Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/288

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culiers invoqués à l’appui de la démonstration. Mais il est clair que ce qui a été dit du blé, du vêtement, du transport, est vrai de tout. Quand l’auteur généralise, c’est au lecteur de particulariser ; et, quand celui-là se dévoue à la lourde et froide analyse, c’est bien le moins que celui-ci se donne le plaisir de la synthèse.

Après tout, cette loi synthétique, nous la pouvons formuler ainsi :

La valeur, qui est la propriété sociale, naît de l’effort et de l’obstacle.

À mesure que l’obstacle s’amoindrit, l’effort, la valeur, ou le domaine de la propriété, s’amoindrissent avec lui.

La propriété recule toujours, pour chaque satisfaction donnée, et la Communauté avance sans cesse.

Faut-il en conclure, comme fait M. Proudhon, que la Propriété est destinée à périr ? De ce que, pour chaque effet utile à réaliser, pour chaque satisfaction à obtenir, elle recule devant la Communauté, est-ce à dire qu’elle va s’y absorber et s’y anéantir ?

Conclure ainsi, c’est méconnaître complétement la nature même de l’homme. Nous rencontrons ici un sophisme analogue à celui que nous avons déjà réfuté au sujet de l’intérêt des capitaux. L’intérêt tend à baisser, disait-on, donc sa destinée est de disparaître. — La valeur et la propriété diminuent, dit-on maintenant, donc leur destinée est de s’anéantir.

Tout le sophisme consiste à omettre ces mots : pour chaque effet déterminé. Oui, il est très-vrai que les hommes obtiennent des effets déterminés avec des efforts moindres ; c’est en cela qu’ils sont progressifs et perfectibles ; c’est pour cela qu’on peut affirmer que le domaine relatif de la propriété se rétrécit, en l’examinant au point de vue d’une satisfaction donnée.

Mais il n’est pas vrai que tous les effets possibles à obtenir soient jamais épuisés, et dès lors il est absurde de penser