Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/227

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d’hommes craignant Dieu, incapables de transiger avec leur conscience, continue à prendre 4 p. 100 sur tous ses escomptes, sans faire jouir le public de la plus légère bonification ? Croiriez-vous que c’est sur ce pied de 4 p. 100 sur un capital de 431 millions, dont elle n’est pas propriétaire, qu’elle règle les dividendes de ses actionnaires, et qu’elle fait coter ses actions à la Bourse ? Est-ce du vol, cela, oui ou non ?

Nous ne sommes pas au bout. Je ne vous ai dit que la moindre partie des méfaits de cette société d’agioteurs, instituée par Napoléon tout exprès dans le but de faire fleurir le parasitisme gouvernemental et propriétaire, et de sucer le sang du peuple. Ce ne sont pas quelques millions de plus ou de moins qui peuvent atteindre d’une manière dangereuse un peuple de 36 millions d’hommes. Ce que je vous ai révélé des larcins de la Banque de France n’est que bagatelle : ce sont les conséquences qu’il faut surtout considérer.

La Banque de France tient aujourd’hui dans ses mains la fortune et la destinée du pays.

Si elle faisait remise à l’industrie et au commerce d’une différence sur le taux de ses escomptes, proportionnelle à l’augmentation de son encaisse ; si, en autres termes, le prix de son crédit était réduit à 3/4 p. 100, ce qu’elle devrait faire pour s’exempter de tout vol, cette réduction produirait instantanément, sur toute la face de la République, et en Europe, des conséquences incalculables. Un livre ne suffirait pas à les énumérer : je me bornerai à vous en signaler quelques-unes.

Si donc le crédit de la Banque de France, devenue Banque nationale, était de 3/4 p. 100 au lieu de 4, les banquiers ordinaires, les notaires, les capitalistes, et jusqu’aux actionnaires de la Banque même, seraient bientôt forcés, par la concurrence, de réduire leurs intérêts, escomptes et dividendes au maximum de 1 p. 100, frais d’acte et commission compris. Quel mal, pensez-vous, ferait cette ré-