Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/160

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tention du lecteur sur les circonstances dans lesquelles on a cherché le fondement de la Valeur. Mais avant, je dois la faire poser elle-même devant lui dans une série d’exemples. C’est par des applications diverses que l’esprit saisit une théorie.

Je montrerai comment tout se réduit à un troc de services. Je prie seulement qu’on se rappelle ce qui a été dit du troc dans le chapitre précédent. Il est rarement simple ; quelquefois il s’accomplit par circulation entre plusieurs contractants, plus souvent par l’intermédiaire de la monnaie, et il se décompose alors en deux facteurs, vente et achat ; mais comme cette complication ne change pas sa nature, il me sera permis, pour plus de facilité, de supposer le troc immédiat et direct. Cela ne peut nous induire à aucune méprise sur la nature de la Valeur.

Nous naissons tous avec un impérieux besoin matériel qui doit être satisfait sous peine de mort, celui de respirer. D’un autre côté, nous sommes tous plongés dans un milieu qui pourvoit à ce besoin, en général, sans l’intervention d’aucun effort de notre part. L’air atmosphérique a donc de l’utilité sans avoir de valeur. Il n’a pas de Valeur, parce que, ne donnant lieu à aucun Effort, il n’est l’occasion d’aucun service. Rendre service à quelqu’un, c’est lui épargner une peine ; et là où il n’y a pas de peine à prendre pour réaliser la satisfaction, il n’y en a pas à épargner.

Mais si un homme descend au fond d’un fleuve, dans une cloche à plongeur, un corps étranger s’interpose entre l’air et ses poumons ; pour rétablir la communication, il faut mettre la pompe en mouvement ; il y a là un effort à faire, une peine à prendre ; certes, cet homme y sera tout disposé, car il y va de la vie, et il ne saurait se rendre à lui-même un plus grand service.

Au lieu de faire cet effort, il me prie de m’en charger ; et, pour m’y déterminer, il s’engage à prendre lui-même une peine dont je recueillerai la satisfaction. Nous débattons et