Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/279

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raison pour adoucir la transition ; ce n’en est pas une pour interdire systématiquement tout progrès, encore moins pour le méconnaître.

On nous représente l’industrie comme une lutte. Cela n’est pas vrai, ou cela n’est vrai que si l’on se borne à considérer chaque industrie dans ses effets, sur une autre industrie similaire, en les isolant toutes deux, par la pensée, du reste de l’humanité. Mais il y a autre chose ; il y a les effets sur la consommation, sur le bien-être général.

Voilà pourquoi il n’est pas permis d’assimiler, comme on le fait, le travail à la guerre.

Dans la guerre, le plus fort accable le plus faible.

Dans le travail, le plus fort communique de la force au plus faible. Cela détruit radicalement l’analogie.

Les Anglais ont beau être forts et habiles, avoir des capitaux énormes et amortis, disposer de deux grandes puissances de production, le fer et le feu ; tout cela se traduit en bon marché du produit. Et qui gagne au bon marché du produit ? Celui qui l’achète.

Il n’est pas en leur puissance d’anéantir d’une manière absolue une portion quelconque de notre travail. Tout ce qu’ils peuvent faire, c’est de le rendre superflu pour un résultat acquis, de donner l’air en même temps qu’ils suppriment la pompe, d’accroître ainsi notre force disponible, et de rendre, chose remarquable, leur prétendue domination d’autant plus impossible que leur supériorité serait plus incontestable.

Ainsi nous arrivons, par une démonstration rigoureuse et consolante, à cette conclusion, que le travail et la violence, si opposés par leur nature, ne le sont pas moins, quoi qu’en disent protectionistes et socialistes, par leurs effets.

Il nous a suffi pour cela de distinguer entre du travail anéanti et du travail économisé.