Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/320

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il me reste à faire voir que les Socialistes partent de la même donnée ; seulement, ils modifient ainsi la conclusion : « La propriété est un privilége nécessaire ; il le faut maintenir, mais en demandant au propriétaire une compensation, sous forme de droit au travail, en faveur des prolétaires. »

Ensuite je ferai comparaître les communistes, qui disent, toujours en se fondant sur la même donnée : La propriété est un privilége, il la faut abolir.

Et enfin, au risque de me répéter, je terminerai en renversant, s’il est possible, la commune prémisse de ces trois conclusions : les agents naturels ont ou créent de la valeur. Si j’y parviens, si je démontre que les agents naturels, même appropriés, ne produisent pas de la Valeur, mais de l’Utilité qui, passant par la main du propriétaire, sans y rien laisser, arrive gratuitement au consommateur, — en ce cas, économistes, socialistes, communistes, tous devront enfin s’accorder pour laisser, à cet égard, le monde tel qu’il est.


M. Considérant[1]. « Pour voir comment et à quelles conditions la Propriété particulière peut se manifester et se développer Légitimement, il nous faut posséder le Principe fondamental du droit de Propriété. Le voici :

« Tout homme possède Légitimement la chose que son travail, son intelligence ou plus généralement que son activité a créée.

Ce Principe est incontestable, et il est bon de remarquer qu’il contient implicitement la reconnaissance du Droit de tous à la Terre. En effet, la terre n’ayant pas été créée par l’homme, il résulte du Principe fondamental de la Propriété que la Terre, le fonds commun livré à l’Espèce, ne peut en aucune façon être légitimement la propriété absolue et exclusive de tels ou tels individus qui n’ont pas créé cette valeur. — Constituons donc la vraie théorie de la Propriété, en la fondant exclusivement sur le principe irrécusable qui assoit la Légitimité de la Propriété sur le fait de la création de la chose ou de la valeur possédée. Pour cela faire, nous allons raisonner sur la création de l’Industrie, c’est-à dire sur l’origine et sur le développement de la culture, de la fabrication, des arts, etc., dans la Société humaine.

Supposons que sur le terrain d’une île isolée, sur le sol d’une nation, ou sur la terre entière (l’étendue du théâtre de l’action ne change rien à

  1. Les mots en italiques et capitales sont ainsi imprimés dans le texte original.