Mémoires posthumes de Braz Cubas/Chapitre 122

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Traduction par Adrien Delpech.
Garnier Frères (p. 402-403).


CXXII

Une intention très fine


Ce qui vexait Nha-Lolo, c’était l’attitude de son père. La facilité avec laquelle il était entré dans l’intimité des joueurs mettait en relief ses anciennes habitudes et affinités sociales, et Nha-Lolo craignait qu’un tel beau-père ne me fît rougir. Elle s’étudiait, elle m’étudiait ; elle se transformait. La vie élégante et polie l’attirait parce qu’elle lui paraissait le moyen le plus sûr de mettre nos deux personnes en parfaite harmonie. Elle observait, imitait et devinait. En même temps, elle faisait un effort pour dissimuler la vulgarité de sa famille. Ce jour-là, l’algarade paternelle l’attrista profondément. Son abattement était si visible et si expressif que j’en arrivai à attribuer à Nha-Lolo l’intention positive de séparer dans mon esprit sa propre cause de celle de l’auteur de ses jour. Ce sentiment me parut d’une grande élévation. C’était une affinité de plus entre nous.

— Décidément, me dis-je, je vais arracher cette fleur à ce bourbier.