Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/422

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nopole, et conduire à de nouveaux triomphes un peuple qui aura tout à la fois obtenu le juste salaire de son travail et fait l’épreuve de sa force morale. Nous faisons une expérience dont le monde entier profitera. Nous enseignons aux hommes civilisés de tous les pays comment on triomphe sans intrigue, sans transaction, sans crime et sans remords, sans verser le sang humain, sans enfreindre les lois de la société et encore moins les commandements de Dieu. »

Tel est le but, tel est l’esprit de l’association. On ne sera pas surpris des vives lumières qu’elle a répandues en Angleterre, si l’on veut bien se rappeler que la question de la liberté du commerce touche à tous les grands problèmes de la science économique : distribution des richesses, paupérisme, colonies, et à un grand nombre de difficultés politiques ; car c’est le monopole qui sert de base à l’influence aristocratique, à la prépondérance de l’Église établie, au système de conquêtes et d’envahissements qui a prévalu dans les conseils de la Grande-Bretagne, au développement exagéré de forces navales que cette politique exige, enfin à la haine et à la méfiance des peuples qu’elle ne peut manquer de susciter.

Je crois avoir établi que la France et l’Angleterre suivent, en matière de douanes, une politique opposée. C’est le moment d’examiner la question que je posais en commençant :

Quelles seront, sur la prospérité, la sécurité et la moralité des deux nations, les conséquences logiques de l’état de choses dans lequel chacune d’elles aspire à se placer ?

§ III. — Je n’examinerai pas longuement les effets comparés de la liberté et du monopole sur la prospérité des nations. Les écoles politiques modernes paraissent se préoccuper beaucoup moins de prospérité que de prépondérance, comme si la prépondérance pouvait être considérée comme autre chose qu’un moyen (et souvent un moyen trompeur)