Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 7.djvu/595

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que homme illustre, ou un seul noble élevé aux plus hautes dignités de l’état, des ordres & des chapitres, qui ne découvrit au nombre de ses ayeux, quantité de gens obscurs. Supposé qu’un homme de la premiere qualité, plein de sa haute naissance, vit passer en revûe sous ses yeux, toute la suite de ses ancêtres, à-peu-près de la même maniere que Virgile fait contempler à Enée tous ses descendans, de quelles différentes passions ne seroit-il pas agité, lorsqu’il verroit des capitaines & des pastres, des ministres d’état & des artisans, des princes & des goujats, se suivre les uns les autres, peut-être d’assez près, dans l’espace de quatre mille ans ? De quelle tristesse ou de quelle joie son cœur ne seroit-il pas saisi à la vûe de tous les jeux de la fortune, dans une décoration si bigarrée de haillons & de pourpre, d’outils & de sceptres, de marques d’honneur & d’opprobre ? Quel flux & reflux d’espérances & de craintes, de transports de joie & de mortification, n’essuyeroit-il pas, à-mesure que sa généalogie paroitroit brillante ou ténébreuse ? Mais que cet homme de qualité, si fier de ses ayeux, rentre en lui-même, & qu’il considere toutes ces vicissitudes d’un œil philosophique, il n’en sera point altéré. Les générations des mortels, alternativement illustres & abjectes, s’effacent, se confondent, & se perdent comme les ondes d’un fleuve rapide ; rien ne peut arrêter le tems qui entraîne après lui tout ce qui paroît le plus immobile, & l’engloutit à jamais dans la nuit éternelle. (D. J.)

Quand les familles modernes remontent jusqu’au tems des premieres croisades, & qu’à partir de-là elles prennent pour tige un homme déjà illustre ou de quelque considération, leur généalogie peut être regardée comme respectable. On peut s’aider sur ces matieres des généalogies anciennes de Claude de l’Isle, & d’un livre du P. Buffier, intitulé les souverains de l’Europe, & pour la maison de France en particulier, de l’histoire généalogique qu’en a donné M. le Gendre de Saint-Aubin.

GÉNÉALOGIQUE, (Arbre) Art. héraldique, stemma dans Séneque, grande ligne au milieu de la table généalogique, qu’elle divise en d’autres petites lignes, qu’on nomme branches, & qui marquent tous les descendans d’une famille ou d’une maison ; les degrés généalogiques se tracent dans des ronds rangés au-dessus, au-dessous, & aux côtés les uns des autres, ce que nous avons imité des Romains, qui les appelloient stemmata, d’un mot grec qui veut dire une couronne de branches de fleurs.

C’est un amusement pour un philosophe, que de voir l’arbre généalogique d’un gentilhomme buriné sur une grande feuille de vélin ; vous trouvez toûjours cet arbre taillé, émondé, cultivé, sans mousse, sans bois-mort, & sans aucune branche pourrie ; vous êtes encore presque sûr de trouver à la tête de la plûpart des arbres généalogiques, un grand ministre d’état, ou un célebre militaire. L’honnête artisan qui a donné la naissance à cet homme illustre, dont on prétend descendre, est retranché de l’arbre généalogique, avec tous ses ancêtres d’une vie frugale, & vous diriez que le fondateur de la maison n’a jamais eu de pere. Mais si nous remontions plus haut vers la source de plusieurs nobles de tout pays, nous les perdrions peut-être dans une foule d’artisans ou de fermiers, sans espérance de les en voir sortir, à-peu-près comme la voie appienne des anciens Romains, qui après avoir couru plusieurs milles, s’alloit perdre dans un marais. (D. J.)

Table généalogique, est la table des ancêtres de quelqu’un. On dispose ces tables en colonnes ou en arbres. Voyez ci-dessus Arbre généalogique.

GÉNEALOGISTE, s. m. (Art. hérald.) faiseur de généalogies, qui décrit l’histoire sommaire des pa-

rentés & des alliances d’une personne, ou d’une maison

illustre, qui en établit l’origine, les branches, les emplois, les décorations. C’est une science toute moderne, faite par M. d’Hozier en France ; c’est lui qui a débrouillé le premier les généalogies du royaume, & qui les a tirées des plus profondes ténebres.

D’Hozier (Pierre) dont il s’agit ici, étoit fils d’un avocat, & nâquit à Marseille en 1592. Le pur hasard le jetta dans le goût des recherches généalogiques, lorsqu’il y pensoit le moins, & uniquement pour rendre service à M. Créqui de Bernieulle, qui avoit des raisons personnelles d’être au fait de sa généalogie. M. d’Hozier après y avoir travaillé longtems, publia pour son coup d’essai, la généalogie de la maison de Créqui-Bernieulle ; le succès qu’il eut, fit sa réputation & sa fortune. Louis XIII. lui conféra en 1641 la charge de juge d’armes de France, vacante par la mort de François de Chevrier de Saint-Mauris, qui exerça le premier cette fonction en 1614 ; mais M. d’Hozier laissa son prédécesseur bien loin derriere lui, en réduisant la connoissance de tous les titres des nobles, en principes & en art. Alors la noblesse du royaume desira d’avoir une généalogie dressée de sa main ; on lui remit les armes, les noms, les sur-noms, & les contrats de chaque famille : à son travail prodigieux il joignoit une mémoire étonnante en ce genre. M. d’Ablancourt disoit qu’il falloit qu’il eût assisté à tous les mariages & à tous les baptemes du royaume. Louis XIV. à son avenement à la couronne, avoit créé en sa faveur la charge de généalogiste de France, & lui donna en 1651 un brevet de conseiller d’état. Il mourut comblé de faveurs le premier Décembre 1660, & laissa trois fils qui marcherent sur ses traces.

Louis-Roger d’Hozier son fils ainé, fut non-seulement pourvû en 1666 de l’emploi de généalogiste & de juge d’armes de France, mais encore d’une charge de gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, & du collier de l’ordre de S. Michel.

Louis Pierre d’Hozier son second fils eut les mêmes titres & les mêmes graces.

Enfin Charles d’Hozier, autre fils de Pierre d’Hozier, trouva dans les mémoires de son pere, quantité de matériaux pour augmenter le nobiliaire de France, & dressa toutes les généalogies des maisons anciennes & illustres, sous le titre de Grand Nobiliaire, qu’il publia à Châlons. Il réduisit dans une forme nouvelle les preuves de noblesse pour les pages du roi, ceux de ses écuries, & les demoiselles de saint Cyr. Sa majesté le gratifia des mêmes titres qu’avoient eu ses freres, & d’une pension de deux mille livres. M. le duc de Savoie l’honora de la croix de la religion, & des ordres militaires de S. Maurice & de S. Lazare.

Parmi les généalogistes les plus accrédités, l’on peut mettre au premier rang M. de Clérambault, spécialement chargé des généalogies & preuves des personnes nommées chevaliers des ordres du roi. (D. J.)

GÉNEHOA ou GHENIOA, (Géog.) pays d’Afrique dans la Nigritie, le long du Niger ; il abonde en coton, orge, ris, troupeaux & poisson. La province de Gualata le borne au nord, la riviere du Sénéga au sud, & l’Océan atlantique le baigne au couchant ; c’est-là du-moins en gros ce qu’en disent les voyageurs, qui ont successivement copié Leon l’affriquain. Les cartes de Dapper, celles de Sanson, de Nolin & autres, conservent le pays de Génehoa, au nord du Niger ; les nouvelles cartes nomment ce même pays, le pays de Sénega. (D. J.)

GÉNEP, (Géogr.) Genepum, ville d’Allemagne, dans le cercle de Westphalie, au duché de Cleves, sujette au roi de Prusse, avec un château & titre de