Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/188

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En France, les capitaux engagés dans l’industrie donnent, je suppose, 5 p. 100 de profit. — Mais voici Mondor qui a dans une usine 100,000 fr. qui lui laissent 5 p. 100 de perte. — De la perte au gain, la différence est 10,000 fr. — Que fait-on ? — Tout chattement, on répartit entre vous un petit impôt de 10,000 fr. qu’on donne à Mondor ; vous ne vous en apercevez pas, car la chose est fort habilement déguisée. Ce n’est pas le percepteur qui vient vous demander votre part de l’impôt ; mais vous le payez à Mondor, maître de forges, chaque fois que vous achetez vos haches, vos truelles et vos rabots. — Ensuite on vous dit : Si vous ne payez pas cet impôt, Mondor ne fera plus travailler ; ses ouvriers, Jean et Jacques, seront sans ouvrage. Corbleu ! si on vous remettait l’impôt, ne feriez-vous pas travailler vous-mêmes, et pour votre compte encore ?

Et puis, soyez tranquilles, quand il n’aura plus ce doux oreiller du supplément de prix par l’impôt, Mondor s’ingéniera pour convertir sa perte en bénéfice, et Jean et Jacques ne seront pas renvoyés. Alors, tout sera profit pour tous.

Vous insisterez peut-être, disant : « Nous comprenons qu’après la réforme, il y aura en général plus d’ouvrage qu’avant ; mais, en attendant, Jean et Jacques seront sur la rue. »

À quoi je réponds :

1° Quand l’ouvrage ne se déplace que pour augmenter, l’homme qui a du cœur et des bras n’est pas longtemps sur la rue ;

2° Rien n’empêche que l’État ne réserve quelques fonds pour prévenir, dans la transition, des chômages auxquels, quant à moi, je ne crois pas ;

3° Enfin, si, pour sortir d’une ornière et entrer dans un état meilleur pour tous, et surtout plus juste, il faut absolument braver quelques instants pénibles, les ouvriers sont