Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/218

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réalisée par chacun de vos trente-cinq millions de concitoyens. Il y a là de quoi épuiser les draps de Verviers et ceux d’Elbeuf. La nation sera mieux vêtue, voilà tout.

— J’y réfléchirai ; car tout cela se brouille un peu dans ma tête.

— Après tout, en fait de vêtements, l’essentiel est d’être vêtu. Vos membres sont votre propriété et non celle du fabricant. Les mettre à l’abri de grelotter est votre affaire, et non la sienne ! Si la loi prend parti pour lui contre vous, la loi est injuste, et vous m’avez autorisé à raisonner dans l’hypothèse que ce qui est injuste est nuisible.

— Peut-être me suis-je trop avancé ; mais poursuivez l’exposé de votre plan financier.

— Je ferai donc une loi de douanes.

— En deux volumes in-folio ?

— Non, en deux articles.

— Pour le coup, on ne dira plus que ce fameux axiome : « Nul n’est censé ignorer la loi, » est une fiction. Voyons donc votre tarif.

— Le voici :

Art. 1er. Toute marchandise importée paiera une taxe de 5 p. 100 de la valeur.

— Même les matières premières ?

— À moins qu’elles n’aient point de valeur.

— Mais elles en ont toutes, peu ou prou.

— En ce cas, elles paieront peu ou prou.

— Comment voulez-vous que nos fabriques luttent avec les fabriques étrangères qui ont les matières premières en franchise ?

— Les dépenses de l’État étant données, si nous fermons cette source de revenus, il en faudra ouvrir une autre : cela ne diminuera pas l’infériorité relative de nos fabriques, et il y aura une administration de plus à créer et à payer.

— Il est vrai ; je raisonnais comme s’il s’agissait d’annu-