Mémoires extraits des recueils de l’Académie royale de Berlin/Sur la construction des Cartes géographiques
SUR LA
CONSTRUCTION DES CARTES GÉOGRAPHIQUES.
de Berlin, année 1779.)
PREMIER MÉMOIRE.
Une Carte géographique n’est autre chose qu’une figure plane qui représente la surface de la Terre, ou une de ses parties. Cette représentation n’aurait aucune difficulté si la Terre était plate, ou si elle était un solide quelconque terminé par des surfaces planes ; il en serait de même si la Terre avait une figure courbe telle qu’elle pût se développer sur un plan, ce qui a lieu à l’égard des cônes et d’une infinité d’autres surfaces courbes. Mais la Terre étant sphérique, ou plutôt sphéroïdique, il est impossible de représenter sur un plan une partie quelconque de sa surface sans altérer les positions et les distances respectives des différents lieux ; et la plus grande perfection d’une Carte géographique doit consister dans la moindre altération de ces distances.
Dans l’impossibilité de construire des Cartes géographiques qui soient la représentation exacte des différents lieux de la Terre, les Géographes ont pensé à former des espèces de tableaux, où les mêmes lieux soient placés suivant les règles de la Perspective ; c’est ce qui a donné naissance aux différentes espèces de projections géographiques, lesquelles ne diffèrent que dans la position de l’œil et dans celle du plan de projection par rapport à la surface du globe terrestre.
Comme la situation des différents lieux de la Terre se détermine par les cercles de longitude et de latitude qui passent par ces lieux, toute la difficulté consiste dans la projection de ces cercles, et il est facile de concevoir que la projection d’un cercle quelconque du globe ne peut être qu’une section conique, formée par l’intersection du plan de projection avec le cône qui aura ce même cercle pour base, et dont le sommet sera dans le lieu de l’œil.
Si l’œil est dans le centre du globe, la projection se nomme centrale et elle a la propriété que tous les grands cercles se trouvent représentés par des lignes droites ; mais les petits cercles le sont par des cercles ou par des ellipses, suivant que leur plan est parallèle ou non au plan de projection. On se sert quelquefois de cette projection pour les Mappemondes, et l’on y suppose ordinairement que le plan de projection est parallèle à l’équateur, moyennant quoi tous les cercles de latitude deviennent aussi des cercles dans la Mappemonde ; mais elle n’est guère usitée pour les Cartes particulières qui ne représentent qu’une partie de la surface de la Terre ; elle l’est davantage pour les Cartes célestes, et c’est, en général, à cette projection que se réduit toute la Gnomonique, les lignes horaires d’un cadran quelconque n’étant autre chose que les projections centrales des cercles horaires de la sphère.
Au reste des Cartes géographiques construites d’après cette projection auraient le grand avantage que tous les lieux de la Terre, qui sont situés dans un même grand cercle du globe, se trouveraient placés en ligne droite dans la Carte ; en sorte que, pour avoir le plus court chemin d’un lieu de la Terre à l’autre, il n’y aurait qu’à joindre ces deux lieux dans la Carte par une ligne droite.
En plaçant l’œil à la surface du globe, et en prenant le plan de projection perpendiculaire au rayon visuel mené de l’œil au centre, on a la projection connue sous le nom de projection stéréographique, imaginée d’abord par Ptolémée pour la construction des astrolabes ou planisphères célestes, et adoptée ensuite par la plupart des Géographes modernes pour la construction des Cartes terrestres. La principale propriété de cette projection consiste en ce que tous les cercles du globe y sont pareillement représentés par des cercles ; en sorte qu’il suffit de déterminer la projection de trois points quelconques d’un méridien ou d’un parallèle, pour pouvoir tracer la projection entière du cercle. On trouve dans différents Traités de Géographie des règles pour tracer les méridiens et les parallèles, quelle que soit la position de l’œil sur la surface du globe. On peut aussi voir sur ce sujet un Mémoire de M. Kætner dans le Recueil de ses Dissertations physiques et mathématiques.
Cette belle propriété de la projection stéréographique a été découverte par Ptolémée, et exposée dans son Traité intitulé Sphœrœ a planetis projectio in planum, Ouvrage qui ne nous est parvenu qu’en arabe et dont Commandin a donné en 1558 une édition latine avec des Commentaires. Elle dépend, en général, de ce que la section du cône visuel est toujours antiparallèle à la base, en sorte que, celle-ci étant un cercle, la section ou projection de ce cercle doit en être un aussi.
Mais la même projection stéréographique a encore une autre propriété très-remarquable, qui ne paraît pas avoir été aperçue par Ptolémée ; c’est que les cercles de la projection se coupent sous les mêmes angles que les cercles du globe, en sorte que tous les angles formés sur la surface du globe se trouvent les mêmes dans la projection ; d’où il s’ensuit qu’une portion quelconque infiniment petite de cette surface conserve la même figure dans la projection et n’est altérée que dans la grandeur. Nous verrons dans la suite de ce Mémoire que cette propriété n’est pas particulière à la projection stéréographique, mais lieu aussi dans les Cartes marines réduites, et dans une infinité d’autres espèces de Cartes qu’on pourrait construire.
Enfin, si l’on suppose l’œil à une distance intinie du globe, en sorte que tous les rayons visuels soient des droites parallèles entre elles, et qu’on prenne le plan de projection perpendiculaire à ces rayons, on a la projection orthographique, dans laquelle les cercles du globe sont des lignes droites, ou des cercles, ou des ellipses, suivant que leur plan est parallèle, ou perpendiculaire, ou oblique aux rayons visuels. Cette espèce de projection n’est guère employée dans la Géographie, mais elle l’est beaucoup dans l’Astronomie pour le calcul des éclipses, et dans la Gnomonique pour la construction des cadrans analemmatiques.
Telles sont les espèces principales de projections, et il est clair qu’on peut en imaginer une infinité d’autres en donnant différentes positions à l’œil et au plan de projection. Mais toutes ces projections ont le défaut d’altérer plus ou moins la grandeur et la figure des divers pays qu’on y représente et M. de la Hire a trouvé que cette altération serait la moindre à quelques égards, si l’on plaçait l’œil hors du globe à une distance de sa surface égale au sinus de la huitième partie de la circonférence d’un grand cercle (voyez les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris pour 1701) ; mais cet avantage n’a peut-être pas paru assez grand aux Géographes pour leur faire adopter une projection qui a en même temps l’inconvénient de représenter la plupart des cercles du globe par des ellipses.
L’idée de tracer les Cartes géographiquescomme des projections de la surface du globe sur un plan est très-simple et très-naturelle ; mais rien n’oblige à la suivre sans exception. Aussi plusieurs savants Géographes s’en sont écartés, et ont employé différentes manières de représenter les cercles des longitudes et des latitudes terrestres, soit par des lignes droites ou par des cercles, ou même par des lignes mécaniques. On peut en effet regarder les Cartes géographiques sous un point de vue plus général et comme des représentations quelconques de la surface du globe ; alors il n’y a qu’à tracer les méridiens et les parallèles suivant une loi quelconque donnée, et placer les divers lieux par rapport à ces lignes comme ils le sont sur la surface de la Terre par rapport aux cercles de longitude et de latitude. De cette manière la construction d’une Carte géographique devient un Problème entièrement indéterminé ; mais on peut le déterminer en l’assujettissant à certaines conditions données, indépendantes de la considération des projections. On en a un exemple dans les Cartes marines réduites ou par latitudes croissantes, dans l’invention desquelles on n’a eu d’autre but que de faire en sorte que les différents rumbs de vent y soient représentés par des lignes droites qui fassent entre elles les mêmes angles que ces rumbs font dans la rose du compas ; cette condition exige premièrement que tous les méridiens soient des lignes droites parallèles, et que tous les parallèles à l’équateur soient pareillement des lignes droites qui coupent les méridiens à angles droits ; et ensuite que les degrés de latitude et de longitude dans la Carte conservent entre eux les mêmes proportions que ces degrés ont sur la surface du globe ; de sorte que, comme les degrés de longitude sont supposés constants dans la Carte et que sur le globe ce sont les degrés de latitude qui sont constants, il faut que dans la Carte les degrés de latitude croissent dans la même raison que ceux de longitude décroissent sur le globe, c’est-à-dire en raison inverse du cosinus de la latitude, ou, ce qui revient au même, en raison directe des sécantes de la latitude ; d’où l’on conclut ensuite par le Calcul intégral que la distance entre l’équateur et un parallèle quelconque doit être proportionnelle au logarithme de la tangente du demi-complément de la latitude de ce parallèle ; ce qui est le fondement connu de la construction des Cartes réduites.
Feu M. Lambert est le premier qui ait envisagé la Théorie des Cartes géographiques sous le point de vue général que je viens d’exposer, et qui ait en conséquence eu l’idée de déterminer les lignes des méridiens et des parallèles par la seule condition que tous les angles faits dans le plan de la Carte soient égaux aux angles correspondants sur la surface du globe. Ce Problème, dont on trouve une solution générale dans le troisième Volume des Beyträge zum Gebrauche der Mathematik, etc., a depuis été résolu aussi par M. Euler dans le Volume qui vient de paraître des Actes de l’Académie de Pétersbourg pour l’année 1777 ; mais ces deux illustres Auteurs se sont contentés ensuite de faire voir que les Théories connues de la projection stéréographique et des Cartes réduites sont renfermées dans cette solution, et personne n’a encore entrepris de donner à ces Théories toute l’extension dont elles sont susceptibles, en déterminant tous les cas où la solution dont il s’agit peut donner des cercles pour les méridiens et les parallèles.
Cette recherche, également intéressante par les artifices analytiques qu’elle demande et par l’utilité dont elle peut être pour la perfection des Cartes géographiques, me paraît digne de l’attention des Géomètres et propre à fournir la matière d’un Mémoire. Je résoudrai d’abord le même Problème par une méthode différente de celle de MM. Lambert et Euler, et, si je ne me trompe, plus simple et plus générale à quelques égards ; j’appliquerai ensuite la solution générale au cas particulier dans lequel on suppose que les méridiens et les parallèles soient des cercles, qui sont les seules courbes qu’on puisse employer facilement dans la construction des Cartes géographiques ; et je résoudrai d’ailleurs quelques autres questions relatives à cet objet et d’où résultent plusieurs conséquences utiles.
1. Je suppose d’abord, pour plus de généralité, que la Terre est un sphéroïde quelconque engendré par la révolution d’une courbe donnée autour d’un axe fixe ; cette courbe sera celle de tous les méridiens de la Terre, et son axe sera en même temps l’axe de la Terre. Je rapporte la même courbe à son axe au moyen de deux coordonnées rectangles et dont l’une soit l’abscisse prise dans l’axe depuis le pôle de la Terre, et dont l’autre soit l’ordonnée perpendiculaire à l’axe. Je nomme ensuite l’arc correspondant, c’est-à-dire l’arc d’un méridien compté depuis le pôle, et l’angle que le plan de ce méridien fait avec le premier méridien dont la position est arbitraire. Il est visible que la position d’un lieu quelconque sur la surface de là Terre sera déterminée par l’arc du méridien, qui passe par ce lieu, et par l’angle de ce méridien avec le premier méridien on voit en même temps que dans le cas de la Terre sphérique l’arc sera (en prenant le rayon de la Terre pour unité) la distance au pôle, ou le complément de la latitude du lieu, et l’angle la longitude de ce même lieu ; et l’on aura dans ce cas
En général, quelle que soit la figure de la Terre, pourvu qu’elle soit sphéroïdique, l’angle sera toujours égal à la longitude, et l’arc du méridien sera une fonction donnée de la latitude.
Cela posé, imaginons que le même lieu soit placé sur la Carte géographique de manière que sa position soit déterminée par deux coordonnées rectangles et étant l’abscisse prise sur un axe quelconque, et l’ordonnée perpendiculaire à cet axe ; il est clair que ces deux quantités doivent dépendre des quantités c’est-à-dire être des fonctions de ces deux dernières quantités ; et il est visible que, si dans ces fonctions on fait la variable constante, on aura les coordonnées de la courbe qui représente le méridien dont la longitude est au contraire, si l’on y fait constante, on aura les coordonnées de la courbe qui représente le parallèle auquel répond l’arc du méridien .
2. Considérons maintenant deux lieux infiniment proches, qui sur la surface de la Terre soient déterminés par les variables et et qui le soient sur la Carte par les variables correspondantes et et cherchons les distances de ces deux lieux sur la surface de la Terre et sur la Carte. Il est évident que la première de ces distances sera exprimée par puisque est la différence des deux arcs de méridien qui passent par les deux lieux, et que est l’arc du parallèle compris entre ces-deux méridiens ; et que la seconde le sera par la formule ordinaire puisque et sont des coordonnées rectilignes et rectangles.
Or la plus grande perfection d’une Carte géographique serait que ces distances fussent égales, car alors toutes les autres distances petites et grandes seraient aussi les mêmes sur la surface de la Terre que sur la Carte ; mais, pour donner à nos recherches toute la généralité possible, nous supposerons que ces distances soient entre elles dans une proportion quelconque exprimée par en sorte que l’on ait
d’où l’on tire l’équation fondamentale
qu’il s’agit maintenant de résoudre.
3. Pour cet effet, je remarque d’abord que l’ordonnée de la courbe des méridiens est une fonction de l’arc donnée par la nature de cette courbe ; de sorte que sera une quantité intégrable, ou du moins qui peut être supposée telle, puisqu’elle ne contient qu’une variable. Faisant donc
l’équation proposée se change en celle-ci
dans laquelle et sont deux variables indépendantes l’une de l’autre, et est une quantité jusqu’ici indéterminée. Et la question se réduit à déterminer au moyen de cette équation les valeurs de et en fonction de et
Comme l’équation dont il s’agit contient deux inconnues et pour la résoudre de la manière la plus générale et la plus simple, je prends un angle indéterminé et je la multiplie par celle-ci
en observant que le produit des deux carrés par les deux carrés peut de même se mettre sous la forme de deux carrés de cette manière
j’aurai donc ainsi la transformée
qui à cause de l’indéterminée peut se partager dans ces deux-ci
Et il ne restera plus qu’à faire en sorte que ces valeurs de et de soient des différentielles complètes ; ce qui est possible au moyen des deux indéterminées et
En effet si l’on fait, pour abréger,
qui doivent être intégrables et auxquelles on peut appliquer la méthode connue de M. d’Alembert.
Suivant cette méthode, on multipliera la seconde par ensuite on l’ajoutera à la première, et on l’en retranchera, ce qui donnera ces deux-ci
lesquelles devant être pareillementintégrables, il s’ensuit que ne peut être qu’une fonction de et une fonction de et ces deux fonctions étant intégrées donneront les valeurs de et d’où l’on tirera et
Dénotons, en général, par les caractéristiques et deux fonction indéterminées quelconques, en sorte que soient deux fonctions quelconques de dénotons de plus par les différentielles de ces fonctions, en sorte que
on fera
et l’on aura
d’où l’on tire
les fonctions désignées par et demeurant arbitraires.
4. Telles sont les expressions les plus générales des coordonnées et qui déterminent sur la Carte la position que doit avoir chaque lieu de la Terre, en vertu de la condition supposée, que la distance de deux lieux quelconques infiniment proches sur la surface de la Terre soit à la distance des mêmes lieux sur la Carte dans la proportion de à (2). Or, ayant supposé (3)
et ensuite
on aura
et par conséquent
mais
donc on aura
On voit par cette formule que la valeur de est une fonction des variables finies et c’est-à-dire de et à cause que est une fonction de D’où il s’ensuit que la distance de deux lieux quelconques de la Terre infiniment proches entre eux, dont l’un répond à et et l’autre à e sera à la distance des mêmes lieux placés sur la Carte dans une proportion dépendant uniquement de et par conséquent tous les lieux de la Terre situés autour d’un lieu donné, à des distances infiniment petites de ce lieu, se trouveront placés sur la Carte en sorte qu’ils formeront une figure semblable à celle qu’ils forment sur la surface de la Terre, les côtés homologues de ces deux figures étant dans la proportion de à et l’étendue des mêmes figures étant dans la proportion de à Ainsi une Carte construite d’après les expressions de et que nous venons de trouver, aura la même propriété que nous avons déjà observé être commune aux Cartes stéréographiques et aux Cartes réduites, et qui consiste en ce que chaque portion infiniment petite de la surface de la Terre conserve sa figure sur la Carte et n’est altérée que dans sa grandeur. Et il est facile de se convaincre par notre analyse que les expressions dont il s’agit renferment nécessairement la loi de la description de toutes les Cartes géographiques dans lesquelles la même condition pourra avoir lieu.
5. Pour déterminer maintenant les fonctions inconnues qui entrent dans les expressions de et je remarque que si dans ces expressions on suppose on a les valeurs de ces coordonnées pour la courbe qui représente le premier méridien. Ces valeurs seront donc
lesquelles, à cause des deux fonctions arbitraires et , peuvent être, comme on voit, des fonctions quelconques de Ainsi l’on peut supposer que le premier méridien de la Carte soit une courbe quelconque, et que de plus les changements de latitude sur ce méridien suivent aussi une loi quelconque.
En effet supposons que pour ce méridien on ait
et représentant des fonctions quelconques données de on aura donc
d’où l’on tire
Donc, mettant cette forme de fonction dans les expressions générales de et , on aura
6. Mais cette manière de déterminer les fonctions arbitraires, quoique la plus naturelle et la plus simple, n’est pas néanmoins celle qui convient le mieux à notre objet. En effet, ce qu’il est à propos de prendre pour donné n’est pas la position des lieux qui doivent être placés sous le premier méridien, mais la figure même des méridiens et des parallèles, parce que ce sont les lignes qu’il faut tracer sur la Carte, pour pouvoir ensuite y placer les différents lieux de la Terre. Ainsi la question se réduit à déterminer la forme des fonctions inconnues de la solution générale en sorte qu’il en résulte pour les méridiens et pour les parallèles des lignes d’une nature donnée. Cette question n’a pas encore été résolue et est en elle-même très-difficile, peut-être même impossible à résoudre en général ; mais pour les besoins de la Géographie il suffit de la résoudre dans le cas particulier où les méridiens et les parallèles doivent être des arcs de cercle, ce qui comprend à la fois les deux cas de la projection stéréographique et des Cartes réduites ; car il est naturel que dans la construction des Cartes géographiques on préfère toujours le cercle à toutes les autres courbes, à cause de la facilité et de l’exactitude avec laquelle on peut le tracer par le moyen du compas.
7. Comme la principale propriété du cercle consiste en cè que le rayon de sa courbure est constant, nous allons d’abord chercher en général l’expression des rayons osculateurs des courbes qui doivent représenter les méridiens et les parallèles d’après les formules générales du no 3. Or on sait que l’expression du rayon osculateur, dans les courbes rapportées aux coordonnées rectangles est
et il est facile de voir par la nature de nos formules que pour les méridiens il faudra faire varier uniquement ou dans les expressions de
et et que pour les parallèles il y faudra faire varier uniquement mais on a en général (numéro cité)donc pour les méridiens on aura
par conséquent, si l’on nomme le rayon osculateur d’un méridien quelconque, on aura
Pour les parallèles on aura
donc, nommant le rayon osculateur d’un parallèle quelconque, on aura
Je remarque maintenant que, par la condition de l’intégrabilité des formules
on a
donc les expressions précédentes de et de peuvent se changer en celles-ci
Or nous avons trouvé plus haut (4) que
donc, substituant cette valeur et faisant pour plus de simplicité
on aura ces expressions fort simples
8. Cette quantité sert aussi à déterminer la valeur de car il est visible qu’on aura (4)
Or, comme est une fonction de l’arc du méridien donnée par la figure de ce méridien et que
il s’ensuit qu’on peut aussi regarder comme une fonction de .
Donc, si l’on voulait que la quantité fût constante ou qu’elle fût une fonction quelconque de seul, c’est-à-dire qu’elle demeurât la même dans tous les points d’un même parallèle, il faudrait que fût une fonction de seul sans par conséquent il faudrait que donc on aurait par le numéro précédent savoir par conséquent il faudrait que tous les méridiens de la Carte fussent des lignes droites. Mais nous verrons plus bas que la condition de dans l’hypothèse de fonction de seul, demanderaitque la Terre eût une figure donnée.
9. Supposons maintenant, en général, que tous les méridiens de la Carte soient des cercles quelconques, ce qui renferme aussi le cas précédent où ces méridiens seraient des lignes droites. Il faudra donc que la valeur de soit constante dans chaque méridien et ne varie que d’un méridien à l’autre ; donc et par conséquent ne pourra être qu’une fonction de seul donc la différence de en faisant varier seul, devra être nulle ; ainsi la condition pour que tous les méridiens soient des cercles sera
Qu’on multiplie cette équation par et qu’on l’intègre en faisant varier seul, on aura
étant une fonctions quelconque de sans donc on aura
ce qui fait voir que les paraltèles sont aussi des cercles, puisque leur rayon osculateur étant une fonction de seul doit demeurer le même dans toute l’étendue de chaque parallèle. On prouvera de la même manière qu’en supposant les parallèles circulaires les méridiens le seront aussi. Et la condition commune à la circularité des uns et des autres sera Voyons donc quelle doit être la forme des fonctions et pour que cette condition soit remplie.
10. Pour faciliter cette recherche, je prends d’abord deux autres fonctions que je dénote par les caractéristiques et et que je suppose telles, que
je différentie maintenant cette quantité deux fois de suite, en y faisant varier d’abord et ensuite j’aurai ainsi en dénotant par et par les différences des fonctions et de manière que
donc la condition de donnera cette équation
par conséquent
ces quantités doivent non-seulementêtre égales, mais encore identiques, c’est-à-dire qu’elles doivent être la même quantité indépendammentd’aucune équation entre et donc, comme l’une est fonction de et que l’autre est fonction de il s’ensuit qu’elles ne peuvent devenir identiques à moins d’être égales à une même constante quelconque.
Soit donc une constante arbitraire ; on aura ces deux équations
savoir
qui sont intégrables par les règles connues.
On aura donc, en intégrant,
étant des coefficients quelconques positifs ou négatifs, réels ou imaginaires.
Or
donc on aura
mais
donc, multipliant les équations précédentes par et intégrant, on aura
et étant de nouvelles constantes arbitraires.
Ainsi la forme des fonctions arbitraires est déterminée, et mettant à la place de dans et dans on aura ces expressions
qu’il ne s’agira plus que de substituer dans les valeurs de et (3).
11. Mais, avant de faire cette substitution, j’observe que, la quantité pouvant être également positive ou négative, on aura des formules différentes pour les deux cas, et que toute la différence consistera en ce que les quantités et se trouveront à la place l’une de l’autre ; cela est évident à l’égard de la valeur de pour le faire voir aussi par rapport à celle de j’y mets à la place de la constante arbitraire la quantité aussi arbitraire et réduisant au même dénominateur les deux fractions, divisant ensuite le haut et le bas de la fraction résultante par j’ai
expression qui résulte évidemment de la précédente en y changeant le signe de et en y mettant à la place de et à la place de et réciproquement. De là je conclus donc qu’il suffit de considérer le cas où est une quantité positive, et qu’il n’y aura ensuite qu’à échanger en pour avoir celui de négative. Il est facile de voir en effet par l’équation fondamentale
du no 3 que les variables et sont permutables.
12. Je ferai donc pour plus de simplicité et j’aurai
On aura donc d’abord
et étant des constantes réelles quelconques ; ensuite il est visible qu’en faisant pour plus de généralité
étant aussi des quantités réelles quelconques, il faudra faire
et alors les imaginaires se détruiront d’elles-mêmes dans les expressions précédentes de et Mais au lieu des suppositions précédentes, nous ferons, ce qui revient au même,
étant des constantes arbitraires réelles ; ces substitutions faites, on aura, après les réductions usitées,
13. Si maintenant on élimine de ces deux équations la variable on aura une équation en et qui sera par conséquent celle de toutes les courbes qui représentent les différents méridiens correspondant aux différentes longitudes et réciproquement, si l’on en élimine la variable on aura une équation entre et qui sera l’équation commune à toutes les courbes qui représentent les différents parallèles.
Pour rendre ces éliminations plus faciles, je commence par ajouter ensemble les valeurs de et de j’ai
d’où je tire
et, substituant dans les valeurs de et j’aurai ces équations
d’où il est maintenant facile d’éliminer ou .
14. En éliminant d’abord la quantité on aura cette équation
laquelle se réduit à celle-ci
qu’on voit clairement être à un cercle ; et si l’on nomme le rayon de cercle, l’abscisse et l’ordonnée qui déterminent la position de son centre, on aura
En éliminant de plus l’angle de ces deux dernières équations, on aura celle-ci
en sorte que cet angle sera égal à
15. Éliminonts maintenant l’angle dans les formules du no 13 pour avoir les courbes des parallèles, et l’on aura cette équation
savoir
laquelle se change facilement en celle-ci
qu’on voit aussi être à un cercle ; et, si l’on nomme le rayon de ce cercle, l’abscisse et l’ordonnée qui répondent au centre du même cercle, on aura
Et, si l’on élimine la variable de ces dernières équations, on aura, pour le lieu de tous les centres des cercles qui représentent les parallèles, l’équation
en sorte que cet angle sera par conséquent cette droite sera perpendiculaire à celle qui renferme tous les centres des méridiens (numéro precédent).
16. Cherchons aussi la valeur de la quantité qui exprime la proportion, suivant laquelle chaque région de la Terre est augmentée ou diminuée dans la Carte, en gardant néanmoins sa figure naturelle.
Nous avons vu (8) que ainsi il n’y a qu’à chercher la valeur de la quantité Or, si dans l’expression d du no 10 on substitue à la place des fonctions marquées par et leurs valeurs trouvées dans le même numéro, on a
ce qui par les substitutions du no 12 se réduit à cette forme
en sorte qu’on aura
17. La valeur précédente de peut fournir une preuve de l’exactitude de nos formules ; car, ayant vu (7) que les rayons et des méridiens et des parallèles sont déterminés, en général, par les formules
il faudra qu’en substituant pour sa valeur, il en résulte les mêmes valeurs de et que nous avons trouvées plus haut d’après les équations mêmes des cercles qui représentent les méridiens et les parallèles. Or
c’est ce qui se vérifie en effet, comme on peut s’en assurer par la différentiation de la quantité18. C’est ici le lieu d’examiner les conditions nécessaires pour que la quantité m soit constante, ou au moins une fonction de sans Nous avons déjà vu (8) que dans ce cas tous les méridiens de la Carte devraient être des lignes droites ; ainsi les formules trouvées plus haut, pour le cas où les méridiens seraient des cercles quelconques, auront aussi lieu dans le cas présent. Il ne s’agira donc que de voir si l’expression de du no 16 peut devenir une fonction de seul. Donc, comme peut être censé une fonction de il faudra que le terme qui renferme disparaisse de lui-même ; ce qui ne peut arriver que lorsque
Dans le premier cas on aura
et dans l’autre
donc on aura, en général,
et étant des constantes quelconques ; équation qui servira à déterminer la figure du méridien, aussitôt que sera donné en En diffërentiant logarithmiquement, on aura
mais donc
et de là, en multipliant par et intégrant,
ce qui donnera en si est déjà donné en
Donc, si l’on voulait que fût constante, on aurait
ce qui donne évidemment une ligne droite pour les méridiens de la Terre, et par conséquent un cône droit pour la figure de la Terre.
19. Jusqu’à présent nos formules sont indépendantes de la figure des méridiens de la Terre ; mais, pour pouvoir appliquer ces formules à la construction des Cartes géographiques, il est nécessaire de connaître quelle fonction de la latitude est la variable que nous avons supposée telle que étant l’arc du méridien compté depuis le pôle et l’ordonnée perpendiculaire à l’axe de la Terre (3).
Or, si l’on suppose la Terre sphérique, ainsi+qu’on le fait communément dans les Cartes géographiques, et qu’on prenne, pour plus de simplicité, le rayon de la Terre pour l’unité, on aura évidemment
et l’arc sera en même temps la distance au pôle ou le complément de la latitude. Donc on aura dans ce cas
dont l’intégrale est
de sorte qu’en ajoutant une constante arbitraire on aura en général
ainsi les exponentielles disparaîtront entièrement, et il n’y aura plus que des sinus et cosinus. Mais, pour donner à notre solution toute la généralité dont elle est susceptible, il est nécessaire de déterminer les valeurs de et de sans s’astreindre à l’hypothèse de la Terre sphérique.
Nous supposerons donc que la Terre soit un sphéroïde elliptique, aplati par les pôles ; et nous ferons le rayon de l’équateur ou le demi-grand axe de l’ellipse qui forme les méridiens égal à et le demi-petit axe de cette ellipse, c’est-à-dire le demi-axe de la Terre, égal à En prenant les abscisses dans ce demi-axe depuis son sommet, conformément aux suppositions du no 1, on aura pour l’équation à l’ellipse
d’où l’on tire par la différentiation
or il est visible que est égal à la tangente de l’angle que la perpendiculaire à l’ellipse fait avec l’axe des abscisses ainsi dans le cas présent sera égal à la tangente de l’angle qui exprime la distance au pôle ou le complément de la latitude.
Nommant donc, en général, la distance au pôle ou le complément de la latitude, on aura
donc
donc
et de là
Différentiant, on aura
donc
mais on a (3) donc
Soit
en sorte que soit l’excentricité de l’ellipse qui forme les méridiens de la Terre ; on aura
l’intégrale de est
l’intégrale de est
logsg k,
Et, si dans l’expression de on substitue aussi à la place de on aura
Dans le cas où la Terre est sphérique on a donc
ainsi qu’on l’a trouvé ci-dessus ; or on peut rendre les deux expressions de semblables en prenant un angle tel que l’on ait
car alors on aura pareillement
en sorte qu’on pourra regarder l’angle comme la distance au pôle corrigée en vertu de l’aplatissement de la Terre ; et, comme l’excentricité est fort petite, on pourra trouver la correction dont il s’agit, c’est-à-dire la différence de et de exprimée par une série fort convergente, au moyen des formules que j’ai données dans les Nouveaux Mémoires de l’Académie royale de Berlin de 1776[1]. On aura donc par ces formules
en supposant
En négligeant les quantités de l’ordre on aura
et cette approximation a toute l’exactitude qu’on peut désirer.
20. Nous avons donc résolu d’une manière générale le Problème géographique dont la projection stéréographique ne fournit qu’une solution particulière. Ce qui rend cette projection si utile pour la construction des Cartes géographiques, ce sont les deux propriétés dont nous avons fait mention au commencement de ce Mémoire, et qui consistent : 1o en ce que chaque partie de la surface de la Terre a sur la Carte une figure semblable à celle qu’elle a sur la Terre, et n’est altérée que dans sa grandeur ; 2o en ce que tous les méridiens et les parallèles de la Terre se trouvent représentés sur la Carte par des cercles. Nous avons pris ces deux conditions pour les données du Problème, et nous sommes parvenus à une solution générale qui renferme nécessairement toutes les manières possibles de satisfaire à ces mêmes conditions. Comme il y a plusieurs conséquences à tirer de cette solution, nous les développerons dans la suite de ces Recherches, laquelle fera le sujet d’un second Mémoire.
Parmi les différentes méthodes qu’on a imaginées pour la construction des Cartes terrestres, il y en a deux qui méritent principalement l’attention des Géomètres ; l’une est fondée sur les principes de la projection stéréographique de Ptolémée, et l’autre dépend de la Théorie des latitudes croissantes. La première est employée communémentdans les Mappemondes et dans les Cartes géographiques proprement dites, et a l’avantage que tous les méridiens et les parallèles de la Terre, et, en général, tous les cercles du globe y sont aussi représentés par des cercles ; la seconde est destinée uniquement aux Cartes marines, et diffère surtout de la précédente en ce que tous les méridiens et les parallèles de la Terre y sont représentés par des lignes droites. Mais elles ont l’une et l’autre cette propriété commune, qu’elles n’altèrent point la figure de chaque partie infiniment petite de la surface de la Terre ; en sorte que tous les angles qu’on peut former sur la Terre demeurent les mêmes dans les Cartes construites par ces méthodes.
Cette propriété, considérée en elfe-même et indépendammentde toute autre vue, donne lieu à une question analytique très-curieuse, qui consiste à déterminer la nature des courbes qu’on doit tracer sur un plan, pour représenter les méridiens et les parallèles de la Terre en sorte que la même propriété y ait toujours lieu. Il n’est pas difficile de trouver les formules générâtes qui résolvent ce Problème dans toute son étendue ; mais comme ces formules renferment des fonctions arbitraires, il en naît une nouvelle question concernant la manière de déterminer la forme de ces fonctions en sorte que les lignes qui doivent représenter les méridiens et les parallèles soient d’une nature donnée. Cette question secondaire est en quelque façon beaucoup plus difficile que la question principale, et je ne sais même si elle ne surpasse pas les forces de l’Analyse connue ; mais, pour l’utilité de la Géographie, il n’est pas nécessaire de la résoudre en général, pour des méridiens et des parallèles d’une figure quelconque ; il suffit de la résoudre dans le cas particulier où les méridiens et les parallèles doivent être des arcs de cercles, ce qui comprend à la fois la projection stéréographique et les Cartes réduites ; en effet toutes les autres solutions ne seraient que de pure curiosité, à cause de la difficulté qu’il y aurait toujours dans la pratique à tracer les courbes des méridiens et des parallèles, si elles étaient différentes du cercle. Tel est le Problème qui a fait le principal objet du Mémoire précédent, et que personne, que je sache, n’avait encore tenté de résoudre. La solution que j’en ai donnée ne laisse, ce me semble, rien à désirer du côté de l’Analyse mais comme il y a beaucoup de conséquences et d’applications à déduire de cette solution, j’ai cru qu’il était à propos de l’examiner en détail ; c’est à quoi sont destinées les Recherches suivantes, dans lesquelles je conserverai pour la commodité des citations la suite des chiffres qui distinguent les numéros.
21. Je remarque d’abord que les formules trouvées dans le premier Mémoire (12, 16) renferment deux solutions différentes, puisqu’on a vu (11) qu’il est permis d’y changer en et en mais j’observe en même temps que la solution qui résulterait de cette permutation serait plus curieuse que commode pour la pratique, puisqu’elle renfermerait des exponentielles de l’angle et des sinus et cosinus de la quantité que nous avons trouvé être une quantité logarithmique (19) ; au lieu que la solution que donnent immédiatementles formules dont il s’agit ne renferme que des sinus et cosinus des angles et à cause de
C’est pourquoi nous nous contenterons d’examiner cette solution.
Elle renferme, comme on voit, plusieurs constantes arbitraires, dont les unes contribuent à sa généralité, mais dont les autres ne donnent qu’une généralité apparente, puisqu’elles dépendent de la position arbitraire des axes des coordonnées ; on peut donc, en déterminant ces dernières d’une manière convenable, gagner une plus grande simplicité, sans rien perdre du côté de la généralité.
Pour cela j’observe que, comme les deux lignes droites qui sont les lieux des centres de tous les méridiens et de tous les parallèles de la Carte sont perpendiculaires l’une à l’autre, on peut prendre ces lignes mêmes pour les axes des coordonnées.
Nous supposerons donc que la ligne des centres de tous les méridiens soit l’axe des coordonnéesy, et que la ligne des centres de tous les parallèles soit l’axe des abscisses il faudra pour cela (14,15) : 1o que l’angle soit droit, ce qui donne et par conséquent 2o que l’on ait, en général, ce qui donne 3o que l’on ait aussi, en général, ce qui donnera Si donc on fait ces substitutions, et qu’on mette à la place de et de leurs valeurs en du no 19 ; que de plus on change en en en et en ce qui est évidemment permis, puisque sont des constantes arbitraires ; et qu’on fasse, pour abréger,
on aura
Dans ces formules est la longitude d’un méridien quelconque, le complément de la latitude d’un parallèle quelconque sur la surface de la Terre, l’excentricité des méridiens de la Terre ; sont quatre constantes arbitraires ; sont l’abscisse et l’ordonnée qui déterminent sur la Carte la position d’un lieu quelconque dont la longitude est et dont le complément de la latitude est est le rayon du cercle qui représente un méridien quelconque et dont le centre doit être placé dans l’axe des ordonnées à la distance de celui des abscisses ; est le rayon du cercle qui représente un parallèle quelconque, et dont le centre doit être placé dans l’axe des abscisses à la distance de celui des ordonnées ; enfin est la proportion suivant laquelle la grandeur de chaque région de la Terre est augmentée ou diminuée sur la Carte, en supposant le rayon de l’équateur égal à
22. En considérant les formules précédentes, il est aisé de voir qu’il en naîtra différentes espèces de projections géographiques, suivant qu’on donnera des valeurs différentes à la constante que nous nommerions pour cela l’exposant de la projection.
Et d’abord, si l’on fait on aura
par conséquent
ce qui donne des lignes droites pour les méridiens et les parallèles ; c’est le cas des Cartes réduites.
Pour déterminer donc dans ce cas la position des différents méridiens et des différents parallèles, on fera dans les expressions de et ou plutôt on y supposera seulement infiniment petit, en observant que l’on a
et l’on trouvera
or étant nul, pour que ne soit pas infini, il faut que soit nul en même temps que donc
étant une constante quelconque ; substituant cette valeur et faisant on aura donc
ou plus simplement
étant des constantes arbitraires.
Comme est la longitude et que dépend de la latitude seule, il est clair queest l’équation commune à tous les méridiens, et que
est l’équation commune à tous les parallèles. Ainsi les premiers sont des droites parallèles à l’axe des abscisses, et dont la distance à cet axe croît proportionnellement à la longitude et les derniers sont des droites parallèles à l’axe des ordonnées et dont la distance à cet axe croît proportionnellement aux logarithmes de
Dans les Cartes réduites ordinaires on suppose la Terre sphérique, ce qui donne et par conséquent
ce qui s’accorde avec la Théorie connue de \xies sortes de Cartes. Mais en tenant compte de l’aplatissement de la Terre, on aura
ainsi il n’y aura pour lors qu’à employer la distance au pôle corrigée (19) à la place de .
À l’égard de la valeur de elle sera, en mettant à la place de
23. Après avoir examiné le cas où la quantité est nulle, nous supposerons que cette quantité ait une valeur réelle quelconque ; et nous observerons d’abord, en général, qu’en faisant négatif dans les formules du no 21, on a le même résultat que si l’on y changeait seulement en D’où il s’ensuit que, pour avoir tous les cas possibles, il suffit de donner à des valeurs positives.
Voyons d’abord s’il y a des méridiens et des parallèles qui soient représentés sur la Carte par des lignes droites.
Il faut chercher pour cela les valeurs de et de qui donnent et et il est visible que la supposition de donnera
et par conséquent
et que celle de donnera
d’où l’on tire
En faisant ces substitutions dans les expressions de et ellès deviennent l’une et l’autre nulles. D’où l’on conclura d’abord que l’axe des abscisses est lui-même un méridien qui répond à la longitude et que l’axe des coordonnées est lui-même un parallèle qui répond à une distance au pôle corrigée telle que
Nous nommerons, en général, centre de la Carte le point dans lequel se coupent à angles droits le méridien et le parallèle qui doivent être représentés par des lignes droites ; ce point sera l’origine des coordonnées le méridien rectiligne sera l’axe des et le parallèle rectiligne sera l’axe des .
Comme les quantités sont arbitraires, on pourra prendre un lieu quelconque de la Terre à volonté pour le centre de la Carte. On fera la longitude de ce lieu égale à et, la latitude étant nommée on aura
24. Maintenant comme tous les méridiens doivent se couper dans les pôles, il s’ensuit que les pôles de la Carte seront placés dans l’axe des abscisses. Pour les déterminer il n’y aura qu’à faire et en comptant à l’ordinaire les distances au pôle depuis le pôle boréal de la Terre, la supposition de donnera le pôle boréal de la Carte, et la supposition de donnera le pôle austral. Or donne et donne faisant donc ces suppositions dans les expressions de et on aura pour le pôle boréal
et pour le pôle austral
d’où l’on voit que les deux pôles sont placés de part et d’autre du centre à distances égales.
Nous nommerons la partie de l’axe des abscisses, laquelle est entre les deux pôles et qui est divisée en deux également par le centre de la Carte, l’axe de la Carte, et nous désignerons cet axe par la quantité On aura donc et de là
cette équation, étant combinée avec la précédente
servira à déterminer les deux constantes et D’où l’on voit que l’axe de la Carte est aussi arbitraire, et peut par conséquent être déterminé à volonté suivant la grandeur qu’on veut assigner à la Carte même.
25. Voyons maintenant comment on doit s’y prendre pour tracer les méridiens et les parallèles d’une Carte dont le centre et l’axe sont donnés.
Soit le centre de la Carte (fig. 1), son pôle boréal, en sorte que du centre et du rayon soit décrit le cercle et soient tirés les deux diamètres perpendiculaires entre eux ; le point \mathrm A sera le pôle austral de la Carte ; le point sera l’origine des coordonnées
la ligne sera l’axe de la Carte et en même temps l’axe des abscisses lesquelles seront positives en allant de vers et négatives en allant de vers et la ligne sera l’axe des ordonnées lesquelles seront positives en allant de vers et négatives en allant de vers Les centres des cercles qui représenteront les différents méridiens de la Carte seront placés sur la ligne (prolongée de part et d’autre s’il est nécessaire) à la distance du point et leurs rayons seront égaux à et les centres des cercles qui représenteront les parallèles seront placés sur la ligne à la distance du point et leurs rayons seront égaux à Ainsi l’on pourra décrire ces différents cercles au moyen des formules du no 21, aussitôt qu’on aura déterminé les constantes ainsi que nous l’avons enseigné dans le numéro précédent. Mais, pour faciliter ces opérations autant qu’il est possible, nous allons les ramener à des constructions très-simples et très-commodes pour la pratique.
26. Et d’abord, pour ce qui regarde les méridiens, je vais déterminer les points où chaque méridien coupe l’axe prolongé s’il est nécessaire. Pour cela il n’y a qu’à chercher les valeurs de qui répondent à dans les formules du no 21. Or, faisant on a
donc, en prenant le carré, on aura aussi
ajoutant de part et d’autre la quantité et tirant la racine carrée, on aura
cette valeur étant substituée dans l’expression de elle deviendra
ou bien, par les formules trigonométriques connues, et à cause de
On prendra donc les arcs et d’un nombre de degrés égal à l’angle étant la différence de longitude entre le méridien qu’il s’agit de tracer et le méridien qui passe par le lieu qu’on suppose être au centre de la Carte ; et ayant tiré du point les cordes les points où ces cordes coupent la ligne prolongée s’il le faut, seront les deux extrémités du diamètre du cercle qui représentera le méridien cherché ; en sorte qu’il n’y aura plus qu’à décrire ce cercle du centre placé au milieu de la ligne et il est facile de démontrer par la Géométrie que ce cercle passera en même temps par les points et qui sont les pôles de la Carte. Cette construction suit évidemment de ce que l’angle est égal à et l’angle égal à de sorte que étant égal à on aura
27. Venons maintenant aux parallèles, et cherchons de même les points où chaque parallèle doit couper l’axe On supposera donc ce qui donnera
et par conséquent
on fera cette substitution dans l’expression de et l’on aura
ce qui se réduit à
Or
étant la distance au pôle corrigée du parallèle, et
étant la distance au pôle corrigée du lieu qui répond au centre de la Carte, laquelle est supposée donnée, les signes ambigus étant d’ailleurs à volonté ; donc, puisque on aura
En prenant les signes supérieurs on aura la distance et en prenant les signes inférieurs on aura la distance et le cercle décrit sur le diamètre sera le parallèle cherché.
28. Si l’on suppose alors la formule précédente devient
laquelle est très-commode pour le calcul logarithmique. Pour la construire, on changera en son équivalent
et substituant on aura
Qu’on prenne l’arc d’un nombre de degrés égal à l’angle et les arcs d’un nombre de degrés égal à l’angle et que du point on tire les sécantes qui coupent l’axe en et en ces deux points seront ceux par lesquels devra passer le cercle du parallèle dont il s’agit.
En effet il est clair qu’on aura (en menant la corde perpendiculaire à l’axe )
de plus l’angle sera et l’angle sera donc
par conséquent
donc
donc, etc.
29. Si du centre et du rayon on décrit le cercle et qu’on prenne sur la circonférence l’arc d’un nombre de degrés égal à et les arcs d’un nombre de degrés égal à qu’ensuite on tire les sécantes prolongées jusqu’à l’axe elles couperont cet axe dans les points Car on aura
donc
ce qui s’accorde avec les résultats ci-dessus.
Cette dernière construction sera utile lorsque la position du point de la Carte sera donnée, à la place de celle du centre et nous verrons plus bas que ce point a la propriété, que la quantité y est un minimum dans l’hypothèse de la Terre sphérique (36).
D’ailleurs, pour peu qu’on examine cette construction, il est aisé d’en voir la conformité avec celle qui résulte des principes de la projection stéréographique ordinaire ; la longitude et la distance au pôle seront celles qui répondent au lieu de l’œil sur la surface du globe et le point de la Carte, qui répond à la même longitude et à la distance au pôle sera le centre de la projection, c’est-à-dire le point du plan de projection par lequel passe le diamètre du globe qui aboutit au lieu de l’oeil ; enfin la ligne sera égale à la distance de l’œil à ce même plan.
De là on conclura donc que le cas de donne la projection stéréographique connue ; et qu’ainsi nos formules générales renferment à la fois les deux espèces les plus usitées de Cartes géographiques. De plus on voit par ces formules avec combien de facilité on peut tenir compte de l’aplatissement de la Terre dans la même projection, puisqu’il ne s’agit que d’y prendre, à la place de la vraie distance au pôle la distance corrigée que nous avons vu (19) être à très-peu près égale à
30. Sur la surface de la Terre la circonférence de chaque parallèle est divisée par les méridiens en parties proportionnelles aux différences de longitude ; voyons donc comment la circonférence des parallèles de la Carte sera divisée par les méridiens.
Qu’on mène du pôle au point la droite et qu’on abaisse du point la perpendiculaire sur l’axe il est visible que la tangente de l’angle sera égale à Or
donc
et par conséquent
Qu’on substitue pour et leurs valeurs données par les formules générales du no 21, et l’on trouvera, à cause de
Or on a dans les formules du no 27 (en prenant les signes supérieurs)