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LE VICOMTE DE LAUNAY.

entourée de son trousseau, dont chaque pièce avait été offerte par les premiers fabricants de Paris. Cette belle personne apportait aussi en mariage une galerie de tableaux, dus à nos meilleurs artistes. Ce genre de présents de noces est assez rare aujourd’hui. Parmi ces tableaux, on en remarquait un fort gracieux représentant deux Paysannes, d’après Greuze. Les amateurs se disputaient en idée ce lot précieux et se l’achetaient d’avance, sans savoir encore à qui le sort l’avait destiné. Ce tableau avait été envoyé par un anonyme ; mais des anonymes comme ceux-là sont bientôt reconnus : le talent est une signature.

Parmi ces lots, il y avait un turban oriental velours et or qui faisait l’envie de toutes les femmes. Il a été gagné par l’ambassadeur d’Angleterre. Est-ce un présage ? (Question d’Orient.)

Le beau tableau Gros-Claude a été gagné par madame la duchesse de Narbonne. C’était justice : et, cette fois, c’est le lot qui a du bonheur d’échoir à un juge aussi digne et aussi éclairé.

La robe de la mariée, en dentelle, a été gagnée par le portier de la Renaissance. Le brave homme a emporté tristement sous son bras sa belle robe, en disant : « J’aurais mieux aimé un tableau pour orner ma chambre !… » En effet, le demi-jour d’une loge de portier doit être bien favorable à certaines peintures.

La guirlande de la mariée, en roses blanches données par Batton, a été gagnée par le général ***.

Le buffet, placé dans le vestibule, était servi d’une manière magique. On prononçait quelques paroles et tout à coup une trappe s’ouvrait, et les babas, les pâtés, les gâteaux, les brioches évoqués apparaissaient comme dans les Pilules du Diable.

On doit de grands éloges et beaucoup de reconnaissance à l’ingénieux ordonnateur de cette fête ; tant de soins, tant d’éclat, tant de luxe étaient nécessaires. C’est maintenant que cette institution bienfaisante est réellement fondée, et le succès de cette année assure le succès du bal de l’année prochaine, si toutefois il y a une année prochaine.

Le troisième bal donné aux Tuileries était un vrai bal de charité ; la plupart des invités l’avaient été par complaisance. Quelle file ! quelle foule et quelles figures !… Mais aussi, com-