Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/291

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Et tout cela pour avoir revêtu votre pensée d’une expression fausse. Notre débat eût été bien abrégé, si vous m’aviez dit : Tant que le crédit existe, il ne peut être gratuit ; mais j’ai trouvé le moyen de faire qu’il n’existe pas, et dorénavant j’écrirai sur mon drapeau, au lieu de ces mots : Gratuité du crédit, ceux-ci : Anéantissement du crédit.

La question ainsi posée, je n’aurais eu qu’à examiner vos moyens d’exécution. C’est ce que, par votre dernière lettre, vous m’avez mis à même de faire. J’ai prouvé que ces moyens d’exécution se résument en un mot : papier-monnaie.

J’ai prouvé, en outre :

Que, pour que les billets d’une Banque soient reçus, il faut qu’ils inspirent confiance ;

Que, pour qu’ils inspirent confiance, il faut que la Banque ait des capitaux ;

Que, pour que la Banque ait des capitaux, il faut qu’elle les emprunte précisément à A, B, C, D, qui sont le peuple, et en paie l’intérêt au cours ;

Que si elle en paie l’intérêt, elle ne peut les prêter sans intérêt ;

Que, si elle les prête à A, B, C, D, gratis, après les leur avoir pris de force sous forme de contribution, il n’y a rien de changé dans le monde, si ce n’est une oppression de plus ;

Et enfin que, dans aucune hypothèse, même en réduisant toutes les transactions à des ventes, vous ne détruisez pas cette rémunération du capital, toujours confondue avec le prix de vente.

Il résulte de là, que si votre Banque n’est qu’une fabrique de papier-monnaie, elle amènera la désorganisation sociale.

Que si, au contraire, elle est établie sur les bases de la justice, de la prudence et de la raison, elle ne fera rien que ne puisse faire mieux qu’elle la liberté des Banques.