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LE VICOMTE DE LAUNAY.

chez eux très-fiers, car ils ont une fille qui improvise : cela est merveilleux vraiment ! Mais après ce grand progrès nous expliquera-t-on une chose : jadis les femmes ne savaient point l’orthographe et elles savaient parfaitement bien danser ; les hommes étaient toujours auprès d’elles. — Aujourd’hui les femmes sont fort instruites ; elles parlent l’anglais, l’italien ; elles improvisent en français ; elles lisent la Revue britannique, les histoires de M. Mignet, et même les discours de la Chambre ; elles sont fort en état de soutenir la conversation avec les hommes… et pourtant les hommes les laissent seules faire valoir entre elles cette brillante éducation ; ils se réunissent dans des clubs, dans des cafés, ou bien, ce qui est plus outrageant, dans des bals suspects où ces femmes si bien élevées, si savantes, ne vont pas, et où celles qu’on y va chercher n’ont d’autres prétentions que des succès de danse ; danse bizarre, il est vrai, danse prohibée sans doute, mais enfin qui prouve encore ce que nous disions, c’est que le besoin d’une réforme dans la danse se fait généralement sentir. Oh ! les femmes ! les femmes ! Elles ne comprennent point leur vocation ; elles ne savent point que leur premier intérêt, leur premier devoir est d’être séduisantes. Qu’elles s’instruisent… bien, mais qu’elles ne négligent pas pour s’instruire ce qui doit faire leur véritable attrait ; qu’elles lisent, mais qu’elles chantent ; qu’elles sachent parler l’anglais comme une Anglaise, mais qu’elles sachent porter un chapeau à la française ; qu’elles fassent des vers, si elles peuvent, mais qu’elles sachent rire et danser, plaire enfin, plaire avant tout. L’homme ne demande pas à sa compagne de partager ses travaux, il lui demande de l’en distraire. L’instruction pour les femmes, c’est le luxe ; le nécessaire, c’est la grâce, la gentillesse, la séduction : les femmes sont un ornement dans la vie, et la loi de tout ornement est de paraître fin, léger, délicat et coquet ; ce qui ne l’empêche pas d’être en cuivre ou en pierre, en or ou en marbre.

Le nouveau Cercle des Arts est en pleine prospérité ; brillantes admissions, sévères et capricieuses omissions, tout s’accorde pour en faire une assemblée dont chacun voudra faire partie. Quelques-uns de ses membres, qui ne sont pas encore à la hauteur du siècle, avaient proposé de black bouler M. de