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1598, avril.– Nantes

Édit de Nantes.

Archives nationales (Paris), J//943/2 (AE/II/763)

Henry par la grace de Dieu roy de France et de Navarre, à tous présens et advenir, salut. Entre les grâces infinies qu’il a pleu à Dieu nous départir, celle est bien des plus insignes et remarquables de nous avoir donné la vertu et la force de ne cedder aux effroyables troubles, confusions et désordres qui se trouvèrent à nostre avènement à ce royaume, qui estoit divisé en tant de partz et de factions que la plus légitime en estoit quasy la moindre, et de nous estre néantmoings tellement roydiz contre cette tourmente que nous l’ayons enfin surmontée et touchions maintenant le port de salut et repos de cest Estat, de quoy à Luy seul en soit la gloire toute entière, et à nous la grâce et l’obligation, qu’il se soit voullu servir de nostre labeur pour parfaire ce bon œuvre auquel il a esté visible à tous, si nous avons porté ce qui estoit non seullement de nostre debvoir et pouvoir, mais encore quelque chose de plus, qui n’eust peult-estre pas esté en autre temps bien convenable à la dignité que nous tenons, que nous n’avons pas eu craincte d’y exposer, puisque nous y avons tant de fois et si librement exposé nostre propre vie ; et en cette grande concurrence de si grandz et périlleux affaires, ne se pouvans tous composer tout à la fois et en mesme temps, il nous y a faillu tenir cest ordre d’entreprandre premièrement ceulx qui ne se pouvoient terminer que par la force, et plustost remettre et suspendre pour quelque temps les autres qui se debvoient et pouvoient traicter par la raison et la justice, comme les différendz généraulx d’entre noz bons subjectz, et les maulx particuliers des plus saynes parties de l’Estat, que nous estimions pouvoir bien plus aysément guérir après en avoir osté la cause principalle qui estoit en la continuation de la guerre civille. En quoy nous estans, par la grâce de Dieu, bien et heureusement succeddé, et les armes et hostillitez estans du tout cessées en tout le dedans du royaume, nous espérons qu’il nous succeddera aussy bien aux autres affaires qui restent à y composer, et que par ce moyen nous parviendrons à l’establissement d’une bonne paix et tranquile repos qui a tousjours esté le but de tous noz veuz et intentions, et le pris que nous désirons de tant de peines et travaulx, ausquelz nous avons passé ce cours de nostre aage. Entre les dictes affaires, ausquelz il a faillu donner patience, et l’ung des principaulx, ont esté les plainctes que nous avons receues de plusieurs de noz provinces et villes catholiques de ce que l’exercice de la religion catholique n’estoit pas universellement restably, comme il est porté par les eeditz cy devant faictz pour la pacification des troubles à l’occasion de la religion, comme aussy les supplications et remonstrances qui nous ont esté faictes par noz subjectz de la religion prétendue réformée, tant sur l’inexécution de ce qui leur est accordé par lesdits eeditz que sur ce qu’ilz désireroient y estre adjousté pour l’exercice de leurdicte religion, la liberté de leurs consciences et la seureté de leurs personnes…