Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/483

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France ! Quoi ! après une si longue paix, après tant de relations amicales nouées entre les deux pays, la France serait jugée capable de si détestables desseins ! En vérité, messieurs, je ne saurais m’arrêter patiemment à cette idée que des hostilités soient encore nécessaires entre la France et l’Angleterre ! (Applaudissements prolongés.) Je ne pense pas qu’il soit possible, dans l’état actuel du monde, que ces nations voisines et maintenant en paix, l’une et l’autre avancées en civilisation, soient maintenues par n’importe quelle ruse dans un état de mutuelle haine ! (Adhésions.)

J’espère, messieurs, dans tout ce que j’ai dit, n’avoir pas employé un mot qui puisse faire mal interpréter ma pensée. Je sais que les hommes de Manchester n’aiment pas les titres ; je sais qu’ils sont naturellement portés à suspecter les membres du gouvernement (rires), et aujourd’hui même j’ai entendu dire à un honorable gentleman qu’il s’attendait à ce que je serais atteint soudainement d’un accès de grippe (rires) et hors d’état de me trouver au milieu de vous. Je sais que l’on croit généralement que les hommes n’aiment pas à dire leur pensée lorsqu’ils sont aux affaires (rires) ; mais je n’ai jamais trouvé que la franchise fût une mauvaise politique. (Applaudissements.)

Je vous ai dit sincèrement que je n’ai aucune sympathie pour ce que l’on appelle l’esprit militaire (applaudissements) ; je vous l’ai dit, mais je ne veux pas m’engager devant cette assemblée à agir de telle ou telle façon particulière dans cette question ; j’ignore encore ce que veut faire le gouvernement ; peut-être a-t-il la même opinion que moi sur l’invasion et sur la folie de la panique ; mais tout ce que je puis dire, c’est ceci : attendez, attendez, et avant de prononcer sur ses actes sachez ce qu’il proposera. Donnez votre opinion sur la lettre du comté de Lancastre ; donnez votre opinion sur M. Pigon[1] et sur la lettre du duc de Wellington ; mais ne vous prononcez pas sur les intentions du gouvernement avant de les connaître. (Applaudissements.) Laissez-moi aussi toute ma liberté d’opi-

  1. M. Pigon, grand fabricant de poudre et l’un des principaux instigateurs de la panique.