Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/391

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sorbe, en grande partie, dans le flot de générations de plus en plus nombreuses ; il se résout en accroissement de population, selon des lois qui ont une connexité intime avec le sujet qui nous occupe et qui seront exposées dans un autre chapitre.

Arrêtons-nous un moment et jetons un coup d’œil rapide sur l’espace que nous venons de parcourir.

L’homme a des besoins qui n’ont pas de limites ; il forme des désirs qui sont insatiables. Pour y pourvoir, il a des matériaux et des agents qui lui sont fournis par la nature, des facultés, des instruments, toutes choses que le travail met en œuvre. Le travail est la ressource qui a été le plus également départie à tous ; chacun cherche instinctivement, fatalement, à lui associer le plus de forces naturelles, le plus de capacité innée ou acquise, le plus de capitaux qu’il lui est possible, afin que le résultat de cette coopération soit plus d’utilités produites, ou, ce qui revient au même, plus de satisfactions acquises. Ainsi le concours toujours plus actif des agents naturels, le développement indéfini de l’intelligence, l’accroissement progressif des capitaux, amènent ce phénomène, étrange au premier coup d’œil, qu’une quantité de travail donnée fournisse une somme d’utilités toujours croissante, et que chacun puisse, sans dépouiller personne, atteindre à une masse de consommation hors de proportion avec ce que ses propres efforts pourraient réaliser.

Mais ce phénomène, résultat de l’harmonie divine que la Providence a répandue dans le mécanisme de la société, aurait tourné contre la société elle-même, en y introduisant le germe d’une inégalité indéfinie, s’il ne se combinait avec une autre harmonie non moins admirable, la Concurrence, qui est une des branches de la grande loi de la solidarité humaine.

En effet, s’il était possible que l’individu, la famille, la