Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/108

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réales et le prix des aliments du peuple, doivent-elles, ou non, être maintenues ? Je ne fais aucun doute que l’opinion publique, quelle que soit celle de la législature, ne les regarde comme incompatibles avec l’état de choses actuel. Qu’un changement dans cette législation soit devenu indispensable, c’est ce qui est admis par toute la communauté, sinon par le Parlement. Il est vrai que l’opinion se divise sur la nature de ce changement. Le commerce des céréales sera-t-il entièrement affranchi, ou soumis à un droit fixe ? Dans ces derniers temps, le système du droit fixe a rencontré beaucoup de défenseurs[1]. La protection a été par eux abandonnée, et le principe auquel ils adhèrent est celui du droit fixe, non point en tant que droit protecteur, mais en tant que droit fiscal. Mais la Ligue élève contre ce droit, renfermé dans ces limites, une objection péremptoire, savoir qu’il viole les principes d’après lesquels doit se prélever le revenu public. Le premier de ces principes, c’est que l’impôt doit donner la plus grande somme possible de revenus à l’État, avec la moindre charge possible sur la communauté. Mais, sous l’un et l’autre rapport, le but est manqué par le droit fixe, car il ne peut produire un revenu sans agir comme protection, en élevant le prix des céréales de tout le montant du droit lui-même. Aux époques où il serait efficace, il produirait du revenu, mais il élèverait le prix des grains. Aux époques où il ne serait pas efficace, il n’influerait pas sur le prix, mais il ne remplirait pas non plus le but du chancelier de l’Échiquier. On a dit que le droit serait supporté par l’étranger et non par les habitants de ce pays ; alors, je demande pourquoi fixer le droit à 8 sh. ? Pourquoi pas 10, 15, 20 sh. ? C’est une grande inconséquence que de répondre : Au delà de 8 sh., le droit restreindrait l’importation ; à 20 sh., il équivaudrait à une prohibition. Car, n’en résulte-t-il pas ceci : que 8 sh. laisse plus de place à l’importation que 10 sh. ? et dès lors ne suis-je pas fondé à dire que l’importation serait plus grande avec le droit de 5 sh. ; plus

  1. Le cabinet whig avait proposé un droit de 8 sh. par quarter. Le droit actuel est progressif ; de 1 sh., quand le blé est à 73 sh., il s’élève à 20 sh., quand le blé est à 50 sh. ou au-dessous.