Par la harpe et par le cor de guerre/Mort de Jeoffroy de Pontblanc, chevalier
V
MORT DE GEOFFROY DU PONTBLANC, CHEVALIER
Pays des hommes vaillants, d’autrefois et d’aujourd’hui, — Bretagne ! qui donc fut jamais plus brave que celui-ci ?
Les Anglais exécrables, ainsi que des loups, à minuit, — Par la trahison sont entrés dans la vieille cité.
Or Geoffroy du Pontblanc est encore éveillé dans son lit. — Un bruit le surprend. Il se jette sur son épée. —
Le bruit des armes !… « Les Anglais sont dans Lannion !… » — Point n’est besoin de cuirasse au chevalier vaillant. —
La ceinture de cuir de son épée, bouclée sur son corps nu, — La lance au poing, dans la rue, le voici.
Seul contre cent, seul contre mille, — Sa lance et son épée, à droite et à gauche, frappent.
Ainsi qu’un troupeau de moutons chassés par le berger, — Ensanglantés, les Saxons sont repoussés au centre de la ville.
La honte, dans leur cœur, enfin monta : — « Nous sommes mille ici, fuyant devant un homme nu ! « Archers, frappez vite ! avant l’arrivée du renfort ! — « N’étant point courageux de près, soyons vaillants de loin ! «
Une flèche, raide et acérée, traversa son genou : — Le chevalier Geoffroy du Pontblanc trébucha de douleur.
La flèche dans la jambe, mais l’épée toujours étincelante, — Il recula, lentement, jusqu’à la muraille de sa demeure.
Au mur appuyé, rude besogne il faisait encore, — Tant que la force ne trahit point son bras.
Mais les Anglais maintenant moins inquiets, — S’approchaient en nombre, leurs haches levées.
Hélas ! tu ne bouges plus, chevalier Geoffroy du Pontblanc, — Par un Saxon sans cœur, ta tête a été tranchée.
Mais en terre bretonne il reste encore de ta graine : — Ils lèveront nombreux, les rudes hommes. — Dieu les rende forts ! —
Et le sang coulera, comme la rivière qui passe : — Éternel est notre souvenir ! Paix à toi, chevalier du Pontblanc !