Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/348

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topie égalitaire. Le sol, et le genre humain avec lui, sera revenu à l’état primitif : il n’aura plus de valeur. Les récoltes n’auront plus rien à démêler avec le capital. Leur prix sera dégagé de cet élément maudit qu’on appelle intérêt. Tout, absolument tout, se fera par du travail actuel, visible à l’œil nu. L’économie politique sera fort simplifiée. La France fera vivre un homme par lieue carrée. Tout le reste aura péri d’inanition ; — mais on ne pourra plus dire : La propriété est un monopole, une illégitimité, un vol.

Ne soyons donc pas insensibles à ces harmonies économiques qui se déroulent à nos yeux, à mesure que nous analysons les idées d’échange, de valeur, de capital, d’intérêt, de propriété, de communauté. — Oh ! me sera-t-il donné d’en parcourir le cercle tout entier ? — Mais peut-être sommes-nous assez avancés pour reconnaître que le monde social ne porte pas moins que le monde matériel l’empreinte d’une main divine, d’où découlent la sagesse et la bonté, vers laquelle doivent s’élever notre admiration et notre reconnaissance.

Je ne puis m’empêcher de revenir ici sur une pensée de M. Considérant.

Partant de cette donnée que le sol a une valeur propre, indépendante de toute œuvre humaine, qu’il est un capital primitif et incréé, il conclut, avec raison à son point de vue, de l’appropriation à l’usurpation. Cette prétendue iniquité lui inspire de véhémentes tirades contre le régime des sociétés modernes. D’un autre côté, il convient que les améliorations permanentes ajoutent une plus-value à ce capital primitif, accessoire tellement confondu avec le principal qu’on ne peut les séparer. Que faire donc ? car on est en présence d’une Valeur totale composée de deux éléments, dont l’un, fruit du travail, est propriété légitime, et l’autre, œuvre de Dieu, est une inique usurpation.