Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/362

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pain, de la viande, du fer, du drap. Puisque chacun exploite la Loi à son profit, nous voulons l’exploiter aussi. Nous voulons en faire sortir le Droit à l’assistance, qui est la part de spoliation du pauvre. Pour cela, il faut que nous soyons électeurs et législateurs, afin que nous organisions en grand l’Aumône pour notre classe, comme vous avez organisé en grand la Protection pour la vôtre. Ne nous dites pas que vous nous ferez notre part, que vous nous jetterez, selon la proposition de M. Mimerel, une somme de 600,000 francs pour nous faire taire et comme un os à ronger. Nous avons d’autres prétentions et, en tout cas, nous voulons stipuler pour nous-mêmes comme les autres classes ont stipulé pour elles-mêmes ! »

Que peut-on répondre à cet argument ? Oui, tant qu’il sera admis en principe que la Loi peut être détournée de sa vraie mission, qu’elle peut violer les propriétés au lieu de les garantir, chaque classe voudra faire la Loi, soit pour se défendre contre la spoliation, soit pour l’organiser aussi à son profit. La question politique sera toujours préjudicielle, dominante, absorbante ; en un mot, on se battra à la porte du Palais législatif. La lutte ne sera pas moins acharnée au-dedans. Pour en être convaincu, il est à peine nécessaire de regarder ce qui se passe dans les Chambres en France et en Angleterre ; il suffit de savoir comment la question y est posée.

Est-il besoin de prouver que cette odieuse perversion de la Loi est une cause perpétuelle de haine, de discorde, pouvant aller jusqu’à la désorganisation sociale ? Jetez les yeux sur les États-Unis. C’est le pays du monde où la Loi reste le plus dans son rôle, qui est de garantir à chacun sa liberté et sa propriété. Aussi c’est le pays du monde où l’ordre social paraît reposer sur les bases les plus stables. Cependant, aux États-Unis même, il est deux questions, et il n’en est que deux, qui, depuis l’origine, ont mis plusieurs fois l’ordre