Mémoires de la ville de Dourdan/La ville

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La ville.

La ville de Dourdan eſt baſtie dans le fonds de ce vallon, ſinon qu’elle ſ’eſtend dauantage ſur la pente Septentrionale, en telle ſorte que la riuiere ne paſſe dedans que par vn bout, où ayant fait tourner vn moulin qui dépend du Domaine, & trauerſé cinq ou ſix maiſons, elle en ſort & coule le long des murailles pour ſeruir à pluſieurs Tanneurs & Megiſſiers. Sa figure eſt ronde : elle eſt compoſée de deux parroiſſes, l’vne (& la principale) ſoubs l’inuocation de Sainct Germain Eueſque d’Auxerre, laquelle fut dés l’année mil cent cinquante donnée par Goſlenus Eueſque de Chartres aux Chanoines de Sainct Cheron lez Chartres (peu de temps auparauant par luy regulariſez) & l’autre ſoubs le tiltre de Sainct Pierre. Dans le milieu de la ville eſt vn chaſteau bien baſty, flanqué de bonnes tours & enuironné d’vn large foſſé, à fonds de cuue, reueſtu de pierres taillées : L’vne de ces tours (plus groſſe & haute que les autres) eſtoit cy-deuant deſtachée du chaſteau, & poſée dans le milieu du foſſé pour ſeruir de dongeon & s’y retirer en cas de neceſſité, (auſſi ſe trouue-elle accommodée de toutes choſes neceſſaires en tels accidents, comme d’vn puis & d’vn four pris dans l’eſpoiſſeur du mur, d’vn moulin à bras, & autres pareilles commoditez :) On y entroit du chaſteau en temps de paix à l’aide d’vn pont, & en temps de guerre par vne caſemate, juſques en l’année mil ſix cens huict que Monſieur de Sully vſufruictier de Dourdan fit faire vne terraſſe par le moyen de laquelle elle eſt à preſent vnie & jointe au chaſteau en telle ſorte, qu’on y peut aller de pied ferme comme en toutes les autres : En ceſte tour reſide toute la Seigneurie de Dourdan, & ſont dicts les vaſſaux releuer du Roy à cauſe de la groſſe tour de ſon chaſteau de Dourdan : Toutes les autres tours furent couuertes de thuille en l’année mil quatre cens cinquante, & ont duré telles juſques en l’année mil cinq cens quatrevingts-vnze, que ceſte couuerture fut ruinée par le Mareſchal de Biron, lors qu’auec l’Armée Royale il aſſiegea le chaſteau. Deuant la porte de ce chaſteau eſt vne grande place, en laquelle eſtoit autresfois vn jardin qui y auoit eſté fait depuis peu d’années par vn grand apport de terres qui le rendoit plus haut que le rez de chauſſée : & de faict lors du ſiege le Capitaine Iacques en ayant fait oſter quantité de terre pour fortifier le chaſteau, dans lequel il commandoit : & eſtant paruenu juſques à l’ancien ſolage on y a trouué des foyers & autres choſes, qui font cognoiſtre qu’auparauant y auoit eu des baſtiments qui auoient (peut-eſtre) eſté ruinez pour y pratiquer la commodité de ce jardin : Or de dire quand cela ſ’eſt fait, ie n’en ay peu rien apprendre : bien ſçay-ie que ce jardin eſtoit deſia en nature dés l’année mil quatre cens huict, que Iean Duc de Berry le donna par ſon teſtament au Prieur de Sainct Germain. Au bas de ceſte grande place eſt vne tres-belle halle, en laquelle ſ’eſtalent toutes ſortes de marchandiſes chacun iour de Samedy, & ſ’y vend grande quantité de bled qui y eſt apporté de toute la Beaulce, & principalement en la ſaiſon de ſemer, d’autant que tous les laboureurs de là à Paris y viennent querir des ſemences qui ſ’y trouuent tres-bonnes : Ceſte halle eſtoit deſia baſtie en l’année mil trois cens quinze, car en ce temps le Seigneur de Dourdan donna lettres d’admortiſſement au Prieur de Sainct Pierre pour le recompenſer du droict qu’il y pretendoit auoir à cauſe de quatre eſtaux, mais elles ont eſté augmentées ez années mil quatre cens cinquante & mil quatre cens quatrevingts-ſix.