ! Napolitains, mes amis, que faites-vous de a os richesses, si vous ne les employez à faire renaître en ce beau lieu ses anciennes délices !


Les antiquités que je remarquai sur le rivage sont un petit temple de Diane, en dôme, fort ruiné : les murailles n’en subsistent plus que d’un côté. Néanmoins la voûte, plus qu’à moitié pendue en l’air, se soutient comme une calotte par la force de sa maçonnerie.


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Un temple de Vénus Un autre d’Hercule…. Un autre au milieu d’une flaque d’eau, où nous nous fîmes porter à bras ; on nous le donna pour le temple de Mercure. J’y remarquai quelques restes de l’enduit qu’on appeloit opus retlculatuni- Quand le massif des anciens bâtiments de briques étoit fait, on recouvroit les murs d’un parement de petites briques carrées, de la taille de nos carreaux de faïence, ou de petits carreaux de marbre, soit blanc, soit de couleur : on les disposoit en losange, et le stuc d’autre couleur, qui en faisoit la liaison, mis avec soin et propreté, formoit sur le mur l’image d’un grand fiet de pêcheur et un effet fort agréable à la vue… Des bains antiques, fort curieux, avec les cuves ou places d’icelles, rangées tout le long des deux côtés comme des lits dans un hôpital… Tout est plein aux environs de bains naturels : on ne fait autre cérémonie que de se mettre dans la mer en certains endroits du rivage. On dit ce remède spécifique pour une longue liste de maladies, La forteresse de Baia est au-dessus du rocher qui fait la pointe avancée du demi-cercle. Don Michel Reggio nous fît une chère somptueuse sur sa galère ; ce fut le plus bel endroit de ma journée que le dîner. Grâce à l’exercice étonnant que j’avois fait, jamais appétit ne fut si fougueux, besoin de boire et de manger si pressant, ni manière de s’en acquitter si rapide.


Incontinent après on se remit dans la chaloupe ; on alla parcourir le rivage ; on y vit la Piscine admirable que fit construire Agrippa pour servir de réservoir d’eau à la flotte qui stationnoit au promontoire de Misène. C’est une espèce de lac pensile, fait comme une terrasse en l’air, porté sur 84 grands piliers. Le sol de cette terrasse aérienne est enduit d’un ciment de pozzolana, dur comme du granit. Sans doute qu’elle avoit de hauts bords de tous côtés,pour retenir l’eau qui s’y déchargeoit pardes conduits, et on alloit puiser à l’aise dans cette grande tasse. Elle n’est pas fort élevée au-dessus du rez-de-chaussée, quoique les piliers soient très-hauts ; mais ils sont enterrés en partie, et forment un vaste et magnifique souterrain. Cet ouvrage est tout-à-fait singulier, et je ne puis comprendre quel motif a pu déterminer à le construire de la sorte… La Dragonaria qui paraît avoir été un grand conduit pour les eaux… La Mer Morte… L’ancienne maison de


campagne d’Agrippine L’endroit du rivage où elle fut tuée..


Le promontoire de Misène, joli et tout carré ; et en-deçà, Procida, oîi le roi étoit à la chasse. Il a là une petite mai- ’ son, et c’est une grande fôte pour lui que d’y aller passer quelques jours… Certaines ruines, qu’on nous donna pour être celles d’un cirque ; ce lieu se nomme aujourd’hui II Mercato di Sabato… Une petite plaine jolie, mais inculte et négligée, qui passe pour être les Champs Elysées. Il seroit bon d’enti’etenir, au risque de leur vie, quelques jardiniers pour en avoir soin et pour y semer au moins de l’asphodèle… Le lac d’Achéron ou d’Acherusia, au-delà duquel on voit quelques restes des ruines de Cumes, sur une hauteur… Le lac d’Averne, tout rond, beau, clair et vermeil, au-dessus duquel les oiseaux volent maintenant tant qu’il leur plaît. Vous voyez qu’il a fait une jolie fortune depuis que vous n’avez ouï parler de lui ; mais vous fera-t-elle autant de plaisir que la misère dans laquelle est tombé le lac de Lucrin vous causera de douleur ? Ce n’est plus qu’un mauvais étang bourbeux ; ces huîtres précieuses du grand -père de Catilina, qui adoucissoientà nos yeux l’horreur des forfaits de son petit-fils, sont métamorphoséesen malheureuses anguilles qui sentent la vase. . Une grande vilaine montagne de cendres, de charbon et de pierres ponces, qui, en 1 538, s’avisa de sortir de terre en une nuit, comme un champignon, est venue coudoyer ce pauvre lac, et l’a réduit dans le triste état que jo vous raconte.


Il ne tiendroit qu’à moi de vous dire quantité de choses encore sur la maison de campagne de Cicéron, qu’on appeloit l’Académie, où il a écrit ses Questions académiques ; mais, comme elle étoit un peu avant dans les terres, et qu’il n’y a pas si bonne compagnie qu’autrefois, je n’}’ allai point : à présent ce sont des bains assez fameux. J’ai sans doute aussi négligé divers autres articles dans ce même canton. À bon compte, il étoit nuit noire quand nous quittâmes notre chaloupe à Pozzuoli, et montâmes dans nos chaises pour retourner à Naples, fatigués et recrus si on le fut jamais ; d’ailleurs extrêmement satisfaits de notre journée. Cependant, pour ne pas faire le charlatan avec vous, je dois vous avouer que tous les grands plaisirs que j’avois goûtés étoient beaucoup plus en idée qu’en réalité ; une bonne partie des articles mentionnés dans cette mienne fidèle relation, seroient un peu plats pour quelqu’un qui ne liroit pas la gazette du temps de Caligula ; mais aussi ils sont délicieux par réminiscence, et tirent un agrément infini des gens qui n’y sont plus. Adisson vous a donné une description exacte et suivie de toute cette côte-ci, tirée de Silius Italicus. Pour lui faire paroli, je veux vous la donner d’après Virgile. Je sais, mon doux objet, que cela vous fera un plaisir singulier ; et j’en ai eu un très-grand moi-même à relire, à cette occasion, de bons lambeaux de l’Énéide ; car


À mon gré le Virgile est joli quelquefois.


La mer, l’impertinente mer, ne me pardonna pas plus cette fois-ci qu’elle n’avoit fait ci-devant sur les côtes de Gênes. Oh ! que le proverbe italien a raison de mettre une condition au plaisir qu’il y a d’aller sur mer (che gusto d’andar per mare, se la posta fosse la nave). J’avois cru ici lui faire pièce en ne demeurant pas assez dessus pour lui donner le temps de me faire vomir, et en descendant à terre à tout moment pour voir une chose ou une autre ; mais la maligne bête me garda bien sa rancune. Avant que de rentrer à Naples, je me sentis tourmenté de prodigieuses tranchées. Le lendemain matin la fièvre me prit, ce qui me détermina à repartir incontinent pour Rome.


Ce même jour, 15 au soir, nous reprîmes la poste. Je courus une longue traite tout d’un train. Dehinc Mammurarum lassi consedimus urbe : c’est la petite vilaine ville d’Itri ; il fut bien force de s’y arrêter. Outre la pluie grosse comme le bras et la fatigue, ma chaise avoit cassé tout net, ce qui fut un vilain trait d’ingratitude de la part de la via Appia, à qui j’avois marqué toute sorte d’amitié. J’entrai dans une auberge ; il n’y avoit, comme de raison, ni vivres ni lits. J’étendis près d’un grand feu une figure de matelas sur le pavé, où je passai quelques heures dans l’agitation d’une violente fièvre, suivie enfin du vomissement qui me soulagea un peu. Je n’avois pour toute consolation que celle d’entendre à mes côtés Lacurne ronfler comme une pédale d’orgue. Je l’aurais tué de bon cœur ; mais, mettant un frein à ma colère, je me contentai de reprendre ma course. Le 17, à sept heures du matin, je rentrai à Rome, où je me porte bien actuellement, si ce n’est que j’ai la main cruellement lasse de la longueur et de la rapidité de ma lettre. La peste, en voilà bien tout d’une suite écrit. Pourvu que cela amuse un peu votre curiosité, mon doux objet, j’en suis content. Je pense que vous êtes assez sage pour faire souvent mention de moi avec nos amis Bevi, Maleteste et autres, surtout avec cette charmante petite Montot, que je ne perds pas de vue un seul instant : elle est le Neuilly des femmes comme vous êtes la Montot des hommes. Souvenez-vous de moi près la dame de Bourbonne, dont je raffole aussi tout le jour.