Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/146

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moitié de votre thèse, en quoi différez-vous des économistes ?

Vous convenez qu’avancer un capital, c’est rendre un service, qui donne droit à un service équivalent, lequel est susceptible d’évaluation et s’appelle intérêt.

Vous convenez que le seul moyen de dégager l’équivalence de ces deux services, c’est de les laisser s’échanger librement, puisque vous repoussez l’intervention de l’État, et proclamez, dès le début de votre article, la liberté de l’homme et du citoyen.

Vous convenez que l’intérêt a été, dans son institution providentielle, un instrument d’égalité et de progrès.

Vous convenez que, par l’accumulation des capitaux (qui certes ne s’accumuleraient pas si toute rémunération leur était déniée), l’Intérêt tend à baisser, à mettre l’instrument du travail, la matière première et l’approvisionnement, toujours à la portée plus facile de classes plus nombreuses.

Vous convenez que les obstacles, qui arrêtent cette désirable diffusion du capital, sont artificiels et se nomment priviléges, restrictions, monopoles ; qu’ils ne peuvent être la conséquence fatale de la liberté, puisque vous invoquez la liberté.

Voilà une doctrine qui, par sa simplicité, sa grandeur, sa concordance, le parfum de justice qui s’en exhale, s’impose aux convictions, entraîne les cœurs, et fait pénétrer, dans tous les replis de l’intelligence, le sentiment de la certitude. Que reprochez-vous donc à l’économie politique ? Est-ce d’avoir repoussé les formules diverses — et par suite refusé de prendre le nom — du socialisme ? Oui, elle a combattu le saint-simonisme et le fouriérisme ; vous les avez combattus comme elle. Oui, elle a réprouvé les théories du Luxembourg ; vous les avez réprouvées comme elle. Oui, elle a lutté contre le communisme ; vous avez fait plus, vous l’avez écrasé.